Cour d'appel de Rouen, Ch. civile et commerciale, 20 décembre 2012, n° 12/01573

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Chronologie de l’affaire

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Stéphane Astier · Haas avocats · 9 septembre 2013

Dans un arrêt du 20 décembre 2012 (Cf. CA Rouen – n°12/01573), la Cour d'Appel de Rouen rappelle les règles applicables en matière de rupture des contrats informatiques portant sur l'achat et l'installation d'un progiciel. L'occasion pour les seconds juges de motiver l'octroi de dommages et intérêts accompagnant cette rupture. Dans cette affaire, une Société X avait fait appel à un prestataire informatique pour l'achat et l'installation d'un progiciel permettant l'informatisation de la gestion d'une activité de traction portuaire. Le contrat prévoyait également des prestations de …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ch. civ. et com., 20 déc. 2012, n° 12/01573
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 12/01573
Décision précédente : Tribunal de commerce de Rouen, 11 mars 2012
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

R.G : 12/01573

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRET DU 20 DECEMBRE 2012

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL DE COMMERCE DE ROUEN du 12 Mars 2012

APPELANTE :

SARL FIDAC NORMANDIE exerçant sous le nom commercial TSLT

XXX

XXX

XXX

représentée par Me Caroline SCOLAN, avocat au barreau de ROUEN, postulant

assistée de Me Florent DUGARD, substitué par Me David ALVES DA COSTA, avocats au barreau de ROUEN, plaidant

INTIMEE :

SA ACTIV FRANCE venant aux droits de la société GTI

XXX

XXX

représentée et assistée par Me Claude AUNAY, avocat au barreau du HAVRE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 06 Novembre 2012 sans opposition des avocats devant Monsieur FARINA, Président, en présence de Madame BERTOUX, Conseiller,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur FARINA, Président

Madame PRUDHOMME, Conseiller

Madame BERTOUX, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme WERNER, Greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 06 Novembre 2012, où Monsieur le Président FARINA a été entendu en son rapport oral et l’affaire mise en délibéré au 20 Décembre 2012

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 20 Décembre 2012, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Monsieur FARINA, Président et par Mme WERNER, Greffier

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 13 mars 2006 la société Fidac Normandie a accepté le devis établi par la société Activ France (venant aux droits de la société G.T.I ) portant sur les principales prestations suivantes :

— achat et installation du logiciel Wintruck , destiné à informatiser la gestion de son activité « traction portuaire »,

— formation du personnel.

La société Activ France a établi à ce titre deux factures :

— l’une en date du 17 mai 2006 d’un montant de 2592 € hors taxes, pour la formation du personnel

— l’autre du 29 juin 2006 d’un montant de 8247 € hors taxes pour les autres prestations.

Se plaignant de dysfonctionnements du système informatique installé, la société Fidac Normandie a refusé de régler le solde de prix d’un montant de 2267 €, et a obtenu en référé, le 22 octobre 2007, l’organisation d’une expertise.

L’expert a déposé son rapport le 17 janvier 2010.

Le 3 mars 2011 la société Fidac Normandie a assigné la société Activ France « en résiliation » de contrat et en paiement des sommes suivantes :

—  8421 € en remboursement de prix,

—  7800 € au titre de prestations extérieures de dépannage,

—  94'572 € au titre de frais de personnel exposés pour régler les problèmes rencontrés de 2007 à 2009 dans l’utilisation du logiciel.

Par jugement du 12 mars 2012 le tribunal de commerce de Rouen a rejeté ces demandes au motif que la société Fidac Normandie n’avait pas formulé d’observations dans le délai prévu par une clause insérée dans les bons de livraison.

Le 2 avril 2012 la société Fidac Normandie a interjeté appel du jugement.

Par écritures du 15 octobre 2012, auxquelles il convient de se référer pour un ample exposé des prétentions et des moyens, la société Activ France soulève :

— la caducité de l’appel, faute de signification de la déclaration d’appel dans le délai imparti par l’article 902 du code de procédure civile,

— et l’irrecevabilité des pièces, celles ci ayant été communiquées après le dépôt de conclusions.

Subsidiairement, invoquant la clause susvisée, elle conclut à la confirmation du jugement déféré et reconventionnellement sollicite le paiement des sommes suivantes – 2247,64 € pour solde de prix, ce avec intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2006,

—  5000 € pour procédure abusive,

— et 5980 € pour frais hors dépens.

Par écritures du 17 octobre 2012 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, la société Fidac Normandie conclut au rejet des exceptions de procédure aux motifs principalement :

— que seul le conseiller la mise en état aurait pu en connaître,

— et subsidiairement :

— s’agissant d’une part de la caducité : qu’en l’absence d’avis l’informant de son obligation d’assigner l’intimée, le délai prévu par l’article 902 du code de procédure civile n’a pas couru,

— et s’agissant, d’autre part de l’irrecevabilité des pièces: qu’aucune sanction ne s’attache au défaut de simultanéité de la notification des conclusions et des pièces.

Contestant à la fois le caractère contractuel de la clause susvisée, la validité de celle-ci, ainsi que le sens et la portée qu’en donne la société Activ France,elle conclut à l’infirmation du jugement déféré.

Elle demande à la Cour :

— de prononcer en application de l’article 1184 du Code civil, la résolution du contrat,

— de condamner la société Activ France à payer les sommes sollicitées en première instance ainsi que la somme de 5000 € pour frais hors dépens.

— et de rejeter les demandes reconventionnelles.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 25 octobre 2012.

CELA ÉTANT EXPOSÉ

1) Sur les exceptions de procédure

Attendu que la société Activ France invoque :

— d’une part, la caducité de l’appel, faute de signification de la déclaration d’appel dans le mois de l’avis prévu par l’article 902 du code de procédure civile,

— et d’autre part, au visa de l’article 906 du même code, l’irrecevabilité des pièces notifiées par la société Fidac Normandie postérieurement à la notification des conclusions ;

Mais attendu que l’article 914 du code de procédure civile dispose que le conseiller de la mise en état est seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure ;

Que celles-ci ne peuvent en conséquence être utilement soumises à l’appréciation de la cour, après le prononcé de l’ordonnance de clôture ;

Attendu au surplus que, s’agissant de l’exception de caducité, les fiches du RPVA tenues pour le dossier, ne mentionnent pas d’envoi de l’avis prévu par l’article 902 du code de procédure civile pour faire courir le délai de caducité ;

Que par ailleurs, l’article 906 du code de procédure civile ne prévoit pas expressément de sanction en cas de défaut de simultanéité de notification des conclusions et des pièces ; qu’en outre il n’est pas établi que l’irrégularité invoquée ait pu faire grief à la société Activ France à laquelle la société Fidac Normandie a signifié de nouveau, le 7 août 2012, ses conclusions et ses pièces ;

2) Sur l’exception tirée de l’application de la clause figurant sur les bons de livraison

Attendu qu’invoquant les conclusions de l’expert judiciaire relatives au mauvais fonctionnement du système informatique, la société Fidac Normandie fait valoir que la société Activ France n’a pas satisfait à son engagement ; qu’elle demande en conséquence, sur le fondement de l’article 1184 du Code civil, la résolution du contrat, la restitution du prix, et la réparation des préjudices allégués ;

Attendu que pour s’opposer à ces demandes la société Activ France soutient qu’en application d’une stipulation figurant sur les bons de livraison des 4 et 19 avril 2006, sa responsabilité ne peut pas être engagée ;

Attendu que selon la société Fidac Normandie cette stipulation ne présente pas de caractère contractuel :

— d’une part parce que les bons de livraison n’ont pas été signés par elle , mais par un préposé dont la mission se limitait à justifier avant le départ du technicien, que la prestation avait été accomplie,

— et d’autre part parce que les bons de livraison sont distincts et postérieurs au contrat lui même ;

Qu’elle soutient par ailleurs que la clause invoquée ne contient aucune renonciation au droit d’agir en résolution et n’exclut donc pas une telle action ;

Attendu sur le caractère contractuel de la clause, que sur les bons de livraison figurent à la fois la signature d’un préposé de l’entreprise et le cachet de celle-ci ; que la société Fidac Normandie doit en conséquence être considérée comme ayant accepté les dispositions prévues par les bons de livraison et en particulier celles de la clause considérée ;

Attendu concernant le sens et la portée de la clause, qu’il y a lieu de rechercher dans les termes employés ainsi que dans les circonstances de fait,l’intention des parties ;

Attendu que la stipulation contractuelle invoquée est ainsi rédigée :

« Le logiciel a été mis en place ce jour. À compter de cet instant le client s’engage à procéder aux tests qu’il jugera nécessaire pour certifier le bon fonctionnement du logiciel. Pour ce faire il dispose d’un délai de 15 jours. Durant cette période de tests, toute intervention de G.T.I pour anomalies de fonctionnement se fera à titre gracieux.

Au-delà de cette date, sans nouvelle du client et sauf vice de forme, le logiciel sera réputé fonctionner correctement, être conforme , soit à l’analyse, soit à l’adéquation logicielle, si ces études ont été réalisées. En conséquence toute modification intervenant après la date de fin de tests entraînera un complément de facturation de la part de G.T.I. »

Que cette clause prévoit ainsi :

— une période test de 15 jours au cours de laquelle, en cas d’anomalie de fonctionnement, l’intervention de la société informatique se ferait à titre gracieux,

— et, en l’absence d’observations dans ce délai, le droit pour la société informatique de facturer les modifications demandées ;

Qu’elle a donc pour seul objet la facturation de 'modifications’ intervenues après une période de tests achevée sans observations de la part du client ;

Que selon les termes employés, la facturation des 'modifications’ ultérieures repose sur une présomption de bon fonctionnement du logiciel, celui-ci étant « réputé fonctionner correctement, être conforme soit à l’analyse, soit à l’adéquation logicielle si ces études ont été réalisées » ;

Qu’il s’agit d’une présomption simple de bon fonctionnement qui, en elle-même, n’exclut pas le droit du client de rapporter la preuve contraire ;

Qu’elle ne porte en effet expressément ni sur la validité du contrat ni sur la responsabilité contractuelle en cas de dysfonctionnement du système informatique mis en place ; qu’elle ne prévoit pas de renonciation par le client à son droit d’engager une action en résolution, et en réparation de préjudice ;

Qu’elle ne s’analyse donc pas en une clause exonératoire de responsabilité ;

Attendu au surplus, que la société Fidac Normandie fait valoir à juste titre que si elle devait s’analyser en une clause exonératoire de responsabilité, la stipulation invoquée devrait être réputée non écrite ; qu’elle aurait alors en effet pour objet de dispenser la société informatique de répondre du manquement à l’obligation essentielle, prise par elle, de livrer un système exempt de défauts ; qu’il convient toutefois de préciser que la sanction serait alors encourue par application de l’article 1131 du Code civil relatif à l’absence de cause dans les obligations (cf. com : 22 août 996 ; com: 3 mai 2006 ) et non pas des dispositions de l’article L. 131 – 2 du code de la consommation invoquées ;


Attendu que la société Activ France pourrait en ce cas d’autant moins s’exonérer de l’obligation essentielle susvisée, qu’il résulte du rapport d’expertise que le délai de 15 jours prévu par la clause concernée présentait un caractère théorique, l’appréciation par le client de la pertinence du système installé nécessitant un délai plus long (cf. pages 16, 21, et 23 du rapport d’expertise) ;

Attendu que la société Fidac Normandie n’ayant pas renoncé à se prévaloir des dispositions de l’article 1184 du Code civil , l’acceptation de la clause invoquée ne l’a pas privée du droit de demander la résiliation pour manquement du cocontractant à ses obligations,

Attendu que, selon les dispositions de l’article 1184 du Code civil :

«La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l’une des parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas le contrat n’est point résolu de plein droit, la partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté a le choix de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages intérêts » ;

Attendu que pour l’application de ce texte il convient de rechercher si les manquements allégués sont établis et le cas échéant s’ils sont d’une gravité suffisante pour entraîner la résolution du contrat ;

Attendu que la société Activ France soutient avoir respecté les différentes étapes prévues dans la phase de développement progiciel, jusqu’à la livraison de la recette finale et avoir ensuite assuré la formation du personnel ;

Mais attendu que l’expert judiciaire a constaté plusieurs dysfonctionnements du système informatique ; qu’il note en particulier des anomalies dans le traitement quotidien : affichages incohérents, éditions de factures imparfaites, transmission d’informations déséquilibrées vers le progiciel de comptabilité, états statistiques erronés ;

Qu’il impute ces défauts :

— à l’absence de véritable étude préalable d’adéquation, alors que s’agissant d’un progiciel, la mise en place du système informatique était complexe ;

— à l’absence de recette définitive pourtant prévue aux conditions indiquées dans la proposition initiale ;

— et donc à un manquement aux règles de l’art en matière d’implantation de progiciel, en contradiction avec la proposition énoncée par le fournisseur ;

Qu’il conclut à une impossibilité pour la société Fidac Normandie d’utiliser le système informatique pour la gestion de son activité « traction portuaire » ;

Attendu que ces conclusions claires, précises et sérieusement motivées établissent le manquement de la société Activ France à son obligation de livrer un système informatique adapté aux besoins spécifiés lors de la formation du contrat ;

Que par leur nature et leurs conséquences les défauts relevés présentent un degré de gravité suffisant pour justifier, par application de l’article 1184 du Code civil, la résolution du contrat ; que celle-ci sera donc prononcée aux torts de la société ETC;

3) Sur les demandes en restitution de prix et en paiement de dommages-intérêts

Attendu que la société Fidac Normandie sollicite, outre la résolution du contrat le paiement :

— de la somme de 8421 € soit en restitution de prix, soit à titre d’indemnité destinée à compenser l’absence de contrepartie à celui-ci,

— une indemnité de 7800 € au titre de dépenses afférentes aux prestations de tiers intervenues pour remédier aux problèmes rencontrés,

— et d’une indemnité de 94'572 €, en compensation du temps de travail que le personnel de l’entreprise a consacré à remédier aux problèmes rencontrés dans l’utilisation du logiciel ;

Attendu que la société Activ France fait valoir que le montant des dommages-intérêts sollicité est disproportionné par rapport au montant du marché ;

Qu’elle invoque les dispositions de l’article 1150 du Code civil selon lesquelles : «le débiteur n’est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu’on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n’est point par son dol que l’obligation n’a point été exécutée » ;

Mais attendu, en l’espèce, que la convention avait pour objet la fourniture et l’installation d’un système informatique efficace, que la survenance d’éventuels dysfonctionnements et les conséquences financières en résultant, constituent des dommages prévisibles au sens de l’article 1150 du Code civil ;

Attendu sur la demande relative au prix versé, que la société Fidac Normandie fait valoir qu’elle a payé sans contrepartie la somme de 8421 € ;

Qu’elle demande soit la restitution de cette somme, soit une indemnité de ce montant;

Attendu que l’expert indique à ce sujet (cf : page 22), que s’il est théoriquement possible de corriger les anomalies affectant l’installation informatique livrée, pratiquement cela entraînera un coût supérieur au coût initial de l’opération ;

Attendu que la somme de 8421 € ayant été versée sans contrepartie utile, la société Fidac Normandie est fondée à demander à la société Activ France, responsable de l’inexécution du contrat, le paiement d’une indemnité d’un montant équivalent ;

Attendu sur le second poste de préjudice, qu’il résulte des conclusions de l’expert qu’en raison des anomalies affectant le système informatique, la société Fidac Normandie a dû faire intervenir des prestataires extérieurs; qu’elle a payé à ce titre la somme de 8421 € admise par l’expert ; que s’agissant d’une conséquence de l’inexécution du contrat elle est fondée à demander l’indemnisation de ce chef de préjudice ;

Attendu sur les frais de personnel , que la société Fidac Normandie fait valoir qu’au cours des années 2007, 2008 et 2009, les anomalies du système informatique ont contraint ses employés à consacrer une partie de leur temps de travail à régler les problèmes rencontrés dans l’utilisation du logiciel ; que pour chacune de ces années, elle évalue à 40 % de la masse salariale , la rémunération du temps consacré à cette tâche ; qu’elle sollicite à ce titre une indemnité de 94'572 € ;

Attendu que l’expert judiciaire note que les anomalies relevées ont perturbé le fonctionnement de l’application informatique ; qu’il précise qu’elles ont imposé aux utilisateurs un travail supplémentaire notamment, de vérification des saisies informatiques et de rétablissement des écritures ;

Qu’il décrit les difficultés auxquelles les employés de la société Fidac Normandie ont été confrontés ( cf ci-dessus : affichages incohérents, éditions de factures imparfaites, transmission de données déséquilibrées dans le logiciel…) ;

Qu’il note toutefois que même en l’absence de désordres, l’implantation d’une nouvelle solution logicielle dans une entreprise cause toujours un surcoût de travail pour les utilisateurs : réalisation de tests du nouveau système, maintien de l’ancien système en parallèle du nouveau pendant une certaine période ;

Attendu par ailleurs que, selon les pièces produites par la société Fidac Normandie (pièces 17 et 38) le préjudice allégué porte sur l’accomplissement d’ heures supplémentaire en 2007, 2008 , et 2009 par les salariés des services « exploitation » et « comptabilité », outre, à compter du 1er juillet 2009, par une autre personne embauchée pour libérer ( à raison de 50 % ), du temps pour « l’exploitation » ;

Que l’expert note à cet égard (page 18) que « deux des trois salariés concernés » par la situation jusqu’à la fin de l’année 2009 « étaient déjà employés par la société Fidac Normandie avant la mise en place de la solution litigieuse », et que« le troisième salarié qui aurait été embauché (uniquement '), à cause de la charge de travail trop importante de la personne responsable de l’exploitation », aurait cependant été lui-même affecté, à compter du 1er juillet 2009, à 50 % de son temps « sur cette dernière tâche » ; qu’il relève en outre que « d’autres paramètres peuvent justifier en tout ou partie l’embauche de salariés supplémentaires, telles que par exemple l’augmentation d’activité de la société » ;

Attendu par ailleurs, que le système informatique a été livré et installé au mois d’août 2006 ;

Qu’à compter du mois septembre 2006 (cf : procès-verbaux de constat des 22 et 26 septembre 2006) la société Fidac Normandie s’est plainte de problèmes de fonctionnement de l’installation ; qu’elle a ensuite été confrontée à la persistance d’anomalies d’une importance telle que, selon l’expert, elles rendaient le système inutilisable ; qu’elle indique s’être servie de l’installation informatique, dans les conditions difficiles susvisées, jusqu’à la fin de l’année 2009 ;

Que dans ce contexte, la durée d’utilisation du système informatique apparaît excessive ; qu’en présence en effet d’un logiciel inadapté aux besoins de ses services, la société Fidac Normandie aurait dû rechercher plus tôt une solution de remplacement ;

Attendu que compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, la cour dispose des éléments d’appréciation suffisants pour fixer à 20'000 € l’indemnité destinée à compenser le préjudice résultant des dépenses supplémentaires de personnel générées par les désordres affectant le système informatique ;

4) Sur la demande reconventionnelle en paiement de solde de solde de facture

Attendu que la société Activ France sollicite le paiement de la somme de 2247 € à titre de solde de prix des prestations réalisées ; que la société Fidac Normandie conclut à l’irrecevabilité de cette prétention qui constitue selon elle, une demande nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile ;

Attendu que la société Activ France fait valoir que ses prétentions ne sont pas nouvelles dans la mesure où, en première instance, elle demandait à titre subsidiaire que, le cas échéant, le montant des dommages intérêts qui serait mis à sa charge soit limité à celui du solde de prix ;

Attendu que les dispositions de l’article 564 du code de procédure civile posent le principe selon lequel « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions » ;

Mais attendu que selon les dispositions de l’article 565 du même code : les prétentions « ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges même si leur fondement juridique est différent»;

Attendu en l’espèce, que la demande en paiement de solde du prix n’est pas nouvelle car elle avait été présentée à titre subsidiaire en première instance sous forme de demande de compensation entre d’une part le solde de prix et d’autre part le montant de dommages-intérêts ; que l’exception d’irrecevabilité donc pas fondée ;

Attendu sur le fond, que selon les conclusions de l’expert judiciaire , la reprise des désordres affectant l’installation informatique nécessiterait « un coût supplémentaire de l’ordre du coût initial de l’opération » ; que la société Fidac Normandie ne saurait en conséquence supporter la charge d’un solde de prix qui correspond en définitive à des prestations dépourvues d’intérêt pour elle ;

Que ce chef de demande n’étant pas justifié, il convient de le rejeter ;

5) Sur les autres demandes

Attendu que les prétentions de la société Fidac Normandie étant au moins en partie fondées, et la preuve d’une faute dans l’exercice du droit d’agir en justice n’étant pas rapportée, la demande en paiement de dommages intérêts pour procédure abusive n’est pas justifiée ; qu’elle ne sera donc pas accueillie ;

Attendu que l’équité commande d’allouer à la société Fidac Normandie une indemnité de 3000 € pour frais hors dépens, et de rejeter la demande formée à ce titre par la société Activ France ;

Attendu que les dépens seront mis à la charge de la société Activ France qui succombe en ses prétentions au sens de l’article 696 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Prononce la résolution aux torts de la société Activ France du contrat conclu entre les parties,

Condamne la société Activ France à payer à la société Fidac Normandie les sommes suivantes :

—  8421 euros au titre de la partie de prix versée,

—  7800 euros au titre des prestations extérieures,

— et 20'000 euros au titre des frais de personnel,

Condamne la société Activ France à payer à la la société Fidac Normandie la somme de 3000 euros pour frais hors dépens.

Rejette toutes demandes plus amples ou contraires au présent dispositif.

Condamne la société Activ France aux dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais d’expertise, dont distraction au profit de l’avocat de la société Fidac Normandie conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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