Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 mars 2013, 12-13.900, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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www.uggc.com · 25 juin 2013

La faute – envers de l'aléa thérapeutique (civ.1 20 mars 2013 n°12-13900 ; civ. 1 24 avril 2013 n°12-17975 ; civ. 1 24 avril 2013 n°12-17751) La frontière maladresse – aléa peut parfois paraître difficile à appréhender quand il s'agit de l'exécution technique d'un geste médical dans les suites duquel il est constaté une lésion, une plaie, une blessure, une perforation, une section. Le principe est bien que la responsabilité médicale ne peut être engagée qu'à la suite d'une faute, mais les actes du médecin et en particulier des chirurgiens ont pu être appréciés avec une certaine sévérité, …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. 1re civ., 20 mars 2013, n° 12-13.900
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 12-13.900
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Nîmes, 12 décembre 2011
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000027210050
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2013:C100278
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Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, pris en leurs deux branches qui sont identiques :

Vu l’article 1315 du code civil, ensemble l’article L. 1142-1, I du code de la santé publique ;

Attendu que l’atteinte, par un chirurgien, à un organe ou une partie du corps du patient que son intervention n’impliquait pas, est fautive, en l’absence de preuve, qui lui incombe, d’une anomalie rendant l’atteinte inévitable ou de la survenance d’un risque inhérent à cette intervention qui, ne pouvant être maîtrisé, relèverait de l’aléa thérapeutique ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le 23 mars 2006, M. X…, chirurgien, a pratiqué une lipo-aspiration sur la personne de Maryse Y…, qui est sortie le même jour de la clinique, que, souffrant de douleurs abdominales, elle a fait appel à son médecin généraliste, M. Z…, qui lui rendu visite les 24 et 25 mars et l’a fait hospitaliser le lendemain, au centre hospitalier de Bagnols-sur-Cèze, que Maryse Y… a ensuite été transférée au CHU de Nîmes où, après une opération d’urgence, elle est décédée le 28 mars 2006 ; que son époux, en son nom personnel et au nom de leur fille mineure, ainsi que ses deux fils majeurs (les consorts Y…), ayant recherché la responsabilité de MM. X… et Z…, la cour d’appel, estimant que M. X… n’avait pas commis de faute et que le décès trouvait essentiellement sa cause dans le retard au diagnostic imputable à M. Z…, a condamné ce dernier à indemniser les consorts Y… ;

Attendu que, pour écarter toute faute de M. X…, la cour d’appel s’est bornée à relever qu’il n’était pas démontré que la hernie ombilicale était décelable lors de l’examen clinique préalable, qui s’était révélé normal, aucun facteur de risque n’étant évoqué, qu’à cet égard, compte tenu des circonstances, il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir effectué de plus amples recherches, et que, même s’il n’était pas contestable que la plaie de l’intestin grêle résultait de l’acte chirurgical, il n’était pas davantage démontré que ce dernier n’avait pas été contraire aux règles de l’art ;

Qu’en constatant ainsi que l’intestin grêle avait été perforé lors d’une intervention consistant en l’exérèse de tissu graisseux, sans caractériser en quoi le chirurgien aurait fait la preuve de ce que la hernie ombilicale constituait une anomalie indécelable, rendant l’atteinte inévitable ou de ce que le risque de perforation et la contamination bactérienne subséquente, dont elle relevait, au demeurant, que, selon les experts, il s’agissait de la complication la plus grave de cette intervention, n’aurait pas été maîtrisable, la cour d’appel a violé le premier des textes susvisés et n’a pas donné de base légale à sa décision au regard du second ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a jugé que M. Z… serait seul tenu de réparer le préjudice des consorts Y…, à l’exclusion de M. X…, l’arrêt rendu le 13 décembre 2011, entre les parties, par la cour d’appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. X… à payer aux consorts Y… la somme globale de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. Z… (demandeur au pourvoi principal).

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué :

D’AVOIR rejeté la demande de Monsieur Z… tendant à voir constater que sa responsabilité ne pouvait être retenue qu’à hauteur de 5 %, et d’avoir jugé que Monsieur Z… serait seul tenu de réparer le préjudice des consorts Y…, à l’exclusion de Monsieur X… ;

AUX MOTIFS QUE « les premiers juges ont retenu des conclusions d’expertise qu’elles induisaient « nécessairement » un manquement aux règles de l’art imputable au docteur X… et ont reproché à ce dernier de ne pas avoir diagnostiqué la hernie ombilicale tant lors de l’examen préopératoire que lors de l’intervention chirurgicale, qualifiant ainsi une faute en relation certaine directe avec le décès de Madame Y…. Pour autant, il convient d’observer que les experts n’ont à aucun moment caractérisé une telle faute alors qu’il n’est pas démontré que la hernie ombilicale était décelable lors de l’examen clinique préalable, qui s’est révélé normal, et alors qu’aucun facteur de risque n’était évoqué. À cet égard et compte tenu de ces circonstances il convient de relever qu’il ne peut être reproché au docteur X… de ne pas avoir effectué de plus amples recherches. Par ailleurs, même s’il n’est pas contestable que la plaie de l’intestin grêle résulte de l’acte chirurgical, il n’est pas davantage démontré que ce dernier n’a pas été conforme aux règles de l’art. Enfin, il convient de souligner que le docteur X…, qui a normalement laissé Madame Y… rejoindre son domicile alors que les conséquences de la perforation intestinale n’étaient pas perceptibles dans les quelques heures qui ont précédé la sortie de la patiente, n’a pas été avisé de la dégradation de l’état de santé de cette dernière et n’a ainsi pas été mis en mesure de donner au médecin généraliste les éléments d’information susceptibles de permettre une prise en charge adaptée. Il convient par voie de conséquence, alors qu’aucune faute ne peut être reprochée au docteur X…, et réformant le jugement entrepris, de débouter les consorts Y…, la Caisse primaire d’assurance maladie du Gard et le Centre hospitalier de PONT SAINT ESPRIT de leurs demandes formées à l’encontre du docteur X…. Le rapport d’expertise a au contraire mis en exergue les fautes commises par le docteur Z…, en relevant qu’il était « surprenant » que l’ensemble des symptômes recensés (asthénie, nausées ou vomissements, chute tensionnelle) n’ait pas fait suspecter immédiatement une complication digestive liée à l’intervention faite par le docteur X…. Les experts ont notamment relevé qu’il était « encore plus surprenant » de constater la carence des examens cliniques menés, s’étonnant que le toucher rectal dont il est dit qu’il fait partie de l’étape incontournable d’un examen clinique complet et bien conduit, n’ait pas été effectué alors que ce simple toucher rectal devait normalement conduire immédiatement la patiente vers le bloc opératoire ou vers des investigations radiologiques courantes permettant ainsi une prise en charge chirurgicale en temps utile. Il s’en déduit ainsi que le docteur Z… n’a pas donné à Madame Y… des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données actuelles de la science. Le docteur Z… ne saurait utilement évoquer l’éventuelle responsabilité des médecins hospitaliers qui ont ultérieurement pris en charge Madame Y…, et lui appartiendra le cas échéant et s’il estime utile ou nécessaire d’agir selon les voies de droit qui lui paraîtront adaptées. Il convient par voie de conséquence, réformant partiellement le jugement entrepris, de dire que le docteur Z… a commis une faute médicale en relation de causalité avec le décès de Madame Y… et qu’il sera tenu de réparer l’intégralité du préjudice souffert par les consorts Y… suite à ce décès. Le docteur Z… soutient ajuste titre que la faute ainsi commise « ne pourrait qu’être à l’origine d’une perte de chance de survie pour la patiente » alors que les experts ont noté que la perforation d’une anse intestinale et la contamination bactérienne du tissu cellulaire sous-cutané de la paroi abdominale était la complication la plus grave d’une liposuccion abdominale. Il convient, relevant toutefois que le décès trouve essentiellement sa cause dans le retard au diagnostic et le retard à l’intervention chirurgicale, de dire que le préjudice indemnisable découlant de la faute commise par le docteur Z… est constitué par une perte de chance d’éviter le décès de 90 % » ;

1°) ALORS QU’en cas de lésion d’un organe voisin de celui qui est opéré, la faute du chirurgien ne peut être écartée que si ce dernier démontre que le patient présente une anomalie rendant l’atteinte inévitable pour réaliser l’intervention ; qu’en affirmant néanmoins, pour écarter toute faute du docteur X…, qui avait perforé, lors d’une liposuccion, l’intestin grêle de Madame Y… au niveau d’une hernie ombilicale, qu’il n’était pas démontré que cette hernie était décelable lors de l’examen clinique préalable, bien qu’il eût appartenu au docteur X… d’établir le caractère indécelable de l’hernie, la Cour d’appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l’article L. 1142-1 du Code de la santé publique ;

2°) ALORS QUE le chirurgien qui lèse un organe voisin de celui qu’il opère n’est pas tenu de réparer les conséquences de son acte si la lésion relève de l’aléa thérapeutique, c’est-à-dire d’un risque accidentel inhérent à l’acte médical et qui ne pouvait être maîtrisé ; qu’en se bornant néanmoins à affirmer, pour écarter la responsabilité du docteur X…, qui avait perforé, à l’occasion d’une liposuccion, l’intestin grêle de Madame Y… au niveau d’une hernie ombilicale non décelée lors de l’examen clinique préalable, que le docteur X… n’avait pas à effectuer de plus amples recherches en l’absence de facteur de risque connu et qu’il n’était pas démontré que l’acte chirurgical n’avait pas été conforme aux règles de l’art, sans indiquer en quoi la perforation de l’intestin grêle aurait pu constituer un risque inhérent à la liposuccion, ni en quoi le risque de ne pas déceler une hernie ombilicale n’aurait pu être maîtrisé, la Cour d’appel, qui n’a pas caractérisé un aléa thérapeutique, a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1142-1 du Code de la santé publique.

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour les consorts Y… (demandeurs au pourvoi incident).

Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir débouté les consorts Y… de leurs demandes dirigées contre le docteur X… ;

AUX MOTIFS QUE les premiers juges ont retenu des conclusions d’expertise qu’elles induisaient « nécessairement » un manquement aux règles de l’art imputable au docteur X… et ont reproché à ce dernier de ne pas avoir diagnostiqué la hernie ombilicale tant lors de l’examen préopératoire que lors de l’intervention chirurgicale, qualifiant ainsi une faute en relation certaine et directe avec le décès de Mme Y… ; que pour autant, il convient d’observer que les experts n’ont à aucun moment caractérisé une telle faute alors qu’il n’est pas démontré que la hernie ombilicale était décelable lors de l’examen clinique préalable, qui s’est révélé normal, et alors qu’aucun facteur de risque n’était évoqué ; qu’à cet égard, et compte tenu de ces circonstances, il convient de relever qu’il ne peut être reproché au docteur X… de ne pas avoir effectué de plus amples recherches ;

que par ailleurs, même s’il n’est pas contestable que la plaie de l’intestin grêle résulte de l’acte chirurgical, il n’est pas davantage démontré que ce dernier n’a pas été conforme aux règles de l’art ; qu’enfin, il convient de souligner que le docteur X…, qui a normalement laissé Mme Y… rejoindre son domicile alors que les conséquences de la perforation intestinale n’étaient pas perceptibles dans les quelques heures qui ont précédé la sortie de la patiente, n’a pas été avisé de la dégradation de l’état de santé de cette dernière et n’a ainsi pas été mis en mesure de donner au médecin généraliste les éléments d’information susceptibles de permettre une prise en charge adaptée ; qu’il convient par voie de conséquence, alors qu’aucune faute ne peut être reprochée au docteur X…, et réformant le jugement entrepris, de débouter les consorts Y… de leurs demandes à l’encontre du docteur X… ;

ALORS, D’UNE PART, QU’ en cas de lésion d’un organe voisin de celui qui est opéré, la faute du chirurgien ne peut être écartée que si ce dernier démontre que le patient présente une anomalie rendant l’atteinte inévitable pour réaliser l’intervention ; qu’en affirmant néanmoins, pour écarter toute faute du docteur X…, qui avait perforé, lors d’une liposuccion, l’intestin grêle de Mme Y… au niveau d’une hernie ombilicale, qu’il n’était pas démontré que cette hernie était décelable lors de l’examen clinique préalable, bien qu’il eût appartenu au docteur X… d’établir le caractère indécelable de l’hernie, la cour d’appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l’article L.1142-1 du code de la santé publique ;

ALORS, D’AUTRE PART, QUE le chirurgien qui lèse un organe voisin de celui qu’il opère n’est pas tenu de réparer les conséquences de son acte si la lésion relève de l’aléa thérapeutique, c’est-à-dire d’un risque accidentel inhérent à l’acte médical et qui ne pouvait être maîtrisé ; qu’en se bornant néanmoins à affirmer, pour écarter la responsabilité du docteur X…, qui avait perforé, à l’occasion d’une liposuccion, l’intestin grêle de Mme Y… au niveau d’une hernie ombilicale non décelée lors de l’examen clinique préalable, que le docteur X… n’avait pas à effectuer de plus amples recherches en l’absence du facteur de risque connu et qu’il n’était pas démontré que l’acte chirurgical n’avait pas été conforme aux règles de l’art, sans indiquer en quoi la perforation de l’intestin grêle aurait pu constituer un risque inhérent à la liposuccion, ni en quoi le risque de ne pas déceler une hernie ombilicale n’aurait pu être maîtrisé, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé un aléa thérapeutique, a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.1142-1 du code de la santé publique.

Le greffier de chambre

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