Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 18 janvier 2018, n° 16/01001

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 5, 18 janv. 2018, n° 16/01001
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/01001
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 23 septembre 2015, N° F14/02812
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 5

ARRÊT DU 18 Janvier 2018

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 16/01001

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Septembre 2015 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS Section Encadrement RG n° F14/02812

APPELANTE :

Madame Z X

née le […] à Saint-Germain en Laye (78100)

[…]

[…]

représentée par Me Laure IELTSCH, avocat au barreau de PARIS, toque : P0038

INTIMEE :

SA MINHAL FRANCE

[…]

[…]

N° SIRET : 999 990 286

représentée par Me Cécile FOURCADE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1815

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 novembre 2017, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Isabelle MONTAGNE, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Q-Bernard BRETON, Présidente

Monsieur H MEYER, Conseiller

Madame Isabelle MONTAGNE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame B C, lors des débats

ARRÊT :

— contradictoire

— mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— signé par Madame Q-Bernard BRETON, Présidente et par Madame B C, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Z X a été engagée par la société Sofitel Paris Bercy à compter du 5 décembre 2005 ; son contrat de travail en qualité d’assistante chef de réception a été transféré à compter du 10 septembre 2007 à la société Minhal France exploitant l’hôtel Scribe situé 1 rue Scribe à Paris (9e), avec reprise de son ancienneté ; par avenant du 17 décembre 2009, elle a été promue chef de réception statut agent de maîtrise niveau IV échelon 2 ; par avenant du 25 mars 2011, son salaire a été revalorisé à 2.800,00 euros mensuels à compter du 1er mars 2011 et le statut de cadre lui a été octroyé avec un forfait annuel de 214 jours travaillés pour une année complète.

Le salaire moyen mensuel brut s’élevait à 2.746,42 euros.

Les relations de travail étaient soumises à la convention collective des cafés-hôtels-restaurants et la société Minhal emploie habituellement plus de dix salariés.

A l’issue de deux examens des 5 et 20 juin 2013, le médecin du travail a formulé un avis d’inaptitude au poste le 20 juin 2013.

Par lettre du 5 juillet 2013, la salariée a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 12 juillet 2013, puis par lettre du 19 juillet 2013 a reçu notification de son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 26 février 2014, elle a saisi le conseil de prud’hommes de Paris afin d’obtenir diverses indemnités tant au titre de la rupture que de l’exécution du contrat de travail.

Suivant jugement prononcé le 24 septembre 2015, notifié le 18 décembre 2015, cette juridiction a condamné l’employeur à payer à la salariée les sommes de 8.239,26 euros à titre de rappel d’indemnité de préavis, 823,92 euros au titre des congés payés afférents et 700,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et a débouté la salariée de ses autres demandes. Celle-ci en a régulièrement interjeté appel le 15 janvier 2016.

Suivant conclusions du 28 novembre 2017 reprises oralement à l’audience, sans ajout ni retrait, l’appelante demande à la cour de confirmer le jugement en ses condamnations, l’infirmer pour le surplus, condamner la société Minhal à lui payer les sommes suivantes:

* 50.000,00 euros en réparation de son préjudice pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1.742,58 euros à titre de rappel de salaire d’heures supplémentaires pour la période du 25 mars 2011 au 7 juin 2013 et 174,25 euros au titre des congés payés y afférents,

* 15.000,00 euros en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral et de la violation de l’obligation de sécurité de résultat,

* 3.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

et à lui remettre les documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision.

Suivant conclusions du 28 novembre 2017 reprises oralement à l’audience, sans ajout ni retrait, la société Minhal demande à la cour d’infirmer le jugement, débouter l’appelante de toutes ses demandes, la condamner à lui restituer la somme totale au titre de l’indemnité de préavis et des congés payés afférents, perçue par elle à tort en exécution du jugement, soit 7.744,79 euros et à lui payer la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l’audience, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur le licenciement

L’appelante fait valoir qu’aucune recherche de reclassement loyale et sérieuse n’est intervenue tant au niveau de l’entreprise qu’au niveau du groupe Sofitel-Accor ; qu’il ne lui a été proposé aucun reclassement ni aucun aménagement de poste ; que l’employeur a été déloyal en présentant quatre postes de reclassement aux délégués du personnels dont il savait qu’ils ne correspondaient pas aux restrictions émises par le médecin du travail ; qu’en réalité elle a fait l’objet d’un licenciement économique déguisé et en tous les cas discriminatoire au regard de son état de santé.

La société intimée fait valoir qu’elle n’appartient à aucun groupe ; qu’aucune permutation des salariés n’est possible entre ses effectifs et ceux des entités du groupe Accor ; que la procédure de constat de l’inaptitude de la salariée est régulière ; qu’elle a tout mis en 'uvre pour permettre une reconversion de celle-ci vers un poste de 'revenue management' ; qu’il était impossible de la reclasser au regard des importantes restrictions posées par le médecin du travail ; qu’elle a respecté son obligation de reclassement.

L’article L.1226-2 du code du travail dans sa version applicable au moment du licenciement prévoit que lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise et qu’enfin l’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

Il appartient à l’employeur de justifier de recherches effectives et sérieuses de reclassement dans l’entreprise et dans l’ensemble des entités du groupe auquel elle appartient.

A l’issue des deux examens de la salariée, l’avis d’inaptitude formulé par le médecin du travail le 20 juin 2013 est ainsi rédigé 'inapte au poste de chef de réception – apte à un poste sédentaire à la condition de bénéficier d’une formation adaptée. La station debout ne doit pas excéder 1 heure / jour en discontinu'.

Auparavant, le 15 mai 2013, la salariée a adressé son curriculum vitae et une lettre de motivation aux fins de reconversion dans le domaine du 'revenue management' à la direction de la société, pièces qui ont été transmises par D E, directrice des ressources humaines à Fanny Saumur, interlocutrice compétente pour traiter de cette demande ; par courriel du 27 mai 2013, celle-ci a adressé à la direction un compte-rendu positif de l’entretien tenu avec la salariée le même jour relatif à la reconversion envisagée.

A la suite des contacts noués grâce à l’intervention de son supérieur hiérarchique, la salariée a, le 2 juin 2013, précisé à la direction son projet de reconversion professionnelle dans le domaine du 'revenue management'.

Le 5 juin 2013, la salariée a informé la direction de son inaptitude provisoire à la suite du premier examen par le médecin du travail et a précisé qu’elle se présenterait à l’hôtel le lendemain afin de rencontrer D E et garantir le passage des consignes à son assistante.

Par courriel détaillé du 6 juin 2013 faisant suite à l’entretien tenu le même jour, D E a confirmé à la salariée que les postes disponibles dans l’entreprise, à savoir réceptionniste de jour, réceptionniste de nuit, chef de rang au restaurant Le lumière, commis de cuisine et agent de maintenance, ne correspondaient pas aux restrictions émises par le médecin du travail, que des rendez-vous avaient été organisés depuis le 16 mai 2013 auprès de correspondants au sein d’hôtels du groupe Sofitel Accor pour envisager une reconversion professionnelle vers le métier de 'revenue management', que ses souhaits en termes de mobilité et de postes avaient été pris en compte et lui a apporté des éléments de réponse aux questions posées quant au sort de son contrat de travail.

En produisant des courriels des 10 et 17 juin 2013 et un courrier du 20 juin 2013 aux termes duquel le médecin du travail confirme que les quatre postes proposés ne sont pas compatibles avec l’état de santé de la salariée, la société intimée justifie d’un dialogue régulier entre D E et Q-R S, médecin du travail qui s’est déplacée dans l’entreprise le 14 juin 2013 pour étude des conditions du poste et des autres postes à pourvoir.

Par courriel du 10 juin 2013, D E a confirmé à la salariée les dates des immersions organisées pour elle les 13 et 14 juin 2013 au sein de l’hôtel Sofitel Paris la Défense, et les 18 et 19 juin 2013 au sein de l’hôtel Sofitel Paris Arc de triomphe.

Par courriels des 14 et 19 juin 2013, la salariée a adressé à la direction des comptes-rendus de ses stages d’immersion respectifs dans les deux hôtels concernés.

Le 20 juin 2013, elle a été reçue par D E pour faire le point sur ses perspectives professionnelles suite à l’avis d’inaptitude rendu le même jour.

Il ressort du compte-rendu de la réunion des délégués du personnel du 27 juin 2013 que ceux-ci ont émis un vote favorable à l’unanimité quant aux motifs s’opposant au reclassement de la salariée dans l’entreprise au regard des recommandations du médecin du travail ; par ailleurs, F G, ancien salarié, membre titulaire de la délégation unique du personnel et secrétaire du Comité d’hygiène et de sécurité des conditions du travail entre 2010 et 2014, témoigne de ce que les délégués du personnel ont été tenus informés de la procédure de reclassement et se sont prononcés en pleine connaissance de cause en faveur du licenciement de la salariée au regard de son inaptitude et de l’absence de poste pouvant lui être proposé au sein de l’entreprise au regard des importantes restrictions médicales émises.

Par courriel du 2 juillet 2013, D E a fixé un rendez-vous à la salariée le 5 juillet 2013 afin de lui faire passer le test 'RM Visa' dans le cadre de sa reconversion et l’a tenue précisément informée par ce même courriel de l’état d’avancement de la procédure de reclassement.

L’employeur produit la facture d’une action de formation intitulée 'calculs appliqués au RM à l’aide d’Excel 07" à l’Académie Accor le 4 juillet 2013, qu’il a fait suivre à la salariée.

Par courriels des 4 juillet 2013 ayant pour objet 'reclassement Melle X', les correspondants des hôtels Sofitel Arc de triomphe, Sofitel Paris La défense et Sofitel Paris Le faubourg, sur sollicitation de D E, lui ont fait part de l’absence de poste disponible au sein de leurs services 'revenue management'.

Par courriel du 9 juillet 2013, le service des ressources humaines a adressé à la salariée le détail des résultats négatifs du test qu’elle avait passé quelques jours plus tôt, ce qui compromettait totalement la reconversion envisagée.

La salariée ne conteste pas que lors de l’entretien du 12 juillet 2013, la direction lui a fait part de deux nouveaux postes à pourvoir, à savoir responsable relation clientèle et chargée de clientèle externe, et que ceux-ci ne correspondaient pas non plus aux restrictions posées par le médecin du travail.

S’agissant du périmètre de la recherche de reclassement, la salariée, produisant principalement de la documentation publicitaire, allègue l’appartenance de la société Minhal France au groupe Sofitel Accor ; il ressort de ces documents la mention 'Hôtel Scribe managed by Sofitel' ; toutefois cette seule mention est insuffisante à établir l’appartenance de la société Minhal au groupe considéré et la possibilité d’une permutation du personnel de la société Minhal France, avec des entités juridiques du groupe allégué, dont les liens juridiques et capitalistiques ne sont pas démontrés. Par conséquent, la salariée n’est pas fondée en son moyen tiré de l’absence d’une recherche de reclassement au sein des entités du groupe allégué.

Il ressort de tout ce qui précède que le licenciement est motivé par l’inaptitude de la salariée à son poste et l’employeur qui, dans le cadre d’un dialogue constant avec le médecin du travail, a, compte tenu des importantes restrictions médicales dont la salariée faisait l’objet, concrètement et loyalement recherché le reclassement de la salariée en étudiant les postes disponibles et en l’accompagnant effectivement et régulièrement dans un projet de reconversion professionnelle par l’organisation de stages et la prise en charge d’une formation, n’a pas manqué à son obligation de reclassement au sein de l’entreprise.

Le moyen tiré d’un licenciement économique déguisé n’est pas fondé dans la mesure où d’une part, le licenciement est fondé sur une inaptitude et l’impossibilité de reclassement de la salariée, où d’autre part, la salariée se contente d’alléguer sans la démontrer une cause économique à cette rupture et où enfin, l’employeur produit le contrat de travail de N O P qui a remplacé la salariée en qualité de chef de réception à compter du 27 août 2013, ainsi que le registre d’entrées et de sorties du personnel dont il ressort un nombre constant de personnes travaillant dans l’entreprise entre 2008 et 2014, notamment au niveau de la réception.

Enfin le moyen tiré d’un licenciement discriminatoire en raison de l’état de santé de la santé n’est pas fondé en ce que la salariée ne produit aucun élément de fait pertinent laissant supposer l’existence d’une discrimination, l’analyse des pièces produites, sus-détaillée, faisant au contraire ressortir que la société a entrepris des démarches concrètes et effectives en vue d’accompagner la salariée dans sa démarche de reconversion en qualité de revenue manager.

Le licenciement motivé par une inaptitude et l’impossibilité de reclassement de la salariée est donc fondé.

L’article L.1226-4 du code du travail applicable au moment du licenciement prévoit qu’en cas de licenciement pour inaptitude consécutive à une maladie ou un accident non professionnel, le préavis n’est pas exécuté, le contrat de travail est rompu à la date de la notification du licenciement, le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l’indemnité mentionnée à l’article L.1234-9 et

par dérogation à l’article L.1234-5, l’inexécution du préavis ne donne pas lieu à versement d’une indemnité compensatrice.

Le licenciement étant fondé sur une inaptitude d’origine non professionnelle et l’impossibilité d’exécuter le préavis ne résultant pas du fait de l’employeur, il s’ensuit que la salariée n’est pas fondée en sa demande d’allocation d’une indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents ; le jugement sera donc infirmé sur ce point sans qu’il n’y ait lieu de condamner la salariée à rembourser les sommes versées dans le cadre de l’exécution provisoire du jugement, le remboursement demandé étant la conséquence légale de l’infirmation de la disposition du jugement de ce chef.

Sur le harcèlement moral et la violation de l’obligation de sécurité de résultat

L’article L.1152-1 du code du travail prévoit qu’aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Il ressort de l’article L.1154-1 du code du travail qu’en cas de litige, dès lors que le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Précisant souffrir de douleurs à la hanche droite en raison d’une luxation congénitale et bénéficiant d’une reconnaissance de travailleur handicapé, la salariée invoque une dégradation de ses conditions de travail à compter de son retour de congé maternité en janvier 2013, en lien avec son congé parental qui n’aurait pas convenu à l’employeur, celui-ci la contraignant à justifier de sa présence dès 9 heures le matin alors qu’elle bénéficiait d’une convention de forfait, lui imposant une surcharge de travail et n’ayant pas respecté les préconisations du médecin du travail des 17 janvier et 15 mai 2013 prohibant la station debout prolongée.

La salariée produit des arrêts de travail successifs pour la période comprise entre le 19 décembre 2011 et le 16 août 2012, des échanges de courriels intervenus pendant son arrêt, les 5, 6 et 8 mars 2012 aux termes desquels son supérieur, H I lui demande de préparer l’évaluation de son assistante, les fiches d’aptitude du 17 janvier 2013 mentionnant 'apte à reprendre en travail à temps partiel à raison de quatre jours hebdomadaires. La station debout prolongée ne doit pas excéder 50% du temps de travail. A revoir dans 4 mois' et du 15 mai 2013 mentionnant 'apte à son poste de travail à la condition d’éviter la station debout prolongée. A revoir dans 3 semaines', et des attestations de trois anciens salariés : J K, qui était son assistante, Quentin Leroy, qui était chef de brigade et son subordonné, et Y Barbet, qui était gouvernante ; il en ressort que le temps partiel de la salariée n’aurait pas été bien perçu par sa direction, que la salariée aurait été vue à plusieurs reprises en larmes, qu’il lui serait arrivé d’effectuer des 'shifts' de 7 heures à 23 heures l’obligeant à dormir sur place, qu’elle aurait été contrainte de rester en station debout à la réception en période de sous-effectif, que la direction aurait exercé des pressions pour savoir si elle était à son poste, qu’il lui était demandé d’être présente à 9 heures en raison d’une réunion quotidienne à 9 heures 30 et que la charge de travail de ce service était importante.

Pris dans leur ensemble, les éléments de fait produits par la salariée laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral et il appartient à l’employeur de justifier que ces agissements n’étaient pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Faisant valoir que l’allégation d’harcèlement a été formulée pour la première fois pendant l’instance prud’homale, la société intimée estime avoir fait preuve de bienveillance pour permettre à la salariée d’exercer son activité dans le respect de sa pathologie.

Elle produit la facture d’achat d’un siège debout-assis qui avait été mis à sa disposition, ce que celle-ci ne conteste pas, peu important qu’il ait été acquis le 4 avril 2012 et qu’il ait été précédemment mis à disposition d’un autre salarié alors que pour la période considérée, il est justifié que ce salarié, qui avait été déclaré apte les 13 et 25 juin 2012, n’en avait plus besoin.

Elle produit par ailleurs un échange de courriels pour la période comprise entre les 29 et 31 mai 2013 entre la salariée, son assistante J K et le directeur d’exploitation et supérieur hiérarchique direct de la salariée, H I, dont il ressort que ce dernier avait rappelé fermement à l’ordre par écrit J K qui avait émis des remarques et allusions désobligeantes aux contraintes personnelles de la salariée, étant précisé qu’J K atteste désormais en faveur de la salariée et met en cause sa hiérarchie.

En outre, F Erdine, titulaire de mandats de représentation du personnel, témoigne de ce qu’il n’a jamais été alerté d’une situation de harcèlement par la salariée et estime que la direction a fait preuve de bienveillance à son égard en l’accompagnant activement dans sa démarche de reconversion professionnelle.

La société intimée produit également un écrit de H I détaillant longuement les actions mises en oeuvre pour prendre en compte la situation de la salariée à son retour de congé de maternité qui, attachant de l’importance à ne pas être perçue comme une handicapée par les clients, ne souhaitait pas utiliser sa canne de marche, ainsi qu’un témoignage de L M, ancien directeur général de l’établissement aux termes duquel il conteste les propos menaçants que lui prête J K, il indique qu’il avait personnellement pris, grâce à ses contacts personnels et familiaux, des rendez-vous médicaux auprès de spécialistes en accord avec la salariée, ce que celle-ci ne conteste pas, et que celle-ci lui avait confié que sa grossesse était fortement déconseillée par ses médecins car elle représentait un facteur d’aggravation de sa pathologie.

Il ressort en outre du témoignage d’Auriane Galzin, responsable expérience client, que la salariée lui avait confié ses inquiétudes liées à sa grossesse et ses implications sur son état de santé au regard de sa pathologie qui risquait de s’aggraver, et de celui de Youssef Bourak, directeur de nuit au service de la réception, que la salariée travaillait en journée et qu’il ne lui était arrivé qu’à titre très exceptionnel de décaler ses horaires pour être présente en soirée jusqu’à 22 heures 30 en fonction des nécessités de l’activité et de son organisation personnelle pour accomplir ses tâches.

La société intimée produit le jugement du conseil de prud’hommes dans le conflit l’ayant opposé à Quentin Leroy à la suite de son licenciement pour faute grave relatif à des faits survenus le 19 septembre 2013, ce qui affaiblit fortement la valeur probante de son témoignage.

Il ressort des développements précédents que l’employeur s’est attaché à échanger avec la médecine du travail sur la situation de la salariée et l’adaptation de son poste antérieurement à l’avis d’inaptitude du 20 juin 2013.

L’employeur démontre à partir des plannings de la salariée signée par celle-ci et de ceux d’Y Barbet, qui ne travaillait pas dans le même service, que leurs horaires de travail ne concordaient habituellement pas, à l’exception de 4 jours en 2012 et 24 jours pour 2013, ce dont il résulte que celle-ci n’est pas crédible quand elle indique 'je voyais régulièrement Z travailler toute la journée à son poste, y rester très tard, de la retrouver le lendemain en ouverture et d’apprendre qu’elle était restée sur l’hôtel avec seulement quelques heures de repos prises sur l’établissement'.

L’employeur fait valoir de manière pertinente que le fait de demander à la salariée, chef de la réception, d’assister à une réunion quotidienne à 9 heures 30 dans le cadre de ses fonctions n’est pas constitutif d’une pression mise sur celle-ci mais fait partie de ses obligations contractuelles.

Enfin, la demande d’évaluation de son adjointe formulée par son supérieur pendant son arrêt, a

constitué un événement isolé, et ne peut servir à fonder un harcèlement moral.

Au regard des éléments qui précèdent, il sera retenu que l’employeur justifie de manière objective que les faits dénoncés par la salariée ne constituent ni une violation de l’obligation de sécurité de résultat ni un harcèlement moral.

La salariée n’est donc pas fondée en sa demande de dommages et intérêts en raison d’un harcèlement moral et elle en sera déboutée.

Sur la durée du travail

La salariée prétend que sa convention de forfait est nulle au motif qu’elle ne ressortait pas de la qualification de cadre dirigeant ou cadre autonome du niveau 5 de la grille de classification nationale exigée par l’article 13 de la convention collective pour se voir appliquer un forfait jour et qu’elle ne disposait d’aucune autonomie dans l’organisation de son temps de travail ; que de plus l’employeur ne justifie pas avoir respecté les dispositions légales relatives au contrôle de la durée du travail et à l’entretien individuel annuel afférent; elle réclame le paiement d’heures supplémentaires effectuées sur la base de son planning reconstitué et de son décompte.

La société intimée fait valoir que la convention de branche a laissé aux entreprises, visées dans son champ d’application professionnel et géographique, le soin de définir le régime d’une convention de forfait en jours ; que les dispositions de l’accord collectif d’entreprise portant sur le temps de travail des cadres du 12 mars 2013 sont conformes avec les dispositions légales applicables ; que la convention de forfait est régulière et valide ; elle produit les plannings de la salariée signés par celle-ci.

En premier lieu, le seul élément produit par la salariée au soutien de son allégation relative à son manque d’autonomie est constitué par le témoignage de Quentin Leroy qui s’avère peu crédible au regard du conflit l’ayant opposé à son employeur. Aucun élément objectif ne permet de remettre en cause son statut de cadre autonome, ce dont il s’ensuit qu’elle relevait des dispositions de l’accord collectif d’entreprise portant sur le temps de travail des cadres du 12 mars 2013.

Cet accord prévoit notamment qu’outre un entretien annuel avec son supérieur hiérarchique sur l’organisation et la charge de travail et l’amplitude des journées d’activité, le cadre autonome émarge chaque mois contradictoirement avec son supérieur hiérarchique un document attestant du nombre de jours travaillés chaque semaine et que chaque année la durée du travail est décomptée par récapitulation du nombre de journées ou demi-journées travaillées. Ces dispositions assurent des droits suffisants permettant la garantie effective du respect des durées maximales conventionnelles de travail, ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires.

En outre, il ressort de l’examen des plannings journaliers signés par la salariée de janvier 2008 à juillet 2013 qu’un suivi des repos et des récupérations a effectivement été mis en place et appliqué à la salariée.

Celle-ci remet en cause ces plannings en prétendant que l’employeur lui demandait de signer des plannings erronés afin de ne pas faire apparaître toutes les heures effectuées ; cependant, elle ne produit aucun élément sérieux de nature à étayer cette accusation, qui n’est donc pas établie.

Par ailleurs, le fait qu’aucun entretien n’a eu lieu en 2012 s’explique objectivement par le fait que la salariée a été de manière continue en arrêt pour maladie du 1er mars au 16 août 2012 puis en congé pour maternité du 17 août au 9 décembre 2012.

Par conséquent, la salariée n’est pas fondée en son moyen tiré de la nullité de la convention de forfait jours dont elle bénéficiait au regard de son statut de cadre autonome.

L’article L.3121-48 du code du travail dispose que les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours ne sont pas soumis aux dispositions relatives aux durées légales hebdomadaire et quotidienne maximales de travail.

Par conséquent, la salariée qui avait conclu une convention de forfait en jours n’est pas fondée en sa demande au titre d’heures supplémentaires. Sa demande de ce chef sera rejetée.

Sur les frais irrépétibles

Au regard de la solution du litige, le jugement qui a accordé à la salariée une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile doit être infirmé de ce chef.

S’agissant de l’instance d’appel, compte tenu de la situation économique des parties, il n’y a pas lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement prononcé par le conseil de prud’hommes de Paris le 24 septembre 2015, sauf en ce qu’il a condamné la société Minhal France à payer à Z X les sommes de 8.239,26 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 823,92 euros et 700,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

L’INFIRMANT sur ces seuls points et statuant à nouveau,

DEBOUTE Z X de ses demandes au titre de l’indemnité compensatrice de préavis avec congés payés afférents et de l’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile formée en première instance,

DEBOUTE la société Minhal France de ses demandes,

CONDAMNE Z X aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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