Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 9 mars 2021, n° 20/00818

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 13e ch., 9 mars 2021, n° 20/00818
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 20/00818
Décision précédente : Tribunal de commerce de Pontoise, 19 décembre 2019
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53J

13e chambre

ARRET N°

PAR DEFAUT

DU 09 MARS 2021

N° RG 20/00818 – N° Portalis DBV3-V-B7E-TXTQ

AFFAIRE :

D X

C/

B Z

….

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Décembre 2019 par le Tribunal de Commerce de

PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG :

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Nadia CHEHAT

Me Typhanie BOURDOT

Me Martine DUPUIS

TC PONTOISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF MARS DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur D X

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par Maître Nadia CHEHAT, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 88

et par Maître Hakim ZIANE, avocat plaidant au barreau de PARIS, vestiaire : P0498

APPELANT

****************

Monsieur J H I

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par Maître Typhanie BOURDOT, avocat postulant au barreau de VERSAILLES,

vestiaire : 644 et par Maître Amina BENOTMANE, avocat plaidant au barreau du

VAL-DE-MARNE, vestiaire : 78

Société BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS prise en la personne de ses représentants

légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat

postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 2063545 et par Maître

BUISSON, avocat plaidant au barreau du Val d’Oise substitué par Maître Chelsy ROSSI-FERRARI,

avocat au barreau du VAL D’OISE

Monsieur F A

[…]

[…]

défaillant

Monsieur B Z

[…]

[…]

défaillant

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à

l’audience publique du 12 Janvier 2021 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant

Madame Delphine BONNET, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN,

Suivant acte sous seing privé en date du 3 novembre 2014, la Banque populaire rives de Paris (la Banque populaire) a consenti à la société H2N automobiles (la société H2N) deux prêts destinés à financer l’acquisition d’un fonds de commerce d’un montant respectif de 150 000 euros et de 50 000 euros, le premier bénéficiant de la caution de la Socama, en garantie desquels M. D X, par deux actes séparés du 11 octobre 2014, s’est porté caution solidaire à hauteur de 37 500 euros pour le premier et de 60 000 euros pour le second, avec, dans chaque acte, le consentement exprès de

son épouse.

Par acte sous seing privé du 1er mars 2016, M. X a cédé l’intégralité de ses parts sociales de la société H2N à MM. B Z, J H I et F A, l’acte comportant une clause de substitution de caution sous réserve de l’accord de l’organisme bancaire prêteur et les cessionnaires déclarant, dans l’hypothèse du refus de la banque, se porter sous-cautions solidaires de M. X s’agissant des sommes que pourrait lui réclamer la Banque populaire au titre des cautionnements garantissant les deux prêts.

Le 15 décembre 2017, la société H2N a été placée en liquidation judiciaire. La Banque populaire a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur judiciaire à hauteur de 98 266,91 euros outre intérêts pour le prêt de 150 000 euros et de 32 727,17 euros outre intérêts pour le prêt de 50 000 euros.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 janvier 2018, la Banque populaire a mis en demeure M. X de lui régler la somme totale de 70 227,70 euros.

Puis, par acte du 22 mars 2018, la banque a assigné en paiement M. X.Celui-ci a assigné en intervention forcée MM. B Z, J H I et F A.

Par jugement contradictoire assorti de l’exécution provisoire du 20 décembre 2019, le tribunal de commerce de Pontoise a :

— déclaré la Banque populaire recevable et fondée en l’ensemble de ses demandes,

— débouté M. X de l’ensemble de ses demandes,

— condamné M. X, pris en sa qualité de caution solidaire de la société H2N Automobiles, à payer à la Banque populaire la somme de 70 227,70 euros,

— condamné M. X, pris en sa qualité de caution solidaire de la société H2N Automobiles, à payer à la Banque populaire la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné in solidum MM. Z et A à payer à M. X la somme de 70 227,70 euros, limitée à la somme de 37 500 euros pour le prêt de 150 000 euros et à la somme 60 000 euros pour le prêt de 50 000 euros,

— jugé recevable et bien fondé l’appel en garantie formé par M. H I à l’encontre de M. Z tendant à le relever et à le garantir de toutes condamnations susceptibles d’être prononcées contre lui à la demande de M. X,

— débouté M. H I de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté M. A de l’ensemble de ses demandes,

— dit que les dépens de la présente instance seront supportés par tiers par MM. X, Z et A.

Par déclaration du 6 février 2020, M. X a interjeté appel de ce jugement. La déclaration d’appel a été signifiée par actes remis à étude d’huissier le 31 mars 2020 à M. Z et le 10 avril 2020 à M. A, lesquels n’ont pas constitué avocat.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 29 avril 2020 puis signifiées le 15 mai 2020 par acte remis à étude d’huissier à M. Z et M. A, M. X demande à la cour de :

— le dire et le juger recevable et bien fondé en son appel,

— infirmer en toutes ses dispositions le jugement,

et statuant à nouveau,

à titre principal :

— ordonner la nullité des actes de cautionnement souscrits,

à titre subsidiaire :

— condamner solidairement MM. Z, A et H I à le relever et le garantir de toutes les condamnations susceptibles d’être prononcées contre lui à la demande de la Banque populaire,

à titre infiniment subsidiaire :

— l’autoriser à se libérer de sa dette selon 23 mensualités de 500 euros, le solde devant être réglé lors de la 24e mensualité,

— dire que le règlement de cette dette s’effectuera le 15 de chaque mois, le premier versement devant intervenir le 15 du mois suivant la signification de la décision à intervenir,

— dire que le non-paiement de l’une quelconque de ces échéances entraînera de plein droit l’exigibilité immédiate de la créance après une mise en demeure demeurée infructueuse au terme d’un délai de quinze jours ouvrés,

en tout état de cause :

— débouter la Banque populaire, MM. Z, H I et A de l’ensemble de leurs demandes,

— condamner in solidum la Banque populaire, MM. Z, H I et A à lui verser la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La Banque populaire, dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 2 décembre 2020 puis signifiées par acte remis à étude d’huissier à M. Z le 3 août 2020 et à M. A le 5 août 2020, demande à la cour de :

à titre principal

— débouter M. X de sa demande tendant à voir prononcer la nullité des engagements de caution souscrits le 11 octobre 2014,

— constater que la cour n’est pas saisie d’une demande de déchéance du droit pour elle de se prévaloir des engagements de caution signés le 11 octobre 2014, en application de l’article L332-1 du code de la consommation,

— confirmer la décision en toutes ses dispositions, sauf à préciser que les intérêts au taux conventionnel courent à compter de la mise en demeure du 22 janvier 2018 ou à tout le moins à compter de l’assignation,

— débouter M. X de l’ensemble de ses demandes,

à titre subsidiaire

— confirmer la décision en toutes ses dispositions, sauf à préciser que les intérêts au taux conventionnel courent à compter de la mise en demeure du 22 janvier 2018 ou à tout le moins à compter de l’assignation,

— débouter M. X de l’ensemble de ses demandes,

à titre très subsidiaire

— lui donner acte qu’elle s’en rapporte à justice sur la demande tendant à voir condamner solidairement MM. Z, H I et A à relever et garantir M. X de toutes les condamnations susceptibles d’être prononcées contre lui,

— condamner, en tant que de besoin, MM. X, H I, Z et A à lui payer la somme de 70 227,70 euros avec intérêts au taux conventionnel à compter de la mise en demeure du 22 janvier 2018 ou à tout le moins à compter de l’assignation,

en tout état de cause

— condamner M. X à lui porter et payer la somme de 3 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. X aux entiers dépens,

— dire que les dépens d’appel pourront être recouvrés directement par la Selarl Lexavoué Paris-Versailles, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

M. H I dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 28 juillet 2020 puis signifiées par acte remis à étude d’huissier à M. A le 11 août 2020 et à M. Z le 12 août 2020, demande à la cour de :

— confirmer le jugement,

par conséquent

à titre principal,

— débouter M. X de son appel en intervention forcée à son encontre dès lors qu’il avait parfaitement connaissance de la substitution de sous-caution intervenue entre lui-même et M. Z depuis le 24 novembre 2017,

— dire et juger recevable et bien fondé son appel en garantie à l’encontre de M. Z tendant à le relever et le garantir de toutes condamnations susceptibles d’être prononcées contre lui à la demande de M. X,

à titre subsidiaire,

— l’autoriser à se libérer de sa dette selon 23 mensualités de 400 euros, le solde devant être réglé lors de la 24e mensualité,

en toute hypothèse,

— condamner in solidum MM. X et Z à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner in solidum MM. X et Z aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 décembre 2020.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Aucun moyen n’étant soulevé ou susceptible d’être relevé d’office, il convient de déclarer l’appel de M. X recevable.

M. X critique le jugement en ce qu’il a commis une erreur d’appréciation sur le caractère disproportionné de son engagement de caution. Après avoir visé l’article L. 332-1 du code de la consommation et rappelé la jurisprudence en matière de disproportion du cautionnement, M. X prétend que l’acte de cautionnement dont se prévaut la Banque populaire est disproportionné au regard de ses facultés précisant qu’à l’époque de son engagement, il percevait la somme mensuelle de 1 425 euros et qu’il supportait le remboursement d’un prêt immobilier et de divers crédits à la consommation, ce dont la banque était parfaitement informée. Il affirme que son engagement de caution était manifestement disproportionné à ses biens et revenus, ce d’autant que sa situation s’est encore détériorée depuis.

La Banque populaire rappelle que la sanction liée à une prétendue disproportion de l’engagement de caution n’est pas la nullité de l’acte mais l’impossibilité pour le créancier professionnel de s’en prévaloir, en sorte que M. X doit être débouté de sa demande de ce chef.

Elle prétend qu’en tout état de cause, il résulte de la fiche de renseignements remplie au moment de la souscription des engagements que M. X, marié sous le régime de la communauté, est propriétaire de sa résidence principale acquise en avril 2008 qu’il a estimée à 220 000 euros, qu’il a déclaré percevoir une pension de 16 800 euros, être gérant de la société H2N et que sa femme percevait un revenu annuel de 28 000 euros. La banque souligne qu’il a indiqué ni être au chômage ni avoir contracté un prêt immobilier auprès du Crédit lyonnais. Elle estime qu’il n’est donc pas

démontré que les engagements étaient disproportionnés au moment où ils ont été souscrits et que M. X n’établit pas qu’ils le seraient au moment où elle l’a appelé, soulignant qu’il est toujours propriétaire d’un bien immobilier.

Il résulte des dispositions de l’article L. 341-4 ancien du code de la consommation reprises aux articles L. 332-1 et L. 343-4 du même code qu’un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Il appartient à la caution qui invoque la disproportion de son engagement d’en apporter la preuve, laquelle s’apprécie à la date de la conclusion du cautionnement. La charge de la preuve du retour à meilleure fortune de la caution incombe au créancier.

En outre, lorsque la caution, lors de son engagement, a déclaré des éléments sur sa situation financière au créancier, celui-ci, en l’absence d’anomalies apparentes, peut se fonder sur ces seules déclarations de la caution dont il n’a pas à vérifier l’exactitude. La caution n’est pas alors admise à établir devant le juge que sa situation financière était en réalité moins favorable sauf si le créancier professionnel a eu connaissance de l’existence d’autres charges pesant sur la caution.

Lorsqu’une caution est mariée sous le régime de la communauté légale, le caractère manifestement disproportionné de son engagement s’apprécie au regard de ses biens et revenus mais également de ceux de la communauté.

Comme le relève justement la banque, la sanction du caractère manifestement disproportionné de l’engagement de caution est l’impossibilité pour le créancier professionnel de s’en prévaloir et non pas sa nullité. En l’absence de tout autre moyen de nullité développé par M. X autre qu’un rappel général des conditions de forme de l’acte de cautionnement sans en tirer une quelconque conséquence juridique au cas d’espèce, il convient, par substitution de motifs, de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de nullité des actes de cautionnement.

Il y a lieu néanmoins d’examiner le moyen tiré de la disproportion manifeste des engagements de caution soulevé par M. X au visa de l’article L. 332-1 du code de la consommation dans la mesure où il conclut in fine au débouté de la banque.

M. X, lorsqu’il s’est porté caution de la société H2N, a signé une fiche de renseignements en date du 19 août 2014, sous la mention 'je certifie sur l’honneur que les renseignements ci-dessus indiqués sont exacts et complets, notamment en ce qui concerne mon patrimoine, mes revenus et mes charges personnelles' aux termes de laquelle il a déclaré :

— être marié sous le régime de la communauté et avoir deux enfants à charge,

— être propriétaire avec son épouse de sa résidence principale acquise en 2008, estimée à 220 000 euros, au moyen d’un emprunt sur lequel il reste dû 185 000 euros, soit une valeur nette de 35 000 euros,

— percevoir des revenus annuels de 16 800 euros et son épouse de 28 000 euros,

— supporter des charges annuelles de remboursement du prêt immobilier de 12 000 euros.

Contrairement à ce que soutient la banque, ni les rémunérations de M. X en qualité de gérant ni les dividendes en qualité d’associé de la société H2N, qui sont des revenus escomptés de l’opération cautionnée, ne peuvent être pris en considération.

Il apparaît ainsi qu’au moment de leur souscription les deux engagements de caution signés le même jour par M. X à hauteur de la somme totale de 97 500 euros étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus et à ceux de la communauté.

La banque, qui inverse la charge de la preuve, n’établit pas qu’au moment où elle l’a appelé pour un montant de 70 227,70 euros, le 22 mars 2018, le patrimoine de M. X lui permettait de faire face à son obligation.

Elle ne peut donc se prévaloir des engagements de caution souscrits par M. X en garantie des prêts consentis à la société H2N et doit être déboutée de ses demandes.

Il convient en conséquence d’infirmer le jugement en ce qu’il a fait droit aux demandes de la banque et à la demande subsidiaire de M. X formée à l’encontre de MM. Z et A ainsi qu’à l’appel en garantie formé par M. H I à l’encontre de M. Z, devenus sans objet.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par défaut,

Déclare l’appel de M. X recevable,

Infirme le jugement sauf en ce qu’il a rejeté la demande de M. X d’annulation des actes de cautionnement,

Statuant de nouveau des chefs infirmés,

Déboute la Banque populaire rives de Paris de ses demandes,

Condamne la Banque populaire rives de Paris aux dépens de première instance et d’appel,

Rejette les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties pour le surplus.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, La présidente,

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