Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 31 juillet 2019, n° 19/03598

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 3, 31 juill. 2019, n° 19/03598
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/03598
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 20 décembre 2018, N° 2018065025
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRÊT DU 31 JUILLET 2019

(n° 322, 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/03598 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7KJX

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 Décembre 2018 -Tribunal de Commerce de Paris – RG n° 2018065025

APPELANTE

SA OLKY PAYMENT SERVICE PROVIDER, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[…]

L3378 Livange (LUXEMBOURG)

N° SIRET : B 165776

Représentée par Me Michel LAVAL de la SCP MICHEL LAVAL & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0108

Assistée par Me Marie FRISCH, avocat au barreau de PARIS, toque : P108

INTIMÉES

CREDIT MUTUEL Y, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

N° SIRET : 775 577 018

Y Z A, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

N° SIRET : 440 180 388

Représentées par Me Arnaud GUYONNET de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque

: L0044

Assistées par Me Christophe BOUCHEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : T006

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Juin 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Sophie GRALL, Conseillère, et Mme Christina DIAS DA SILVA, Conseillère, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre

Mme Christina DIAS DA SILVA, Conseillère

Mme Sophie GRALL, Conseillère

Qui ont en délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Anaïs SCHOEPFER

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Sophie GRALL, pour la Présidente empêchée et par Anaïs SCHOEPFER, Greffière.

Suivant ordonnance du 25 juillet 2018, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a condamné la société de droit luxembourgeois Olky Payment Service Provider ('Olkypay'), établissement spécialisé dans les opérations de paiement, à payer des sommes à titre de provision aux sociétés Crédit Mutuel Y et Monext, . Il n’a pas été interjeté appel de cette ordonnance.

Par exploit d’huissier du 30 novembre 2018, les sociétés Crédit Mutuel Y et Y Z A, filiale du Crédit Mutuel Y, liée à Olkipay par un contrat de déploiement d’une plate-forme d’acquisition monétique permettant le paiement en ligne, ont assigné la société Olkypay devant le même juge des référés aux fins notamment de voir désigner la Caisse des dépôts et consignations en qualité de séquestre judiciaire. La défenderesse a fait valoir que le tribunal de commerce devait se déclarer incompétent au profit du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Paris.

Par ordonnance du 21 décembre 2018, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :

— s’est déclaré compétent,

— désigné Me Rodet en qualité de séquestre judiciaire, avec mission de :

— recevoir les fonds initialement portés au crédit du compte n°15589 29100024711925 40 ouvert au nom d’Olkypay dans les livres de Crédit Mutuel Y, soit la somme de 218.000 euros ;

— conserver ces fonds dans I’attente d’une décision de justice définitive ordonnant leur remise, soit au

Crédit Mutuel Y, soit à Olkypay, ou d’une transaction mettant un terme a la contestation entre les parties ;

— dit que le séquestre ainsi désigné ne pourra se dessaisir des sommes consignées entre ses mains que par la signification à la requête de la partie la plus diligente :

— d’une décision judiciaire définitive ordonnant la mainlevée du séquestre et la remise des fonds à l’une et/ou l’autre partie(s) ;

— ou d’un accord transactionnel conclu entre les parties, convenant du sort des sommes consignées ;

— dit que la mesure de séquestre sera caduque si la demanderesse n’a pas introduit une procédure au fond aux fins de voir statuer sur la propriété des fonds séquestrés dans un délai de trois mois à compter de la date de l’ordonnance a intervenir;

— dit n’y avoir lieu a application de l’article 700 code de procédure civile ;

— condamné Olkypay à supporter les dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 61,95 euros TTC dont 10,11 euros de TVA.

Suivant déclaration du 15 février 2019, la société Olkypay a interjeté appel de cette décision, intimant les société Crédit Mutuel Y et la société Y Z A.

Par ses dernières conclusions du 17 mai 2019, l’appelante demande à la cour de :

à titre principal,

— infirmer l’ordonnance du 21 décembre 2018 en ce que le président du tribunal de commerce de Paris s’est déclaré compétent,

— dire et juger que seul le juge de l’exécution près le tribunal de grande instance de Paris est compétent pour connaître de la difficulté relative à l’exécution de l’ordonnance du 21 décembre 2018,

à titre subsidiaire,

— dire que Crédit Mutuel Y et Y Z A sont irrecevables en leurs demandes,

à titre infiniment subsidiaire,

— infirmer l’ordonnance du 21 décembre 2018 en ce que Maître X a été désigné séquestre aux fins de recevoir la somme de 218.000 euros prélevée par Crédit Mutuel Y au profit d’Y Z A,

— débouter le Crédit Mutuel Y et Y Z A de toutes leurs demandes ;

à titre reconventionnel,

— ordonner la levée du séquestre et la restitution des fonds à Olkypay Service Provider,

en tout état de cause,

— condamner in solidum le Crédit Mutuel Y et Y Z A à verser 5.000 euros à Olkypay en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait valoir que :

— l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire dispose que le JEX connaît de manière exclusive des difficultés relatives aux titres exécutoires ; le juge des référés commerciaux est incompétent pour statuer sur les difficultés relatives à l’exécution de ses propres décisions (Com. 21 janvier 1992, n° 90-14.193, Bull. civ. IV, n° 31) ;

— il n’y a pas lieu à compensation au sens de l’article 1347 du code civil car l’ordonnance du 21 décembre 2018 ordonne paiement à la société Crédit Mutuel Y et non Y Z A et les sommes prélevées appartiennent aux clients d’Olkypay à l’égard desquels Y ne fait valoir aucune créance ;

— les intimées n’ont pas intérêt à agir contre la société Olkypay car les fonds dont la remise a été ordonnée ne lui appartiennent pas ;

— les conditions de l’article 872 du code de procédure civile ne sont pas réunies en l’espèce en ce que l’urgence n’est pas caractérisée et qu’il est fait état de contestations sérieuses car la fin des relations commerciales entre les parties au litige n’a en aucun cas modifié l’objet du compte par définition dédié et le placement sous séquestre de sommes ne peut être ordonné pour des fonds appartenant à des tiers sans les avoir attraits dans la procédure (TGI Lyon, ordonnance de référé, 24 mars 2014, n° 14/00303 ; voir également Paris, 1 er juin 2007, n° 07/05278).

Par ses conclusions transmises le 27 mai 2019, les intimées demandent à la cour de :

— confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a rejeté l’exception d’incompétence,

subsidiairement :

— se déclarer en toute hypothèse compétente pour statuer sur les autres prétentions des parties en tant que juridiction d’appel du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Paris,

— confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a désigné Me Rodet en qualité de séquestre judiciaire,

— confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses autres dispositions non contraires au présent dispositif,

— condamner Olkypay à verser à Crédit Mutuel Y une somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner Olkypay aux dépens, qui pourront être recouvrés par Me Arnaud Guyonnet (SCP AFG), Avocat au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Elles font valoir que :

— l’exception d’incompétence doit être rejetée car le juge des référés est valablement saisi en l’absence de procédure d’exécution en cours (Civ. 2 ème , 18 oct. 2012, Bull. civ. II, n°176) ;

— la compensation, prévue aux articles 1347 et suivants du code civil, est un moyen d’extinction d’une obligation, non une mesure d’exécution forcée, dont la liste limitative figure exclusivement au sein du code des procédures civiles d’exécution ; la demande de désignation d’un séquestre judiciaire est également prévue aux articles 1961 et suivants du code civil et ne constitue pas davantage une mesure d’exécution forcée ;

— la fin de non recevoir doit être rejetée car il existe un litige sur la propriété des fonds litigieux et une action au fond est actuellement pendante devant le tribunal de commerce de Brest ;

— la mesure de séquestre est la seule de nature à éviter la création d’une situation irréversible et constitue bien une mesure provisoire.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens respectifs.

MOTIFS DE LA DECISION

Le prélèvement litigieux d’un montant de 218 880,04 euros, opéré par le Crédit Mutuel Y le 15 novembre 2018, par le débit du compte de règlement ouvert en ses livres au nom de Olkypay, a pour cause, pour partie, la condamnation prononcée à l’encontre de cette dernière par l’ordonnance de référé rendue le 25 juillet 2018 au bénéfice de la banque.

Pour autant, la demande de séquestre de cette somme, formée par les sociétés intimées, si elle est en rapport avec l’exécution de cette décision, ne s’inscrit pas dans le cadre d’une difficulté d’exécution, puisqu’elle ne constitue pas une mesure d’exécution forcée engagée par les créanciers en vertu de leur titre exécutoire.

En conséquence, le juge des référés du tribunal de commerce a retenu à bon droit sa compétence, et il sera statué au visa de l’article 872 du du code de procédure civile qui fonde la demande et non au visa des dispositions du code des procédures civiles d’exécution, la cour étant juridiction d’appel des deux juridictions.

Le moyen en vertu duquel les sociétés intimées n’auraient pas intérêt à agir dès lors qu’elles demandent le séquestre de fonds n’appartenant pas à leur débitrice, ne constitue pas une fin de non recevoir mais une défense au fond sur le bien fondé de la mesure sollicitée, de sorte que l’irrecevabilité de l’action soulevée par Olkypay doit être rejetée.

L’article 872 du code de procédure civile dispose que, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

Il est constant qu’un différend oppose les parties sur la disponibilité des fonds prélevés par le Crédit Mutuel Y sur le compte de la société Olkypay, qui prétend qu’ils ne seraient pas sa propriété mais celle de ses clients, alors que la banque soutient que la convention de compte de règlement était résiliée depuis le 15 novembre 2018, date à laquelle le compte a été mouvementé, de sorte que les fonds crédités à Olkypay à cette date étaient la propriété de cette dernière. Le tribunal de commerce de Brest est actuellement saisi au fond de ce litige.

L’urgence est caractérisée dans un contexte où les créanciers cherchent à se prémunir du risque de disparition de fonds qu’ils estiment la propriété de leur débiteur, qu’ils ont mis en demeure d’exécuter ses obligations depuis le 20 novembre 2018 et à l’égard duquel les saisies exécutions précédemment diligentées se sont avérées infructueuses.

Le séquestre est une mesure conservatoire qui ne préjudicie pas au fond et préserve les droits respectifs des parties. Elle représente ainsi la seule mesure qui permet d’éviter de créer une situation irréversible, de sorte que l’ordonnance doit être confirmée.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déclare les sociétés Crédit Mutuel Y et Y Z A recevables en leur action,

Confirme l’ordonnance entreprise,

Y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Olky Payment Service Provider aux dépens, distraits conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, Pour la Présidente empêchée,

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