Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 16 décembre 2020, n° 19/01763

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, ch. soc., 16 déc. 2020, n° 19/01763
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 19/01763
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Épernay, 10 juillet 2019, N° F18/00074
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Arrêt n°

du 16/12/2020

N° RG 19/01763

OB/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 16 décembre 2020

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 11 juillet 2019 par le Conseil de Prud’hommes d’EPERNAY, section Industrie (n° F 18/00074)

SAS CALDERYS FRANCE

[…]

[…]

Représentée par la SCP RAHOLA DELVAL CREUSAT LEFEVRE, avocats au barreau de REIMS et par la SELAFA CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE, avocats au barreau des HAUTS-DE-SEINE

INTIMÉ :

Monsieur Y X

[…]

[…]

Représenté par la SELARL DUTERME-MOITTIE-ROLLAND-PICHOIR, avocats au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 4 novembre 2020, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 16 décembre 2020.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Christine ROBERT-WARNET, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Monsieur Olivier BECUWE, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSE DU LITIGE :

Engagé, le 29 juin 1987, à durée indéterminée, par la société Calderys (la société), en qualité de manutentionnaire, devenu agent technique, M. X, placé en arrêt de travail pour maladie, à compter du mois de mars 2013, en raison de douleurs dorsales, a, le 19 juin 2014, fait une demande de reconnaissance de maladie professionnelle au titre du tableau n° 98.

Sa demande ayant fait l’objet d’un refus, selon décision du 23 décembre 2014 confirmée le 9 avril 2015, le salarié a saisi d’un recours, le 15 mai 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Marne.

Déclaré inapte par le médecin du travail le 1er septembre 2015, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement selon lettre du 22 octobre 2015.

Par jugement du 31 janvier 2018, la juridiction de la sécurité sociale a infirmé la décision du 9 avril 2015 et renvoyé l’intéressé devant la caisse primaire d’assurance maladie pour la liquidation de ses droits.

Par requête du 23 juillet 2018, M. X a saisi le conseil de prud’hommes d’Epernay de demandes au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Rejetant la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale de l’article L.1471-1 du code du travail en sa version alors applicable, la juridiction prud’homale a, par jugement du 11 juillet 2019, condamné l’employeur du chef du licenciement.

Par déclaration du 2 août 2019, la société a fait appel de ces chefs de dispositif.

Par des conclusions notifiées le 25 septembre 2020, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des moyens, elle sollicite l’infirmation du jugement, soulève, à titre principal, la prescription et réclame, à titre subsidiaire, le rejet des demandes.

Par des conclusions d’appel incident en réplique notifiées le 1er octobre 2020, auxquelles il est également renvoyé pour l’exposé des moyens, M. X demande la confirmation du jugement sur le chef de la prescription ainsi que sur la condamnation au titre du reliquat de l’indemnité spéciale de licenciement.

Il en sollicite l’infirmation sur le quantum des dommages-intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

MOTIVATION :

L’article L.1471-1 du code du travail, en sa version alors applicable au litige, prévoit que toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

En l’espèce, le licenciement est du 22 octobre 2015 et a été contesté devant le conseil de prud’hommes le 23 juillet 2018, soit au-delà du délai de deux ans.

Pour écarter le jeu de cette prescription, le conseil de prud’hommes, dont le salarié s’approprie les motifs, a retenu, d’une part, la suspension de la prescription, d’autre part, son interruption.

Sur la suspension, il a énoncé que M. X avait été 'dans l’impossibilité d’agir, dans l’attente de l’issue de son recours auprès du TASS'.

Sur l’interruption, il a, par ailleurs, estimé que 'la corrélation’ entre les procédures, quoique portées successivement devant deux juridictions distinctes, était 'avérée', la procédure initiée le 15 mai 2015 ayant eu pour objet de faire reconnaître le caractère professionnel de la maladie qui a entraîné le licenciement contesté par la procédure prud’homale engagée le 23 juillet 2018.

Le jugement attaqué en déduit l’extension à la seconde procédure, qui est prud’homale, de l’interruption de la prescription qui serait attachée à la première, qui a été menée en matière de sécurité sociale.

Toutefois, l’action en reconnaissance de la maladie professionnelle a été dirigée contre l’organisme de sécurité sociale et celle en contestation du licenciement pour inaptitude l’a été contre l’employeur.

Ces deux actions, déjà différentes par leurs parties, l’apparaissent également par leur objet.

La première a pour objet l’ouverture de droits sociaux au titre d’une maladie professionnelle et la seconde vise, par une action indemnitaire, à faire sanctionner un licenciement prononcé pour inaptitude.

Il résulte d’ailleurs des articles L.1226-10 et suivants du code du travail que la reconnaissance par les juges du fond de l’origine professionnelle de l’inaptitude du salarié et de la connaissance par l’employeur de cette origine n’est pas subordonnée à la prise en charge par la caisse de sécurité sociale de l’affection du salarié au titre des risques professionnels.

L’autonomie entre les deux procédures étant pleinement consacrée, l’impossibilité d’agir a été à tort retenue par le conseil de prud’hommes.

Quant à l’interruption de la prescription, elle apparaît soumise à de strictes conditions.

En vertu de l’article 2241 du code civil, l’interruption de la prescription ne peut s’étendre d’une action à l’autre.

C’est seulement lorsque les deux actions, au cours d’une même instance, concernent l’exécution du même contrat de travail ou tendent, bien qu’ayant une cause distincte et n’étant pas dirigées contre la même partie, à un seul et même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première, que peut jouer le mécanisme de l’interruption de la prescription entre deux actions.

Or, les actions intentées respectivement les 15 mai 2015 et 23 juillet 2018 ne tendaient pas au même but en raison de leur objet propre tel qu’exposé précédemment.

Il s’ensuit que la prescription biennale a développé ses pleins effets et que la saisine du conseil de prud’hommes a été tardive.

Le jugement sera infirmé.

Il ne serait pas équitable de condamner M. X, qui sera débouté de ce chef ayant succombé au fond, à payer à la société une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour d’appel, statuant publiquement, contradictoirement, et après en avoir délibéré conformément à la loi :

— infirme le jugement rendu entre les parties, le 11 juillet 2019, par le conseil de prud’hommes d’Epernay ;

— juge que l’action de M. X en contestation de son licenciement est irrecevable comme prescrite ;

— rejette les demandes au titre des frais irrépétibles ;

— condamne M. X aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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