Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 5 décembre 2019, n° 17/02322

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, ch. soc., 5 déc. 2019, n° 17/02322
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 17/02322
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

MHD/SB

Numéro 19/4809

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 05/12/2019

Dossier : N° RG 17/02322 – N° Portalis DBVV-V-B7B-GTJP

Nature affaire :

A.T.M. P. : demande relative à la faute inexcusable de l’employeur

Affaire :

SAS SECURAIL

C/

E D,

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE BAYONNE

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 05 Décembre 2019, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 10 Octobre 2019, devant :

Madame X, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame DEBON, faisant fonction de greffière.

Madame X, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame DEL ARCO SALCEDO, Présidente

Madame X, Conseiller

Monsieur LAJOURNADE, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

SAS SECURAIL agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège de la société

[…]

[…]

assistée de CREPIN de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de PAU et Maître MREJEN, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Monsieur E D

[…]

[…]

[…]

Comparant assisté de Maître JOLIBERT de la SELAS MORVILLIERS SENTENAC ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

CAISSE PRIMAIRE D’ ASSURANCE MALADIE DE BAYONNE

[…]

[…]

Comparante en la personne de Madame Y, munie d’un pouvoir régulier

sur appel de la décision

en date du 02 JUIN 2017

rendue par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE BAYONNE

RG numéro : 20160068

FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES

La SAS Securail est spécialisée dans le secteur de l’entretien et de la sécurisation des réseaux

ferroviaires.

Par contrat à durée indéterminée en date du 15 octobre 2012, faisant suite à des contrats de travail à durée déterminée, elle a embauché Monsieur E D en qualité d’agent d’accompagnement train de travaux et annonceur / sentinelle moyennant :

* le versement d':

— une rémunération mensuelle de 1700€ pour une durée de travail de 151,67 heures de travail,

— une indemnité forfaitaire de grands déplacements d’un montant de 1300€.

Par courrier électronique du 8 février 2013, elle l’a informé :

* qu’il devait se rendre à un séminaire qui se tenait au siège de l’entreprise située à Rueil-Malmaison (92'[…] le 12 février 2013 avec trois de ses collègues et qui se déroulait du mardi 12 février 2013 à 10 heures au mercredi 13 février 2013 dans l’après-midi,

* que ce déplacement devait s’effectuer avec un véhicule d’entreprise et en covoiturage avec trois autres salariés concernés par le même déplacement,

* que l’ordre de ramassage était le suivant :

— MonsieurVallée demeurant à Hendaye,

— Monsieur Z demeurant à A,

— Monsieur B demeurant à Orthez,

— Monsieur C demeurant à Limoges.

Seuls Monsieur Z et Monsieur D ont conduit et se sont relayés toute la nuit au volant, en alternant les temps de conduite et les temps de repos.

À la suite de l’assoupissement au volant de Monsieur Z peu avant l’arrivée à Paris, un accident s’est produit vers six heures du matin au cours duquel notamment Monsieur D a été blessé.

À compter du 28 janvier 2015, la CPAM de Pau lui a attribué un taux d’incapacité permanente égal à 17 %.

Déclaré inapte par le médecin du travail à son poste mais apte à un poste sans port de charges, sans déplacements ni mouvements répétitifs de type administratif et faute de possibilité de reclassement, il a été licencié pour inaptitude physique le 27 août 2014.

Par courrier du 29 janvier 2015, il a saisi la commission amiable de la CPAM des Pyrénées atlantiques afin de voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur.

Compte – tenu de l’échec de la procédure amiable, il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne aux mêmes fins.

Par jugement du 2 juin 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :

— dit que l’accident dont a été victime Monsieur E D le 12 février 2013 est un accident

du travail opposable à la société Securail,

— dit que l’accident de travail dont a été victime Monsieur E D est dû à la faute inexcusable de la société Securail,

— fixé au maximum prévu par la loi la majoration de la rente servie à Monsieur D,

— débouter ce dernier de sa demande au titre du retentissement professionnel,

— condamner la société Sécurail a réglé la somme de 1500€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 26 juin 2017, le conseil de la société Sécurail a interjeté appel au nom et pour le compte de sa cliente dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas discutées.

***

Par conclusions du 24 janvier 2019, reprises oralement à l’audience et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits et des moyens, la SAS Sécurail demande à la cour de :

- dire et juger que l’appel est recevable ;

— confirmer le jugement de première instance du TASS de Bayonne du 2 juin 2017 en ce qu’il a débouté Monsieur D de sa demande d’indemnisation au titre de son préjudice professionnel ;

— infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a :

o dit que l’accident dont a été victime M. D le 12 février 2013 est un accident de travail ;

o dit que l’accident de travail de M. D du 12 février 2013 est dû à une faute inexcusable ;

— statuant à nouveau :

* A titre principal :

— dire que la CPAM de Bayonne n’a pas informé l’employeur de sa décision de prise en charge de l’accident du 12 février 2013 en accident de travail ;

— constater que l’accident du 12 février 2013 est un accident de trajet ;

— par conséquent, déclarer Monsieur D irrecevable en sa demande et le débouter de toutes ses demandes ;

* A titre subsidiaire :

— constater que M. Z s’est endormi au volant en prenant une décision fautive de décaler sa pause alors qu’il était fatigué et qu’il conduisait sur une route sans éclairage

public ;

— juger qu’il s’agit là d’une maladresse caractérisée de sa part ;

— constater que le véhicule accidenté ne présentait aucune défaillance et que le matériel transporté

n’était pas dangereux ;

— constater que M. D avait été formé aux risques de la conduite de nuit et notamment à la nécessité de faire des pauses ;

— constater que la Société n’a pas manqué à son obligation de sécurité ;

— par conséquent, débouter purement et simplement Monsieur D de l’ensemble de ses demandes.

Par conclusions du 21 août 2019, reprises oralement à l’audience et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits, des moyens et des prétentions, Monsieur E D demande à la cour de :

— Vu les articles L. 411-1, L. 411-2, L. 452-1 et suivants du Code de la sécurité sociale,.

— Vu les dispositions des articles 696 et 700 du Code de procédure civile,

— Vu le jugement déféré,

— confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a :

— dit et jugé que l’accident dont il a été victime le 12 février 2013 est un accident du travail conformément aux dispositions de l’article L.411-1 du Code de Sécurité Sociale;

— dit et jugé que l’accident dont il a été victime le 12 février 2013 est dû à la faute inexcusable de l’employeur,

— fixé au maximum prévu par la loi la majoration de la rente qui doit être servie,

— réformer la décision en ce qu’elle l’a déboutée de sa demande au titre du retentissement professionnel,

—  ce faisant,

— condamner la société Sécurail à lui verser la somme de 15'000 € au titre de la perte de l’évolution professionnelle du fait de l’accident survenu,

— condamner la même au paiement d’une somme de 3500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la même aux dépens,

—  en tout état de cause,

— débouter la société Sécurail de l’intégralité de ses demandes, fins et prétention à son encontre.

Par conclusions du 16 août 2019, reprises oralement à l’audience et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits et des moyens, la CPAM de Bayonne demande à la cour de :

* si elle jugeait que l’accident dont a été victime l’intimée le 19 août 2011 était dû à la faute inexcusable de l’employeur il est demandé de :

— d’une part préciser le quantum du capital ou de la majoration de la rente à lui allouer,

— d’autre part limiter le montant des sommes à allouer aux intimées :

— au chef de préjudice énuméré à l’article L 452-3 (premier alinéa) du code de la sécurité sociale : les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique, le préjudice d’agrément, le préjudice résultant de la perte de la diminution des possibilités de promotion professionnelle,

— ainsi qu’aux chefs de préjudice non déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale : le préjudice sexuel, le déficit fonctionnel temporaire, les frais liés à l’assistance d’une tierce personne avant consolidation, l’aménagement du véhicule et du logement,

* conformément aux dispositions du troisième alinéa de l’article L 452-3-1 du code de la sécurité sociale, la caisse assurant l’avance des sommes ainsi allouées :

— condamner la société Sécurail à lui rembourser :

— le capital représentatif de la majoration de la rente tel qu’il sera calculé et notifié par la caisse,

— les sommes dont la caisse aura l’obligation de faire l’avance,

— les frais d’expertise.

SUR QUOI,

I – SUR L’OPPOSABILITÉ DE LA DÉCISION DE PRISE EN CHARGE DE L’ACCIDENT DU 12 FÉVRIER 2013 À LA SOCIÉTÉ SÉCURAIL :

Il est constant que le seul fait que la caisse ne justifie pas de l’envoi et de la réception par l’employeur de sa décision de prise en charge de l’accident de travail ne rend pas ladite décision inopposable à l’employeur mais permet seulement audit employeur d’en contester le bien-fondé sans condition de délai.

En l’espèce, il n’est pas contesté que la CPAM de PAU ne peut pas établir l’envoi à l’employeur et la réception par ce dernier du courrier qu’elle lui a adressé l’avisant de la prise en charge de l’accident du 12 février 2013 au titre de la législation des accidents du travail.

Cependant, en application des principes sus rappelés, contrairement à ce que soutient la société Sécurail, l’absence de preuve de la réception de la notification de la prise en charge de l’accident litigieux ne lui rend pas cette décision inopposable mais lui permet en revanche de contester le caractère professionnel de l’accident litigieux sans condition de délai.

Il convient en conséquence de confirmer de ce chef le jugement attaqué.

II – SUR LA FAUTE INEXCUSABLE DE L’EMPLOYEUR :

A – Sur le caractère professionnel de l’accident :

En application des articles :

* L411-1 du code de la sécurité sociale :

' Est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise,'

* L411-2 dudit code :

' Est également considéré comme accident du travail, lorsque la victime ou ses ayants droit apportent la preuve que l’ensemble des conditions ci-après sont remplies…., pendant le trajet d’aller et de retour, entre :

1°) la résidence principale ….et le lieu du travail. Ce trajet peut ne pas être le plus direct lorsque le détour effectué est rendu nécessaire dans le cadre d’un covoiturage régulier ;..'

Il en résulte :

* une présomption d’imputabilité au travail de toute lésion survenue au temps et au lieu du travail, à charge pour l’employeur qui conteste la prise en charge de l’accident d’apporter la preuve d’une cause étrangère des lésions au travail ou d’un état préexistant,

* une protection au titre de la législation aux accidents de travail pour tout salarié en mission pendant tout le temps de sa mission professionnelle ; protection qui inclut non seulement la mission entendue stricto sensu mais également le trajet pour rejoindre le lieu de mission et pour en revenir que cet accident survienne à l’occasion d’un acte professionnel ou de la vie courante.

Ainsi, l’accident de la circulation dont est victime un salarié sur le trajet de son lieu de mission s’analyse en un accident de mission relevant de la législation protectrice et non en un accident de trajet.

En l’espèce, l’employeur soutient que l’accident survenu le 12 février 2013 à 6h30 constitue un accident de trajet car il est survenu en dehors du temps de travail alors que Monsieur E D se rendait sur son lieu de travail.

Cependant, contrairement à ce qu’il prétend, ledit accident est en réalité un accident de travail.

En effet, au-delà du formulaire de déclaration, intitulé ' accident de trajet ' qu’il a rempli lui-même sur lequel il a indiqué que l’accident qui avait eu lieu le 12 février 2013 à 6h30 s’était déroulé durant les horaires de travail du salarié qui allaient de 5 heures à 10 heures du matin ce jour là et qu’il dit relever d’une erreur de plume, il ne peut pas être sérieusement contesté :

* que Monsieur D était en mission lorsqu’il a été victime de l’accident litigieux dans la mesure :

— où il avait reçu pour instruction le 8 février 2013 par courrier électronique de se présenter avec trois de ses collègues à un séminaire organisé à Paris au siège de l’entreprise le 12 février 2013 à 10 heures,

— où pour s’y rendre, lui et ses collègues devaient impérativement utiliser le véhicule de l’entreprise, selon l’ itinéraire fixé par l’employeur,

— où il bénéficiait d’une indemnité forfaitaire de grand déplacement,

* que la réalité de l’accident et le lien entre ledit accident et les lésions constatées par le certificat médical ne sont pas contestés,

* que l’employeur ne rapporte aucun élément susceptible de démontrer que le travail n’a joué aucun rôle dans la survenance de l’accident litigieux.

Compte – tenu des principes sus – rappelés, le sinistre survenu le 12 février 2013 dont Monsieur D a été victime constitue donc un accident du travail et non un accident de trajet.

En conséquence, il en résulte que l’action engagée par le salarié en recherche de la faute inexcusable commise par l’employeur est recevable en raison de la qualification en accident de travail de l’accident du 12 février 2013.

Le jugement attaqué doit donc être confirmé de ce chef.

B – Sur le fond :

En application des articles :

* L452-1 du code de la sécurité sociale :

' Lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants.'

* L452-2 dudit code :

' Dans le cas mentionné à l’article précédent, la victime ou ses ayants droit reçoivent une majoration des indemnités qui leur sont dues en vertu du présent livre….'

Il en résulte que le manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité de résultat à laquelle il est tenu envers le salarié, notamment en ce qui concerne les accidents du travail revêt le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L 452-1 du code de la sécurité sociale, dès lors que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur soit la cause déterminante ou que la victime ait elle-même commis une imprudence.

Il suffit que la faute soit une cause nécessaire de l’accident pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée alors même que d’autres fautes auraient concouru au dommage.

Il incombe au salarié, victime d’un accident de travail, de prouver la faute inexcusable commise par l’employeur c’est-à-dire de démontrer le lien de causalité existant entre l’accident du travail et les manquements retenus à la charge de l’employeur.

En l’espèce, il résulte du procès – verbal d’enquête de gendarmerie :

— que l’accident trouve sa cause immédiate dans l’assoupissement du conducteur du véhicule – Monsieur Z -,

— que lors de l’accident, les passagers de la voiture – dont Monsieur D – ont été blessés.

Monsieur D soutient que la société Sécurail avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel elle exposait ses salariés :

* compte tenu du mode de fonctionnement et d’organisation des transports qu’elle leur avait imposé, à savoir covoiturage et ramassage collectif,

* compte tenu de l’absence de toutes mesures préventives ou de formation sur cette spécificité de déplacement.

Cependant, contrairement à ce qu’il prétend, même si dans son courrier électronique du 8 février

2013, l’employeur l’a averti qu’il devait être présent le 12 février 2013 à 10 heures à Rueil Malmaison (92500) au siège de l’entreprise pour participer à un séminaire se déroulant sur deux jours et même si dans ce même message, il lui a précisé les modalités pratiques du déplacement, à savoir en covoiturage et selon un itinéraire permettant de récupérer un collègue à Limoges, il n’en demeure pas moins qu’il était acquis :

— que l’employeur lui avait accordé une journée de repos – le 11 février 2013 – pour organiser son départ,

— que ce même employeur lui versait des indemnités de grand déplacement et lui remboursait le surplus de ses frais sur justificatifs sans qu’il le conteste sérieusement.

Monsieur D ne rapporte aucune preuve contraire sérieuse remettant en cause l’octroi de la journée du 11 février 2013 comme ' journée de mise à disposition à domicile ', payée par l’employeur, notamment il ne verse aucune attestation de collègues de travail témoignant qu’il a travaillé effectivement la journée du 11 février 2013 ou aucune attestation des trois autres collègues avec lesquels il devait voyager précisant notamment qu’ils avaient dû attendre qu’il finisse sa journée de travail pour prendre la route.

Il se contente d’alléguer, de discuter et de faire des suppositions dans ses dernières conclusions sur la réalité de l’octroi en jour de congé de la journée du 11 février 2013 sans par ailleurs établir non plus que Monsieur Z qui conduisait au moment de l’accident n’avait pas bénéficié du jour du 11 février 2013 en repos.

Il résulte donc de l’ensemble de ces éléments que son employeur lui a donné tous les moyens matériels lui permettant de voyager de jour et qu’en tout état de cause, il ne démontre pas que son employeur l’a obligé à voyager dans la nuit du 11 au 12 février 2013 pour être présent sur les lieux de la mission le 12 février 2013 à 10 heures.

Par ailleurs, contrairement à ce qu’il soutient, ' au-delà du fait que tout conducteur, qui a notamment passé les épreuves du code de la route et qui est titulaire du permis de conduire un véhicule automobile, connaît les risques présentés par une conduite de nuit et les précautions à prendre pour éviter les dangers qui s’y rattachent, ' l’employeur a dispensé à ses salariés des formations en matière de prévention des risques attachés à la conduite de nuit sous forme :

— de courriels électroniques qui lui ont tous été adressés nominativement à lui – Monsieur D – avant l’accident et notamment :

— le 17 décembre 2011, sous forme d’apostrophe très vive de l’employeur indiquant : ' .. je vous le répète, faites attention au volant, Sécurail vous paye des forfaits déplacement pour couvrir vos frais d’hébergement, ce n’est pas un salaire caché, faites les pauses, et n’hésitez pas à faire un somme réparateur avant de reprendre la route. Je commande des VHL 3 et 5 places pour augmenter le co-voiturage et mieux partager les temps de conduite et réduire la fatigue…. Voilà je ne serai pas derrière vous pour vous contrôler sur la route, mais vous ne pourrez pas dire, ou votre famille malheureusement, que vous ne le saviez pas.'

— ou encore le 12 octobre 2012, sous forme d’un courriel auquel sont jointes plusieurs pièces qui insistent sur les risques liés à la fatigue au volant et la nécessité de faire des pauses,

— de notes de service adressées à l’ensemble du personnel en octobre 2012 – dont Monsieur D – qui comportent des documents relatifs à la sécurité routière et portent l’injonction suivante : ' Merci de prendre connaissance des documents joints : vidéo « Tant qu’ il y aura des morts '' ; Guide : ' Guide du bon conducteur',

— de consignes données par message électronique – consigne S 51 du 9 décembre 2011 -.

Il en résulte donc que conformément à l’article L 4121-2 du code du travail, l’employeur a toujours donné aux salariés – et en particulier à Monsieur D – les avertissements nécessaires et a toujours assuré – contrairement aux affirmations du salarié – une formation en matière de sécurité routière.

En outre, contrairement à ce que Monsieur D prétend, son état de fatigue au moment de l’accident est inopérant dans la mesure où il n’était que passager et non conducteur du véhicule.

Enfin, contrairement à ce qu’il affirme, le co voiturage n’est pas une modalité dangereuse de déplacement dans la mesure où elle réduit non seulement la pollution ambiante mais également les temps de conduite respectifs lorsque les déplacements routiers sont privilégiés.

Aussi, il ne peut venir faire grief maintenant à son employeur du fait que sur les quatre salariés qui étaient présents dans la voiture, seuls deux d’entre eux – dont lui- même – conduisaient alors qu’il ne démontre pas que l’employeur avait donné spécialement pour consigne que le volant ne soit tenu que par Monsieur Z et Monsieur D et qu’il n’est pas contesté que la voiture mise à sa disposition était en bon état de fonctionnement.

En conséquence, au vu de l’ensemble de ces éléments, il convient de débouter Monsieur D de l’intégralité de ses demandes relatives à l’existence d’une faute inexcusable et de ses demandes subséquentes.

Le jugement attaqué doit donc être infirmé de ce chef.

III – SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES :

Les dépens sont supportés par la partie qui succombe.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement contradictoirement, en dernier ressort et par arrêt mis à disposition au greffe ;

• Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré opposable à la société SAS Securail la décision de prise en charge de l’accident de travail de Monsieur D le 12 février 2013 par la CPAM de Bayonne et en ce qu’il a reconnu le caractère professionnel de l’accident du 12 février 2013,

• Infirme pour le surplus,

• Statuant à nouveau des chefs infirmés,

• Déboute Monsieur D de l’intégralité de ses demandes relatives à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur et à l’indemnisation subséquente de ses préjudices,

• Y ajoutant,

• Déboute les parties de leur demande respective formée en application de l’article 700 du code de la procédure civile,

• Condamne Monsieur D aux dépens.

Arrêt signé par Madame DEL ARCO SALCEDO, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à

laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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