Cour d'appel de Versailles, 9 décembre 2004, n° 03/04565

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 9 déc. 2004, n° 03/04565
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 03/04565

Texte intégral

COUR D’APPEL

E.D. DE

VERSAILLES

PIE 12ème chambre section 2

O J.F.F./P.G.

C

ARRET N №5B3 Code nac: 39H

contradictoire

DU 09 DECEMBRE 2004

REPUBLIQUE FRANCAISE

R.G. N° 03/04565 AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AFFAIRE: LE NEUF DECEMBRE DEUX MILLE QUATRE, La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire S.A. X FRANCE entre :

S.A. X FRANCE ayant son siège […], agissant poursuites et diligences de son SAS LEXMARK représentant légal domicilié en cette qualité audit siège. INTERNATIONAL

représentée par la SCP KEIME GUTTIN JARRY – avoués N° du dossier 03.432

Rep/assistant Me Franck BERTHAULT avocat au barreau de PARIS (C.234) Décision déférée à la cour :

Jugement rendu le 26 Mars APPELANTE 2003 par le Tribunal de

**************** Commerce de

NANTERRE SAS LEXMARK INTERNATIONAL ayant son siège Site des Trois N° Chambre: 07 Arches 300 Route de Pithiviers 45760 BOIGNY-SUR-BIONNE, prise N° Section : en son établissement secondaire dont le siège est […], N° RG: 02/F00317 Immeuble Newton, […], […], […], […], prise en la personne de ses représentants légaux Expéditions exécutoires domiciliés en cette qualité audit siège. Expéditions délivrées le : 13 DEC. 2004 représentée par Me Farid SEBA – avoué N° du dossier 10111 à: Rep/assistant: Me Mélanie THILL-TAYARA de la SCP SALANS ET SCP KEIME GUTTIN ASSOCIÉS avocats au barreau de PARIS JARRY Rep/assistant Me Florence HERRENSCHMIDT avocat au barreau Me Farid SEBA d’AIX EN PROVENCE. Copie simple Pe 27/05/05 INTIMEE à Me DA SILVA

****************

Composition de la cour :Copie Simple Pe 27/05/05

à U.D.A. En application des dispositions de l’article 786 du nouveau code de

procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience du 04Copie simple le 03/06/05 Octobre 2004 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller chargé du rapport. à AA CC

Copie simple Pe 03/08/05 Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : à Me ANTOINE. LALANCE
Madame Françoise LAPORTE, Président, Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller,
Monsieur Denis COUPIN, conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Marie-Thérèse GENISSEL,

[…]



FAITS ET PROCEDURE :

La Société X FRANCE est la filiale de la société de droit japonais

Y X Z qui fabrique et commercialise notamment des imprimantes pour ordinateurs sous la marque « X ».

La Société LEXMARK INTERNATIONAL est la filiale française du groupe américain LEXMARK qui fabrique et commercialise également des imprimantes sous la marque « LEXMARK ».

Les Sociétés X et LEXMARK sont concurrentes sur le marché de la vente d’imprimantes et ont recours au même réseau de distribution.

Faisant grief à la Société LEXMARK INTERNATIONAL d’avoir élaboré en avril 2001 et diffusé au cours des mois suivants un tableau comparatif des prix et de certaines des caractéristiques des imprimantes X et LEXMARK, lequel constituerait une publicité comparative illicite, la Société X FRANCE l’a, par acte du 19 juin 2001, assignée en référé aux fins de cessation immédiate et sous astreinte de la diffusion de cette publicité.

Par ordonnance du 13 juillet 2001, le Président du Tribunal de Commerce de NANTERRE, statuant par voie de référé, a débouté la Société X

FRANCE de l’ensemble de ses demandes, et l’a condamnée au paiement de la somme de 12.000 F (1.829,39 €) au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

C’est dans ces circonstances que, par acte du 08 janvier 2002, la Société

X FRANCE a assigné au fond la Société LEXMARK INTERNATIONAL, aux fins de cessation immédiate et sous astreinte de la diffusion de la publicité comparative illicite et de dommages-intérêts.

Par jugement du 26 mars 2003, le Tribunal de Commerce de NANTERRE

a débouté la Société X FRANCE de l’ensemble de ses demandes, et l’a condamnée au paiement de la somme de 12.000 € au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

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La Société X FRANCE a interjeté appel de ce jugement.

Elle fait valoir que le tableau diffusé par la Société LEXMARK

INTERNATIONAL constitue une publicité au sens des dispositions du Code de la consommation, dès lors qu’il a perdu son caractère interne par suite de sa diffusion aux revendeurs, peu important que ce document n’ait pas fait l’objet

d’une diffusion systématique.

Elle observe que la circonstance qu’un ou plusieurs revendeurs de matériels X se soient retrouvés en possession du tableau comparatif en cause caractérise un fait de publicité au sens de la jurisprudence, alors même que ces revendeurs ont la qualité de professionnels.

Elle précise que le tableau LEXMARK présente un caractère intéressé, dès lors qu’il n’est pas contesté que ce tableau a été remis à des revendeurs

d’imprimantes, lesquels commercialisent, non seulement du matériel X, mais également du matériel LEXMARK.

A titre subsidiaire, elle propose à la Cour de poser à la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) une question préjudicielle, afin de lui permettre d’apprécier si un tel tableau constitue une publicité au sens des dispositions de l’article 2 § 1 de la directive 84/450/CEE.

Elle invoque le caractère faux et mensonger des allégations contenues dans le tableau incriminé, en tant que celles-ci portent, d’une part sur les prix des imprimantes LEXMARK Z 43 et X SC 680, d’autre part sur le prix de

l’imprimante X SC 880.

Elle soutient que le fait pour la société intimée de présenter ses imprimantes comme ayant un coût à la page plus avantageux que celui des imprimantes X, sans en rapporter la preuve, et alors que les professionnels du secteur de l’informatique concluent au résultat opposé, constitue une publicité mensongère illicite en application de l’article L 121-1 du Code de la consommation.

Elle indique qu’en matière de publicité comparative, l’article L 121-8 ancien du Code de la consommation a édicté un régime spécifique pour les comparaisons de prix, lesquelles ne peuvent porter que sur des produits identiques.

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Elle considère qu’il n’y a pas lieu d’interpréter les dispositions des articles

L 121-8 et L 121-12 anciens du Code de la consommation à la lumière de la directive communautaire 97/55/CE, dès lors que la voie de l’interprétation de ces dispositions ne peut permettre d’atteindre le résultat prescrit par la directive.

Elle estime que, contrairement à ce qu’a retenu le Tribunal, l’ordonnance du 23 août 2001, qui a modifié les articles L 121-1 et suivants du Code de la consommation en vue de transposer en droit français la directive communautaire

97/55/CE, ne constitue pas un texte de nature pénale ayant vocation à s’appliquer aux infractions antérieures en raison du caractère moins sévère des nouvelles dispositions, dans la mesure où les publicités comparatives illicites sont sanctionnées uniquement sur le fondement des principes généraux de la responsabilité civile.

Elle en déduit que les faits antérieurs à l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 23 août 2001 demeurent régis par les dispositions des anciens articles L 121-8 et suivants du Code de la consommation.

Elle soutient que le tableau comparatif diffusé par la Société LEXMARK auprès de ses revendeurs ne respecte, ni les conditions propres à la publicité comparative sur les prix, ni les conditions générales applicables à toute publicité comparative.

Elle qualifie d’illicite ce tableau en ce qu’il établit un comparatif de prix portant sur des produits qui ne sont pas identiques, et en tant qu’il ne mentionne pas la durée pendant laquelle les prix pratiqués par la partie adverse sont maintenus.

Elle considère que le tableau comparatif contient des informations fausses et trompeuses, qu’il n’est ni objectif, ni loyal, et qu’il est dénigrant et jette le discrédit sur les produits de marque X, tant dans sa présentation au regard des modèles d’imprimantes retenus et de leurs prix, que dans ses commentaires sur les caractéristiques et la qualité des imprimantes comparées.

Elle souligne que les conclusions tirées par la Société LEXMARK de son comparatif à la rubrique "les + LESMARK" sont nécessairement tendancieuses et subjectives et ne répondent pas aux conditions de licéité posées par l’article

L 121-8 du Code de la consommation, en ce qu’elles procèdent d’un dénigrement par omission, destiné à faire croire que les imprimantes fabriquées par la partie

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adverse sont globalement supérieures aux imprimantes X, tout en étant d’un moindre prix.

Elle prétend que le tableau comparatif en cause a pour objet de tirer avantage de la notoriété attachée à une marque, en l’espèce la marque X, en présentant les produits LEXMARK comme une alternative aux produits

X, en violation des dispositions de l’article L 121-9 du Code de la consommation.

Elle affirme que la Société LEXMARK a en outre violé délibérément les dispositions de l’article L. 121-12 du Code de la consommation, dans sa rédaction alors en vigueur, en omettant de transmettre à la Société X, avant sa diffusion, une publicité comparative qui visait expressément celle-ci.

Elle relève qu’à supposer que les dispositions des anciens articles L 121-8 et suivants du Code de la consommation soient jugées inapplicables en l’espèce, la publicité comparative utilisée par la société intimée constitue un acte de concurrence déloyale par dénigrement des produits X, caractérisé par le seul fait que le tableau comparatif a pour objet et pour effet de critiquer les imprimantes X.

Elle constate que la Société LEXMARK a ultérieurement continué d’utiliser des tableaux comparatifs illicites, en tant qu’ils contiennent des allégations fausses et mensongères.

Elle observe que ces tableaux constituent également une publicité comparative illicite au sens des nouvelles dispositions issues de l’ordonnance du

23 août 2001 ayant modifié l’article L 121-8 du Code de la consommation, dès lors que les conclusions tirées par la partie adverse de ses comparatifs sont subjectives et dénigrantes, et qu’en outre que la comparaison du seul prix des imprimantes sans référence aux coûts d’utilisation est en elle-même illicite.

Elle ajoute que les pratiques de la Société LEXMARK ont pour effet de dénigrer et de pénaliser les produits X à l’égard de l’ensemble du réseau de distribution, commun aux deux fabricants, et qu’elles visent un objectif de détournement à son profit de la clientèle de la société appelante, à l’origine pour cette dernière d’un préjudice qui ne fera que s’aggraver tant qu’il ne sera pas mis fin à ces procédés déloyaux.

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Par voie de conséquence, la Société X FRANCE demande à la

Cour d’infirmer le jugement entrepris, et, statuant à nouveau, de :

à titre principal, dire que les tableaux comparatifs utilisés par la Société

LEXMARK INTERNATIONAL constituent une publicité au sens des dispositions de l’article L 121-8 du Code de la consommation et de la directive communautaire

n° 84/450/CEE ;

- à titre subsidiaire, poser à la Cour de Justice des Communautés Européennes une question préjudicielle ; sur le tableau comparatif d’avril 2001 :

- dire que le tableau en cause constitue une publicité mensongère illicite qui caractérise un acte de concurrence déloyale à l’égard de la Société

X FRANCE ; dire que ce tableau constitue une publicité comparative illicite qui caractérise un acte de concurrence déloyale à l’égard de la Société X

FRANCE;

sur les tableaux comparatifs de juillet 2001, septembre 2001, novembre 2001 et janvier 2002 :

- dire que les tableaux de septembre 2001 et novembre 2001 constituent une publicité mensongère illicite qui caractérise un acte de concurrence déloyale

à l’égard de la Société X FRANCE ;

- dire que les tableaux de juillet 2001, septembre 2001, novembre 2001 et janvier 2002 constituent une publicité comparative illicite qui caractérise un acte de concurrence déloyale à l’égard de la société appelante ;

- dire qu’en tout état de cause, les tableaux comparatifs litigieux caractérisent des actes de dénigrement et de concurrence déloyale mis en oeuvre par la Société

LEXMARK INTERNATIONAL, préjudiciables à la Société X FRANCE ; en conséquence : ordonner à la Société LEXMARK INTERNATIONAL la cessation immédiate de la diffusion des tableaux en cause, et ce, sous astreinte de

2.000 € par infraction constatée à compter de la signification de l’arrêt à intervenir;

- condamner la Société LEXMARK INTERNATIONAL à payer à la Société

X FRANCE la somme de 200.000 € à titre de dommages-intérêts ; ordonner la publication de l’arrêt à intervenir dans trois journaux ou périodiques, au choix de la société appelante, et aux frais de la société intimée, sans que le coût de chaque insertion ne puisse dépasser

4.000 € HT ;

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- autoriser la Société X FRANCE à procéder à la diffusion de l’arrêt

à intervenir auprès des revendeurs et distributeurs au moyen de sa lettre

d’information ;

- en tout état de cause, condamner la Société LEXMARK INTERNATIONAL à payer à la Société X FRANCE la somme de 30.000 € par application de

'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

- condamner la Société LEXMARK INTERNATIONAL aux entiers dépens de première instance et d’appel.

La Société LEXMARK INTERNATIONAL conclut à la confirmation du jugement déféré, et au débouté de la Société X FRANCE de l’intégralité de ses demandes, formulées sur le fondement tant des articles L 121-1 et suivants du Code de la consommation que de l’article 1382 du Code civil du chef de concurrence déloyale.

Elle réplique que le tableau incriminé n’est pas "intéressé”, puisqu’il

s’adresse, non à des acheteurs utilisateurs potentiels, mais à ses représentants commerciaux.

Elle expose que la circonstance que ces derniers répercutent en partie le contenu du tableau dans le cadre de leurs démarchages auprès de revendeurs ne signifie pas que ce document est systématiquement diffusé auprès des revendeurs et constitue une publicité.

Elle en déduit que le Tribunal a, à bon droit, énoncé qu’en l’absence d’une diffusion systématique, organisée, importante, à l’extérieur de LEXMARK, le tableau eu cause constitue un simple document interne, et non une publicité au sens des articles L 121-1 et suivants du Code de la consommation.

A titre subsidiaire, elle suggère à la Cour de poser à la Cour de Justice des Communautés Européennes une question préjudicielle, formulée dans des termes différents de celle proposée par la Société X.

Elle fait valoir que le fait, pour elle, de procéder à un récapitulatif des avantages (les "+") de ses imprimantes ne revêt aucun caractère déloyal, puisque ce récapitulatif vise à mieux faire connaître les caractéristiques de ses imprimantes auprès de ses revendeurs, sans pour autant passer sous silence les qualités et avantages des imprimantes X.

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Elle estime avoir fait preuve de bonne foi et de loyauté en se bornant à comparer des critères techniques significatifs et pertinents et en se limitant à porter des appréciations sur ses propres produits.

Elle précise que le tableau est particulièrement inoffensif au regard des sollicitations dont les revendeurs professionnels font constamment l’objet, notamment sous la forme des nombreuses offres promotionnelles faites par la

Société X elle-même à l’adresse tant de ses revendeurs que des utilisateurs finaux.

Elle invoque l’exactitude des prix figurant dans ses tableaux (que ce soit dans celui d’avril 2001 ou dans ceux de septembre et novembre 2001), pour conclure qu’ils ne contiennent aucune indication fausse ou trompeuse relative aux prix.

Elle conteste également que la présentation du coût à la page comme un

"+" de ses imprimantes soit une allégation fausse ou trompeuse, alors que les tests habituels en impression continue ne tiennent pas compte de sa technologie

d’impression « monobloc » ainsi que de la nature et du mode de commercialisation de ses cartouches.

Elle fait valoir que les nouvelles dispositions des articles L 121-8 et L 121

9 et L 121-12 du Code de la consommation, dès lors qu’elles sont plus douces que les anciennes, doivent trouver une application immédiate, y compris à des faits antérieurs à leur entrée en vigueur.

Elle soutient qu’à supposer que ces nouvelles dispositions soient jugées inapplicables, le principe de primauté du droit communautaire a pour effet, d’une part que les dispositions des articles L 121-8 et L 121-9 doivent être interprétées conformément au texte et à l’esprit de la directive européenne du 6 octobre 1997, et, d’autre part que l’article L. 121-12, dès lors qu’il est contraire à cette directive, doit demeurer inappliqué.

Elle en déduit que le Tribunal a à juste titre estimé que l’obligation de communication préalable édictée par l’article L 121-12 du Code de la consommation devait être purement et simplement écartée, de telle sorte que

LEXMARK n’avait pas à communiquer son tableau à la Société X.

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Elle en tire également la conséquence que :

- son tableau ne contient aucune indication fausse et/ou trompeuse quant aux prix des imprimantes et est licite au regard, tant des nouvelles dispositions de l’article

L 121-8 du Code de la consommation, d’application immédiate, que de

l’interprétation conforme à la lumière de la directive du 06 mai 1997;

- ce tableau, tout comme les tableaux ultérieurs, respecte les autres conditions de licéité, dès lors qu’il ne contient aucune indication fausse et trompeuse en ce qui concerne les prix, que la comparaison faite n’est ni déloyale, ni dénigrante que ce soit dans la sélection des imprimantes ou encore dans les commentaires faits par elle à la rubrique “+”;

- ce tableau ne tire aucun profit de la notoriété de la Société X, à défaut de créer un risque de confusion entre les deux fournisseurs, la comparaison de ses produits avec ceux de la société appelante étant exclusive de parasitisme de sa part.

Elle souligne que la comparaison des prix, telle qu’elle résulte des tableaux établis ultérieurement, est pertinente, et n’imposait nullement qu’elle

s’accompagne également de la comparaison avec les coûts annexes d’utilisation comprenant les consommables.

Elle objecte que la Société X ne justifie pas de l’existence et du montant du préjudice qui serait résulté pour elle de l’utilisation de ces tableaux, dont l’impact sur les ventes de la partie adverse n’a pu être que négligeable.

Elle ajoute que les mesures accessoires sollicitées par la société appelante, tendant à la publication de l’arrêt à intervenir et à sa diffusion auprès de ses distributeurs, revêt un caractère inapproprié aux circonstances de l’espèce.

Elle sollicite en outre la condamnation de la Société X FRANCE au paiement de la somme de 30.000 € en application de l’article 700 du nouveau

Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 24 juin 2004.

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MOTIFS DE LA DECISION :

SUR LE CARACTÈRE DE "PUBLICITÉ” DES TABLEAUX DIFFUSÉS PAR LA SOCIÉTÉ

INTIMÉE :

Considérant que l’information, objet de la diffusion incriminée, doit être qualifiée de publicité au sens des dispositions des articles L 121-1 et suivants du

Code de la consommation, dès lors qu’elle n’est pas réservée à l’usage exclusivement interne de l’entreprise ;

Considérant qu’en l’occurrence, il résulte des explications de la Société

LEXMARK INTERNATIONAL que les tableaux établis par elle sont destinés à ses commerciaux, afin de leur permettre de mieux maîtriser les produits qu’ils vendent;

Considérant que, toutefois, il est constant que les tableaux litigieux ont été présentés à des revendeurs professionnels, et qu’une copie de ces documents a été laissée à ceux qui en ont fait la demande ;

Or considérant que, dans la mesure où ils se sont trouvés en possession

d’un certain nombre de revendeurs, tiers à la société intimée, ces tableaux ont revêtu un caractère public, peu important qu’ils n’aient pas fait l’objet d’une diffusion systématique ;

Considérant que, de surcroît, la circonstance que les documents en cause soient destinés à des professionnels ne leur enlève pas leur caractère public, dès lors que ces professionnels, revendeurs multi-marques, sont eux-mêmes des acheteurs actuels ou potentiels ayant vocation à être les prescripteurs de matériels

d’impression auprès des utilisateurs finaux ;

Considérant qu’en toute hypothèse, il apparaît que les informations comparatives contenues dans les tableaux établis par la Société LEXMARK

INTERNATIONAL ont fait l’objet d’une divulgation auprès de revendeurs professionnels, en vue de mieux mettre en évidence les caractéristiques techniques des imprimantes LEXMARK par rapport à celles des produits concurrents ;

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Considérant que de telles informations répondent à la définition donnée par l’article 2 § 1 de la directive 84/55/CEE, aux termes duquel la publicité

s’entend de « toute forme de communication faite dans le cadre d’une activité commerciale…, dans le but de promouvoir la fourniture de biens ou de services »;

Considérant que, dès lors qu’au regard de ce qui précède, le document litigieux ne requiert pas préalablement une interprétation de l’article 2 § 1 de cette directive pour pouvoir être juridiquement qualifié, il convient, sans qu’il y ait lieu de saisir la Cour de Justice des Communautés Européennes par voie de question préjudicielle, de dire que, contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, le tableau incriminé constitue une publicité au sens des dispositions légales du Code de la consommation.

SUR L’EXISTENCE ALLÉGUÉE D’UNE PUBLICITÉ TROMPEUSE ILLICITE :

Considérant qu’aux termes de l’article L 121-1 du Code de la consommation,

"Est interdite toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs éléments ci-après : existence, nature, composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine…”;

Considérant qu’au soutien de sa prétention de ce chef, la Société X

FRANCE expose que le prix de 890 F (135,68 €), correspondant à l’imprimante

LEXMARK Z 43, et celui de 990 F (150,92 €), correspondant à l’imprimante

X SC 680, portés sur le tableau diffusé par la Société LEXMARK, sont faux et mensongers, ou pour le moins de nature à induire en erreur ;

Qu’elle relève que, sur la base de prix erronés, le tableau fait ressortir que le prix de l’imprimante LEXMARK serait inférieur de 100 F (15,24 €) à celui de

l’imprimante X, alors que c’est en réalité l’inverse;

Mais considérant qu’il résulte des documents produits aux débats que le prix de l’imprimante LEXMARK, mentionné sur le tableau litigieux pour la somme de 890 F (135,68 €), est le prix normal, hors promotion, lequel figure sur les fiches produites par la Société LEXMARK et dans son flash d’information du mois de mai

2001;

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Considérant qu’il est établi que le prix de 990 F (150,92 €) invoqué par la société appelante correspond en réalité à une offre pour la vente d’un lot spécial

(imprimante avec cartouche couleur) ;

Considérant que, dans la mesure où le prix de 890 F (135,68 €) était le prix standard applicable à tous, la société intimée ne peut se voir sérieusement reprocher de n’avoir pas émis des réserves, ni apporté des précisions relativement

à ce prix ;

Considérant que le prix de l’imprimante LEXMARK Z 43, tel qu’il figure sur le document incriminé, ne peut donc être qualifié d’inexact ou de nature à induire

en erreur ;

Considérant que la Société X FRANCE n’est pas davantage fondée

à soutenir que le prix de 990 F (150,92 €) pour l’imprimante X SC 680, serait faux et mensonger, au motif qu’il ressort du tarif officiel X de juin 2001 que le prix de cette imprimante est en réalité égal à 890 F (135,68 €) ;

Considérant qu’en effet, il est justifié que le prix de 990 F (150,92 €), indiqué sur le tableau pour l’imprimante X SC 680, correspond au prix public conseillé d’X, tel qu’il résulte de ses tarifs officiels d’avril 2001, alors que le prix de 890 F (135,68 €) est conforme au tarif officiel d’X du mois de juin

2001;

Considérant que le prix indiqué sur le tableau ne peut être qualifié de faux ou mensonger, dès lors que le nouveau tarif n’était pas connu au moment où ce tableau a été élaboré ;

Considérant qu’au demeurant, il est constant que la mise à jour du tableau

LEXMARK du mois de juillet 2001 a intégré le nouveau tarif de l’imprimante

X SC 680, soit 890 F (135,68 €) ;

Considérant qu’au surplus, la circonstance que le prix de 990 F

(150,92 €) se soit trouvé périmé à partir du mois de juin 2001 n’était pas de nature

à induire en erreur les revendeurs professionnels multi-marques auxquels étaient divulguées les informations contenues dans le tableau diffusé par la Société

LEXMARK INTERNATIONAL, puisque ces revendeurs étaient en mesure de connaître immédiatement par eux-mêmes la modification du prix de l’imprimante

X SC 680;

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Considérant que la même observation doit être faite en ce qui concerne le prix de 1.290 F (196,66 €), indiqué sur le tableau comparatif, pour le modèle

d’impression X SC 880, puisque le prix de cette imprimante s’est trouvé réduit à 1.190 F (181,41 €) seulement à partir du mois de juin 2001, la mise à jour du tableau LEXMARK du mois de juillet 2001 ayant intégré le nouveau tarif de

1.190 F (181,41 €) ;

Considérant que, par ailleurs, s’agissant des tableaux comparatifs des

1er septembre 2001 et 1er novembre 2001, il doit être observé que l’exactitude des prix des imprimantes LEXMARK et X figurant sur ces tableaux n’est pas critiquée, que la comparaison des prix entre ces imprimantes est parfaitement transparente, et que la mention "+ LEXMARK" signifie que les prix des imprimantes LEXMARK sont plus avantageux, ce qui ne signifie pas nécessairement que ces imprimantes sont moins chères que les imprimantes

X ;

Considérant que, dès lors, les premiers juges ont à bon droit énoncé que les mentions relatives aux prix respectifs des imprimantes de l’une et l’autre parties, telles qu’elles apparaissent sur le tableau initial d’avril 2001 et sur ceux établis ultérieurement, ne revêtent aucun caractère trompeur ou de nature à induire en erreur au sens des dispositions du Code de la consommation ;

Considérant que, pour conclure au caractère faux et trompeur des allégations de la Société LEXMARK INTERNATIONAL relatives au coût à la page, la Société X FRANCE se fonde sur des études réalisées par des journalistes spécialisés, en particulier sur celle figurant sur le site Internet www.hardware.fr du 1er août 2001, mettant en évidence le coût prohibitif des imprimantes LEXMARK par rapport à celles de sa concurrente ;

Mais considérant que les résultats de cette étude sont combattus par le rapport du Laboratoire EUROBENCH en date du mois de mai 2001, lequel décrit les avantages du système d’impression « monobloc » mis en oeuvre par la société intimée, et conclut que :

"Le système monobloc est la garantie à moindre coût de la solution de la quasi totalité des problèmes d’impression sans intervention onéreuse de SAV ou

d’échange" ;

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Considérant qu’il s’infère de l’analyse de ce laboratoire indépendant, dont les appréciations ne peuvent être suspectées de subjectivité, que les spécificités de la technologie d’impression « monobloc » de la Société LEXMARK, combinées avec les méthodes de commercialisation des cartouches d’encre appliquées par cette dernière, permettent de parvenir à un coût à la page moins élevé pour les imprimantes fabriquées par la société intimée ;

Considérant qu’il s’ensuit que la présentation, sur les tableaux diffusés par la Société LEXMARK INTERNATIONAL, d’un coût à la page assorti d’un "+" pour ses imprimantes, ne revêt pas un caractère faux ou trompeur ;

Considérant qu’il y a donc lieu, en confirmant de ce chef le jugement déféré, de dire que ces tableaux ne constituent pas des publicités trompeuses illicites au regard des dispositions de l’article L. 121-1 du Code de la consommation.

SUR LES DISPOSITIONS APPLICABLES À LA PUBLICITÉ COMPARATIVE ILLICITE :

Considérant qu’il est constant que le droit français en matière de publicité comparative est désormais régi par l’ordonnance n° 2001/741 du 23 août 2001, laquelle a transposé la directive communautaire 97/55/CE modifiant la directive

84/450/CEE sur la publicité trompeuse afin d’y inclure la publicité comparative;

Considérant qu’il apparaît également que le tableau élaboré en avril 2001 par la Société LEXMARK INTERNATIONAL a fait l’objet d’une diffusion à une époque antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance susvisée ayant modifié les articles L 121-8 et suivants du Code de la consommation ;

Considérant que la société intimée soutient à tort que les nouvelles dispositions issues de l’ordonnance du 23 août 2001, en tant qu’elles contiennent des dispositions pénales plus douces, sont d’application immédiate à toutes les procédures en cours ;

Considérant qu’en effet, l’action dont la Société X FRANCE a pris

l’initiative est de nature exclusivement civile, puisqu’elle tend uniquement à faire sanctionner le comportement prétendument fautif de la Société LEXMARK

INTERNATIONAL, en conformité avec les dispositions de l’article L 121-14 du

Code de la consommation, par l’allocation de dommages-intérêts ainsi que par des mesures d’interdiction et de publication;

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Considérant qu’il s’ensuit que, contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, le principe d’application immédiate des dispositions pénales plus douces, édicté par l’article 112-1 alinéa 3 du Code pénal, ne saurait s’appliquer à la présente espèce ;

Mais considérant que l’article 3 de la directive 97/55/CE du 06 octobre

1997 a imposé aux Etats membres de mettre en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à cette directive, au plus tard trente mois après sa publication au Journal Officiel des

Communautés Européennes, soit au plus tard le 23 avril 2000 ;

Considérant qu’il apparaît qu’en mai-juin 2001, époque de la diffusion du tableau litigieux, la directive européenne précitée n’avait toujours pas été transposée en droit français, nonobstant l’expiration du délai de transposition depuis plus d’une année ;

Considérant que, toutefois, dès lors que cette directive a intégré le système juridique communautaire à l’expiration de son délai de transposition, le juge national a l’obligation de tenir compte des normes issues de cette directive, peu important que celle-ci n’ait pas été transposée par l’Etat français dans le délai imparti;

Considérant que, selon la Cour de Justice des Communautés

Européennes, "il appartient à la juridiction nationale de donner à la loi interne, dans toute la mesure où une marge d’appréciation lui est accordée par son droit national, une interprétation et une application conformes aux exigences du droit communautaire, et de laisser, pour autant qu’une telle interprétation conforme

n’est pas possible, inappliquée toute règle nationale contraire" (arrêt CJCE Mary

Murphy c/ An Bord Telecom Eireann 157/86 du 4 février 1988);

Considérant que, dans son arrêt C 44/01 du 08 avril 2003 (Pippig

Augenoptik c/ Harlauer Handelsgesellschaft), la Cour de Justice a énoncé que :

"la directive 84/450 a procédé à une harmonisation exhaustive des conditions de licéité de la publicité comparative dans les Etats membres. Une telle harmonisation implique, par nature, que la licéité de la publicité comparative dans toute la Communauté doit être appréciée uniquement à la lumière des critères établis par le législateur communautaire” ;

-15



Considérant que, sur la base de cette appréciation, elle a dit pour droit que :

« L’article 7 paragraphe 2 de la directive 84/450/CEE du 10 septembre 1984, en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative, telle que modifiée par la directive 97/55/CE du 6 octobre 1997, s’oppose à l’application à la publicité comparative de dispositions nationales plus strictes en matière de protection contre la publicité mensongère en ce qui concerne la forme et le contenu de la comparaison… »;

Considérant qu’il doit se déduire de l’objectif communautaire, tel qu’il est explicité par le préambule de la directive 97/55/CE, et tel qu’il est rappelé par

l’arrêt susvisé de la Cour de Justice, d’une harmonisation exhaustive des conditions de licéité de la publicité comparative dans les Etats membres, que toutes mesures plus restrictives édictées par le droit national en matière de publicité comparative, et pas seulement celles ayant trait à la publicité trompeuse

« stricto sensu », doivent être laissées inappliquées par le juge national ;

Considérant qu’il s’ensuit, d’une part, que les dispositions des articles

L 121-8 et L 121-9 anciens du Code de la consommation, en tant qu’elles ne sont pas contraires à la directive du 6 octobre 1997 transposée en droit français par

l’ordonnance du 23 août 2001, doivent être interprétées conformément au texte et à l’esprit de cette directive;

Considérant qu’il s’ensuit, d’autre part, que les dispositions de l’article

L 121-8 et de l’article L 121-12 anciens du Code de la consommation, dès lors qu’elles sont contraires à l’esprit de la directive et ne peuvent donner lieu à une interprétation conforme à celle-ci, doivent être purement et simplement écartées;

Considérant qu’en l’occurrence, il doit être observé que les dispositions de

l’article 3 bis de la directive 84/450, issues de la directive 97/55 du 6 octobre 1997,

n’imposent pas que la publicité, lorsqu’elle comporte une comparaison sur les prix, concerne des produits identiques vendus dans les mêmes conditions, et indique la durée pendant laquelle sont maintenus des prix mentionnés comme siens par

l’annonceur ;

Considérant que ces dispositions ne subordonnent pas davantage la diffusion de la publicité à l’obligation de communication préalable par l’annonceur du message comparatif aux professionnels qu’elle vise ;

-16



Considérant que, par voie de conséquence, le tableau diffusé entre avril et juin 2001 par la Société LEXMARK INTERNATIONAL, même s’il n’est pas conforme aux exigences susvisées des anciens articles L 121-8 et L 121-12 du

Code de la consommation alors en vigueur, ne peut être qualifié de publicité comparative illicite comme étant contraire à des dispositions du droit national devant demeurer inappliquées ;

Considérant qu’il incombe cependant à la Cour de rechercher si ce tableau, et ceux diffusés ultérieurement, constituent ou non une publicité comparative illicite au regard des anciens articles L 121-8 et suivants du Code de la consommation, en tant que ces dispositions ne sont pas contraires à la directive du 06 octobre 1997, désormais transposée en droit français par l’ordonnance du

23 août 2001.

SUR L’EXISTENCE ALLÉGUÉE D’UNE PUBLICITÉ COMPARATIVE ILLICITE :

Considérant que la licéité du tableau comparatif de la Société LEXMARK

INTERNATIONAL doit être appréciée au regard des articles L 121-8 et L 121-9 alors en vigueur du Code de la consommation, interprétés à la lumière du texte et de la finalité de la directive du 06 octobre 1997;

Considérant qu’il résulte de ces dispositions que, pour être licite, la publicité comparative doit notamment :

- n’être pas trompeuse ou de nature à induire en erreur ;

- comparer objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives des biens ou services, objet de la publicité ;

- être loyale et ne pas entraîner le discrédit ou le dénigrement du concurrent ou de ses produits ; ne pas tirer indûment profit de la notoriété attachée à une marque ou à des signes distinctifs d’un concurrent ;

Considérant qu’à titre préalable, il a déjà été relevé que les tableaux diffusés par la société intimée ne revêtent pas un caractère trompeur ou de nature

à induire en erreur au sens des dispositions de l’article L. 121-1 du Code de la consommation ;

-17



Considérant que, selon la Société X FRANCE, le tableau élaboré en avril 2001 par la Société LEXMARK INTERNATIONAL, ayant pour objet de présenter les produits LEXMARK comme "L’alternative à X”, est tendancieux en ce qu’il se borne à comparer quatre modèles d’imprimantes d’une nouvelle gamme LEXMARK à trois modèles d’imprimantes de marque X alors disponibles sur le marché ;

Mais considérant qu’il ne peut se déduire de ce tableau que la Société

LEXMARK INTERNATIONAL a entendu procéder à une comparaison exhaustive de toutes les imprimantes fabriquées par l’une et l’autre parties, de telle sorte que le choix fait par la société intimée de sélectionner un certain nombre d’imprimantes sur la base de critères qui lui sont propres ne revêt pas un caractère fautif;

Considérant que la Société X FRANCE invoque le caractère subjectif du tableau en ce qu’il omet de faire apparaître dans son comparatif

l’imprimante X SC 480 SXU, dont le prix public est de 590 F, soit 89,94 €

(inférieur à celui de l’imprimante X SC 580 dont le prix public est de 790 F, soit 120,43 €) ;

Mais considérant que la Société LEXMARK INTERNATIONAL justifie que son tableau, loin de se limiter à une comparaison entre les prix, prend en compte

d’autres caractéristiques (vitesse, résolution, compatibilité, support papier, garantie…), lesquelles, si elles avaient été appliquées à l’imprimante X SC

480 SXU, auraient été défavorables à cette dernière ;

Considérant que la société appelante stigmatise la pratique adverse consistant, afin de promouvoir sa nouvelle gamme d’imprimantes, à comparer ses produits aux anciens modèles de la Société X, alors que cette dernière avait dans l’intervalle également lancé sa nouvelle gamme ;

Mais considérant qu’il résulte de l’étude accessible le 1er août 2001 sur le site internet www.HardWare.fr que LEXMARK a sorti sa nouvelle gamme, et en particulier l’imprimante Z 43, antérieurement à ses concurrents ;

Considérant que la Société LEXMARK INTERNATIONAL ne peut se voir sérieusement reprocher de n’avoir pas intégré dès le mois d’avril 2001 la nouvelle gamme d’X, alors que celle-ci n’est arrivée sur le marché au plus tôt qu’au mois de juin 2001, et alors que la société intimée a, dès juillet 2001, mis à jour ses tableaux en incorporant les nouvelles gammes de ses concurrents ;

-18



Considérant qu’il s’ensuit que le tableau comparatif LEXMARK ne peut être qualifié de déloyal dans sa présentation, au regard des modèles

d’imprimantes retenus et de leurs prix;

Considérant que, selon la Société X FRANCE, le tableau incriminé, et ceux diffusés ultérieurement; aboutissent à des conclusions tendancieuses et dénigrantes, au motif qu’elles font ressortir les prétendus "+" des imprimantes

LEXMARK par rapport aux imprimantes X, ce qui sous-entend de manière subjective que les premières sont globalement supérieures aux secondes ;

Mais considérant que le récapitulatif des avantages (sous la forme des "+") des imprimantes LEXMARK ne revêt pas en soi un caractère déloyal, dès lors qu’il vise à mettre en avant les caractéristiques des propres imprimantes de la Société

LEXMARK INTERNATIONAL, sans comporter des appréciations qualitatives sur les imprimantes de sa concurrente;

Considérant qu’au demeurant, il s’infère de l’examen des tableaux que la société intimée ne dissimule pas la supériorité des imprimantes X par rapport aux siennes, lorsque l’une ou l’autre des caractéristiques qu’elle a choisi de privilégier se révèle avantageuse pour les produits de la société appelante ;

Considérant qu’au surplus, le caractère prétendument subjectif de la comparaison à laquelle la Société LEXMARK a procédé se trouve contredit par le fait que ses appréciations reposent sur un large éventail des caractéristiques de ses imprimantes et sur leur caractère objectivement vérifiable;

Considérant qu’il s’ensuit également que ces tableaux comparatifs ne revêtent pas un caractère déloyal au regard de leurs commentaires sur les caractéristiques et sur la qualité des imprimantes comparées ;

Considérant que la Société X FRANCE soutient vainement que les tableaux comparatifs élaborés par la Société LEXMARK en juillet 2001, septembre

2001, novembre 2001 et janvier 2002 seraient illicites en ce qu’ils établissent une comparaison entre le prix des imprimantes concurrentes sans prendre en compte le coût des consommables ;

Considérant qu’en effet, c’est la prise en compte des avantages procurés par ces consommables, ainsi d’ailleurs que d’autres caractéristiques tout aussi pertinentes les unes que les autres, intervenant dans la détermination du prix, qui

-19


explique que certaines appréciations de la société intimée soient revêtues de la mention "+ LEXMARK", alors même que le prix des imprimantes X, en y incluant celui des consommables, est inférieur au prix des produits LEXMARK;

Considérant qu’en toute hypothèse, la comparaison entre les prix des imprimantes des deux sociétés concurrentes ne saurait être qualifiée d’illicite au seul motif qu’elle ne s’accompagne pas également d’une comparaison entre les coûts annexes d’utilisation de ces imprimantes ;

Considérant que cette comparaison, en tant qu’elle porte sur une caractéristique essentielle, vérifiable et représentative des biens ou services offerts, répond aux exigences de l’ancien article L 121-8 du Code de la consommation, en même temps qu’elle est conforme aux dispositions issues de

l’ordonnance du 23 août 2001, applicables aux tableaux établis postérieurement

à l’entrée en vigueur de cette ordonnance ;

Considérant que, par ailleurs, la Société X FRANCE soutient que ces tableaux comparatifs sont illicites en ce qu’ils tirent profit de la notoriété attachée à la marque X, en présentant les produits LEXMARK comme une alternative aux produits X ;

Mais considérant que, si la société intimée détient, en particulier dans le secteur des imprimantes jets d’encre, une part de marché sensiblement moins élevée que celle des Sociétés HEWLETT-PACKARD, CANON et X, cette circonstance n’autorise pas pour autant à conclure que la publicité comparative litigieuse a été choisie par elle avec comme objectif de se positionner sur ce marché en se plaçant à moindres frais dans le sillage de ses principales concurrentes ;

Considérant qu’à cet égard, la Société LEXMARK explique, sans être contredite sur ce point, que son modeste budget publicitaire s’explique par le fait qu’elle réserve l’essentiel de sa communication à ses revendeurs professionnels, par l’intermédiaire desquels elle commercialise ses imprimantes ;

Considérant que, de surcroît, il doit être observé que les tableaux incriminés identifient clairement les deux concurrents, de telle sorte qu’ils

n’engendrent pas un risque de confusion entre les produits de l’un et de l’autre;

-20



Considérant que cette publicité comparative ne caractérise donc pas un acte de parasitisme ayant pour objet de permettre à la société intimée de tirer indûment avantage de la notoriété attachée à la marque X ;

Considérant que, par voie de conséquence, il convient, en confirmant également de ce chef le jugement entrepris, de dire que les tableaux diffusés par la Société LEXMARK INTERNATIONAL ne constituent pas des publicités comparatives illicites au sens, tant des anciens articles L 121-8 et L 121-9 du

Code de la consommation interprétés à la lumière de la directive du 97/55/CE du

06 octobre 1997, que des dispositions nouvelles issues de l’ordonnance du

23 août 2001 applicables aux tableaux établis à compter de septembre 2001.

SUR LES AGISSEMENTS ALLÉGUÉS DE CONCURRENCE DÉLOYALE:

Considérant que, dès lors que la publicité comparative litigieuse est jugée licite, la circonstance que les tableaux de la société intimée comparent les imprimantes de cette dernière avec celles de sa concurrente, ne saurait être par elle-même constitutive d’agissements de concurrence déloyale par dénigrement;

Considérant qu’au surplus, il a déjà été énoncé que les tableaux comparatifs de la Société LEXMARK ne revêtent un caractère déloyal, ni dans leur présentation au regard des modèles d’imprimantes retenus et de leur prix, ni au regard de leurs commentaires sur les caractéristiques et sur la qualité des imprimantes comparées ;

Considérant qu’il a également été relevé que le recours à ce mode de communication ne caractérise pas, de la part de la Société LEXMARK

INTERNATIONAL, un comportement parasitaire ayant pour objet de lui permettre de bénéficier à moindres frais de la notoriété de la Société X FRANCE et des investissements publicitaires mis en oeuvre par cette dernière ;

Considérant qu’il apparaît en outre que les appréciations de caractère technique assortissant ces tableaux sont exclusives de toute critique ou remarque négative sur la qualité des imprimantes de la société appelante, et qu’elles ne cherchent nullement à discréditer les produits de cette dernière ;

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Considérant que cette forme de publicité ne saurait davantage revêtir un caractère dénigrant pour la marque X, au motif qu’elle s’adresse à des revendeurs professionnels particulièrement aptes à répercuter les informations contenues dans les tableaux litigieux auprès de leurs clients utilisateurs ;

Considérant qu’en effet, elle participe d’une stratégie commerciale destinée, parmi beaucoup d’autres, à permettre à un fournisseur d’imprimantes, dans un secteur économique où la concurrence est très rude, d’accroître les ventes de ses produits par l’intermédiaire de revendeurs multi-marques ;

Considérant qu’elle ne peut donc, ainsi que l’ont à bon droit retenu les premiers juges, s’analyser en un acte de concurrence déloyale de nature à engager la responsabilité de la Société LEXMARK INTERNATIONAL sur le fondement des dispositions de l’article 1382 du Code civil;

Considérant que, dès lors qu’au regard de ce qui précède, les tableaux incriminés ne constituent ni une publicité trompeuse illicite, ni une publicité comparative illicite, ni un agissement constitutif de concurrence déloyale, il convient, en confirmant le jugement déféré, de débouter la Société X

FRANCE de ses demandes de cessation immédiate de la diffusion de ces tableaux et de dommages-intérêts.

SUR LES DEMANDES COMPLÉMENTAIRES ET ANNEXES :

Considérant que, dès lors que les prétentions de la Société X

FRANCE sont écartées, cette dernière ne peut qu’être déboutée de ses demandes tendant à voir ordonner la publication du présent arrêt et à se voir autoriser à procéder à la diffusion de cet arrêt auprès des revendeurs et distributeurs ;

Considérant que l’équité commande d’allouer à la Société LEXMARK

INTERNATIONAL une indemnité complémentaire de 5.000 € sur le fondement de

l’article 700 du nouveau Code de procédure civile;

-22



Considérant qu’il n’est cependant pas inéquitable que la société appelante conserve la charge des frais non compris dans les dépens exposés par elle dans le cadre de la présente instance ;

Considérant que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a condamné la Société X FRANCE aux dépens de première instance ;

Considérant que cette dernière, qui succombe pour l’essentiel en son recours, doit être condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, hormis en ce qu’il

a énoncé que les tableaux litigieux ne constituent pas une publicité ;

Statuant à nouveau de ce dernier chef, et ajoutant :

DIT que les tableaux comparatifs utilisés par la Société LEXMARK

INTERNATIONAL constituent une publicité au sens des dispositions des articles

L 121-1 et suivants du Code de la consommation et de la directive communautaire

n° 84/450/CEE ;

DIT que ces tableaux ne constituent ni une publicité trompeuse illicite, ni une publicité comparative illicite, ni un acte de concurrence déloyale ;

DÉBOUTE la Société X FRANCE de l’ensemble de ses demandes;

CONDAMNE la Société X FRANCE à payer à la Société LEXMARK

INTERNATIONAL la somme complémentaire de 5.000 € sur le fondement de

l’article 700 du nouveau Code de procédure civile;

-23



CONDAMNE la Société X FRANCE aux dépens d’appel, et AUTORISE

Maître SEBA, Avoué, à recouvrer directement la part le concernant, conformément

à ce qui est prescrit par l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, Président, et signé par
Madame Françoise LAPORTE, Président et par Mme Marie-Thérèse GENISSEL, greffier présent lors du prononcé

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

Obewirel

Par arrêt en date du 14 avril 2005, la présente décision a été rectifiée en ce sens que :

ORDONNE la rectification de la première page de l’arrêt 513 du 09 décembre

2004 par substitution de l’avocat plaidant de la SAS LEXMARK INTERNATIONAL, "Me

Florence HERRENSCHMIDT avocat au barreau D’AIX EN PROVENCE« par »Me Fleur

HERRENSCHMIDT, avocat à la cour d’appel de Paris",

DIT que la présente décision rectificative sera mentionnée sur la minute et les expéditions de l’arrêt et sera notifié comme celui-ci.

LAISSE les dépens de l’instance en rectification à la charge du Trésor Public.

Fait à Versailles le : 4.4.05 Le greffier benimsel

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Cour d'appel de Versailles, 9 décembre 2004, n° 03/04565