Cour d'appel de Rennes, 2e chambre, 17 novembre 2023, n° 21/00986

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 2e ch., 17 nov. 2023, n° 21/00986
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 21/00986
Importance : Inédit
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 25 novembre 2023
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Texte intégral

2ème Chambre

ARRÊT N°523

N° RG 21/00986

N° Portalis DBVL-V-B7F-RLD7

(2)

M. [Y] [D]

Mme [N] [M] épouse [D]

C/

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE INVEST IMMO)

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

— Me NOEL

— Me SIROT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Ludivine BABIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 05 Septembre 2023, tenue en double rapporteur sans opposition des parties, par Monsieur David JOBARD, Président de Chambre et Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 17 Novembre 2023, après prorogations, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTS :

Monsieur [Y] [D]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Madame [N] [M] épouse [D]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Tous deux représentés par Me Tangi NOEL, postulant, avocat au barreau de RENNES

Tous deux représentés par Me Laetitia LAMY, plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE INVEST IMMO

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Pierre SIROT de la SELARL RACINE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

EXPOSE DU LITIGE :

Suivant Selon offre de prêt établie le 7 juillet 2008 acceptée le 19 juillet 2008, la S.A. BNP Paribas Personal Finance a consenti à M. et Mme [Y] [D] un prêt de la somme de 1 070 343 euros remboursable en 240 mensualités au taux conventionnel de 4,85 % (TEG de 4,95 %) destiné à financer l’acquisition de leur future résidence principale pour le prix de 570 000 euros outre les frais, ainsi que pour racheter huit prêts consentis par le CIO et la société Cetelem.

Selon acte dressé le 23 juillet 2008 les époux [D] ont fait l’acquisition d’un immobilier situé aux Sorinières avec le financement obtenu.

Les conventions stipulaient qu’une somme de 532 000 euros devait être remboursée par la vente de l’ancien domicile des époux [D] et d’un immeuble de rapport situés à [Localité 5].

La banque a perçu la somme de 152 000 euros de la vente de l’immeuble de rapport.

Suite au non paiement d’échéances du crédit et après mise en demeure du 14 juin 2010, la S.A. BNP Paribas Personal Finance s’est prévalue de la déchéance du terme et a fait délivrer un commandement aux fins de saisie immobilière sur la maison située à [Localité 5] le 18 octobre 2010.

Cités devant le juge de l’exécution le 13 janvier 2011, les époux [D] ont notamment invoqué la responsabilité de la banque dans l’octroi du prêt.

Par jugement d’orientation du 9 janvier 2015, le juge de l’exécution a déclaré irrecevables des exceptions de nullité et débouté les époux [D] de leurs prétentions, quant à la suppression de l’indemnité conventionnelle.

La cour d’appel de Rennes a confirmé ce jugement par arrêt du 12 janvier 2016. Selon arrêt rectificatif du 25 avril 2017, la cour a infirmé partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau déclaré irrecevable la demande d’indemnisation formée par les époux [D] contre la société BNP Paribas Personal Finance, confirmant pour le reste le jugement déféré.

Le pourvoi formé par les époux [D] a été rejeté par arrêt de la cour de cassation du 14 octobre 2016.

La société BNP Paribas Personal Finance a perçu la somme de 253 625,84 euros sur le prix d’adjudication.

Se plaignant de manquements de la banque à ses obligations, M. et Mme [Y] [D] ont fait assigner la S.A. BNP Paribas Personal Finance devant le tribunal de grande instance de NANTES par acte d’huissier du 17 novembre 2017 pour solliciter, au visa de l’article 1147 devenu 1217 et 1231-1 du code civil, la condamnation du prêteur à des dommages-intérêts.

Par jugement du 14 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Nantes a :

Déclaré la demande de M. et Mme [Y] [D] irrecevable par l’effet de la prescription,

Condamné in solidum M. et Mme [Y] [D] à payer à la S.A. BNP Paribas Personal Finance une somme de 7 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamné in solidum M. et Mme [Y] [D] aux dépens, avec autorisation de recouvrement direct donné dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

M. et Mme [D] sont appelants du jugement et par dernières conclusions notifiées le 6 juin 2023, ils demandent de :

— Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nantes en première instance, le 14 janvier 2021

En conséquence :

— juger recevable l’action formée par M. [Y] [D] et Mme [N] [D] contre BNP Personal Finance au titre du contrat de prêt conclu le 23 juillet 2008 ;

Statuant à nouveau :

— Juger que la société BNP Paribas Personal Finance a engagé sa responsabilité à raison du manquement à son devoir de mise en garde, et de sa carence dans l’information transmise à ses clients ;

En conséquence :

— Condamner la société BNP Paribas Personal Finance à indemniser les époux [D] du préjudice découlant de la perte de chance, à hauteur de la somme de 1 309 544,08 euros (à parfaire, ce montant devant être actualisé) ;

— Compenser le montant de cette indemnisation avec le montant de la créance détenue par BNP Personal Finance à l’encontre des Epoux [D] au titre du contrat de prêt conclu le 23 juillet 2008 ;

— Condamner BNP Personal Finance au paiement d’un montant de 10 000 euros au titre de l’indemnisation du préjudice moral subi par M. [Y] [D] et Mme [N] [D] consécutif aux fautes commises à leur égard par BNP Personal Finance ;

En tout état de cause :

— Juger que BNP Paribas Personal Finance est défaillante dans la communication du taux et de la durée de période ;

En conséquence, prononcer la déchéance des intérêts au taux contractuel du contrat de prêt conclu le 23 juillet 2008 ;

— Juger que BNP Paribas Personal Finance n’a pas inclus le montant de l’assurance dans le calcul du TEG figurant dans l’acte de vente contenant prêt conclu le 23 juillet 2008

— En conséquence, juger que le taux d’intérêt légal doit être substitué au taux conventionnel et enjoindre à la société BNP Paribas Personal Finance de produire un décompte rectifié de son prêt ;

— Débouter BNP Paribas Personal Finance de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

— Ordonner l’exécution provisoire de l’arrêt à intervenir ;

— Condamner BNP Paribas Personal Finance au paiement à M. [Y] [D] et Mme [N] [D] de la somme de 7 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 20 juin 2023, la société BNP Paribas Personal Finance demande de :

Déclarer BNP Paribas Personal Finance recevable bien fondée en ses conclusions, fins et prétention,

Débouter M. [Y] [D] et Mme [N] [D], née [M], de leur appel formé à l’encontre du jugement rendu le 14 janvier 2021 par le Tribunal judiciaire de Nantes

Y faisant droit

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

En tout état de cause,

Débouter M. [Y] [D] et Mme [N] [D], née [M], de l’intégralité de leurs demandes, fins et prétentions,

Condamner in solidum M. [Y] [D] et Mme [N] [D], née [M], à verser à la BNP Paribas Personal Finance la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

Les Condamner in solidum aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du Code de Procédure Civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions visées.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 22 juin 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la prescription :

Les époux [D] font grief au jugement d’avoir déclaré leur action indemnitaire irrecevable comme étant prescrite pour avoir été engagée plus de cinq années après la conclusion du contrat le 23 juillet 2008 date de régularisation de l’acte authentique.

Ils font valoir que le délai de prescription de l’article L. 110-4 du code de commerce a été interrompu par leur demande formalisée devant le juge de l’exécution par conclusions du 25 septembre 2012 à l’occasion de la procédure de saisie-immobilière engagée par la banque.

Ils font grief au jugement d’avoir retenu que l’interruption de prescription de leur demande ainsi formée par conclusions était non avenue du fait du rejet de leur demande par arrêt rendu par la cour d’appel du 12 janvier 2016 devenu définitif par suite de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 16 mars 2017. Ils soutiennent que c’est à tort que le tribunal a estimé que la demande avait été rejetée au sens de l’article 2243 du code civil alors que la cour d’appel dans son arrêt du 12 janvier 2016 a simplement constaté que la demande indemnitaire qu’ils avaient formée n’était pas de la compétence du juge de l’exécution mais de celle du juge du fond. Ils soutiennent qu’ils sont ainsi fondés à se prévaloir par application des dispositions de l’article 2241 du code civil de l’effet interruptif résultant de la saisie d’une juridiction incompétente, le défaut de pouvoir du juge de l’exécution ne constituant pas une fin de non recevoir au sens de l’article 122 du code de procédure civile.

Mais c’est à tort que les époux [D] soutiennent que le défaut de pouvoir juridictionnel d’un juge constitue une simple exception d’incompétence alors qu’il constitue une fin de non recevoir (Cassation civile 2ème 15 avril 2021) sur laquelle la cour s’est définitivement prononcée par son arrêt du 12 janvier 2016.

C’est en conséquence par d’exacts motifs que le tribunal a retenu que la demande avait été rejetée au sens l’article 2243 du code civil et que l’effet interruptif attaché à leurs conclusions notifiées le 25 septembre 2012 à l’occasion de la procédure engagée devant le juge de l’exécution était non avenu en suite de l’arrêt rendu par la cour de cassation le 16 mars 2017.

M. et Mme [D] demandent de voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts du prêteur faute pour lui de justifier de leur avoir communiquer le taux et la durée de la période pour n’indiquer que le taux est calculé annuellement sans préciser s’il est calculé sur une base de 360 ou 365 jours ; que par ailleurs, le montant de l’assurance n’est pas inclus dans le calcul du TEG.

En application de l’article L. 110-4 du code de commerce, l’action en déchéance du droit du prêteur aux intérêts se prescrit par cinq ans à compter du jour où l’emprunteur a connu ou aurait dû connaître l’inexactitude du TEG.

Il convient de relever que les irrégularités dont se prévalent les époux [D] étaient apparentes dès la conclusion du contrat le 23 juillet 2008 en ce qu’il était précisé sur l’offre que le TEG était calculé hors frais d’acte et assurance facultative extérieure et que l’indication d’un calcul sur une base de 360 ou 365 jours n’est pas précisé. S’agissant du taux de période il est précisé sur l’offre comme étant mensuel est de 0,40 %. Il en résulte que leurs demandes formées par assignation du 17 novembre 2017 soit plus de cinq après la conclusion du contrat sont irrecevables comme étant prescrites.

De manière surabondante, il sera rappelé qu’ainsi que le fait valoir le prêteur, que la déchéance du droit aux intérêts du prêteur suppose que les emprunteurs établissent que les irrégularités qu’ils invoquent soient à l’origine d’une erreur en leur défaveur excédant la marge d’exactitude de la décimale fixée par l’article R. 313-1 du code de la consommation et qu’au cas d’espèce, les époux [D] ne fournissent aucun élément de nature à faire une telle démonstration.

S’agissant de la demande indemnitaire fondée sur un manquement de la banque à son obligation de mettre en garde sur le risque d’endettement excessif né de l’octroi d’un prêt et sur un choix inadapté du financement et des conditions d’assurance, le délai de prescription de l’action en indemnisation d’un tel dommage commence à courir, non à la date de conclusion du contrat de prêt, mais à la date d’exigibilité des sommes au paiement desquelles les emprunteurs ne sont pas en mesure de faire face en suite de la déchéance du terme.

Il en résulte que le point de départ du délai de prescription ne court pas à compter de la date de conclusion du contrat mais à compter de la date du commandement de payer aux fins de saisie immobilière du 18 octobre 2010 en suite de la vaine mise en demeure précédemment effectuée.

Par suite du caractère non avenu de l’interruption de prescription attaché aux conclusions du 25 septembre 2012, il en résulte que le délai de prescription de cinq ans était acquis à la date de l’assignation du 17 novembre 2017.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a déclaré l’action des époux [D] prescrite ainsi qu’en ses autres dispositions accessoires.

M. et Mme [D] sui succombent, seront condamnés aux dépens d’appel et à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Nantes.

Y ajoutant

Condamne in solidum M. [Y] [D] et Mme [N] [M] épouse [D] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum M. [Y] [D] et Mme [N] [M] épouse [D] aux dépens.

Accorde le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

Rejette toutes autres demandes.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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