CAA de BORDEAUX, 5ème chambre (Juge unique), 7 décembre 2021, 21BX03756, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 5e ch. juge unique, 7 déc. 2021, n° 21BX03756
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 21BX03756
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de La Réunion, 30 décembre 2020, N° 1901199, 1901416
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000044462223

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

I. La Société de concassage et de préfabrication de La Réunion (SCPR), société par actions simplifiée, a demandé au tribunal administratif de La Réunion d’annuler la décision du 17 juin 2019 par laquelle la commission départementale d’aménagement foncier de La Réunion s’est opposée à la division de la parcelle cadastrée section BW n° 253 à Saint-Leu ainsi que la décision du 14 août 2019 par laquelle le maire de la commune de Saint-Leu s’est opposé à cette division.

Par un jugement n° 1901199, 1901416 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de La Réunion n’a pas admis l’intervention de la commune de Saint-Leu dans l’instance n° 1901199 relative à la décision de la commission départementale d’aménagement foncier, a annulé les décisions contestées et a enjoint au maire de la commune de Saint-Leu de délivrer à la société SCPR une décision de non-opposition à sa déclaration préalable de division de la parcelle concernée dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement.

II. La société SCPR a demandé au tribunal administratif de La Réunion d’annuler la décision du 17 juin 2019 par laquelle la commission départementale d’aménagement foncier de La Réunion s’est opposée à la division de la parcelle cadastrée section BW n° 294 à Saint-Leu ainsi que la décision du 14 août 2019 par laquelle le maire de la commune de Saint-Leu s’est opposé à cette division.

Par un jugement n° 1901198, 1901417 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de La Réunion n’a pas admis l’intervention de la commune de Saint-Leu dans l’instance n° 1901198, a annulé les décisions contestées et a enjoint au maire de la commune de Saint-Leu de délivrer à la société SCPR une décision de non-opposition à sa déclaration préalable de division de la parcelle concernée dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement.

III. La société SCPR a demandé au tribunal administratif de La Réunion d’annuler la décision du 27 novembre 2019 par laquelle le maire de la commune de Saint-Leu a rejeté sa demande de permis de construire pour des bâtiments destinés à l’exploitation d’une carrière sur la parcelle cadastrée section BW n° 253 sur le territoire de cette commune.

Par un jugement n° 2000076 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision contestée et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

IV. La société SCPR a demandé au tribunal administratif de La Réunion d’annuler la décision du 27 novembre 2019 par laquelle le maire de la commune de Saint-Leu a rejeté sa demande de permis de construire pour des équipements destinés à l’exploitation d’une carrière sur la parcelle cadastrée section BW n° 294 sur le territoire de cette commune.

Par un jugement n° 2000079 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision contestée et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

V. La société SCPR a demandé au tribunal administratif de La Réunion d’annuler la décision du 27 novembre 2019 par laquelle le maire de la commune de Saint-Leu a rejeté sa demande de permis de construire pour des équipements destinés à l’exploitation d’une carrière sur la parcelle cadastrée section BW n° 253 sur le territoire de cette commune.

Par un jugement n° 2000078 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision contestée et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

VI. La société SCPR a demandé au tribunal administratif de La Réunion d’annuler la décision du 27 novembre 2019 par laquelle le maire de la commune de Saint-Leu a rejeté sa demande de permis de construire pour des bâtiments destinés à l’exploitation d’une carrière sur la parcelle cadastrée section BW n° 294 sur le territoire de cette commune.

Par un jugement n° 2000080 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision contestée et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 21BX03756, le 22 septembre 2021, et par un mémoire enregistré le 19 novembre 2021, la commune de Saint-Leu, représentée par Me Boissy, demande à la cour d’ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1901199, 1901416 du tribunal administratif de La Réunion.

Elle soutient que :

 – son action repose sur l’article R. 811-15 du code de justice administrative ;

 – le jugement est irrégulier dès lors qu’il ne comporte pas les signatures exigées par l’article R. 741-7 du code de justice administrative ;

 – en outre-mer, et en particulier à La Réunion, les projets de division de parcelles sont soumis à déclaration préalable selon une procédure particulière sous l’égide du département en application des articles L. 181-31 et suivants du code rural et de la pêche maritime ; en application de ces dispositions, seule la décision de la commission départementale d’aménagement foncier, s’opposant au projet au motif qu’il était susceptible de compromettre gravement le caractère agricole du terrain et de remettre en cause ses conditions d’exploitation normale, peut faire l’objet d’un recours ; la société n’a pas exercé de recours contre cette décision avant l’expiration du délai dont elle disposait ; elle n’avait donc aucun intérêt à contester la décision du maire qui ne peut être regardée comme ayant retiré une quelconque décision créatrice de droits et son recours contre cette décision était tardif ;

 – la décision du maire du 14 août 2019 est purement confirmative de la décision de la commission départementale d’aménagement foncier ; ce refus ne peut être regardé comme faisant grief à la société requérante, le maire n’ayant aucune compétence dans ce domaine ; l’objet des deux décisions est le même et le fondement juridique est similaire puisque le maire s’est référé à la décision de la commission ; la demande de la société n’était donc pas recevable ;

 – le terrain concerné est classé en zone agricole du plan local d’urbanisme ; la richesse faunistique et la présence d’espèces protégées ont été reconnues par deux ordonnances du juge des référés du 29 avril 2019 ; une partie du terrain est actuellement exploitée et accueille un élevage et une autre partie sert au pâturage des animaux ; si l’exploitation du site est envisagée pour une période de quatre ans, les nuisances sonores et les poussières auront un effet dévastateur sur le bien-être des animaux et la qualité du site ; si la partie du terrain où est envisagée l’exploitation de la carrière n’accueille pas actuellement d’exploitation agricole, cela ne signifie pas qu’elle n’en présente pas le potentiel ; c’est donc à tort que le tribunal a estimé que le projet ne compromettra pas le caractère agricole de la zone ;

 – dès lors que la décision du maire n’a pas retiré une décision créatrice de droits, l’invocation par la société de l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme relatif à la procédure contradictoire de retrait est inopérante ;

 – dès lors que la division foncière ne relevait que du code rural et de la pêche maritime et pas du code de l’urbanisme, est également inopérant le moyen de la société tiré de ce que son dossier n’était pas incomplet au regard du code de l’urbanisme.

Par un mémoire, enregistré le 3 novembre 2021, la société SPCR, représentée par Me Hercé, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Leu le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – le moyen tiré de l’absence des signatures requises sur le jugement doit être écarté dès lors qu’à l’appui de ses affirmations, la commune se borne à produire la copie du jugement qui lui a été notifiée ;

 – la décision de la commission départementale d’aménagement foncier et celle de la commune, rendues sur la division projetée, n’ont pas le même objet ; elles sont prises sur deux fondements juridique distincts ; l’avis de la commission ne fait pas partie des pièces à joindre à la déclaration qui doit être déposée au titre du code de l’urbanisme ; en tout état de cause, la décision de la commission a fait l’objet d’un recours dans le délai ; il ne peut donc être soutenu que le recours contre la décision de la commune serait dirigé contre une décision confirmative d’une précédente décision qui n’aurait pas été contestée dans le délai ;

 – le projet de division porte sur deux lots seulement ; la parcelle n’est pas cultivée et n’accueille aucune activité d’élevage ; elle n’est pas à usage agricole ; le lot A destiné à devenir la propriété de la société, est bâti ; cinq bâtiments à usage d’habitation y sont construits ; à l’issue de la période d’exploitation de quatre ans, les terrains seront remis en l’état et leur caractère naturel y sera restauré ; le lot B, constitué d’un amoncellement de roches impropre à une exploitation agricole, n’a que peu d’intérêt agricole ; contrairement à ce qu’a estimé la commission départementale d’aménagement foncier, la division n’est donc pas susceptible de porter une atteinte grave au caractère agricole du site pour l’application de l’article R. 181-32 du code rural et de la pêche maritime ;

 – le schéma d’aménagement régional ne classe pas la parcelle parmi les espaces agricoles ; la commission n’était donc pas compétente pour se prononcer sur le projet de division ;

 – la commission n’a pas délibéré valablement, selon les modalités prévues à l’article R. 121-4 du code rural et de la pêche maritime ;

 – la décision de la commission n’est pas motivée, en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l’administration ;

 – la décision de la commission est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation au regard de l’article R. 181-32 du code rural et de la pêche maritime ;

 – la décision du maire a été prise sur un avis irrégulier de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers ; cette commission ne s’est pas prononcé au motif que le projet relevait de la compétence de la commission départementale de l’aménagement foncier alors qu’elle était bien compétente pour se prononcer en application de l’article L. 181-12 du code rural et de la pêche maritime ; cette absence d’avis a eu une incidence sur la décision prise ;

 – la décision du maire est également illégale pour avoir été prise sans contradictoire préalable alors qu’elle retire une non-opposition tacite antérieure, en méconnaissance de l’article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration ; cette absence de contradictoire l’a nécessairement privée d’une garantie ;

 – les conditions de retrait prévues par l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme ne sont pas remplies, la non-opposition tacite n’étant pas illégale ;

 – la décision du maire a été prise en méconnaissance du principe de l’indépendance des législations dès lors qu’elle se fonde uniquement sur la décision de la commission départementale d’aménagement foncier alors qu’elle devait reposer sur des considérations d’ordre urbanistique ; cette décision est entachée d’une erreur de droit ; aucune disposition ne dispense d’autorisation ou de déclaration en outre-mer les divisions visées à l’article L. 442-1 du code de l’urbanisme, qualifiées de lotissements et soumises à permis d’aménager ou à déclaration préalable.

Par un mémoire, enregistré le 27 novembre 2021, la commission départementale d’aménagement foncier de La Réunion, représentée par Me Naceur présente des observations et conclut à ce qu’il soit fait droit à la requête de la commune de Saint-Leu et à ce que soit mis à la charge de la société SCPR le versement d’une somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle s’associe aux moyens développés par la commune et soutient que tant la perte de superficie agricole causée par le projet que l’absence de garantie quant au devenir agricole des lots divisés établissent que le caractère agricole et naturel de la parcelle serait gravement compromis au sens de l’article R. 181-32 du code rural et de la pêche maritime.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 21BX03757, le 22 septembre 2021, et par un mémoire enregistré le 19 novembre 2021, la commune de Saint-Leu, représentée par Me Boissy, demande à la cour d’ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1901198, 1901417 du tribunal administratif de La Réunion.

Elle soutient les mêmes moyens que ceux exposés dans l’instance n° 21BX03756 visée ci-dessus.

Par un mémoire, enregistré le 3 novembre 2021, la société SPCR, représentée par Me Hercé, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Leu le versement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – le moyen tiré de l’absence des signatures requises sur le jugement doit être écarté dès lors qu’à l’appui de ses affirmations, la commune se borne à produire la copie du jugement qui lui a été notifiée ;

 – la décision de la commission départementale d’aménagement foncier et celle de la commune, rendues sur la division projetée, n’ont pas le même objet ; elles sont prises sur deux fondements juridique distincts ; l’avis de la commission ne fait pas partie des pièces à joindre à la déclaration qui doit être déposée au titre du code de l’urbanisme ; en tout état de cause, la décision de la commission a fait l’objet d’un recours dans le délai ; il ne peut donc être soutenu que le recours contre la décision de la commune serait dirigé contre une décision confirmative d’une précédente décision qui n’aurait pas été contestée dans le délai ;

 – le projet de division ne porte que sur deux lots ; le premier lot, destiné à devenir sa propriété, sera remis en état au terme de l’exploitation d’une durée de quatre ans et restitué à un usage agricole et il ne sera pas porté atteinte au caractère agricole ni à l’exploitation du second lot, destiné à demeurer la propriété de l’indivision B… ;

 – la commission n’a pas délibéré valablement, selon les modalités prévues à l’article R. 121-4 du code rural et de la pêche maritime ;

 – la décision de la commission n’est pas motivée, en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l’administration ;

 – la décision de la commission est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation au regard de l’article R. 181-32 du code rural et de la pêche maritime ;

 – la décision du maire a été prise sur un avis irrégulier de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers ; cette commission ne s’est pas prononcé au motif que le projet relevait de la compétence de la commission départementale de l’aménagement foncier alors qu’elle était bien compétente pour se prononcer en application de l’article L. 181-12 du code rural et de la pêche maritime ; cette absence d’avis a eu une incidence sur la décision prise ;

 – la décision du maire est également illégale pour avoir été prise sans contradictoire préalable alors qu’elle retire une non-opposition tacite antérieure, en méconnaissance de l’article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration ; cette absence de contradictoire l’a nécessairement privée d’une garantie ;

 – les conditions de retrait prévues par l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme ne sont pas remplies, la non-opposition tacite n’étant pas illégale ;

 – la décision du maire a été prise en méconnaissance du principe de l’indépendance des législations dès lors qu’elle se fonde uniquement sur la décision de la commission départementale d’aménagement foncier alors qu’elle devait reposer sur des considérations d’ordre urbanistique ; cette décision est entachée d’une erreur de droit ; aucune disposition ne dispense d’autorisation ou de déclaration en outre-mer les divisions visées à l’article L. 442-1 du code de l’urbanisme, qualifiées de lotissements et soumises à permis d’aménager ou à déclaration préalable.

Par un mémoire, enregistré le 27 novembre 2021, la commission départementale d’aménagement foncier de La Réunion, représentée par Me Naceur présente des observations et conclut à ce qu’il soit fait droit à la requête de la commune de Saint-Leu et à ce que soit mis à la charge de la société SCPR le versement d’une somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle s’associe aux moyens développés par la commune et soutient que tant la perte de superficie agricole causée par le projet que l’absence de garantie quant au devenir agricole des lots divisés établissent que le caractère agricole et naturel de la parcelle serait gravement compromis au sens de l’article R. 181-32 du code rural et de la pêche maritime.

III. Par une requête, enregistrée sous le n° 21BX03758, le 22 septembre 2021, la commune de Saint-Leu, représentée par Me Boissy, demande à la cour d’ordonner le sursis à exécution du jugement n° 2000076 du tribunal administratif de La Réunion.

Elle soutient que :

 – son action repose sur l’article R. 811-15 du code de justice administrative ;

 – le jugement est irrégulier dès lors qu’il ne comporte pas les signatures exigées par l’article R. 741-7 du code de justice administrative ;

 – la commission départementale d’aménagement foncier ayant refusé la division parcellaire, et la société n’étant ni recevable ni fondée à contester la décision de la commission, le maire était tenu de refuser le permis de construire ;

 – en toute hypothèse, le maire s’était opposé à la division et pouvait légalement se référer à cette opposition pour refuser le permis de construire ;

 – le tribunal a censuré à tort le motif de refus tiré de ce que les dispositions du plan local d’urbanisme applicables à la zone Ad et notamment les articles A1 et A2 faisaient obstacle à la délivrance du permis sollicité ; le tribunal n’a pas motivé son jugement sur ce point ;

 – la société n’est pas fondée à invoquer l’absence de consultation de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers car cette commission a été consultée.

Par un mémoire, enregistré le 3 novembre 2021, la société SPCR, représentée par Me Hercé, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Leu le versement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 –  le moyen tiré de l’absence des signatures requises sur le jugement doit être écarté dès lors qu’à l’appui de ses affirmations, la commune se borne à produire la copie du jugement qui lui a été notifiée ;

 – comme l’a jugé le tribunal, le maire ne pouvait fonder sa décision sur celle de la commission d’aménagement foncier qui a été prise sur le fondement d’une législation distincte ; l’avis de la commission ne fait pas partie des pièces qui doivent être jointes aux dossiers de demande de permis de construire ;

 – le jugement est suffisamment motivé ;

 – la commune ne peut faire valoir que le refus de permis serait justifié par l’incompatibilité du projet avec l’article A1 du règlement du plan local d’urbanisme dès lors que le projet a été qualifié de projet d’intérêt général par arrêté préfectoral du 5 décembre 2018 et que le PLU a été mis en compatibilité avec ce projet ; dans sa version applicable à la date du refus de permis, le PLU permettait donc la réalisation du projet ; de plus, comme l’a jugé le tribunal, la commune ne peut pas se prévaloir des dispositions applicables à la zone Ad qui avaient été introduites dans le PLU par l’arrêté du 5 décembre 2018 qui a été annulé ;

 – la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers aurait dû être consultée conformément à l’article L. 181-12 du code rural et de la pêche maritime ; c’est avis est d’autant plus important qu’il s’agit d’un avis conforme ;

 – en admettant que la commune se soit fondée, pour refuser le permis sur des considérations urbanistiques et notamment sur la décision d’opposition à la division de la parcelle dont il s’agit, cette décision est elle-même entachée d’illégalité dès lors qu’elle a été prise sans que la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers se soit prononcée, sans procédure contradictoire, sans que la décision de non-opposition retirée soit entachée d’illégalité et en contradiction avec le principe d’indépendance des législations.

IV. Par une requête, enregistrée sous le n° 21BX03759, le 22 septembre 2021, la commune de Saint-Leu, représentée par Me Boissy, demande à la cour d’ordonner le sursis à exécution du jugement n° 2000079 du tribunal administratif de La Réunion.

Elle soutient les mêmes moyens que ceux exposés dans l’instance n° 21BX03758 visée ci-dessus.

Par un mémoire, enregistré le 3 novembre 2021, la société SPCR, représentée par Me Hercé, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Leu le versement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient les mêmes moyens que ceux invoqués sans le cadre de l’instance n° 21BX03758 visée ci-dessus.

V. Par une requête, enregistrée sous le n° 21BX03760, le 22 septembre 2021, la commune de Saint-Leu, représentée par Me Boissy, demande à la cour d’ordonner le sursis à exécution du jugement n° 2000078 du tribunal administratif de La Réunion.

Elle soutient que :

 – son action repose sur l’article R. 811-15 du code de justice administrative ;

 – le jugement est irrégulier dès lors qu’il ne comporte pas les signatures exigées par l’article R. 741-7 du code de justice administrative ;

 – la commission départementale d’aménagement foncier ayant refusé la division parcellaire, et la société n’étant ni recevable ni fondée à contester la décision de la commission, le maire était tenu de refuser le permis de construire ;

 – en toute hypothèse, le maire s’était opposé à la division et pouvait légalement se référer à cette opposition pour refuser le permis de construire ;

 – le tribunal a censuré à tort le motif de refus tiré de ce que les dispositions du plan local d’urbanisme applicables à la zone Ad et notamment les articles A1 et A2 faisaient obstacle à la délivrance du permis sollicité ; le tribunal n’a pas motivé son jugement sur ce point ;

 – la société n’est pas fondée à invoquer l’absence de consultation de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers car cette commission a été consultée ;

 – la société ne peut se prévaloir d’un permis tacite et de la méconnaissance de la procédure contradictoire prévue en cas de retrait d’un acte créateur de droit ; une demande de complément de dossier a été adressée à la société et ce n’est qu’à compter du 29 juillet 2019 que son dossier de demande peut être considéré comme complet ; le délai d’instruction était de quatre mois.

Par un mémoire, enregistré le 3 novembre 2021, la société SPCR, représentée par Me Hercé, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Leu le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – le moyen tiré de l’absence des signatures requises sur le jugement doit être écarté dès lors qu’à l’appui de ses affirmations, la commune se borne à produire la copie du jugement qui lui a été notifiée ;

 – comme l’a jugé le tribunal, le maire ne pouvait fonder sa décision sur celle de la commission d’aménagement foncier qui a été prise sur le fondement d’une législation distincte ; l’avis de la commission ne fait pas partie des pièces qui doivent être jointes aux dossiers de demande de permis de construire ;

 – le jugement est suffisamment motivé ;

 – la commune ne peut faire valoir que le refus de permis serait justifié par l’incompatibilité du projet avec l’article A1 du règlement du plan local d’urbanisme dès lors que le projet a été qualifié de projet d’intérêt général par arrêté préfectoral du 5 décembre 2018 et que le PLU a été mis en compatibilité avec ce projet ; dans sa version applicable à la date du refus de permis, le PLU permettait donc la réalisation du projet ; de plus, comme l’a jugé le tribunal, la commune ne peut pas se prévaloir des dispositions applicables à la zone Ad qui avaient été introduites dans le PLU par l’arrêté du 5 décembre 2018 qui a été annulé ;

 – la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers aurait dû être consultée conformément à l’article L. 181-12 du code rural et de la pêche maritime ; cet avis est d’autant plus important qu’il s’agit d’un avis conforme ;

 – elle était titulaire d’un permis de construire tacite qui a été retiré sans procédure contradictoire ce qui l’a nécessairement privée d’une garantie ;

 – le retrait de permis suppose que le permis tacite retiré soit illégal ce qui n’est pas le cas en l’espèce ;

 – en admettant que la commune se soit fondée, pour refuser le permis sur des considérations urbanistiques et notamment sur la décision d’opposition à la division de la parcelle dont il s’agit, cette décision est elle-même entachée d’illégalité dès lors qu’elle a été prise sans que la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers se soit prononcée, sans procédure contradictoire, sans que la décision de non-opposition retirée soit entachée d’illégalité et en contradiction avec le principe d’indépendance des législations.

VI. Par une requête, enregistrée sous le n° 21BX03761, le 22 septembre 2021, la commune de Saint-Leu, représentée par Me Boissy, demande à la cour d’ordonner le sursis à exécution du jugement n° 2000080 du tribunal administratif de La Réunion.

Elle soutient les mêmes moyens que ceux exposés dans le cadre de l’instance n° 21BX03760 visée ci-dessus.

Par un mémoire enregistré le 3 novembre 2021, la société SPCR, représentée par Me Hercé, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Leu le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative

Elle soutient les mêmes moyens que ceux invoqués dans le cadre de l’instance n° 21BX03760 susvisée.

Vu :

 – les autres pièces des dossiers ;

 – les requêtes d’appel au fond enregistrées sous les n° 21BX01319, 21BX01320, 21BX01321, 21BX01322, 21BX01323 et 21BX01324.

Vu :

 – le code rural et de la pêche maritime ;

 – le code de l’urbanisme ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme C… A…,

 – et les observations de :

* Me Dubois, représentant la commune de Saint-Leu, qui rappelle le contexte de construction de la nouvelle route du littoral dans lequel s’inscrivent les affaires ; elle rappelle que la déclaration du projet d’intérêt général ainsi que la mise en conformité du plan local d’urbanisme et l’autorisation d’exploitation de la carrière ont été annulées par le tribunal et qu’il ne reste à réaliser que 2,5 km de route, de sorte que le projet de la SCPR ne présente plus de caractère de nécessité ; elle affirme que le projet, qui comporte neuf bâtiments et diverses installations, va remettre en cause 50 ha de zone agricole à protéger en altérant la qualité des sols et en compromettant les pâturages ; elle affirme que rien ne garantit que la durée de l’exploitation sera limitée à quatre ans et que six mois suffiront à remettre les lieux en l’état ; pour le surplus, elle s’en remet aux écritures ;

* Me Floury, représentant la société SCPR, qui rappelle que le chantier de la nouvelle route du littoral est actuellement à l’arrêt, ce qui rend nécessaire l’approvisionnement en matériaux et justifie donc l’intérêt du projet ; elle rappelle également que la société a fait appel des jugements d’annulation rendus par le tribunal et affirme que les procédures en cours ne faisaient pas obstacle à ce que la commune statue sur ses demandes de division et de permis de construire conformément au code de l’urbanisme ; elle indique enfin que la société, qui a confirmé ses demandes de permis de construire le 27 juillet 2021, est titulaire de permis tacites qui ne sont plus susceptibles de retrait et que, par conséquent les requêtes en sursis en exécution des jugements concernant les refus de permis de construire sont devenues sans objet ;

* Me Dubois indique ne pas souhaiter présenter d’autres observations après l’intervention de Me Floury.

Des notes en délibéré ont été enregistrées dans les instances n°21BX03758, n°21BX03759, n°21BX03760 et n°21BX03761 le 3 décembre 2021, présentées pour la Société de concassage et de préfabrication de La Réunion (SCPR) par Me Boissy.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article R. 811-15 du code de justice administrative sur lequel sont fondées les requêtes : « Lorsqu’il est fait appel d’un jugement de tribunal administratif prononçant l’annulation d’une décision administrative, la juridiction d’appel peut, à la demande de l’appelant, ordonner qu’il soit sursis à l’exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l’appelant paraissent, en l’état de l’instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l’annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d’annulation accueillies par ce jugement ».

2. La société de concassage et de préfabrication de La Réunion (SCPR), a pour projet l’ouverture et l’exploitation d’une carrière au lieu-dit Ravine du Trou, sur le territoire de la commune de Saint-Leu. Le terrain d’assiette du projet est situé sur une partie des deux parcelles cadastrées section BW n° 253 et n° 294 appartenant à l’indivision B…. Par deux décisions du 17 juin 2019, la commission départementale d’aménagement foncier s’est opposée à la division des deux parcelles. Par deux décisions du 14 août 2019, le maire de la commune de Saint-Leu s’est également opposé à la division des parcelles concernées. Le 27 novembre 2019, le maire de la commune a par ailleurs rejeté les demandes de permis de construire déposées par la société concernant, d’une part, les bâtiments et, d’autre part, les installations, à édifier sur chacune des parcelles. Par des jugements du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de La Réunion, saisi par la société SPCR, n’a pas admis l’intervention de la commune de Saint-Leu dans les deux instances relatives aux deux décisions de la commission départementale d’aménagement foncier, a annulé les décisions de la commission et du maire de la commune de Saint-Leu d’opposition aux divisions parcellaires, ainsi que les refus de permis de construire, et a enjoint au maire de délivrer à la société SPCR une décision de non-opposition aux déclarations préalables de division des parcelles cadastrées section BW n° 253 et n° 294 dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement. La commune de Saint-Leu, qui a par ailleurs fait appel de ces jugements, demande qu’il soit sursis à leur exécution. La commune conteste les jugements n° 1901199, 1901416 et n° 1901198, 1901417 en tant qu’ils prononcent l’annulation des décisions du maire du 14 août 2019 et qu’ils portent injonction au maire de délivrer une décision de non-opposition aux déclarations préalables de division des deux parcelles. En l’absence de contestation de la commune s’agissant de la non-admission de ses interventions et de l’annulation des décisions de la commission départementale d’aménagement foncier, elle doit être regardée comme ayant entendu faire appel de ces jugements seulement en tant qu’ils portent annulation des décisions du maire du 14 août 2019 et injonction au maire.

3. Alors même que la société SCPR, qui a confirmé ses demandes de permis de construire le 26 avril 2021 après l’annulation par le tribunal administratif des refus opposés à ses demandes le 27 novembre 2019, serait devenue titulaire de permis de construire tacites, les requêtes de la commune de Saint-Leu tendant à ce qu’il soit sursis à l’exécution des jugements d’annulation des refus de permis du 27 novembre 2019 ne sont pas pour autant devenues sans objet. Il y a lieu de statuer sur ces requêtes.

4. La commission départementale d’aménagement foncier de La Réunion, qui n’a pas la personnalité morale, déclare intervenir au soutien de la commune de Saint-Leu dans les instances n° 21BX03756 et 21BX03757. Son intervention peut être regardée comme formulée au nom du département de La Réunion qui justifie, eu égard à la nature et à l’objet du litige, d’un intérêt suffisant à intervenir.

5. En l’état de l’instruction, aucun des moyens susvisés invoqués par la commune de Saint-Leu ne paraissent sérieux et de nature à justifier, outre l’annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d’annulation accueillies par les jugements attaqués. Par suite, la commune n’est pas fondée à demander qu’il soit sursis à l’exécution de ces jugements.

6. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que soit mises à la charge de la société SCPR, qui n’est pas la partie perdante dans les présentes instances, les sommes demandées pour la commission départementale d’aménagement foncier de La Réunion, qui peuvent être regardées comme demandées en réalité pour le département de La Réunion au titre des frais d’instance. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Saint-Leu le versement à la société SCPR d’une somme globale de 2 500 euros au titre des frais exposés par elle dans les six instances.


DECIDE :

Article 1er : Les interventions du département de La Réunion dans les instances n° 21BX03756 et 21BX03757 sont admises.

Article 2 : Les requêtes de la commune de Saint-Leu sont rejetées.

Article 3 : La commune de Saint-Leu versera à la société SCPR la somme globale de 2 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées pour le département de La Réunion est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la commune de Saint-Leu, à la société de concassage et de préfabrication de La Réunion, au département de La Réunion et à l’indivision B….

Une copie en sera adressée pour information au préfet de La Réunion.


Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2021.


La présidente de chambre,

Elisabeth A…

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

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Nos 21BX03756, 21BX03757, 21BX03758, 21BX03759, 21BX03760, 21BX03761

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CAA de BORDEAUX, 5ème chambre (Juge unique), 7 décembre 2021, 21BX03756, Inédit au recueil Lebon