Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 15 avril 2021, n° 20/16033

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 2, 15 avr. 2021, n° 20/16033
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/16033
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Meaux, 8 octobre 2020, N° 19/00667
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 2

ARRET DU 15 AVRIL 2021

(n° 167 , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/16033 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCTLV

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 09 Octobre 2020 -Président du Tribunal judiciaire de Meaux – RG n° 19/00667

APPELANTS

Mme A Y

[…]

[…]

Représentée par Me Stéphanie DUGOURD de la SELARL HDLA – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0344

Assistée par Me Arnaud GUINOT, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Stéphanie DUGOURD de la SELARL HDLA – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0344

M. C X

[…]

[…]

Représenté par Me Stéphanie DUGOURD de la SELARL HDLA – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0344

Assistée par Me Arnaud GUINOT, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Stéphanie DUGOURD de la SELARL HDLA – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0344

INTIMEES

Société SCCV LES COTTAGES SUR MARNE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Jean-Christophe LUBAC de la SCP SARTORIO LONQUEUE SAGALOVITSCH & ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0482

Assistée par Me Clément BOUDOYEN, avocat au barreau de PARIS,

Société NOVASTRADA prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Jean-Christophe LUBAC de la SCP SARTORIO LONQUEUE SAGALOVITSCH & ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0482

Assistée par Me Clément BOUDOYEN, avocat au barreau de PARIS,

S.A. SOCIETE CENTRALE POUR LE FINANCEMENT DE L’IMMOBILI ER (SOCFIM) prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[…]

[…]

Représentée et assistée par Me A VINCENT de la SELARL WTS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0345

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 17 Mars 2021, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Hélène GUILLOU, Présidente de chambre conformément aux articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Hélène GUILLOU, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Lauranne VOLPI

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Hélène GUILLOU, Présidente de chambre et par Lauranne VOLPI, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

Exposé du litige

Par acte authentique du 6 octobre 2017, Mme A Y et M. C X ont fait l’acquisition pour le prix de 259 000 euros TTC d’une maison en l’état futur d’achèvement (VEFA)

par l’intermédiaire de la société Novastrada, promoteur immobilier, qui a créé la SCCV les Cottages sur Marne (la SCCV) pour la réalisation de ce programme sis à […]).

Le délai prévisionnel d’achèvement était fixé à la fin du mois de décembre 2018.

Se plaignant de retards dans la construction et la livraison et de l’absence de perspective de livraison malgré les mises en demeure adressées, Mme A Y et M. C X ont fait assigner le 6 novembre 2019 en référé la SCCV Les Cottages sur Marne et la société Novastrada, pour :

— faire injonction à la SCCV d’achever les travaux et de livrer le bien immobilier et ses éléments d’équipement, suivant le contrat signé, avant 1e 31 décembre 2019, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard,

— condamner la SCCV au paiement d’une provision de 10 155,92 euros pour les préjudices subis avec intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019, date de la mise en demeure,

— condamner la SCCV au paiement d’une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 6 décembre 2019, ils ont également fait assigner la Société centrale pour le Financement de l’Immobilier (la SOCFIM).

Le 14 septembre 2020, la maison a été livrée aux consorts X-Y. Ces derniers ont émis des réserves et ont consigné la somme de 12 950 euros sur le prix de vente.

Par deux courriers en date du 15 septembre et du 7 octobre 2020, ils ont fait part à la SCCV de nombreuses malfaçons.

La SCCV a demandé reconventionnellement d’une part le solde du prix de vente et d’autre part leur condamnation au paiement de la somme de 16 892,31 euros au titre des travaux modificatifs non réglés,

Par ordonnance du 9 octobre 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux a :

- mis la société Novastrada hors de cause,

— rejeté ses demandes de dommages et intérêts et au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit n’y avoir lieu à référé sur les demandes des consorts X-Y,

— condamné les consorts X-Y à payer à la SCCV la somme provisionnelle de 8 477,84 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente,

— dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de déconsignation,

— condamné les consorts X-Y à payer à la société SOCFIM la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— rejeté les demandes de la SCCV et des consorts X-Y au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la SCCV aux dépens.

Le juge a estimé que la société Novastrada devait être mise en hors de cause, les consorts X-Y ayant signé la vente du 6 octobre 2017 avec la SCCV Les Cottages sur Marne de même que la société SOCFIM doit également être mise hors de cause, les consorts X-Y n’ayant pas mis en oeuvre sa garantie.

Il a également jugé que les raisons invoquées par la société Les Cottages sur Marne pour justifier le retard du chantier constituaient une contestation sérieuse à la demande d’indemnisation des consorts X-Y, mais qu’en revanche, ces derniers étaient incontestablement redevables de la somme de 8 477,84 euros au titre des travaux modificatifs.

Par déclaration en date du 6 novembre 2020, les consorts X-Y ont fait appel de cette décision, critiquant l’ordonnance en ce qu’elle a :

- mis la société Novastrada hors de cause,

— dit n’y avoir lieu à référé sur les demandes des consorts X-Y,

— condamné les consorts X-Y à payer à la société Les Cottages sur Marne la somme provisionnelle de 8 477,84 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente,

— condamné les consorts X-Y à payer à la Socfim la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— rejeté la demande des consorts X-Y au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 3 décembre 2020, une saisie-attribution à hauteur de 10 099,98 euros a été réalisée sur le compte bancaire des consorts X-Y à la demande de la SCCV.

Par conclusions communiquées par la voie électronique le 2 mars 2021, les consorts X-Y demandent à la cour de :

- les dire recevables et bien fondés en leur appel,

— infirmer l’ordonnance de première instance en ce qu’elle a :

• renvoyé les parties à se pourvoir sur le fond du litige,

• mis hors de cause la société Novastrada,

• dit n’y avoir lieu à référé sur leurs demandes,

• les a condamnés à payer à la société SOCFIM la somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

• les a condamnés à payer à la SCCV la somme provisionnelle de 8 477,84 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l’ordonnance de référé en date du 9 octobre 2020,

• rejeté leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la SCCV à leur payer la somme de 23 287,65 euros à titre de provision, avec intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019, date de la première mise en demeure,

— rejeter toute demande de condamnation formée à leur encontre,

— faire injonction à la SCCV de lever les réserves contenues dans le procès-verbal de livraison du 14 septembre 2020, mais également celles contenues dans les courriers qu’ils leur ont adressés le 15 septembre 2020 et le 7 octobre 2020 assorties d’une astreinte d’un montant de 100 euros par jour de

retard à compter du 14 novembre, qu’elle se réservera le droit de liquider,

— condamner la SCCV leur payer à titre indemnitaire suite à l’exécution de l’ordonnance rendue le 9 octobre 2020, la somme de 1 622 euros en remboursement des frais indûment prélevés à titre de provision, avec intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2020, date de la saisie et la somme de 1 500 euros à titre de provision, au titre du préjudice subi suite à l’exécution de l’ordonnance de 1re instance, somme à parfaire,

— en tout état de cause, condamner la SCCV à leur payer la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Les consorts X-Y exposent en substance les éléments suivants :

S’agissant de la société SOCFIM :

— il est vrai qu’ils n’ont pas mis en oeuvre la garantie de la société SOCFIM et ne formulent aucune demande à son encontre, cependant, la société SOCFIM étant garant financier de l’achèvement des travaux et caution solidaire de la SCCV ils souhaitent lui rendre la procédure opposable,

S’agissant du retard dans les travaux :

— La SCCV se prévaut de 756,7 jours de suspension légitime du chantier, repoussant la date de livraison au 25 janvier 2021,

— cependant, il est prévu à l’article 38.3.4 du contrat qu’une cause de suspension n’est légitime et ne produit effet que si elle est certifiée par le maître d’oeuvre,

- s’agissant des inondations et coulées de boue, la seule publication d’un arrêté de catastrophe naturelle ne suffit pas à caractériser la force majeure,

— s’agissant des intempéries, des défaillances d’entreprises et des travaux modificatifs, aucune certification du maître d’oeuvre n’est produite et les pièces produites par la SCCV se contredisent sur ce point,

— dès lors, aucune des causes de suspension invoquée par la SCCV ne peut faire effet.

— la maison a été livrée le 14 septembre 2020, soit avec plus de 600 jours de retard sur la date prévisionnelle (31 décembre 2018).

— Ce retard a fait subir aux consorts X-Y un préjudice évalué à la somme de 23 287,65 euros.

S’agissant des travaux modificatifs :

— le juge a retenu que les consorts X-Y avaient commandé pour 9 667,84 euros de travaux modificatifs et n’en avaient payé que 1 200 euros,

— cependant, l’article 42 du contrat prévoit que des travaux modificatifs ne doivent être réalisés que si les consorts X-Y acceptent le devis de la SCCV dans les 10 jours,

— tel n’a pas été le cas en l’espèce, les consorts X-Y n’ayant jamais reçu aucun devis pour ces travaux,

— par ailleurs, les sociétés Les Cottages sur Marne et Novastrada se sont engagées à prendre en charge une partie de ces travaux modificatifs lors d’une réunion à la marie de Dampmart le 16 février

2019,

— Dans un litige concernant la même opération immobilière, le tribunal judiciaire de Meaux a, le 25 novembre 2020, débouté la SCCV de sa demande de paiement de travaux modificatifs, au motif qu’il n’était pas prouvé que les acquéreurs avaient accepté les devis,

S’agissant des réserves :

— par deux courriers en date du 15 septembre et 7 octobre 2020, les consorts X-Y ont informé la SCCV de leurs nombreuses réserves,

— La SCCV n’a jamais levé ces réserves et les conteste pour la plupart alors qu’elles ont été validées par la société Novastrada qui a visité le chantier.

S’agissant de la saisie-attribution :

— Les consorts X-Y ont exposé des frais pour un montant de 1 622 euros à cause de la saisie-attribution du 3 décembre 2020,

— La cour devra condamner la SCCV à leur rembourser ces frais et à les indemniser du préjudice moral consécutif à cette saisie à hauteur de 1 500 euros.

Par conclusions communiquées par la voie électronique le 8 mars 2021, les sociétés Les Cottages sur Marne et Novastrada demandent à la cour de :

- débouter les consorts X-Y de l’ensemble de leurs demandes,

— confirmer, en conséquence, l’ordonnance entreprise,

— condamner les consorts X-Y à verser à la société Novastrada une somme de 500 euros en réparation du préjudice qu’elle a subi du fait de leur recours abusif,

— condamner les consorts X-Y à leur verser une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel dans les conditions de l’article 699 du même code.

Les sociétés Les Cottages sur Marne et Novastrada exposent en résumé ce qui suit :

S’agissant des réserves :

— faute de clause contraire du contrat, la SCCV dispose d’un délai légal d’un an (article 1646-1 du code civil) à compter de la livraison de la maison pour procéder à la levée des réserves soit jusqu’au 15 septembre 2021, étant précisé qu’ils contestent plusieurs des réserves soulevées par les consorts X-Y n’en sont pas puisqu’elles correspondent en effet à des modifications techniques, lié à des règles spécifiques de construction, parfaitement autorisées par le contrat.

— d’autres réserves dont la fissure du béton sont dues au fait des consorts X-Y, de sorte que c’est à juste titre que le juge a refusé de condamner la SCCV à lever ces réserves.

S’agissant de la saisie-attribution :

— la demande de remboursement des frais est irrecevable car nouvelle en cause d’appel, et les consorts X-Y ont en tout état de cause déjà saisi le juge de l’exécution d’une demande en ce sens, une audience était prévue pour le 15 avril 2021,

— la SCCV était en droit de faire exécuter l’ordonnance de première instance.

S’agissant des retards des travaux :

— les consorts X-Y reprochent à la SCCV de ne pas avoir respecté l’article 38.3.4 du contrat qui prévoit que les causes de suspension des travaux doivent faire l’objet d’un certificat du maître d’oeuvre, mais ce formalisme est purement probatoire et la SCCV est en droit d’établir l’existence de causes de suspension légitime des travaux par d’autres moyens de preuve.

— les intempéries et défaillances d’entreprise n’ont certes pas fait l’objet de certifications par le maître d’oeuvre mais sont établies par de nombreux documents.

— s’agissant des inondations et coulées de boue, au vu des pièces produites dont l’arrêté de catastrophe naturelle produit, la force majeure avancée par la SCCV ne peut pas être écartée avec l’évidence requise en référé,

— quant aux travaux modificatifs demandés par les consorts X-Y, il est incontestable qu’ils ont retardé le chantier,

— il ressort de ces éléments qu’il existe à tout le moins une contestation sérieuse sur l’existence de cause de suspension légitime des travaux, que la SCCV évalue à 756,7 jours.

S’agissant des travaux modificatifs :

— l’article 42 invoqué par les consorts X Y pour ne pas payer les travaux supplémentaires ne stipule pas que l’absence de devis fait obstacle à ce que des travaux modificatifs soient mis à leur charge alors que la SCCV établit sans contestation possible que ces travaux ont été demandés eux, qu’ils n’en ont jamais contesté le coût avant la procédure d’appel,

— Le fait que la SCCV aurait, lors d’une réunion à la mairie de Dampmart du 16 février 2019, accepté de payer ces travaux est inopérant, ces travaux ayant été effectués avant cette réunion.

S’agissant de la société Novastrada :

— c’est à bon droit que le juge a retenu que la société Novastrada devait être mise hors de cause puisqu’elle n’est pas partie au contrat de vente du 6 octobre 2017 entre les consorts X-Y et la SCCV,

— si le juge a écarté l’existence d’un abus en première instance, cet abus est caractérisé en appel,

— en effet, les consorts X-Y persistent en leur erreur et ne dirigent toujours aucune demande à son encontre,

Par conclusions communiquées par la voie électronique le 31 décembre 2020, la société SOCFIM demande à la cour de :

— recevoir la société SOCFIM en ses demandes et l’y déclarer bien fondée,

— constater que les consorts X-Y n’ont pas mis en jeu la garantie financière d’achèvement de la société SOCFIM,

— constater que la garantie financière d’achèvement consentie par la société SOCFIM exclut expressément la demande des consorts X-Y en paiement de dommages et intérêts, à titre de provision, de la somme de 23 287,65 euros pour les préjudices subis, du fait du retard de la livraison

de leur maison,

— déclarer mal fondés les consorts X-Y en leur appel formé à l’encontre de l’ordonnance du 9 octobre 2020,

— confirmer l’ordonnance de référé rendue le 9 octobre 2020 en ce qu’elle a mis hors de cause la société SOCFIM,

— en tout état de cause, condamner les consorts X-Y à payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens, dont distraction est requise au bénéfice de la SELARL WTS, représentée par Maître A Vincent.

La société SOCFIM expose en substance ce qui suit :

— Les dommages et intérêts auxquels la SCCV pourrait être condamnée sont expressément exclus de la garantie financière d’achèvement de la société SOCFIM. De plus, l’arrêt du chantier n’étant pas constaté, la garantie ne peut pas être mise en oeuvre et n’a d’ailleurs pas été mise en oeuvre par les consorts X-Y.

Il sera renvoyé aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

L’article 808, devenu 834 du code de procédure civile, dispose que, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l’un des moyens de défense opposés aux prétentions du demandeur n’apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

En outre, selon l’article 809 devenu 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L’article 809 devenu 835 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’espèce deux demandes de provision sont formées, l’une par M. X et Mme Y, l’autre par la SCCV.

Sur la demande de provision des acquéreurs:

L’acte de vente fixe au troisième trimestre 2018 la date contractuelle de livraison, soit au plus tard le 31 décembre 2018.

Celle-ci n’est intervenue que le 14 septembre 2020, et ce, avec des réserves, soit 624 jours de retard.

La SCCV soutient que le retard de livraison invoqué n’excède pas les causes légitimes de retard stipulées au contrat de vente en l’état futur d’achèvement, qu’il est prévu que celles-ci peuvent résulter d’un certificat établi par le maître d’oeuvre.

Elle invoque les inondations et coulées de boues (21 jours), les journées d’intempéries (115,3 jours), la défaillance de 4 entreprises et des concessionnaires Enedis et GRDF (469,4 jours) ainsi que les travaux modificatifs réclamés par les acquéreurs (120 jours).

Le contrat stipule en effet que sont des causes légitimes de suspension du délai de livraison les grèves, les intempéries et phénomène climatiques retenus par le maître d’oeuvre, et justifiés par les relevés de la station météorologique la plus proche du chantier, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire des ou de l’une des entreprises ou de leurs fournisseurs (…) Les retards imputables aux compagnies concessionnaires (EDF France télécom etc…)(…) L’incidence de la demande de travaux supplémentaires ou modificatifs de l’acquéreur.'

Les causes invoquées rentrent donc dans les causes contractuelles de suspensions.

Quant à la preuve de ces causes et de leur durée, ainsi que l’a relevé le premier juge, le formalisme imposé par le contrat vise à alléger la preuve mais n’interdit pas d’autres modes de preuve, de sorte que sauf à établir que ces événements ne sont manifestement pas de nature à constituer une cause de suspension, il n’appartient pas au juge des référés de les écarter.

En l’espèce, les intempéries sont également établies par le relevé produit par la SCCV, de même que l’arrêté de catastrophes naturelles relatif aux coulées de bout du 15 janvier au 5 février 2018.

Enfin l’appréciation de la preuve d’une défaillance d’entreprise suppose une interprétation de cette notion (procédure collective’ abandon de chantier’ incompétence) qui ne relève pas du juge des référés.

Il en est de même des 'défaillances’ de Enedis ou GRDF, les éléments versés aux débats démontrant en effet un refus de celles-ci de déployer leur réseau et leur exigence d’une réouverture des tranchées, mais non l’imputabilité de ces refus, ou de la 'défaillance’ de la société Valyo alors que les explications de la SCCV sur ce point démontrent que le maire de Dampmart s’est opposé à la pose des compteurs d’eau potable, et qu’un litige est survenu sur la validité des tests réalisés. L’imputabilité du retard compté à cet égard ne relève pas du juge de l’évidence.

Enfin les travaux modificatifs ont fait l’objet de beaucoup de discussions entre les parties mais les mails échangés démontrent suffisamment que ces travaux n’ont pas été réalisés comme cela avait été initialement prévu, de sorte que le retard n’est pas imputable avec évidence aux acquéreurs. En effet si le vendeur est en droit de se prévaloir de l’allongement des délais du seul fait des demandes spécifiques, en revanche, l’importance des retards comptabilisés à ce titre relève du juge du fond puisqu’il suppose l’appréciation de la validité du décompte au regarde des demandes spécifiques, des contraintes apportées et de la mise en oeuvre par vendeur.

En conséquence, il sera retenu que les causes alléguées par la SCCV pour expliquer le très important retard de livraison, ne peuvent être retenues sans examen au fond et appréciation des responsabilités des différents intervenants, ce qui ne relève pas des pouvoirs du juge des référés.

Des contestations sérieuses s’opposent donc aux pénalités réclamées par Mme Y et M. X et la décision qui a dit n’y avoir lieu à référé sera confirmée.

Sur la provision demandée par la SCCV:

Ainsi que cela a été rappelé précédemment, les courriels échangées entre les parties démontrent que

la réalisation des 'travaux modificatifs acquéreurs’ (TMA) a donné lieu à de nombreuses discussions et mécontentement, alors même que ces travaux avaient été pour la plupart expressément contractuellement prévus et acceptés.

Mais le seul devis versé aux débats concerne une somme de 1 200 euros qui a été payée.

L’autre estimation des travaux versée aux débats est unilatérale et sans commune mesure avec le premier devis, puisque, par exemple le remplacement de la baie de 2,50 m par une baie de 3 mètres avec deux portes coulissantes et une partie fixe, chiffrée initialement 950 euros est finalement facturée 6007,60 euros. De même la cloison supplémentaire dans le cellier et l’ajout d’une porte WC qui figurait dans les travaux modificatifs initiaux sans coût supplémentaire, sont ils finalement facturés 326 et 232 euros.

Il sera également relevé qu’alors que dans un courriel la société Novastrada accepte la modification du revêtement de sol du rez-de-chaussée, et annoncé la prise en charge de ce coût par le vendeur, ce montant est finalement facturé 1 496,50 euros.

Enfin de la lecture des échanges entre les parties ressort un litige sur la bonne réalisation de ces travaux.

Dès lors, en présence de contestations sur le chiffrage des travaux supplémentaires, sur leur bonne réalisation et compte tenu de l’absence de tout chiffrage contractuel de ces travaux, il ne sera pas fait droit en référé à la demande de provision, la décision étant infirmée de ce chef.

Sur la demande de levée des réserves:

Ainsi que l’a retenu le premier juge, à défaut de spécifications particulières la levée des réserves doit être réalisée dans le délai de 60 jours après la réception des travaux, en application de la norme Afnor, et non un an comme le soutient la SCCV, ce délai étant celui de la garantie.

Ce délai étant largement expiré, et les réserves n’étant pas toutes levées, il sera fait droit à la demande en ce qui concerne les réserves mentionnées sur le procès-verbal de réception du 14 septembre 2020 soit la fourniture de la notice pour les panneaux photovoltaïque, le remplacement d’une ampoule dans le garage, la reprise de l’enduit au droit de la tôle (+ avant + arrière), la fissure à gauche de la prise TV et à gauche de l’ouvrant droit dans le séjour, l’horizontalité du volet de la salle de bain, la pièce sur la 'nourrice’ arrivée du robinet de puisage, la rectification des coffrets côté rue, le complément de joint dans la salle de bain, la réfection du 'bateau’ dans la rue, la pose d’un cache de volet roulant, la réfection de la trappe VMC dans la cuisine, le déplacement de la 'pieuvre électrique’ sur la trappe pour permettre l’accès aux combles, la reprise de la finition sur le rebord de la fenêtre de la cuisine, le remplacement d’une lame dans le séjour, le réglage de la fenêtre dans le bureau, la reprise de la bavette du porche, la réfection du bateau.

Ces réserves ont en effet été approuvées par une représentante du vendeur Mme Z.

En seront en revanche exclues les autres réserves qui sont contestées, car non signalées, ou ayant fait l’objet de travaux équivalents dont la réalité est contestée (place de stationnement non réglementaire) ou l’imputabilité est contestée, ce qui est le cas pour la fissure dans le séjour, les explications données sur ces points par la SCCV justifiant un débat devant le juge du fond.

Compte tenu du délai déjà écoulé, le prononcé d’une astreinte est nécessaire, mais son point de départ ne peut être rétroactif.

Sur la demande relative au coût de la saisie-attribution:

En application de l’article L. 213-6 du code des procédures civiles d’exécution il appartient au juge de l’exécution et non au juge des référés de statuer sur le coût de la saisie-attribution du 3 décembre 2020.

Sur la mise hors de cause de la société Novastrada:

Le contrat de réservation a été signé avec cette société, mais celle-ci s’est substituée la SCCV de sorte qu’il n’y a plus lieu de la maintenir dans la cause.

Sur la demande de mise hors de cause de la société Socfim

La société Socfim est le garant de l’achèvement des travaux, cette garantie est due jusqu’au terme de la garantie d’achèvement.

Il n’est pas contesté que même si des réserves subsistent, l’immeuble est désormais achevé au sens de l’article R 261-1 du code de la construction qui dispose que ' L’immeuble vendu à terme ou en l’état futur d’achèvement est réputé achevé au sens de l’article 1601-2 du code civil, reproduit à l’article L. 261-2 du présent code, et de l’article L. 261-11 du présent code lorsque sont exécutés les ouvrages et sont installés les éléments d’équipement qui sont indispensables à l’utilisation, conformément à sa destination, de l’immeuble faisant l’objet du contrat, à l’exception des travaux dont l’acquéreur se réserve l’exécution en application du II de l’article L. 261-15. Pour l’appréciation de cet achèvement, les défauts de conformité avec les prévisions du contrat ne sont pas pris en considération lorsqu’ils n’ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages ou éléments ci-dessus précisés impropres à leur utilisation.

La constatation de l’achèvement n’emporte par elle-même ni reconnaissance de la conformité aux prévisions du contrat, ni renonciation aux droits que l’acquéreur tient de l’article 1642-1 du code civil, reproduit à l’article L. 261-5 du présent code, et de l’article L. 242-1 du code des assurances.'

Dès lors son maintien dans la cause n’est pas utile et la décision sera confirmée sur ce point.

Cependant, les circonstances du présent litige, l’important retard pris dans l’achèvement du programme, justifient qu’aucune somme ne soit mise à la charge de M. X et de Mme Y.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance du 9 octobre 2020 sauf en ce qu’elle a:

— condamné Mme A Y et M. C X à payer à la SCCV Les Cottages sur Marne la somme provisionnelle de 8 477,84 euros, avec intérêt au taux légal,

— condamné Mme Y et M. X à payer à la société Socfim la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de levée des réserves,

et, statuant à nouveau de ces seuls chefs,

— Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande en paiement des travaux modificatifs,

— Ordonne à la SCCV Les Cottages sur Marne de procéder à la levée des réserves telles que mentionnées sur le procès verbal du 14 septembre 2020, signé par le représentant de la SCCV et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé le délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision,

Condamne la SCCV Les Cottages sur Marne à payer à Mme A Y et M. C X la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCCV Les Cottages sur Marne aux dépens d’appel.

La Greffière, La Présidente,

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Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 15 avril 2021, n° 20/16033