Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 20 février 2013, n° 12/02480

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, ch. soc., 20 févr. 2013, n° 12/02480
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 12/02480
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Sabres, 10 juin 2012
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

CK/KG

ARRET N° 149

R.G : 12/02480

XXX

MAULEON

C/

X

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRÊT DU 20 FEVRIER 2013

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/02480

Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 11 juin 2012 rendu par le Conseil de Prud’hommes des SABLES D’OLONNE.

APPELANT :

XXX

XXX

XXX

XXX

Représenté par Me Antoine PLATEAUX (avocat au barreau de NANTES)

INTIMEE :

Madame Y X

XXX

XXX

Représentée par Me Sylvie ROIRAND (avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON), substituée par Me Marie-Odile FAUCONNEAU (avocat au barreau de POITIERS)

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 08 Janvier 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente

Madame Catherine KAMIANECKI, Conseiller

Monsieur Jean-Paul FUNCK-BRENTANO, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Christine PERNEY

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente, et par Madame Christine PERNEY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Mme X a bénéficié d’un contrat d’avenir signé avec le lycée Savary de Mauléon, à effet du 1er septembre 2006 au 30 juin 2007, renouvelé par deux avenants du 1er juillet 2007 au 30 juin 2008 puis du 1er juillet 2008 au 30 juin 2009. Elle a été affecté comme agent d’administratif à l’école publique du Dauphin bleu.

Le 4 mai 2009 l’inspection académique a informé Mme X qu’elle avait atteint le maximum légal de 36 mois et que son contrat d’avenir ne pouvait pas être renouvelé.

Le 17 juillet 2009 l’inspection académique a informé Mme X qu’elle pourrait bénéficier d’un nouveau contrat d’avenir dès lors qu’elle aurait 50 ans le 4 septembre 2009.

Un nouveau contrat d’avenir a été signé à effet du 15 septembre 2009 au 30 juin 2010 et Mme X a été affecté comme assistante administrative du directeur à l’école publique du Dauphin bleu. Elle a ensuite bénéficié d’un contrat unique d’insertion du 1er juillet 2010 au 30 juin 2011, renouvelé du 1er juillet 2011 au 30 juin 2012.

Le 3 février 2012 Mme X a saisi le conseil de prud’hommes des Sables d’Olonne pour solliciter la requalification du contrat d’avenir en contrat à durée indéterminée et faire reconnaître l’exécution déloyale des contrats de travail par l’employeur avec toutes conséquences de droit sur son indemnisation.

Par jugement du 11 juin 2012 le conseil de prud’hommes des Sables d’Olonne a notamment :

* ordonné la requalification du contrat d’avenir en contrat à durée indéterminée,

* constaté que Mme X était toujours en poste et avait le statut d’agent contractuel de droit public, et renvoyé Mme X devant le tribunal administratif de Nantes seul compétent pour apprécier les conséquences indemnitaires de la requalification,

* condamné le lycée Savary de Mauléon à verser à Mme X la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* débouté Mme X de sa demande de requalification,

* condamné le lycée Savary de Mauléon à payer à Mme X la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* ordonné l’application de l’article 1154 du code civil,

* condamné le lycée Savary de Mauléon aux dépens.

Vu l’appel régulièrement interjeté par le lycée Savary de Mauléon.

Vu les conclusions déposées le 17 décembre 2012 et développées oralement à l’audience de plaidoiries par lesquelles le lycée Savary de Mauléon demande notamment à la cour d’infirmer la décision déférée, de débouter Mme X de l’ensemble de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions déposées le 24 décembre 2012 et développées oralement à l’audience de plaidoiries par lesquelles Mme X sollicite notamment :

* la confirmation de la décision déférée en ce qu’elle a prononcé la requalification du contrat d’avenir et condamné le lycée Savary de Mauléon à lui payer la somme de 2 500 euros pour exécution déloyale du contrat de travail et celle de 1 500 euros au titre de l’article 700 du du code de procédure civile,

* sa réformation pour le surplus la cour devant condamner le lycée Savary de Mauléon à lui payer la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l’article L 1245-2 du code du travail à titre d’indemnité de requalification et d’y ajouter une somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés en cause d’appel, outre l’application de l’article 1154 du code civil.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées et oralement reprises.

SUR CE

Sur la requalification en contrat à durée indéterminée

Les premiers juges ont exactement rappelé la définition du contrat d’avenir et du contrat unique d’insertion, l’évolution législative les concernant et la chronologie des contrats signés par Mme X.

Les dits contrats s’inscrivent dans un parcours d’insertion, destiné à permettre le retour à l’emploi de certaines personnes rencontrant des difficultés particulières de ce chef, le contrat d’avenir instauré par la loi du 18 janvier 2005 ayant été remplacé par le contrat unique d’insertion à compter du 1er janvier 2010.

L’un et l’autre exigent, d’une part, la signature d’une convention individuelle tripartite entre l’employeur, le bénéficiaire et l’autorité administrative dite 'prescripteur', représentant l’Etat, à savoir selon les cas, l’Anpe, puis Pôle emploi, ou le président du conseil général ou le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale (Epci), et, d’autre part la signature d’un contrat de travail entre le bénéficiaire et l’employeur.

L’article L 5134-41 du code du travail, dans sa rédaction applicable au contrat d’avenir, a défini le contrat de travail signé entre l’employeur et le bénéficiaire comme 'un contrat de travail de droit privé, à durée déterminée conclu en application de l’article L 1242-3 du code du travail avec l’un des employeurs mentionnés au 3° de l’article L 5134-38 du code du travail', et a précisé que 'les dispositions de l’article L 1242-13 du code du travail relatives au nombre maximal de renouvellements ne sont pas applicables'.

L’article L 5134-24 du code du travail, dans sa rédaction applicable au contrat unique d’insertion, définit le contrat de travail signé entre l’employeur et le bénéficiaire comme 'un contrat de travail de droit privé, soit à durée déterminée conclu en application de l’article L 1242-3 du code du travail, soit à durée indéterminée’ et ajoute qu’il 'ne peut être conclu pour pourvoir des emplois dans les services de l’état'.

En l’espèce les contrats de travail successifs ont été conclus entre le lycée Savary de Mauléon, employeur, et Mme X, bénéficiaire, et ont expressément prévu des durées déterminées.

Mme X fait valoir plusieurs arguments pour solliciter la requalification du contrat d’avenir en contrat à durée indéterminée, au visa de l’article L 1245-1 du code du travail et notamment en exposant que ses emplois successifs ont excédé la durée maximale légale, à savoir 36 mois, dès lors qu’elle n’avait pas encore atteint 50 ans, hypothèse autorisant le dépassement de cette durée maximale, et que surtout elle n’a pas reçu la formation lui permettant une évolution professionnelle par l’acquisition de nouvelles compétences, contrepartie nécessaire à son emploi selon les prescriptions légales du contrat d’avenir.

Elle produit plusieurs jurisprudences, dont une décision de la cour de cassation, en date du 11 juillet 2012, dont elle déduit par raisonnement a contrario qu’un défaut de formation en cours d’exécution du contrat d’avenir permet la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée.

Toutefois dans les motifs de sa décision en date du 24 octobre 2012, rendue sur question prioritaire de constitutionnalité, le conseil constitutionnel a exclu cette requalification du contrat d’avenir en contrat à durée indéterminée, qui contreviendrait par ses effets au principe d’accès des citoyens aux postes de la fonction publique, ceux ci ne pouvant être pourvus qu’en tenant compte de la capacité, des vertus et des talents au sens de l’article 6 de la déclaration de 1789.

Ainsi, dès lors que le lycée Savary de Mauléon est un établissement public local d’enseignement, donc une personne morale de droit public, et que la requalification du contrat en durée indéterminée permettrait à Mme X de devenir un agent de service public, sa demande ne peut prospérer, quels que soient ses arguments.

En conséquence la décision déférée sera réformée de ce chef et Mme X sera déboutée de sa demande de requalification et des prétentions en découlant.

Sur l’exécution déloyale du contrat de travail

Le tribunal des conflits a, de jurisprudence constante, décidé que :

— le juge judiciaire est compétent pour apprécier les litiges nés de la conclusion, de l’exécution, de la rupture et de l’échéance du contrat de travail conclu entre l’employeur et le bénéficiaire, légalement défini comme un contrat de travail de droit privé,

— le juge judiciaire doit saisir d’une question préjudicielle le juge administratif, seul compétent, de tout litige mettant en jeu la légalité de convention individuelle tripartite,

— le juge administratif est seul compétent pour apprécier les conséquences d’une requalification lorsque le contrat n’entre pas dans le champ des catégories d’emploi, d’employeurs ou de salariés visés par les dispositions légales sur le contrat d’avenir ou le contrat unique d’insertion, ou lorsque la requalification implique non pas la réparation d’un préjudice mais la poursuite d’une relation contractuelle au delà du terme initialement prévu.

Ainsi le juge judiciaire est compétent pour apprécier les conséquences indemnitaires d’une éventuelle exécution déloyale du contrat de travail conclu entre le lycée Savary de Mauléon et Mme X.

Mme X soutient qu’elle n’a pas reçu la formation que tant le contrat d’avenir que le contrat unique d’insertion devaient lui garantir.

Or l’obligation de formation de l’employeur est définie dans un imprimé Cerfa, annexé à la convention individuelle tripartite et en l’espèce il n’a jamais été prévu autre chose qu’une aide à la prise de poste, une adaptation au poste de travail, par formation en interne, sans validation des acquis de l’expérience. Ainsi Mme X qui ne conteste pas avoir bénéficié de ces actions d’accompagnement et de formation fournies par l’employeur, ne peut considérer qu’elles étaient insuffisantes, dès lors qu’elles correspondaient aux engagements de l’employeur qui n’était pas tenu d’aller au delà.

Mme X soutient également qu’elle ne pouvait bénéficier d’un contrat d’avenir au delà d’une durée de 36 mois. Toutefois le contrat d’avenir ayant pris effet au 15 septembre 2009 était postérieur au 50e anniversaire de Mme X, née le XXX, ce qui ne caractérise pas un manquement de l’employeur, la durée maximale pouvant être dépassée pour tout bénéficiaire âgé de plus de 50 ans.

Mme X ne peut considérer que ce contrat est un renouvellement du contrat initial en date du 1er septembre 2006 excluant de considérer qu’elle était une bénéficiaire 'entrant dans le dispositif', dès lors que ce contrat initial a été poursuivi sans interruption par l’effet de deux avenants successifs, jusqu’au 30 juin 2009 et qu’un nouveau contrat a ensuite été conclu après une interruption. De surcroît elle a alors été recruté non plus comme simple agent administratif mais comme assistante administrative du directeur de l’école du Dauphin bleu.

Mme X ne peut pas plus invoquer un préjudice dès lors que le contrat d’avenir à effet au 15 septembre 2009 lui a permis de bénéficier d’un emploi.

En conséquence elle sera déboutée de sa demande d’indemnisation et la décision déférée sera réformée de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Mme X qui succombe sera condamnée aux dépens.

Nonobstant l’issue de l’appel, l’équité et les circonstances économiques commandent de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Réforme la décision déférée en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

Déboute Mme X de l’ensemble de ses demandes ;

Y ajoutant ;

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions ;

Condamne Mme X aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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