Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 3 mars 2022, n° 19/01858

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ch. soc., 3 mars 2022, n° 19/01858
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 19/01858
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Louviers, 3 avril 2019
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 19/01858 – N° Portalis DBV2-V-B7D-IFL7

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 03 MARS 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :


Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE LOUVIERS du 04 Avril 2019

APPELANT :

Monsieur X Y

[…]

[…]

représenté par Me Lucile MATRAND, avocat au barreau de l’EURE substitué par Me Mehdi LOCATELLI, avocat au barreau de l’EURE

INTIMEE :

SA SANOFI PASTEUR

[…]

[…]

représentée par Me Vincent MOSQUET de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Christophe PLAGNIOL, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE

COMPOSITION DE LA COUR :


Lors des débats et du délibéré :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Monsieur CAUBET, Conseiller

Madame BACHELET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme DUBUC, Greffière

DEBATS :


A l’audience publique du 18 Janvier 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 03 Mars 2022 ARRET :


CONTRADICTOIRE


Prononcé le 03 Mars 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. X Y a travaillé comme opérateur 1 au sein de la SA Sanofi Pasteur soit par contrats de travail temporaire, soit en contrats de travail à durée déterminée aux motifs de complément à sa formation, accroissement temporaire d’activité ou remplacement de salariés absents du 13 avril 2015 au 1er septembre 2018.


Les relations contractuelles des parties étaient soumises à la convention collective de l’industrie pharmaceutique.


Par requête du 14 décembre 2018, M. X Y a saisi le conseil de prud’hommes de Louviers en requalification de sa relation de travail avec la SA Sanofi Pasteur en contrat de travail à durée indéterminée, et paiement de rappels de salaire et d’indemnités.


Par jugement du 4 avril 2019, le conseil a débouté M. X Y de sa demande de requalification en contrat de travail à durée indéterminée, de l’ensemble de ses demandes, et l’a condamné aux dépens.

M. X Y a interjeté appel le 2 mai 2019.


Par conclusions remises le 29 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, M. X Y demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de l’ensemble de ses demandes, statuant à nouveau, requalifier à durée indéterminée avec la SA Sanofi Pasteur son contrat de travail avec une date d’ancienneté au 13 avril 2015, condamner la SA Sanofi Pasteur à lui verser les sommes suivantes :

indemnité de requalification : 2 677,70 euros,• rappel de participation : 1 785 euros,• rappel d’intéressement : 865,50 euros,• indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur le fondement de l’article• L.1235-3 du code du travail : 10 710,80 euros nets de CSG et de CRDS,• indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 2 500 euros,•

dire que les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter du dépôt de la requête et du jour de la décision à intervenir pour les sommes à caractère indemnitaire, et condamner la SA Sanofi Pasteur aux entiers dépens.


Par conclusions remises le 12 janvier 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la SA Sanofi Pasteur demande à la cour de déclarer l’appel de M. X Y mal fondé, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a jugé que l’intégralité des chefs de demandes de M. X Y était recevable, en conséquence, statuant à nouveau, déclarer l’action en requalification intentée par M. X Y partiellement irrecevable et, en tout état de cause, mal fondée, débouter M. X Y de l’intégralité de ses demandes, le condamner à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.


En accord avec les parties, l’ordonnance de clôture de la procédure rendue le 6 janvier 2022 a fait l’objet d’un rabat et la procédure a été clôturée à l’audience du 18 janvier 2022 avant l’ouverture des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prescription de l’action


En considération de la saisine du conseil de prud’hommes le 14 décembre 2018, la SA Sanofi Pasteur soulève la prescription de l’action en requalification pour les contrats conclus avant juin 2017 au visa de l’article L.1471-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, considérant notamment que le délai de prescription doit s’apprécier contrat par contrat et que s’agissant d’une fin de non recevoir, les contrats prescrits ne peuvent être évoqués au fond et ne peuvent donc faire l’objet d’une requalification.

M. X Y s’oppose au moyen tiré de la prescription au motif que l’action en requalification concerne l’exécution du contrat soumis à une prescription de deux ans, dont le point de départ court de la date de fin du contrat lorsque l’action est fondée sur le motif de recours ou en cas de succession de contrats, la fin du dernier contrat, de sorte qu’en engageant son action le 14 décembre 2018, aucune prescription n’est encourue, le dernier contrat ayant pris fin le 1er septembre 2018.


Selon l’article L.1471-1 du code du travail dans sa version applicable depuis le 1er avril 2018, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.


Toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture.


Conformément à l’article 40-II de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ces dispositions s’appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de publication de ladite ordonnance, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Lorsqu’une instance a été introduite avant la publication de ladite ordonnance, l’action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne y compris en appel et en cassation.


Il en résulte que le délai de prescription d’une action en requalification d’un contrat précaire en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours énoncé au contrat a pour point de départ, en cas de succession de contrats précaires, le terme du dernier contrat de mission ou contrat de travail à durée déterminée, peu important que ces contrats aient été interrompus entre eux, sauf à ce que la prescription alors applicable ait été acquise durant l’une de ces interruptions.

M. X Y a été lié à la SA Sanofi Pasteur en qualité d’opérateur 1 conditionnement par les contrats suivants :


- du 13 avril 2015 au 14 octobre 2015 : contrat de travail temporaire pour accroissement temporaire d’activité lié à la préparation et réalisation des campagnes d’été dont la campagne hémisphère Nord 2015


- du 4 janvier 2016 au 23 décembre 2016 : contrat de travail à durée déterminée pour accroissement temporaire d’activité lié à l’augmentation des vaccins AXIM, Dengue, grippe


- du 6 juin 2017 au 22 décembre 2017 : contrat de travail à durée déterminée pour accroissement temporaire d’activité lié à l’augmentation de la fabrication des vaccins


- du 2 au 7 juillet 2018 : contrat de travail temporaire pour remplacement d’un salarié absent


- du 9 au 13 juillet 2018 : contrat de travail temporaire pour remplacement d’un salarié absent


- du 16 juillet au 3 août 2018 : contrat de travail temporaire pour remplacement d’un salarié absent


- du 6 au 24 août 2018 :contrat de travail temporaire pour remplacement d’un salarié absent


- du 27 août au 1er septembre 2018 : contrat de travail temporaire pour remplacement d’un salarié absent.


Aussi, alors que le salarié invoque avoir pourvu un emploi permanent et durable, qu’aucune prescription n’a été acquise entre les différentes interruptions, que la relation contractuelle entre M. X Y et la SA Sanofi Pasteur a pris fin le 1er septembre 2018 et la saisine interruptive de prescription datant du 14 décembre 2018, l’action n’est pas prescrite, même partiellement.


Dès lors la cour confirme le jugement ayant rejeté le moyen tiré de la prescription.

Sur la requalification du contrat de travail à durée déterminée


Selon l’article L. 1242-1 du code du travail, un contrat de travail durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.


L’article L.1242-2 du même code dispose que, sous réserve des contrats spéciaux prévus à l’article L.1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cinq cas qu’il énumère, parmi lesquels figurent le remplacement d’un salarié, l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise et les emplois saisonniers ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, il est d’usage de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.


Selon l’article L.1245-1du code du travail, est réputé à durée indéterminée tout contrat conclu en méconnaissance des dispositions des articles L.1242-1 à L.1242-4, et 1242- 6 à L.1242- 8, et 1242-12 alinéa 1, et 1243-11 alinéa 1, L.1243-13, et 1244-3 et L.1244-4 du même code.


Le motif du recours à un contrat de travail à durée déterminée s’apprécie au jour de sa conclusion.


En application des dispositions de l’article L.1251-6 du code du travail, il peut être fait appel à un salarié temporaire pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement pour remplacer un salarié absent ou en cas d’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise.


En tout état de cause, selon l’article L.1251-5 du code du travail, le contrat de mission, quel que soit son motif ne peut avoir pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l’activité normale ou permanente de l’entreprise utilisatrice.


Selon l’article L.1251-40 du même code, lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L.1251-5 à L.1251-7, L.1251-10 à L.1251-12, L.1251-30 à L.1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l’entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission.
En cas de litige sur le motif du recours, il incombe à l’entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat de mission.


En l’espèce, M. X Y sollicite la requalification de ses contrats précaires aux motifs que la société Sanofi Pasteur a institutionnalisé le 'tiers temps’ pour les salariés précaires en employant de manière continuelle des salariés en contrats précaires pour un prétendu accroissement temporaire d’activité en appliquant le délai de carence aux salariés et non au poste de travail, que la violation du délai de carence concernant les contrats de travail à durée déterminée du 4 janvier 2016 au 23 décembre 2016 et du 6 juin 2017 au 22 décembre 2017 emporte automatiquement requalification, qu’il a occupé un emploi durable lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise, laquelle est caractérisée même lorsque l’activité connaît des variations, dès lors qu’elles interviennent de manière régulière suivant un mode d’organisation identique, rappelant qu’il appartient à l’employeur d’apporter la preuve de la licité du motif du recours, ce qu’il ne fait pas.


La société Sanofi Pasteur s’oppose à la demande puisque les motifs de recours sont tous justifiés, que concernant le premier contrat pour complément de formation, il est établi qu’il est conforme aux dispositions de l’article L.1251-7 du code du travail par les multiples formations dispensées au salarié qui a obtenu plusieurs qualifications, que son activité dépend des commandes saisonnières du vaccin de la grippe pour les hémisphères nord et sud et par des commandes ponctuelles pour les autres vaccins en fonction des appels d’offres, de sorte que le volume des commandes est par essence incertain, qu’elle est soumise à de nombreux aléas de production, se caractérisant par des pics d’activité justifiant un accroissement temporaire d’activité.


La société Sanofi Pasteur est spécialisée dans la fabrication de vaccins humains et son site de production situé à Val de Reuil assure la distribution mondiale de tous les vaccins fabriqués par la société Sanofi Pasteur en France et les opérations industrielles de la production biologique des antigènes au stade 'vrac’ jusqu’à la production de produits finis, à savoir les vaccins et leur distribution dans le monde.


Le site de Val de Reuil est le premier producteur mondial de vaccin contre la grippe saisonnière pour les hémisphères nord et sud.


Il n’est pas sérieusement discuté que la fabrication du vaccin est saisonnière et dépend notamment des recommandations de l’OMS concernant la composition grippal.

M. X Y a été lié à la SA Sanofi Pasteur en qualité d’opérateur 1 conditionnement du 13 avril 2015 au 1er septembre 2018 par les contrats et pour les motifs ci-dessus rappelés.


Au cours de cette période, les transmissions de souches par l’OMS ont eu lieu aux dates suivantes :


Pour l’hémisphère nord :


- campagne 2013-2014 : 21 février 2013


- campagne 2014-2015 : 20 février 2014


- campagne 2015-2016 : 26 février 2015


- campagne 2016-2017 : 25 février 2016


- campagne 2017-2018 : 2 mars 2017


- campagne 2018-2019 : 22 février 2018
Pour l’hémisphère sud :


- campagne 2013 : 20 septembre 2012


- campagne 2014: 26 septembre 2013


- campagne 2015 : 25 septembre 2014


- campagne 2016 : 24 septembre 2015


- campagne 2017 : 29 septembre 2016


- campagne 2018 : 28 septembre 2017


- campagne 2019 : 27 septembre 2018.


Il en résulte une variation de quelques jours, ce qui n’a pas pour effet de réduire de manière significative le temps de l’ensemble des étapes d’élaboration, fabrication et d’expédition du vaccin, générateur de ce fait d’un accroissement temporaire d’activité justifiant le recours aux contrats précaires.


L’activité de conditionnement sur laquelle le salarié a été affecté dans le cadre de chacun de ses contrats consiste en l’étiquetage du produit final et à sa mise en boîte sous forme de lots.


Selon le premier contrat du 13 avril 2015 au 14 octobre 2015, M. X Y a été mis à disposition de la SA Sanofi Pasteur au motif d’un complément de formation au visa de l’article L.1251-7 alinéa 2 du code du travail lié à la préparation et réalisation des campagnes d’été dont la campagne hémisphère nord 2015.


Il résulte du document reprenant l’historique du salarié que sur la durée de ce contrat, il a suivi les sessions de formation suivantes :


- 13 avril 2015 : Accueil site VDR sur une durée de trois heures

renseignement et vérification des DDL (fondamentaux)

pour 0,50 heure


Accueil conditionnement pour deux heures


Recyclage BPF pour 0,01 heure


- 14 avril 2015 : processus de recyclage pour une durée d’une heure


Process control pour une durée de deux heures


- 15 avril 2015 : opérations de changement de lot pour une durée de deux heures


Process control pour une durée de deux heures


- 16 avril 2015 : processus de réconciliation et de dénombrement pendant deux heures


- 27 mai 2015 : recyclage pratique pour 0,40 heure
- 8 juin 2015 : 'process control’ pour une durée de 0 heure


- 9 juin 2015 : FAMAR-FAMAR5 conduite autonome encaisseuse palettisation pour une durée de 16 heures


- 16 juin 2015 : FAMAR 3 et FAMAR 5 conduite autonome ENCART pour une durée de 35 heures


- 23 juin 2015 : méthodologie des opérations de changement de lot pour 0 heure


- 23 juin 2015 : FAMAR 3 VDP/VVDP encartonneuse pour 0,75 heure


- 24 juin 2015 : FAMAR 3 conduite autonome Thermo pour 24 heures


- 21 juillet 2015 : FAMAR 3 et FAMAR 5 conduite autonome ETIQ pour une durée de 35 heures


Autorisation interne de conduite de gerbeurs à conducteur accompagnant


- 10 septembre 2015 : conduite de l’étiqueteuse autonome pour une durée de 35 heures

conduite de l’encarteuse autonome pour une heure mise en BG manuelle et palettisation du PFC pour 0,25 heure conduite autonome Thermo pour une durée d’une heure


- 1er octobre 2015 : conduite autonome vigneteuse : 0 heure


Néanmoins, le recours à l’intérim pour un complément de formation professionnelle répond à des critères précis et un accord collectif de branche a été signé le 7 septembre 2005 afin de mettre en oeuvre le dispositif prévu par l’article L.1251-7 du code du travail issu de la loi du 18 janvier 2005, précisant que la mission de formation en cause peut concerner cinq catégories de personnes :


- candidats souhaitant développer, compléter ou adapter leurs qualifications lorsque ces dernières ne sont pas ou plus adaptées aux exigences de leur bassin d’emploi


- candidats âgés d’au moins 45 ans souhaitant maintenir ou élargir leurs compétences professionnelles,


- candidats, hommes ou femmes, intéressés par un métier traditionnellement réservé à l’autre sexe,


- candidats ayant besoin d’une formation pratique complémentaire en entreprise utilisatrice ayant bénéficié dans le mois précédent d’un contrat de développement professionnel intérimaire défini par l’accord du 8 juillet 2004,


- bénéficiaires (jeunes et demandeurs d’emploi) d’un contrat de professionnalisation. Ce contrat doit avoir été conclu en application de l’article L.1242-3 du code du travail relatif eu contrat de travail à durée déterminée.


Une convention tripartite définit les engagements de l’entreprise de travail temporaire, de l’entreprise utilisatrice et du travailleur intérimaire.


La SA Sanofi Pasteur n’apporte aucun élément permettant d’établir que M. X Y répondait aux conditions pour bénéficier de ce dispositif, dont il convient au surplus d’observer que la durée invoquée ne correspondait pas au besoin de formation sur le poste d’opérateur au service conditionnement que la SA Sanofi Pasteur évalue elle-même à un délai compris entre un et deux mois dans ses écritures, ce qui est corroboré par les pièces produites, alors que le contrat litigieux a été régularisé pour six mois.
Par ailleurs, suivant le graphique de l’évolution des quantités des objets conditionnés chaque mois de 2015 à 2017, si la variabilité est incontestable puisqu’au plus bas sur la période en mai 2015 il a été conditionné un peu moins que 5 000 000 pour atteindre un pic en août 2015 et juin ou juillet 2017 de l’ordre de 28 000 000, néanmoins, alors que la médiane se situe autour de 15 000 000 d’objets conditionnés, le recours aux salariés précaires dans ce service n’est justifié par un réel l’accroissement temporaire d’activité par rapport à l’activité normale de l’entreprise que dès lors que cette activité moyenne est dépassée, ce qui a été le cas de juin 2015 à octobre 2015, de février 2016 à avril 2016, de juin 2016 à septembre 2016 , mars 2017, de juin 2017 à septembre 2017.


D’ailleurs, dans les schémas produits par la SA Sanofi Pasteur il est admis que la vague de conditionnement pour le vaccin de la grippe pour l’hémisphère nord se situe en août et septembre.


Aussi, alors que les périodes au cours desquelles depuis avril 2015, M. X Y a été engagé, soit en intérim soit en contrat de travail à durée déterminée, excèdent les seules périodes au cours desquels l’accroissement temporaire d’activité est établi, de sorte qu’il n’existe pas nécessairement de lien entre la période d’emploi de M. X Y et la réalité de l’accroissement temporaire d’activité, son recrutement en qualité d’opérateur conditionnement étant ainsi déconnecté de tout besoin conjoncturel, s’inscrit dans l’activité durable et permanente de la SA Sanofi Pasteur, justifiant que la relation de travail soit requalifiée en contrat à durée indéterminée depuis l’origine de la relation contractuelle, soit le 13 avril 2015, sans qu’il y ait lieu de répondre aux autres moyens tendant aux mêmes fins.


La cour infirme ainsi le jugement entrepris.

Sur les conséquences de la requalification


Compte tenu de la requalification en contrat à durée indéterminée à effet au 13 avril 2015, le salarié est fondé à obtenir une indemnité de requalification conformément aux dispositions de l’article L.1251-41 du code du travail égale à au moins un mois de salaire.


Alors qu’il n’est pas discuté que le dernier salaire de M. X Y s’élevait à 2 677,70 euros bruts, il y a lieu de lui allouer cette somme à titre d’indemnité de requalification.


Il sollicite la prime d’intéressement et de participation au titre de l’exercice 2015, à laquelle s’oppose la SA Sanofi Pasteur aux motifs qu’une telle demande ne peut être faite après la clôture de l’exercice concerné, sauf à remettre en cause les droits de l’ensemble des salariés bénéficiaires qui ne sont pas parties à la cause, le salarié pouvant seulement obtenir des dommages et intérêts pour privation d’une perte de chance de percevoir une prime d’intéressement et/ou participation, sous réserve qu’il fasse la démonstration de l’existence d’une faute de l’employeur, de son préjudice et du lien de causalité entre cette faute et le préjudice.


Par l’effet de la requalification, le salarié est en droit de solliciter l’ensemble des droits dont il aurait bénéficié en raison de son contrat à durée indéterminée, ce qui inclut la prime d’intéressement et de participation dès lors qu’il existe un tel accord au sein de l’entreprise, sans que puisse lui être opposé la clôture des exercices y ouvrant droit, dès lors que ses droits ont été éludés du fait de l’employeur.


Dans la mesure où en 2015, M. X Y a travaillé au sein de la SA Sanofi Pasteur pendant six mois, qu’il n’est pas discuté que l’accord de Groupe permet de bénéficier des primes après trois mois d’ancienneté, au prorata de son temps de présence, sans qu’il y ait lieu de prendre en compte les éventuelles sommes qu’il aurait perçues par la société de travail intérimaire qui l’employait et compte tenu des droits ouverts à la participation et l’intéressement, tels que résultant du tableau produit au débat, la SA Sanofi Pasteur est condamnée à verser à ce titre les sommes respectives de 1 785 euros et 865,50 euros.
Le contrat de travail requalifié ayant pris fin le 1er septembre 2018 sans respect d’une procédure de licenciement, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.


Par conséquent, M. X Y est fondé à obtenir :

l’indemnité compensatrice de préavis d’une durée de deux mois : 5 355,40 euros• les congés payés afférents : 535,54 euros•

l’indemnité conventionnelle de licenciement :•

cette indemnité est accordée aux salariés ayant une ancienneté supérieure à un an, cette ancienneté étant calculée conformément aux dispositions de l’article 23 de la convention collective qui détermine l’ancienneté en fonction du temps de présence depuis la date d’entrée dans les lieux.


Depuis le 13 avril 2015, M. X Y compte plus d’un an de présence dans l’entreprise, de sorte qu’il est éligible à l’indemnité conventionnelle de licenciement.


Pour les salariés ayant entre 1 et 5 ans d’ancienneté, elle est calculée à raison de 9/30ème par année à compter de la date d’entrée dans l’entreprise.


Aussi, depuis le 13 avril 2015 jusqu’à l’issue du délai de préavis, M. X Y a acquis trois ans et sept mois d’ancienneté, de sorte que son indemnité s’élève à 2 878,53 euros.


La SA Sanofi Pasteur est condamnée au paiement de cette somme.


Conformément à l’article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable depuis le 1er avril 2018, compte tenu de l’ancienneté du salarié, il peut prétendre à des dommages et intérêts compris entre trois et quatre mois de salaire.


Né le […], M. X Y a perçu l’allocation de retour à l’emploi avant de trouver un nouvel emploi de conducteur livreur à compter du 12 juin 2020, ainsi que cela résulte du bulletin de paie qu’il communique.


Aussi, la cour lui alloue la somme de 8 200 euros à titre de dommages et intérêts.


Les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l’employeur devant le bureau de jugement du 7 février 2019 et celles à caractère indemnitaire à compter du présent arrêt.


Les conditions de l’article L.1235-4 du code du travail étant réunies, il convient d’ordonner le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés des indemnités chômage versées au salarié licencié dans la limite de quatre mois d’indemnités de chômage, du jour de la rupture au jour de la présente décision.

Sur les dépens et frais irrépétibles


En qualité de partie principalement succombante, la SA Sanofi Pasteur est condamnée aux entiers dépens, déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à M. X Y la somme de 1 200 euros pour les frais générés par l’instance et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS LA COUR


Statuant par arrêt contradictoire,


Confirme le jugement entrepris ayant rejeté le moyen tiré de la prescription ;


L’infirme en ses autres dispositions ;


Statuant à nouveau,


Requalifie la relation entre M. X Y et la SA Sanofi Pasteur en contrat à durée indéterminée à effet au 13 avril 2015 ;


Condamne la SA Sanofi Pasteur à payer à M. X Y les sommes suivantes :

indemnité de requalification : 2 677,70 euros bruts• prime de participation au titre de l’année 2015 : 1 785 euros• intéressement au titre de l’année 2015 : 865,50 euros• indemnité compensatrice de préavis: 5 355,40 euros• congés payés afférents : 535,54 euros• indemnité conventionnelle de licenciement : 2 878,53 euros• dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 8 200 euros


Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l’employeur devant le bureau de jugement du 7 février 2019 et celles à caractère indemnitaire à compter du présent arrêt ;


Ordonne le remboursement par la SA Sanofi Pasteur aux organismes intéressés des indemnités chômage versées à M. X Y dans la limite de quatre mois d’indemnités de chômage, du jour de la rupture au jour de la présente décision ;


Condamne la SA Sanofi Pasteur à payer à M. X Y la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;


Déboute la SA Sanofi Pasteur de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en appel ;


Condamne la SA Sanofi Pasteur aux entiers dépens de première d’instance et d’appel.


La greffière La présidente
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