Cour administrative d'appel de Marseille, 7e chambre, 18 décembre 2020, n° 18MA02936

  • Digue·
  • Environnement·
  • Ouvrage·
  • Inondation·
  • Installation·
  • Ressource en eau·
  • Autorisation·
  • Activité·
  • Nomenclature·
  • Public

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 7e ch., 18 déc. 2020, n° 18MA02936
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 18MA02936
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 19 avril 2018, N° 1502230
Dispositif : Rejet

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI du domaine de l’Olympe a demandé au tribunal administratif de Marseille, à, titre principal, d’annuler l’arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 26 janvier 2015 portant mise en demeure à son encontre au titre des articles L. 171-6 à L. 171-8 du code de l’environnement concernant la digue de l’Olympe située sur la commune d’Aix-en-Provence et, à titre subsidiaire, de réformer cet arrêté pour limiter la remise en état de la digue de l’Olympe à l’enlèvement des remblais du mois de septembre 2014, dans les plus larges délais.

Par un jugement n° 1502230 du 20 avril 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 juin 2018 et 2 octobre 2020, sous le n° 18MA02936, la SCI du domaine de l’Olympe, représentée par Me B, demande à la Cour :

1°) à titre principal, d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 avril 2018 ;

2°) d’annuler l’arrêté du 26 janvier 2015 ;

3°) à titre subsidiaire, de réformer cet arrêté en vue de limiter la remise en état de la digue de l’Olympe à l’enlèvement des remblais du mois de septembre 2014, dans les délais les plus larges ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la demande de remise en état de la digue est prescrite ;

— le rapport de manquement du 29 octobre 2014 méconnaît les dispositions des articles L. 171-1 et L. 171-2 du code de l’environnement et le droit de propriété ;

— la visite des inspecteurs de l’environnement viole les stipulations des articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le rapport de manquement administratif est entaché d’une erreur de fait dès lors qu’elle n’est pas à l’origine de l’apport des gravats ;

— les dispositions de l’article L. 214-1 du code de l’environnement ne sont pas applicables à la digue et à ses remblais, dont l’existence est antérieure à ces dispositions et les travaux ont été avalisés par les autorités publiques ;

— la digue de l’Olympe ne constitue pas un ouvrage au sens de l’article L. 214-1 du code de l’environnement ;

— la digue de l’Olympe est légale en application du principe de non rétroactivité de la loi prévu à l’article 2 du code civil auquel la loi du 16 décembre 1964 n’a pas dérogé ;

— l’arrêté contesté viole les dispositions de l’article L. 214-3-1 du code de l’environnement en raison d’une erreur quant à la personne du débiteur ;

— la digue doit être qualifiée d’ouvrage public et relève du principe d’intangibilité ;

— elle ne relève pas des dispositions de l’article L. 214-3, I du code de l’environnement ;

— l’arrêté en litige méconnaît l’article L. 211-1 du code de l’environnement et est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation ;

— à titre subsidiaire, le rapport de manquement ne vise que les remblais effectués en septembre 2014 ;

— le risque représenté par la digue résulte exclusivement des rapports réalisés dans des conditions ne respectant pas le principe du contradictoire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2020, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par SCI du domaine de l’Olympe ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code civil ;

— le code de l’environnement ;

— la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 ;

— la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 ;

— le décret n° 93-742 du 29 mars 1993 ;

— le décret n° 2017-81 du 26 janvier 2017 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme D,

— et les conclusions de M. Thiélé, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI du domaine de l’Olympe est propriétaire de la parcelle cadastrée section KL n° 1, située sur le territoire de la commune d’Aix-en-Provence, quartier La Badesse, en rive gauche de l’Arc, sur laquelle est édifiée une digue d’environ 450 mètres de long, dénommée digue de l’Olympe. A la suite d’un rapport de manquement administratif, du 29 octobre 2014, établi par un agent de contrôle du service environnement de la direction départementale des territoires et de la mer des Bouches-du-Rhône, la SCI du domaine de l’Olympe a fait l’objet, le 26 janvier 2015, d’un arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône portant mise en demeure à son encontre, au titre des articles L. 171-6 à L. 171-8 du code de l’environnement et concernant l’ouvrage constitué par la digue de l’Olympe, de déposer un dossier de remise en état global y compris pour les travaux réalisés récemment ou de déposer un dossier de demande d’autorisation au titre du I de l’article L. 214-3 du code de l’environnement de la digue, y compris pour les travaux réalisés récemment, dans un délai de deux mois à compter de sa notification. La SCI du domaine de l’Olympe relève appel du jugement du 20 avril 2018 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté du 26 janvier 2015.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l’article L. 171-1 du code de l’environnement, dans sa rédaction applicable à la date de l’arrêté contesté : " I. – Les fonctionnaires et agents chargés des contrôles prévus à l’article L. 170-1 ont accès : 1° Aux espaces clos et aux locaux accueillant des installations, des ouvrages, des travaux, des aménagements, des opérations, des objets, des dispositifs et des activités soumis aux dispositions du présent code, à l’exclusion des domiciles ou de la partie des locaux à usage d’habitation. Ils peuvent pénétrer dans ces lieux entre 8 heures et 20 heures et, en dehors de ces heures, lorsqu’ils sont ouverts au public ou lorsque sont en cours des opérations de production, de fabrication, de transformation, d’utilisation, de conditionnement, de stockage, de dépôt, de transport ou de commercialisation mentionnées par le présent code ; 2° Aux autres lieux, à tout moment, où s’exercent ou sont susceptibles de s’exercer des activités soumises aux dispositions du présent code () / II. – Les fonctionnaires et agents chargés des contrôles ne peuvent avoir accès aux domiciles et à la partie des locaux à usage d’habitation qu’en présence de l’occupant et avec son assentiment.« . L’article L. 171-2 de ce code dispose que : » I. – Lorsque l’accès aux lieux mentionnés aux 1° et 2° du I de l’article L. 171-1 est refusé aux agents, ou lorsque les conditions d’accès énoncées au II du même article ne sont pas remplies, les visites peuvent être autorisées par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux ou les locaux à visiter () « . Selon l’article L. 172-1 du même code : » I. – Outre les officiers et agents de police judiciaire et les autres agents publics spécialement habilités par le présent code, sont habilités à rechercher et à constater les infractions aux dispositions du présent code et des textes pris pour son application et aux dispositions du code pénal relatives à l’abandon d’ordures, déchets, matériaux et autres objets les fonctionnaires et agents publics affectés dans les services de l’Etat chargés de la mise en oeuvre de ces dispositions, ou à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, à l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, dans les parcs nationaux et à l’Agence des aires marines protégées. Ces agents reçoivent l’appellation d’inspecteurs de l’environnement. II. – Pour exercer les missions prévues au I, les inspecteurs de l’environnement reçoivent des attributions réparties en deux catégories : 1° Les attributions relatives à l’eau et à la nature qui leur donnent compétence pour rechercher et constater les infractions prévues par les titres II, VI et VII du présent livre, les chapitres Ier à VII du titre Ier du livre II, le livre III, le livre IV et les titres VI et VIII du livre V du présent code et les textes pris pour leur application ainsi que sur les infractions prévues par le code pénal en matière d’abandon d’ordures, déchets, matériaux et autres objets ; () III. – Les inspecteurs de l’environnement sont commissionnés par l’autorité administrative et assermentés pour rechercher et constater tout ou partie des infractions mentionnées au 1° ou au 2° du II du présent article « . Aux termes de l’article L. 171-7 dudit code : » Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l’objet de l’autorisation, de l’enregistrement, de l’agrément, de l’homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application des dispositions du présent code, ou sans avoir tenu compte d’une opposition à déclaration, l’autorité administrative compétente met l’intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu’elle détermine. Elle peut édicter des mesures conservatoires et suspendre le fonctionnement des installations et ouvrages ou la poursuite des travaux, opérations ou activités jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d’autorisation, d’enregistrement, d’agrément, d’homologation ou de certification. () « . L’article L. 171-8 du code précité prévoit que : » I. – Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, en cas d’inobservation des prescriptions applicables en vertu du présent code aux installations, ouvrages, travaux, aménagements, opérations, objets, dispositifs et activités, l’autorité administrative compétente met en demeure la personne à laquelle incombe l’obligation d’y satisfaire dans un délai qu’elle détermine. En cas d’urgence, elle fixe les mesures nécessaires pour prévenir les dangers graves et imminents pour la santé, la sécurité publique ou l’environnement. / II. – Si, à l’expiration du délai imparti, il n’a pas été déféré à la mise en demeure, l’autorité administrative compétente peut arrêter une ou plusieurs des sanctions administratives suivantes : / 1° L’obliger à consigner entre les mains d’un comptable public avant une date qu’elle détermine une somme correspondant au montant des travaux ou opérations à réaliser. () / 2° Faire procéder d’office, en lieu et place de la personne mise en demeure et à ses frais, à l’exécution des mesures prescrites ; les sommes consignées en application du 1° sont utilisées pour régler les dépenses ainsi engagées ; / 3° Suspendre le fonctionnement des installations et ouvrages, la réalisation des travaux et des opérations ou l’exercice des activités jusqu’à l’exécution complète des conditions imposées et prendre les mesures conservatoires nécessaires, aux frais de la personne mise en demeure ; / 4° Ordonner le paiement d’une amende au plus égale à 15 000 euros et une astreinte journalière au plus égale à 1 500 euros applicable à partir de la notification de la décision la fixant et jusqu’à satisfaction de la mise en demeure. Les dispositions des deuxième et troisième alinéas du 1° s’appliquent à l’astreinte. () / Les mesures prévues aux 1°, 2° 3° et 4° ci-dessus sont prises après avoir informé l’intéressé de la possibilité de présenter ses observations dans un délai déterminé ".

3. L’article L. 160-1 du code de l’environnement dispose que : « Le présent titre définit les conditions dans lesquelles sont prévenus ou réparés, en application du principe pollueur-payeur et à un coût raisonnable pour la société, les dommages causés à l’environnement par l’activité d’un exploitant. / L’exploitant s’entend de toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui exerce ou contrôle effectivement, à titre professionnel, une activité économique lucrative ou non lucrative ». Aux termes de l’article L. 161-4 du code précité : « Le présent titre ne s’applique pas lorsque plus de trente ans se sont écoulés depuis le fait générateur du dommage ».

4. La SCI du domaine de l’Olympe ne peut utilement soutenir que l’arrêté contesté est relatif à un fait générateur prescrit en application de l’article L. 161-4 du code de l’environnement dès lors qu’il n’a pas été pris sur le fondement de ces dispositions mais sur celles des articles L. 171-1 et suivants du même code.

5. Les dispositions du I de l’article L. 171-1 du code de l’environnement mentionnées au point 2 ne prévoient pas la nécessité d’obtenir l’accord du propriétaire pour accéder aux espaces clos entre 8h et 20h et autres lieux à tout moment, contrairement au II du même article qui mentionne expressément que pour les domiciles et locaux à usage d’habitation, les agents assermentés n’y ont accès qu’en présence de l’occupant et avec son assentiment. Dès lors, le contrôle effectué par l’agent du service environnement de la direction départementale des territoires et de la mer des Bouches-du-Rhône de la digue de l’Olympe située en bordure de l’Arc, qui ne se trouve pas au domicile ou dans les locaux à usage d’habitation de la SCI du domaine de l’Olympe mais dans un espace non clos, n’avait pas à faire l’objet d’une autorisation des propriétaires. Par suite, la circonstance que le rapport de manquement administratif du 29 octobre 2014 et l’arrêté contesté mentionnent à tort, d’une part, que « Nous avons été reçu par les propriétaires de la parcelle MM. Alain et Serge A » et, d’autre part, que «   » l’inspecteur a constaté, en présence des propriétaires, la réalisation des travaux " est sans incidence. Par ailleurs, en l’absence de manifestation de volonté matérialisant un refus d’accès, la visite n’avait pas à être autorisée par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance du ressort, en application de l’article L. 171-2 du code de l’environnement. Le moyen tiré de la violation de ces dispositions, de celles de l’article L. 171-1 du même code et du principe du droit de propriété ne peut qu’être écarté.

6. Aux termes de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l’accès de la salle d’audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l’exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice. () ». Aux termes de l’article 8 de cette convention : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. ».

7. Ainsi qu’il a été dit au point 2, l’ingérence des fonctionnaires et agents chargés des contrôles mentionnée par les dispositions des articles L. 171-1 et L. 171-2 du code de l’environnement est prévue par la loi et constitue ainsi une mesure nécessaire à la sécurité publique et à la protection de la santé au sens des stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui n’ont dès lors pas été méconnues. En outre, la société requérante ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l’article 6 de la convention précitée eu égard à la nature de l’autorité en cause qui ne revêt pas le caractère d’un tribunal au sens de ces stipulations.

8. Aux termes de l’article L. 211-1 du code de l’environnement : " I. – Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion prend en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer : () 1° La prévention des inondations () « . L’article L. 214-1 du code précité dispose que : » Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations, les ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d’écoulement des eaux () « . Selon l’article L. 214-2 de ce code : » Les installations, ouvrages, travaux et activités visés à l’article L. 214-1 sont définis dans une nomenclature, établie par décret en Conseil d’Etat après avis du Comité national de l’eau, et soumis à autorisation ou à déclaration suivant les dangers qu’ils présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques compte tenu notamment de l’existence des zones et périmètres institués pour la protection de l’eau et des milieux aquatiques () « . Aux termes de l’article L. 214-3 du même code : » I.- Sont soumis à autorisation de l’autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d’accroître notablement le risque d’inondation, () « . L’article L. 214-6 du code précité dispose que : » () – II.- Les installations, ouvrages et activités déclarés ou autorisés en application d’une législation ou réglementation relative à l’eau antérieure au 4 janvier 1992 sont réputés déclarés ou autorisés en application des dispositions de la présente section. Il en est de même des installations et ouvrages fondés en titre. III.- Les installations, ouvrages et activités qui, n’entrant pas dans le champ d’application du II, ont été soumis à compter du 4 janvier 1992, en vertu de la nomenclature prévue par l’article L. 214-2, à une obligation de déclaration ou d’autorisation à laquelle il n’a pas été satisfait, peuvent continuer à fonctionner ou se poursuivre si l’exploitant, ou, à défaut le propriétaire, a fourni à l’autorité administrative les informations prévues par l’article 41 du décret n° 93-742 du 29 mars 1993, au plus tard le 31 décembre 2006. Toutefois, s’il apparaît que le fonctionnement de ces installations et ouvrages ou la poursuite de ces activités présente un risque d’atteinte grave aux intérêts mentionnés à l’article L. 211-1, l’autorité administrative peut exiger le dépôt d’une déclaration ou d’une demande d’autorisation. « . Aux termes de l’article R. 214-1 du code précité : » La nomenclature des installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation ou à déclaration en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 figure au tableau annexé au présent article () 3.2.2.0. Installations, ouvrages, remblais dans le lit majeur d’un cours d’eau / 1° Surface soustraite supérieure ou égale à 10 000 m² (A) ; / 2° Surface soustraite supérieure ou égale à 400 m² et inférieure à 10 000 m² (D). / Au sens de la présente rubrique, le lit majeur du cours d’eau est la zone naturellement inondable par la plus forte crue connue ou par la crue centennale si celle-ci est supérieure. La surface soustraite est la surface soustraite à l’expansion des crues du fait de l’existence de l’installation ou ouvrage, y compris la surface occupée par l’installation, l’ouvrage ou le remblai dans le lit majeur. () / 3. 2. 6. 0. Digues () 1° De protection contre les inondations et submersions ".

9. En premier lieu, la SCI du domaine de l’Olympe ne démontre pas que la digue en cause aurait été autorisée en application d’une législation ou réglementation relative à l’eau antérieure au 4 janvier 1992 ni qu’elle aurait fourni à l’autorité administrative les informations prévues par l’article 41 du décret n° 93-742 du 29 mars 1993, au plus tard le 31 décembre 2006, selon le II et du III de l’article L. 214-6 du code de l’environnement. La seule circonstance que la digue aurait été édifiée antérieurement aux lois des 16 décembre 1964 et 3 janvier 1992 n’est pas de nature à justifier sa régularité. Ces dispositions dérogeant expressément au principe de non-re´troactivite´ de la loi prévu par l’article 2 du code civil, la société requérante ne peut dès lors utilement soutenir que cet article en vertu duquel la loi ne dispose que pour l’avenir et n’a point d’effet rétroactif a été méconnu.

10. En deuxième lieu, il résulte de l’instruction que la digue de l’Olympe d’environ 450 mètres de long est implantée en rive gauche de l’Arc dont il n’est pas contesté qu’elle a été édifiée dans le but de protéger des inondations les habitations situées derrière cet ouvrage. Ce dernier constitue dès lors un ouvrage réalisé à des fins non domestiques entraînant une modification du niveau ou du mode d’écoulement des eaux de l’Arc au sens de l’article L. 214-1 du code de l’environnement, lequel est soumis, en application de l’article L. 214-2 du même code, à une obligation d’autorisation ou de déclaration suivant les dangers qu’il présente et la gravité de ses effets sur la ressource en eau à laquelle il n’a pas été satisfait en l’espèce. La digue de l’Olympe relève, en outre, de la nomenclature « 3. 2. 6.0 » relative aux digues prévue à l’article R. 214-1 du code de l’environnement comme le mentionne le rapport de manquement administratif qui porte sur l’absence d’existence légale de la digue. Sur ce point, la SCI du domaine de l’Olympe ne peut utilement se prévaloir d’une rédaction de cet article postérieure à l’arrêté contesté, issue du décret n° 2017-81 du 26 janvier 2017, qui renvoie aux dispositions de l’article R. 562-13 du même code à l’appui du moyen relatif à la procédure de demande d’autorisation des système d’endiguement laquelle doit être présentée par la commune ou l’établissement public de coopération intercommunal compétent, ce moyen de forme devant être apprécié dans sa version en vigueur à la date de l’arrêté contesté. Par suite, la circonstance à la supposer établie que la digue de l’Olympe préexisterait au régime d’autorisation prévue par la loi sur l’eau du 3 janvier 1992 n’est pas de nature à établir qu’elle ne serait pas soumise aux dispositions de l’article L. 214-1 du code de l’environnement ni que l’arrêté contesté, qui ne demande pas la démolition de la digue en cause, aurait été pris en méconnaissance de ces dispositions.

11. En troisième lieu, la SCI du domaine de l’Olympe n’établit pas que les travaux effectués sur la digue de l’Olympe auraient été subventionnés par le conseil général des Bouches-du-Rhône en se prévalant d’un courrier du 7 mai 1975 de ce dernier et d’une lettre du 11 septembre 1975 de la commune d’Aix-en-Provence qui se bornent à faire référence à des travaux sur les rives de l’Arc bordant sa propriété sans plus de précision. La circonstance que les travaux de confortement en cause ne constituent pas des remblais au sens de la nomenclature « 3.2.2.0 » prévue à l’article R. 214-1 du code de l’environnement est sans incidence sur la légalité de l’arrêté contesté lequel, pas plus que le rapport de manquement administratif, n’invoque cette nomenclature. Par ailleurs, d’une part, ces travaux et ce rapport portent sur la digue de l’Olympe laquelle entre dans la rubrique « 3.2.6.0 » relative aux digues de protection contre les inondations et, d’autre part, ils sont susceptibles d’accroître notablement le risque d’inondation, selon le rapport établi au mois d’août 2009 par le bureau d’étude IPSEAU, et doivent, ainsi, être soumis à autorisation au sens des dispositions de l’article L. 214-3 du code de l’environnement.

12. En quatrième lieu, il résulte de l’instruction que, par un courrier du 19 septembre 2014, la famille A a informé le préfet des Bouches-du-Rhône qu’elle allait procéder à des travaux de renforcement et d’entretien de la digue. Une lettre du 12 novembre 2014 de la SCI du domaine de l’Olympe mentionne également que « début septembre, MM. A ont été contactés par une société de BTP se présentant comme ayant l’habitude de travailler avec les collectivités, et proposant l’apport de matériaux propres pour conforter certains points de notre digue. () Ils ont donc accepté cette opportunité de conforter l’arrière de la digue en urgence ». La production d’une correspondance du 10 novembre 2014 de la SCI du domaine de l’Olympe adressée à la société Drive of Luxe l’informant qu’aucun camion lui appartenant ou à l’un de ses associés ou à un sous-traitant n’est autorisé à pénétrer dans sa propriété n’est pas de nature à établir qu’elle ne serait pas à l’origine des dépôts effectués au mois de septembre 2014. Il en va de même de la lettre du 21 avril 2018 qu’elle a adressée au commissariat d’Aix-en-Provence, suite au constat d’un dépôt de gravats effectué le même jour sur sa propriété et de la venue de deux camions qui ont fait demi-tour suite à l’intervention téléphonique de la police. Par suite, la SCI du domaine de l’Olympe ne démontre pas qu’elle ne serait pas l’auteur des dépôts de déchets issus de travaux publics constatés par le rapport de manquement administratif du 29 octobre 2014, lequel n’est ainsi pas entaché d’erreur de fait.

13. Aux termes de l’article L. 214-3-1 du code de l’environnement : « Lorsque des installations, ouvrages, travaux ou activités soumis à déclaration au titre du II de l’article L. 214-3 ou relevant des dispositions du I de l’article L. 214-4 ou de l’article L. 214-6 sont définitivement arrêtés, l’exploitant ou, à défaut, le propriétaire remet le site dans un état tel qu’aucune atteinte ne puisse être portée à l’objectif de gestion équilibrée de la ressource en eau défini par l’article L. 211-1. Il informe l’autorité administrative de la cessation de l’activité et des mesures prises. Cette autorité peut à tout moment lui imposer des prescriptions pour la remise en état du site, sans préjudice de l’application des articles L. 163-1 à L. 163-9 et L. 163-11 du code minier. ». Il résulte de ces dispositions que la charge financière des mesures à prendre au titre de la remise en état d’un site ne peut être légalement imposée au détenteur d’un bien qui n’a pas la qualité d’exploitant, d’ayant droit de l’exploitant ou qui ne s’est pas substitué à lui en qualité d’exploitant.

14. La digue et les travaux en litige étant dépourvus de toute autorisation prévue par les dispositions mentionnées au point 8, la SCI du domaine de l’Olympe ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de l’article L. 214-3-1 du code de l’environnement par l’arrêté en litige qui n’a pas été pris sur ce fondement mais sur celui des articles L. 171-1 à L. 171-8 du code de l’environnement. Il s’en suit que le syndicat intercommunal d’aménagement du bassin de l’Arc (SABA) ne peut être considéré comme l’exploitant de cet ouvrage selon ces dispositions, auquel incomberait la remise en état du site. Les circonstances que ce syndicat aurait engagé des travaux sur les rives de l’Arc et que le coût des travaux serait de 475 000 euros sont sans incidence. Par ailleurs, la SCI du domaine de l’Olympe étant la propriétaire de la parcelle supportant la digue en cause, le préfet des Bouches-du-Rhône a pu légalement la mettre en demeure, sur le fondement des articles L. 171-1 à L. 171-8 du code de l’environnement, de déposer un dossier de remise en état global ou de déposer un dossier de demande d’autorisation, au titre du I de l’article L. 214-3 du code précité, pour la digue et les travaux de confortement de cette digue réalisés en septembre 2014.

15. La qualification d’ouvrage public peut être déterminée par la loi. Présentent aussi le caractère d’ouvrage public notamment les biens immeubles résultant d’un aménagement, qui sont directement affectés à un service public, y compris s’ils appartiennent à une personne privée chargée de l’exécution de ce service public.

16. Il résulte de l’instruction que la SCI du domaine de l’Olympe n’est pas chargée de l’exécution d’un service public. Par ailleurs, selon une étude réalisée en novembre 2007 par le centre d’étude du machinisme agricole et du génie rural des eaux et forêts (Cemagref), la digue de l’Olympe présente un aléa de rupture fort et, en l’absence de réalisation de travaux, elle constitue un danger en cas de rupture pour les populations situées en arrière de l’ouvrage. Une autre étude effectuée par le bureau d’études IPSEAU en août 2009 relève que la conception de cette digue n’offre pas de garanties de sécurité suffisantes en cas de crues plus importantes et que le risque de rupture existe en plusieurs points, voire potentiellement sur tout son linéaire, faisant peser une menace sur les riverains situés côté aval de la digue. La société requérante ne peut dès lors soutenir que la digue de l’Olympe qui protège les habitations situées derrière elle d’une inondation en cas de crue est affectée à l’utilité publique, ni qu’elle relève de la responsabilité du préfet des Bouches-du-Rhône. Il s’en suit que cette digue ne constitue pas un ouvrage public devant bénéficier du principe d’intangibilité.

17. Compte tenu de ce qui a été dit au point 16 concernant le risque d’accroître notablement le risque d’inondation représenté par la digue de l’Olympe constaté par les études effectuées aux mois de novembre 2007 et d’août 2009, la SCI du domaine de l’Olympe n’est pas fondée à se prévaloir de la violation des dispositions du I de l’article L. 214-3 du code de l’environnement du fait du caractère protecteur de la digue.

18. Eu égard à ce qui a été exposé au point 16, l’arrêté contesté ne méconnaît pas les dispositions de l’article L. 211-1 du code de l’environnement relatives à la prévention des inondations, ni n’est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation du risque d’inondation dès lors que l’arasement puis la reconstruction de la digue de l’Olympe dans les règles de l’art en recul de l’Arc proposés par les études de novembre 2007 et d’août 2009 sont nécessaires à la prévention des inondations au sens des dispositions de cet article.

Sur les conclusions subsidiaires :

19. Le rapport de manquement administratif et l’arrêté contesté ne sont pas limités aux seuls remblais mais portent également sur la digue laquelle présente un caractère dangereux ainsi qu’il a été dit au point 16. La circonstance que les deux rapports Ipseau et Cemagref aient été réalisés de manière non contradictoire est sans incidence. En tout état de cause, la requérante a pu discuter devant le tribunal et la Cour du caractère dangereux de la digue. Ainsi, la procédure contradictoire n’a pas été méconnue. Par suite, les conclusions subsidiaires de la SCI du domaine de l’Olympe tendant à ce que l’arrêté en litige soit limité à l’enlèvement des remblais ne peuvent dès lors qu’être rejetées.

20. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI du domaine de l’Olympe n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 26 janvier 2015.

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SCI du Domaine de l’Olympe demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI du domaine de l’Olympe est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI du domaine de l’Olympe et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré après l’audience du 4 décembre 2020, où siégeaient :

— M. Pocheron, président de chambre,

— M. Guidal, président assesseur,

— Mme D, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 décembre 2020.

bb

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour administrative d'appel de Marseille, 7e chambre, 18 décembre 2020, n° 18MA02936