Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 31 janvier 2018, n° 17/12915

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 3, 31 janv. 2018, n° 17/12915
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/12915
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Évry, 6 juin 2017, N° 2017R00126
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 31 JANVIER 2018

(n° 75, 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 17/12915

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2017 -Tribunal de Commerce d’Evry – RG n° 2017R00126

APPELANTE

SAS EVERGREEN LAUREL HOTEL PARIS

[…]

[…]

N° SIRET 410 404 792

Représentée par Me Sébastien FLEURY, avocat au barreau de PARIS, toque : R207

assistée de Me Caroline PIRES substituant Me Sébastien FLEURY, avocat au barreau de PARIS, toque : R207

INTIMEE

SA […]

[…]

[…]

N° SIRET : 393 379 870

Représentée et assistée de Me Thibaud DESSALLIEN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1003

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Décembre 2017, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Martine ROY-ZENATI, Premier Président de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Martine ROY-ZENATI, Premier Président de chambre

Mme Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Mme Mireille QUENTIN DE GROMARD, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Véronique COUVET

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Martine ROY-ZENATI, président et par Mme Véronique COUVET, greffier.

La société Evergreen Laurel Hôtel Paris exploite à Levallois-Perret (92), un hôtel de luxe. Elle a conclu avec la société Propreté environnement industriel (PEI), trois contrats de prestation d’entretien, l’un par acte sous seing privé en date du 3 octobre 2008 pour l’entretien des parties communes et deux autres par actes du 24 octobre 2014 pour l’entretien des chambres et la mise à disposition d’un équipier polyvalent. Les prestations du mois de février 2017, représentant pour les trois contrats la somme de 72 793,64 euros TTC, n’ont pas été payées par la société Evergreen au motif d’une grève de trois jours du personnel de la société PEI.

Par acte d’huissier en date du 25 avril 2017, la société PEI a assigné en référé devant le président du tribunal de commerce d’Evry la société Evergreen aux fins d’obtenir le paiement par provision des prestations du mois de février 2017.

Par ordonnance de référé en date du 7 juin 2016, le président du tribunal de commerce d’Evry a :

— condamné la société Evergreen Laurel Hôtel à payer à la société PEI les sommes de 72 793,64 euros au titre des factures du mois de février 2017 avec intérêts au taux contractuel à compter 12 avril 2017 et de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— dit que la société PEI devra consigner lesdites sommes en garanties valables ;

— débouté les parties de leurs autres demandes ;

— condamné la société Evergreen Laurel Hôtel ;

— liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 45,06 euros dont 7,51 euros de TVA.

Par déclaration d’appel du 27 juin 2017, la société Evergreen Laurel Hôtel Paris – ci-après Evergreen – a relevé appel de cette ordonnance.

Par conclusions transmises le 27 novembre 2017, elle demande à la cour, sur le fondement de l’article 873 alinéa 2 du code de procédure civile et des articles 1147 ancien et suivants et 1348 du code civil de :

— infirmer la décision du juge des référés du tribunal de commerce d’Évry en ce qu’elle l’a condamnée à payer à la société Propreté environnement industriel les sommes de 72 793,64

euros au titre des factures de février 2017 et 1 000 euros d’article 700 du code de procédure civile ;

— constater qu’il existe une contestation sérieuse quant à la créance de la société Propreté environnement industriel ;

— dire n’y avoir lieu à référé ;

— débouter la société Propreté environnement industriel de l’intégralité de ses demandes ;

— ordonner la restitution par le séquestre des sommes qu’elle a payées ;

subsidiairement ;

— surseoir à statuer dans l’attente de l’issue définitive de la procédure initiée au fond par ses soins ;

— ordonner la consignation auprès du bâtonnier de toute nouvelle somme due par elle dans l’attente de l’issue définitive de la procédure initiée au fond par ses soins ;

— constater que les nouvelles factures réclamées par la société Propreté environnement industriel ne sont que de 93 756,85 euros et limiter la provision à ce montant ;

en tout état de cause :

— condamner la société Propreté environnement industriel au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la société Propreté environnement industriel aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Ils font valoir :

sur l’existence d’une contestation sérieuse à la demande de provision,

— que la juridiction des référés a le pouvoir d’apprécier si l’éventualité d’une compensation entre créances réciproques est de nature à rendre sérieuse la contestation de l’obligation invoquée par la partie sollicitant une provision ; qu’il existe une connexité entre la créance de dommages et intérêts née à l’occasion de l’exécution d’un contrat qui en a été la condition nécessaire, et celle qui résulte du contrat au profit de l’auteur des agissements délictueux ;

— qu’en l’espèce, la direction de la société PEI a mis en place une grève de son personnel, qui a occupé le hall de l’hôtel, à la suite du refus de la société Evergreen de procéder à une augmentation du prix des prestations et de sa décision de non renouvellement des contrats litigieux ; qu’au surplus, la société PEI a octroyé des avantages sociaux par accord d’entreprise en date du 13 octobre 2017, soit quinze jours avant la passation du marché à son successeur ;

— que ce comportement fautif et déloyal de la société PEI a causé d’importants dommages à la société Evergreen, les chambres n’ayant pas été préparées, le hall ayant été occupé, des frais diverses ayant dus être engagés et les partenaires commerciaux ainsi que la clientèle de l’hôtel ayant signifié leur mécontentement ; que les avantages sociaux octroyés au personnel représentant un coût financier important, la société Solitis, prestataire retenu pour reprendre le marché, s’est désistée ; que la société Evergreen s’est retrouvée sans prestataire à quelques

jours de la fin du marché ; que la société Tefid, qui a finalement repris le marché, a proposé des prix bien supérieurs ; que l’image de la société Evergreen a été entachée, du fait de la manifestation et de la survenance des forces de police ; que le préjudice subi par la société Evergreen est donc particulièrement conséquent et peut être chiffré à hauteur de 643 730,00 euros ;

— que cette créance de dommages et intérêts rend sérieusement contestable l’existence de la créance invoquée par la société PEI ; qu’aucune provision ne pourra lui être accordée, conformément à l’article 873 alinéa 2 du code de procédure civile ;

à titre subsidiaire,

— qu’au regard de ces éléments, la société PEI ne peut prétendre à obtenir la levée du séquestre ;

— que la demande complémentaire formée par la société PEI au titre du règlement du mois de mars 2017 ne tient pas compte de l’arrêt des prestations pendant les jours de grève et est sérieusement contestable au regard du montant de la créance de dommages et intérêts de la société Evergreen ;

— que la société Evergreen a engagée une procédure au fond et que la cour d’appel doit surseoir à statuer dans l’attente de la décision à intervenir ; qu’en tout état de cause, s’il était fait droit à la demande complémentaire à hauteur de 93 756,85 euros, ces montants devront être consignés.

Par conclusions transmises le 4 décembre 2017, la société PEI – PEI – demande à la cour, sur le fondement des articles 873 alinéa 2 du code de procédure civile, 378, 73 et 74 et 521 alinéa 1 du même code, et 1344 du code civil, de :

— confirmer l’ordonnance de référé du 7 juin 2017 en ce qu’elle a condamné la société Evergreen à lui payer la somme de 72 793,64 euros avec intérêt au taux contractuel à compter du 12 avril 2017, et celle de 1 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la société Evergreen à lui payer la somme provisionnelle de 93 759,85 euros au titre des factures du mois de mars 2017, avec intérêts contractuels à compter de la mise en demeure du 4 mai 2017 ;

— déclarer irrecevable la demande de la société Evergreen de surseoir à statuer dans l’attente de l’issue de la procédure qu’elle a initiée au fond ;

— débouter la société Evergreen de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

— condamner la société Evergreen à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la société Evergreen aux entiers dépens, à recouvrer par Maître Thibaud Dessallien, Avocat, conformément aux dispositions des articles 699 et suivants du code de procédure civile.

Elle fait valoir :

— que pour les prestations de février 2017, la société PEI a émis trois factures à échéance au 30 mars 2017, pour un montant total de 72 793,64 euros TTC ; que ni la réalité des

prestations facturées ni leur montant n’est contesté par la société Evergreen ; que pour ses prestations de mars 2017, la société PEI a émis en date du 31 mars 2017 trois factures à échéance du 30 avril 2017 pour une somme totale de 95 098,12 euros TTC ; qu’aucune facturation afférente aux prestations de nettoyage n’a été émise pour les trois jours de grève ; que ces créances sont donc certaines, liquides et exigibles ;

— qu’en matière de référé, pour que l’éventualité d’une compensation puisse constituer une contestation sérieuse, encore faut-il que la compensation alléguée ne soit pas elle-même sérieusement contestable ; que la créance alléguée par la société Evergreen n’est pas certaine ; que la société PEI n’a commis aucune faute et conteste toute responsabilité en ce qui concerne le déclenchement, le déroulement ou la résolution du conflit social ; qu’au surplus le chiffrage du préjudice subi est sérieusement contestable en ce que la société Evergreen a remplacé la société PEI durant les trois jours de grève et n’a eu à régler qu’une fois lesdites prestations ; qu’elle ne démontre aucune atteinte à l’image ; que les allégations relatives à la facturation à l’heure, exorbitante et illégale, du repreneur Tefid sont sérieusement contestables ;

— qu’au regard de ces éléments, il appert que l’éventualité d’une compensation n’est pas de nature à rendre sérieusement contestable la créance de la société PEI ;

— que la demande de sursis à statuer n’a pas été soulevée avant toute défense au fond et devra donc être regardée comme dilatoire et irrecevable ;

— que la demande de consignation doit être exclue, s’agissant d’une provision, et ce conformément à l’article 521 alinéa 1er du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Considérant qu’en application de l’article 809 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire ;

Que toutefois, si le juge des référés n’a pas le pouvoir d’ordonner la compensation, il lui appartient de rechercher si l’exception opposée est de nature à rendre sérieusement contestable la créance invoquée ;

Considérant que l’Hôtel Evergreen exploite un hôtel de catégorie 4 étoiles ; que le 6 mars 2017 un mouvement de grève des salariés de la société PEI dans les locaux de l’hôtel ; qu’il résulte des constats d’huissier dressés les 6 et 7 mars 2017 qu’une trentaine de grévistes se sont rassemblés dans le hall de la réception où une sono a été branchée diffusant des slogans ; que les services d’ordre sont intervenus ; que, pour des raisons de sécurité, le restaurant de l’hôtel a d^pu fermer ; que des sacs poubelle contenant des déchets ont été déversés dans le hall ; que le ménage des chambres n’est pas assuré ;

Considérant qu’un protocole de fin de conflit a été signé entre la société PEI et les organisations syndicales représentatives des salariés le 13 mars 2017, ce qui laisse comprendre que, même si le mouvement social n’aurait durer que 3 jours au sein même de l’hôtel comme PEI le soutient, le travail des salariés grévistes n’a pu reprendre avant la signature du protocole ;

Considérant que Evergreen invoque un préjudice lié à la perte de clientèle et donc de chiffre d’affaires, au remplacement du service de nettoyage générant un surcoût, la mise en cause de sa responsabilité par la société qui exploite le restaurant au sein de l’hôtel pour ne pas lui

avoir assuré une jouissance paisible de ses locaux, du poids financier de la reprise du marché par un candidat autre que celui qu’elle avait retenu qui s’est désisté en raison de la hausse des avantages consentis par PEI quelques jours avant la date de reprise, et de l’atteinte à son image ; qu’elle estime justifiée de l’ensemble de ses préjudices la réparation à hauteur de 643 730 euros ;

Considérant qu’à la suite d’une renégociation des tarifs sur lesquels les parties ne se sont pas entendues Evergreen a résilié les 3 contrats, à effet du 31 mars 2017 ; que la société PEI réclame le paiement des factures de ses prestations au titre de ces trois contrats pour les mois de février à échéance du 30 mars 2017 et mars à échéance du 30 avril 2017, soit la somme totale de 166 553,49 euros ;

Considérant qu’au vu des éléments produits aux débats il ressort que les événements subis par la société Evergreen au mois de mars 2017 sont de nature à ouvrir un droit à réparation constitutif d’une contestation sérieuse de sorte que l’obligation de s’acquitter des prestations réclamées doit être limitée à hauteur de la somme de 72 793,64 euros qui a été consignée ; que par ces motifs qui se substituent à ceux retenus par le premier juge, l’ordonnance sera confirmée ;

Considérant que le sort des dépens et de l’indemnité de procédure a été exactement réglé par le premier juge ;

Que chaque partie succombant partiellement en cause d’appel, il n’y a pas lieu de faire application au titre de l’article 700 du code de procédure civile, mais de laisser à chacune d’elles la charge de ses dépens ;

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance entreprise ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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