Cour de cassation, Chambre civile 1, 17 juin 2015, 14-19.740, Publié au bulletin

  • Contrat d'exercice d'un gynécologue obstétricien·
  • Contrats et obligations conventionnelles·
  • Contrat avec une clinique·
  • Transfert de la maternité·
  • Résiliation judiciaire·
  • Applications diverses·
  • Détermination·
  • Inexécution·
  • Résiliation·
  • Conditions

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Viole l’article 1134 du code civil une cour d’appel qui prononce la résiliation judiciaire du contrat d’exercice d’un gynécologue obstétricien aux torts exclusifs d’une clinique, alors que ce contrat avait réservé l’hypothèse d’une résiliation d’agrément des organismes de tutelle et que le fait pour un établissement de santé de s’engager, conformément aux orientations et objectifs fixés par les schémas régionaux d’organisation sanitaire, dans un regroupement de ses activités conduisant au transfert de sa maternité au sein d’un centre hospitalier public ne saurait lui être imputé à faute

Chercher les extraits similaires

Commentaires3

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
Cass. 1re civ., 17 juin 2015, n° 14-19.740, Bull. 2015, n°833, 1er Civ., n°1253 Bull. 2015 n° 6, I, n° 145
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 14-19740
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin 2015, n°833, 1er Civ., n°1253 Bulletin 2015 n° 6, I, n° 145
Décision précédente : Cour d'appel de Caen, 10 mars 2014
Textes appliqués :
article 1134 du code civil
Dispositif : Cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000030759725
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2015:C100687
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le 28 août 1992, la polyclinique de Deauville (la clinique) a conclu un contrat d’exercice professionnel libéral avec M. X…, gynécologue obstétricien, prévoyant qu’elle lui confiait, « sauf résiliation d’agrément des organismes de tutelle », la coexclusivité des lits de maternité de la clinique et que M. X… s’engageait à consacrer à celle-ci l’essentiel de son activité hospitalière privée et à ne pas exercer son art dans un autre établissement en dehors de ses fonctions hospitalières publiques à temps partiel ; qu’à la suite du regroupement des activités de la clinique avec celles d’établissements de santé publics sur un site unique et du transfert de la maternité de la clinique au sein de l’hôpital de la Côte fleurie, conformément aux schémas régionaux d’organisation sanitaire, la clinique n’a été autorisée par l’agence régionale d’hospitalisation à poursuivre son activité de gynécologie obstétrique que jusqu’au 31 décembre 2007 ; que M. X…, s’opposant à la modification de son contrat consécutive à ce transfert, en a demandé la résiliation aux torts exclusifs de la clinique et la condamnation de cette dernière au paiement de l’indemnité conventionnelle de résiliation et de dommages-intérêts pour non-respect du préavis ; que la clinique a sollicité reconventionnellement la résolution judiciaire du contrat aux torts de M. X… en invoquant une méconnaissance de la clause contractuelle d’exclusivité ;

Sur le second moyen :

Attendu que la clinique fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de résolution judiciaire du contrat de M. X… à ses torts exclusifs alors, selon le moyen :

1°/ que la violation par un médecin de la clause d’exclusivité insérée à son contrat d’exercice professionnel constitue à elle seule un manquement d’une importance telle qu’elle justifie la résiliation judiciaire aux torts exclusifs du médecin ; qu’en retenant que le comportement de M. X… ne caractérisait pas une faute dont la clinique pût se prévaloir pour obtenir la résolution du contrat aux torts du praticien et obtenir des dommages-intérêts au titre d’une perte de chance de réaliser des accouchements alors qu’elle avait relevé que M. X… s’était engagé à ne pas exercer son art dans un autre établissement en dehors des fonctions hospitalières publiques à temps partiel qu’il était appelé à remplir et qu’il était constant qu’il avait travaillé, en qualité de médecin gynécologue dans un établissement hospitalier privé à Paris à compter du 26 janvier 2004, ce en vertu d’un contrat à temps partiel, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses propres constatations et partant a violé les articles 1134 et 1184 du code civil ;

2°/ qu’il ressort des constatations mêmes de la cour d’appel que M. X… s’était engagé à consacrer à la clinique I’essentiel de son activité hospitalière privée et à ne pas exercer son art dans un autre établissement en dehors des fonctions hospitalières publiques à temps partiel qu’il était appelé à remplir et qu’il était constant que M. X… avait travaillé, en qualité de médecin gynécologue, dans un établissement hospitalier privé à Paris, à compter du 26 janvier 2004, ce en vertu d’un contrat à temps partiel, ce dont il s’évinçait qu’il avait manqué à ses obligations contractuelles justifiant la résiliation du contrat à ses torts exclusifs ; qu’en se fondant, pour estimer que le comportement de M. X… ne caractérisait pas une faute dont la clinique pût se prévaloir pour obtenir la résiliation du contrat aux torts du praticien, sur la circonstance que I’activité à temps partiel n’était pas concurrentielle de celle de Deauville, la cour d’appel, qui a statué par un motif inopérant, impropre à écarter le manquement grave de M. X… à ses obligations justifiant le prononcé de la résiliation du contrat d’exercice professionnel à ses torts exclusifs, a privé sa décision de base légale au regard de I’article 1184 du code civil ;

3°/ que le juge, qui ne peut procéder par voie d’affirmation, doit préciser sur quels éléments de preuve il se fonde pour prendre sa décision ; qu’en se bornant à affirmer, pour écarter le moyen tiré de ce que M. X… avait gravement violé ses obligations contractuelles en ne respectant pas la clause d’exclusivité insérée dans son contrat d’exercice professionnel, que I’activité à temps partiel de M. X… au sein de I’hôpital privé Saint-Joseph à Paris n’était pas concurrentielle de celle de Deauville et que c’était manifestement pour interdire I’exercice d’une activité concurrente que la clause d’exclusivité avait été insérée dans le contrat d’exercice, sans préciser les éléments de preuve sur lesquels elle s’était fondée pour parvenir à cette conclusion, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de I’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’ayant estimé non concurrentielle l’activité exercée au sein d’un établissement de santé privé parisien par M. X… et retenu que le contrat ne prévoyait une résiliation sans préavis ni indemnité qu’en cas de faute grave sanctionnée par la juridiction ordinale, la cour d’appel a pu en déduire que le comportement du praticien ne caractérisait pas une faute justifiant une résiliation de son contrat d’exercice à ses torts exclusifs ; que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l’article 1134 du code civil ;

Attendu que, pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat aux torts exclusifs de la clinique, l’arrêt retient que la perte de l’agrément n’est que la conséquence des choix antérieurs de celle-ci de ne pas poursuivre son activité d’obstétrique et qu’elle doit assumer les conséquences du manquement caractérisé à son engagement d’assurer à M. X… la coexclusivité des lits de maternité ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le contrat d’exercice avait réservé l’hypothèse d’une résiliation d’agrément des organismes de tutelle et que le fait pour un établissement de santé de s’engager, conformément aux orientations et objectifs fixés par les schémas régionaux d’organisation sanitaire, dans un regroupement de ses activités conduisant au transfert de sa maternité au sein d’un centre hospitalier public ne saurait lui être imputé à faute, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du permier moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a, sur la demande de M. X…, prononcé la résiliation judiciaire du contrat d’exercice professionnel aux torts exclusifs de la polyclinique de Deauville, l’arrêt rendu le 11 mars 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rouen ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, avocat aux Conseils, pour la société polyclinique de Deauville

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR, infirmant le jugement, prononcé la résiliation judiciaire du contrat d’exercice professionnel conclu le 28 août 1992 entre les parties et ce, aux torts exclusifs de la Polyclinique de Deauville, d’AVOIR dit que cette résiliation prendrait effet à la date de l’arrêt, d’AVOIR en conséquence condamné la polyclinique de Deauville à payer à Monsieur X… la somme de 98.010 euros à titre d’indemnité de résiliation avec intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2008 et la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du délai de préavis avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt et ce avec application de l’article 1154 du code civil ;

AUX MOTIFS QUE les articles 1134 et 1147 du code civil disposent que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et que le débiteur de l’obligation inexécutée est condamné à des dommages et intérêts toutes les fois qu’il ne justifie pas d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée ; l’article 1152 dispose que si la convention porte que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ou moindre sauf pour le juge à augmenter ce qui est manifestement dérisoire et réduire ce qui est manifestement excessif ;- aux termes du contrat d’exercice professionnel conclu entre les parties signataires pour une durée indéterminée, la Polyclinique de Deauville a confié au docteur X…, sauf résiliation d’agrément des organismes de tutelle, la co-exclusivité des 15 lits de la maternité de la Polyclinique de Deauville ; les cas de résiliation de la convention à l’initiative de la Polyclinique de Deauville, avec ou sans indemnité, sont prévus et les conséquences financières de la rupture sont différentes selon que la conférence médicale d’établissement (CME) a donné ou non un avis favorable ; il est constant que Monsieur X… n’a pu poursuivre l’activité d’obstétrique dans les conditions prévues par le contrat d’exercice à partir de la fin de l’année 2007 mais la Polyclinique de Deauville soutient en substance que la décision administrative de fermeture de la maternité et la perte de l’agrément constituent des causes d’exonération légale et contractuelle ; il peut être admis à cet égard que la politique de restructuration et de recomposition des établissements de santé menée sous l’égide des agences régionales d’hospitalisation, au travers des schémas régionaux d’orientation sanitaire (SROS) et de la mise en place des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM), a concerné la quasi-totalité des établissements de santé en France ; pour autant la Polyclinique de Deauville ne démontre pas que la fermeture de sa maternité lui ait été imposée par l’administration en vertu d’une décision unilatérale revêtant les caractéristiques de la force majeure ;bien au contraire, il apparaît qu’elle a été à l’initiative de certaines démarches et qu’elle a, à tout le moins, participé et collaboré activement à la restructuration qui a conduit notamment à la suppression de la maternité de Deauville ; il ressort amplement des pièces du dossier que :- lors de sa réunion du 29 octobre 1999 la conférence médicale d’établissement s’est déclarée favorable au dépôt par la Polyclinique de Deauville d’une demande de conversion des lits de maternité en lits de chirurgie ; – dans le cadre de la restructuration hospitalière initiée par l’ARH de Basse-Normandie, la Polyclinique de Deauville et le centre hospitalier de l’Estuaire ont décidé de bâtir un projet commun avec la création d’un établissement commun sur site unique ; le protocole d’accord du 21 septembre 2000 en a défini les objectifs et les conditions, notamment 'l’accord du directeur de l’ARH’ ; il en a confirmé le caractère consensuel ; contrairement à ce qu’a jugé le tribunal, le SROS n’imposait pas expressément la disparition du service d’obstétrique de la Polyclinique de Deauville même si la réalisation des objectifs poursuivis impliquait, dans le Pays d’Auge, le regroupement des structures existantes sur 2 ou 3 sites dont 1 à Lisieux ; en outre, le SROS prévoyait la faculté pour les établissements qui ne pourraient justifier d’une activité minimale annuelle de 300 accouchements, de se mettre à niveau dans un délai de 3 à 5 ans ; l’accord-cadre signé le 3 janvier 2005 entre l’ARH, les centres hospitalier de l’Estuaire (Equemauville) et de Trouville et la Polyclinique de Deauville confirmait le rôle décisif des établissements de santé dans la constitution du pôle de santé de la Côte Fleurie et dans le regroupement des activités ; et cet accord, auquel la Polyclinique de Deauville a consenti, prévoyait, entre autres dispositions, le transfert de l’activité d’obstétrique de la Polyclinique vers le centre hospitalier de l’Estuaire ; il convient d’observer que le projet de rapprochement des structures avec l’éventualité de la suppression de la maternité avait été évoqué en interne lors de diverses CME de la polyclinique (15 janvier 2001 et 6 juin 2001) avec pour contrepartie le développement de l’activité de chirurgie de la Polyclinique ; il n’est pas surprenant que, dans ce contexte, la Polyclinique n’ait pas exercé de recours contre la disposition du SROS concernant la maternité ; enfin, c’est bel et bien un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) qui a été signé le 6 avril 2007 'actant l’application’ de l’accord-cadre du 3 janvier 2005 ;même si la fusion et ses conséquences figuraient parmi les objectifs stratégiques de la région et si les 'marges de manoeuvre’ dont disposait l’établissement de santé au regard des impératifs financiers qu’elle ne pouvait éluder, étaient sans doute limitées, force est de constater que la SA Polyclinique de Deauville a conclu avec l’ARH de Basse-Normandie une convention qui ne peut s’analyser en un 'fait du prince’ de nature à la dispenser de ses obligations contractuelles à l’égard de Monsieur X… ; il en est de même de ce que la polyclinique appelle la 'perte de l’agrément’ ; dans sa séance du 18 septembre 2007, l’ARH a en effet pris une délibération au terme de laquelle elle a accueilli la demande présentée par la Polyclinique de Deauville tendant au renouvellement de son autorisation d’exercer l’activité de gynécologie-obstétrique ; et si elle a limité au 31 décembre 2007 la durée de validité de cette autorisation c’est dans le cadre de l’opération de regroupement des 3 établissements de santé de la Côte Fleurie sur un site unique prévu par le SROS et au vu du CPOM du 6 avril 2007 ;c’est en raison de l’arrêt programmé de l’activité de soins de gynécologie-obstétrique au 31 décembre 2007, que ce terme a été fixé et non parce que le seuil d’accouchements minimum de 300 n’aurait pas été atteint ; la décision rendue est donc conforme à la demande de la Polyclinique de Deauville en date du 20 avril 2007 qui ne sollicitait le renouvellement de l’autorisation que « dans l’attente du transfert effectif de l’activité prévue dès cette année 2007 » ; s’il est exact que l’ARH a appelé l’attention de la polyclinique sur la nécessité d’une demande en renouvellement, on ne peut considérer que l’établissement ait été contraint d’y procéder ; c’est parce qu’il n’existait alors aucune certitude que l’activité puisse être transférée avant la date normale d’échéance (10 septembre 2007) que la demande a été formulée et non parce que la Polyclinique de Deauville aurait voulu poursuivre au-delà l’activité d’obstétrique ; d’ailleurs, la Polyclinique de Deauville n’a nullement exercé de recours, et pour cause, à l’encontre de la décision de l’ARH visant expressément l’article L.6122-8 dernier alinéa du code de la santé publique relatif à la continuité des soins dans le cadre d’une opération de regroupement prévue par le SROS ; le fait que Monsieur X… n’ait, lui-même, exercé aucun recours est indifférent ; dès lors la décision de l’ARH ne peut être considérée comme une décision unilatérale venant « mettre fin de façon impromptue et brutale à (l') autorisation » comme le prétend la Polyclinique de Deauville ;il n’existe pas dans cet acte l’expression d’un 'fait du prince’ ou la révélation d’une cause étrangère non imputable à la Polyclinique : et celle-ci ne peut donc invoquer la 'perte de l’agrément', qui n’est que la conséquence de ses choix antérieurs, comme facteur d’exonération de ses obligations contractuelles à l’égard du docteur X… ;en fonction de l’ensemble de ces éléments, la cour considère que la Polyclinique de Deauville doit assumer les conséquences de son manquement caractérisé à son engagement d’assurer au docteur X… la 'co-exclusivité des 15 lits de maternité de la Polyclinique de Deauville’ ; la résiliation judiciaire du contrat d’exercice sera ainsi prononcée au regard de l’importance de la disposition méconnue au préjudice de Monsieur X… qui n’était pas tenu d’accepter les offres de 'reclassement’ qui lui ont été faites courant 2007 par son co-contractant ;

ALORS D’UNE PART QUE les annexes aux schémas régionaux d’organisation sanitaire de deuxième génération (SROS II), établis par les agences régionales d’hospitalisation (ARH), étaient des documents réglementaires opposables aux autorisations de soins sollicitées par les établissements de santé ; que l’annexe au volet périnatalité du SROS II de Basse-Normandie, adopté en juin 2010, prévoyait qu’un seul service de maternité de niveau 1, confié à un établissement public et non à un établissement privé, devrait à terme être autorisé dans le secteur de la Côte Fleurie, où se situe la polyclinique de Deauville ; qu’en retenant néanmoins que le SROS II n’imposait pas la disparition du service d’obstétrique de la polyclinique de Deauville, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée de cet acte réglementaire et violé les dispositions combinées des articles L. 6121-2 et R. 6122-25 du code de la santé publique, dans leur rédaction alors applicable ;

ALORS, D’AUTRE PART, QUE le respect des orientations et objectifs des schémas régionaux d’organisation sanitaires subordonne la délivrance ou le renouvellement des autorisations de soins et s’impose de façon générale aux établissements de santé et plus spécialement aux établissements de droit privé, quand bien même la réorganisation de la carte des soins serait conduite en concertation avec eux ; que le respect des orientations et objectifs des schémas régionaux d’organisation sanitaire constitue donc un fait du prince exonératoire de responsabilité contractuelle pour les établissements de santé qui engagent des restructurations afin de se conformer à ces orientations et objectifs ; qu’en décidant le contraire la cour d’appel a violé l’article 1148 du code civil ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu’il résulte des constatations de la cour d’appel que le contrat d’exercice professionnel accordait au docteur X… la co-exclusivité sur quinze lits de maternité de la polyclinique de Deauville, sauf résiliation d’agrément des autorités de tutelle ; qu’il résulte de ces mêmes constatations que l’agence régionale de l’hospitalisation de Basse-Normandie a décidé, par une délibération n°3 du 18 septembre 2007, de ne pas renouveler au-delà du 31 décembre 2007 l’autorisation de la polyclinique de Deauville d’exercer l’activité de soins de gynécologie-obstétrique, correspondant aux quinze lits de maternité ; que cette délibération résiliait donc l’agrément visé par l’article premier du contrat d’exercice professionnel à compter du 31 décembre 2007 et justifiait, en application des stipulations de cet article premier, l’exonération de la polyclinique de Deauville de ses obligations contractuelles à l’égard du docteur X… ; qu’en écartant cette clause par la considération que la perte de l’agrément n’était que la conséquence des choix antérieurs de la polyclinique, quand il lui appartenait de l’appliquer en considération de ses seuls termes, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l’article 1134 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR, infirmant le jugement, débouté la Polyclinique de Deauville de ses demandes tendant à voir dire et juger que le docteur X… avait gravement violé les obligations contractuelles mises à sa charge en exerçant une activité hors de la Polyclinique depuis janvier 2004, à voir prononcer la résolution judiciaire du contrat d’exercice professionnel signé le 28 août 1992 aux torts du docteur X… et à voir fixer le montant des dommages et intérêts mis à la charge de Monsieur X… à la somme de 1.062.582 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi ;

AUX MOTIFS QUE la résiliation judiciaire du contrat d’exercice liant les parties est acquise ; la faute de la Polyclinique a été caractérisée ; il s’agit d’examiner si Monsieur X… a, lui-même, commis une faute justifiant le prononcé de la résiliation aux torts partagés ; en vertu du contrat du 28 avril 1992, Monsieur X… s’était engagé à consacrer à la clinique l’essentiel de son activité hospitalière privée et, sauf cas d’urgence ou impossibilité matérielle, à ne pas exercer son art dans un autre établissement en dehors des fonctions hospitalières publiques à temps partiel qu’il était appelé à remplir ; or, il est constant que Monsieur X… a travaillé, en qualité de médecin gynécologue, dans un établissement hospitalier privé à Paris à compter du 26 janvier 2004, et ce, en vertu d’un contrat à temps partiel (4 demi-journées par semaine) alors qu’auparavant il effectuait des vacations à l’hôpital public d’Honfleur ; pour autant il continuait d’exercer à la Polyclinique de Deauville de 6 à 7 demi-journées par semaine, y consacrant ainsi toujours l’essentiel de son activité hospitalière privée au sens du contrat ; même si la convention n’a pas été, au moins dans sa lettre, strictement respectée par l’intéressé puisque l’hôpital parisien Saint-Joseph, où il exerçait les lundi et mardi, n’était pas un hôpital public, cette activité a temps partiel n’était pas concurrentielle de celle de Deauville ; or, c’est manifestement pour interdire l’exercice d’une activité concurrente que la clause pré-citée avant été insérée dans le contrat ; dans ces conditions, le comportement du docteur X… ne caractérise pas une faute dont la Polyclinique puisse de prévaloir pour obtenir la résolution du contrat aux torts du praticien et obtenir des dommages et intérêts au titre d’une perte de chance de réaliser des accouchements ; alors qu’elle n’ignorait pas depuis le début de l’année 2004 (cf les courriers échangés avec le docteur X… à cette époque), et les absences du médecin les lundi et mardi et le fait qu’il exerçait ces jours-là une activité hospitalière à Paris, la Polyclinique n’a invoqué l’argument tiré de l’exercice par Monsieur X… d’une partie de son activité hors la maternité de Deauville qu’à l’occasion de l’instance judiciaire engagée par le médecin en 2008 ; ce qui est révélateur du caractère artificiel de sa prétention ; et c’est de façon tout aussi infondée qu’elle prétend imputer à une faute du docteur X… la baisse du nombre des accouchements à la Polyclinique de Deauville et même la 'perte de l’agrément’ de la maternité enfin, il convient d’observer que la Polyclinique ne pouvait, en toute hypothèse, résilier le contrat d’exercice sans préavis ni indemnité qu’en cas de faute (du praticien) jugée grave, par la juridiction ordinale et sanctionnée par une interdiction d’exercer de plus de 6 mois ;ce qui n’est pas le cas en l’occurrence ;dans les autres cas la polyclinique ne pouvait résilier le contrat sans recueillir l’avis de la CME qu’à charge pour elle de payer l’une ou l’autre des indemnités sus-mentionnées (cf article XIII du contrat) ; le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat aux torts de Monsieur X… sans lui accorder d’indemnité et en ce qu’il a, au contraire, condamné l’intéressé à payer à la polyclinique une indemnité au titre d’une probabilité de 15 % de perte de chance de réaliser 735 accouchements ;

ALORS, D’UNE PART, QUE la violation par un médecin de la clause d’exclusivité insérée à son contrat d’exercice professionnel constitue à elle seule un manquement d’une importance telle qu’elle justifie la résiliation judiciaire aux torts exclusifs du médecin ; qu’en retenant que le comportement du docteur X… ne caractérisait pas une faute dont la polyclinique pût se prévaloir pour obtenir la résolution du contrat aux torts du praticien et obtenir des dommages et intérêts au titre d’une perte de chance de réaliser des accouchements alors qu’elle avait relevé que le docteur X… s’était engagé à ne pas exercer son art dans un autre établissement en dehors des fonctions hospitalières publiques à temps partiel qu’il était appelé à remplir et qu’il était constant qu’il avait travaillé, en qualité de médecin gynécologue dans un établissement hospitalier privé à Paris à compter du 26 janvier 2004, ce en vertu d’un contrat à temps partiel, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses propres constatations et partant a violé les articles 1134 et 1184 du code civil ;

ALORS, D’AUTRE PART, QU’ il ressort des constatations mêmes de la cour d’appel que le Docteur X… s’était engagé à consacrer à la clinique l’essentiel de son activité hospitalière privée et à ne pas exercer son art dans un autre établissement en dehors des fonctions hospitalières publiques à temps partiel qu’il était appelé à remplir et qu’il était constant que le docteur X… avait travaillé, en qualité de médecin gynécologue, dans un établissement hospitalier privé à Paris, à compter du 26 janvier 2004, ce en vertu d’un contrat à temps partiel, ce dont il s’évinçait qu’il avait manqué à ses obligations contractuelles justifiant la résiliation du contrat à ses torts exclusifs ; qu’en se fondant, pour estimer que le comportement du docteur X… ne caractérisait pas une faute dont la clinique pût se prévaloir pour obtenir la résiliation du contrat aux torts du praticien, sur la circonstance que l’activité à temps partiel n’était pas concurrentielle de celle de Deauville, la cour d’appel, qui a statué par un motif inopérant, impropre à écarter le manquement grave du docteur X… à ses obligations justifiant le prononcé de la résiliation du contrat d’exercice professionnel à ses torts exclusifs, a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1184 du code civil ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE le juge, qui ne peut procéder par voie d’affirmation, doit préciser sur quels éléments de preuve il se fonde pour prendre sa décision ; qu’en se bornant à affirmer, pour écarter le moyen tiré de ce que le docteur X… avait gravement violé ses obligations contractuelles en ne respectant pas la clause d’exclusivité insérée dans son contrat d’exercice professionnelle, que l’activité à temps partiel du docteur X… au sein de l’hôpital privé Saint Joseph à Paris n’était pas concurrentielle de celle de Deauville et que c’était manifestement pour interdire l’exercice d’une activité concurrente que la clause d’exclusivité avait été insérée dans le contrat d’exercice, sans préciser les éléments de preuve sur lesquels elle s’était fondée pour parvenir à cette conclusion, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour de cassation, Chambre civile 1, 17 juin 2015, 14-19.740, Publié au bulletin