Cour de cassation, Chambre sociale, 5 juillet 2017, 15-21.924, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Commentaires7

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Maître Judith Bouhana- Avocat Spécialiste · LegaVox · 30 novembre 2017

www.bouhana-avocats.com · 22 novembre 2017

Les discriminations au travail sont nombreuses : discrimination syndicale (1), à l'égard l'âge (2), de la santé (3) ou de l'orientation sexuelle (4) sont prohibées par la loi (article 1132-1 du Code du travail). Le barème obligatoire fixé par les ordonnances “Macron” n'est pas applicable : le licenciement discriminatoire est nul, la réintégration du salarié peut être ordonnée et l'indemnité pour licenciement nul est au minimum égale à 6 mois de salaire (article L.1235-3-1 du Code du travail). Toute décision reposant sur une discrimination illicite est nulle (article L.1132-4 du Code du …

 

Village Justice · 22 novembre 2017

Comme en matière de harcèlement moral (en savoir plus), le licenciement discriminatoire échappe au barème obligatoire des indemnités pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse fixées par l'ordonnance 2017-387 du 22 septembre 2017. L'article 1132-1 du Code du travail liste les principales discriminations prohibées en droit du travail tels que l'activité syndicale (1), l'âge (2), la santé (3) et l'orientation sexuelle (4), dont il va être ici question. Ainsi, en dépit du barème obligatoire, tout ce qui relève d'une sanction discriminatoire fait l'objet d'une indemnisation …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 5 juill. 2017, n° 15-21.924
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 15-21.924
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Bordeaux, 20 mai 2015, N° 14/05544
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000035151302
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2017:SO01191
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Texte intégral

SOC.

CGA

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 5 juillet 2017

Rejet

Mme Y…, conseiller le plus ancien faisant fonction de président

Arrêt n° 1191 F-D

Pourvoi n° R 15-21.924

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. Frédéric X…, domicilié […],

contre l’arrêt rendu le 21 mai 2015 par la cour d’appel de Bordeaux (chambre sociale, section B), dans le litige l’opposant à la Caisse agricole mutuel de Charente-Maritime et Deux-Sèvres, dont le siège est […],

défenderesse à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 31 mai 2017, où étaient présents : Mme Y…, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Z…, conseiller référendaire rapporteur, M. Betoulle, conseiller, Mme Lavigne, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Z…, conseiller référendaire, les observations de la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat de M. X…, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la Caisse agricole mutuel de Charente-Maritime et Deux-Sèvres ,et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 21 mai 2015) statuant sur renvoi après cassation (Soc. 9 juillet 2014, n°10-18341), que M. X…, employé depuis 1998 par le Crédit agricole mutuel de Charentes-Maritimes et des Deux-Sèvres (le Crédit agricole), a demandé à son employeur l’attribution de jours de congés et d’une prime accordés au personnel, en cas de mariage, par la convention collective nationale du Crédit agricole, à la suite de la conclusion, le 11 juillet 2007, d’un pacte civil de solidarité avec un partenaire de même sexe ;

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir dire qu’il avait subi, de la part du Crédit agricole, une discrimination directe sur le critère de la situation de famille alors, selon le moyen :

1°/ que l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu’en relevant que M. X… ne tirerait pas de conséquence juridique ou indemnitaire de la discrimination fondée sur sa situation de famille, quand il réclamait spécifiquement l’indemnisation du préjudice moral né de cette discrimination ainsi que la réparation du caractère abusif de la résistance de l’employeur à le faire bénéficier des mêmes droits que les salariés mariés depuis l’avis de la Halde du 11 février 2008 qui avait retenu l’existence d’une inégalité de traitement entre les salariés mariés et pacsés peu important leur sexe, la cour d’appel a dénaturé les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°/ que pour apprécier l’existence d’une discrimination et du préjudice subi à cette occasion, les juges du fond doivent se placer à l’époque où les faits discriminatoires ont été commis; qu’en retenant, pour dénier l’existence de la discrimination dont M. X… se disait victime du fait qu’il n’avait pas bénéficié des congés et de la prime pour mariage lors de la conclusion du pacte civil de solidarité en 2007, que la loi du 27 mai 2013 avait autorisé le mariage homosexuel, la cour d’appel a statué par un motif impropre à apprécier l’existence de la discrimination invoquée et privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 122-45 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige ;

3°/ que la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 pose un principe général d’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail et prohibe toute discrimination dans ce cadre; qu’il résulte spécifiquement de l’article L. 122-45 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, qu’aucun salarié ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, en raison de sa situation de famille ; qu’en jugeant au contraire que ni la loi française ni les instruments internationaux ne prohiberaient une différence de traitement entre les personnes mariées et celles ayant conclu un pacte civil de solidarité pour retenir que l’employeur de M. X… pouvait ne pas faire bénéficier le salarié concluant un pacte civil de solidarité d’avantages équivalents à ceux attribués pour la célébration d’un mariage, la cour d’appel a violé ensemble, par refus d’application, l’article L. 122-45 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige et la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 ;

4°/ qu’aucun salarié ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération en raison de sa situation de famille ; que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales protège le droit de toute personne au respect de sa vie familiale et interdit tout discrimination sur le fondement de ce droit ; que la Cour européenne des droits de l’homme juge que la notion de « famille » ne se borne pas aux seules relations fondées sur le mariage et peut englober d’autres liens familiaux, dès lors que les parties cohabitent en dehors du mariage, sans considération du sexe des membres du couple ; qu’en jugeant que ni la loi française ni les instruments internationaux ne prohiberaient une différence de traitement fondée sur la différence de régime juridique entre le mariage et le pacte civil de solidarité pour retenir que la convention collective nationale du Crédit agricole pouvait ne pas accorder aux salariés concluant un pacte civil de solidarité ceux accordés à l’occasion d’un mariage, la cour d’appel a violé ensemble, par refus d’application, l’article L. 122-45 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige et les articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que la cour d’appel, devant laquelle le salarié demandait réparation du préjudice matériel et moral subi du fait qu’il n’avait pas bénéficié, lorsqu’il avait conclu un pacte civil de solidarité avec un partenaire de même sexe, des congés spéciaux, primes et indemnités prévus par les articles 20 et 34 de la convention collective en cas de mariage, ayant retenu à bon droit que les dispositions litigieuses instauraient une discrimination en raison de l’orientation sexuelle, en a déduit que le Crédit agricole devait accorder au salarié les avantages applicables aux salariés ayant contracté mariage, et a réparé l’entier préjudice résultant du fait que le bénéfice de ces avantages lui avait été refusé ; qu’il en résulte que le moyen est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille dix-sept. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour M. X…

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté M. X… de sa demande tendant à voir dire qu’il avait subi, de la part de la Caisse régionale agricole mutuel de Charente-Maritime et des Deux Sèvres, une discrimination directe sur le critère de la situation de famille ;

AUX MOTIFS QUE, s’agissant de la discrimination fondée sur la situation de famille, qui résulte selon M. Frédéric X… de ce que les personnes pacsées ne sont pas assimilées aux personnes mariées, il sera observé d’une part que M. Frédéric X… n’en tire à titre personnel aucune conséquence juridique ou indemnitaire complémentaire, et d’autre part que ni la loi ni les instruments internationaux ne prohibent une différence de traitement fondée sur la différence de régime juridique entre le mariage et le Pacs, a fortiori dans le contexte de la loi 2013/404 du 27 mai 2013 ouvrant le mariage aux personnes de même sexe, comme relevé par la CJUE dans son arrêt du 12 décembre 2013, qui a posé son interprétation par référence à l’impossibilité résultant de la réglementation de l’Etat membre en ce qu’elle en permet pas aux personnes de même sexe de se marier, de même que par la cour de cassation dans son arrêt du 9 juillet 2014 ; que, s’il ne saurait être tiré de l’adoption de la loi du 27 mai 2013 une quelconque obligation pour les couples composés de personnes de même sexe de contracter mariage, en revanche, le choix de ne pas le faire peut comporter des conséquences juridiques, ces deux régimes ayant en diverses matières des conséquences différentes, et étant notamment précisé qu’en droit du travail la loi n° 2014/873 du 4 août 2014 étendant le bénéfice de certains congés pour événements familiaux aux salariés pacses et modifiant l’article L 3142-1 du code du travail n’a pas étendu la totalité de ces avantages, et notamment pas l’autorisation d’absence pour le mariage d’un enfant ; qu’il est à cet égard incidemment observé que les dispositions de la convention collective nationale des caisses de crédit agricole, qui octroie un congé de dix jours, sont largement plus favorables que la loi qui prévoit un congé de quatre jours ; que la discrimination dont M. Frédéric X… a fait l’objet à l’occasion de son Pacs résulte de son orientation sexuelle mais non de sa situation de famille, qui, à la date de la discrimination, se confondait, en l’état de la loi, avec discrimination résultant de son orientation sexuelle ; (…) que, sur la demande de dommages intérêts au titre du préjudice moral : il est constant que le refus de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Charente-Maritime et des Deux-Sèvres de reconnaître à M. Frédéric X… un droit, et ce à raison de son orientation sexuelle, a généré pour celui-ci, au-delà du préjudice matériel, un préjudice moral, et qu’une procédure judiciaire complexe a été nécessaire pour aboutir à la reconnaissance de ses droits ; qu’il sera fait droit à sa demande en son principe ; que, pour autant, la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Charente-Maritime et des Deux-Sèvres, qui relève d’une fédération nationale dans le cadre de laquelle sont menées des négociations avec les partenaires sociaux, dont il est justifié, ne peut être considérée comme seule responsable des retards à la mise en oeuvre dans la convention collective nationale de l’incidence du Pacs sur les avantages des salariés, et M. Frédéric X… n’allègue aucun autre préjudice que celui résultant du refus de la prime et des congés payés pour événement familial, qui fait l’objet d’une indemnisation distincte ; qu’en outre, les recommandations de la Halde, qui avait été saisie avant même la conclusion du Pacs, et qui n’est pas intervenue à la procédure pour observations, n’ont pas de portée obligatoire ; qu’il sera accordé à ce titre à M. Frédéric X… une somme de 2.500 € ;

1°) ALORS QUE l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu’en relevant que M. X… ne tirerait pas de conséquence juridique ou indemnitaire de la discrimination fondée sur sa situation de famille, quand il réclamait spécifiquement l’indemnisation du préjudice moral né de cette discrimination ainsi que la réparation du caractère abusif de la résistance de l’employeur à le faire bénéficier des mêmes droits que les salariés mariés depuis l’avis de la Halde du 11 février 2008 qui avait retenu l’existence d’une inégalité de traitement entre les salariés mariés et pacsés peu important leur sexe, la cour d’appel a dénaturé les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE, pour apprécier l’existence d’une discrimination et du préjudice subi à cette occasion, les juges du fond doivent se placer à l’époque où les faits discriminatoires ont été commis ; qu’en retenant, pour dénier l’existence de la discrimination dont M. X… se disait victime du fait qu’il n’avait pas bénéficié des congés et de la prime pour mariage lors de la conclusion du pacte civil de solidarité en 2007, que la loi du 27 mai 2013 avait autorisé le mariage homosexuel, la cour d’appel a statué par un motif impropre à apprécier l’existence de la discrimination invoquée et privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 122-45 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige ;

3°) ALORS QUE la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 pose un principe général d’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail et prohibe toute discrimination dans ce cadre ; qu’il résulte spécifiquement de l’article L. 122-45 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, qu’aucun salarié ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, en raison de sa situation de famille ; qu’en jugeant au contraire que ni la loi française ni les instruments internationaux ne prohiberaient une différence de traitement entre les personnes mariées et celles ayant conclu un pacte civil de solidarité pour retenir que l’employeur de M. X… pouvait ne pas faire bénéficier le salarié concluant un pacte civil de solidarité d’avantages équivalents à ceux attribués pour la célébration d’un mariage, la cour d’appel a violé ensemble, par refus d’application, l’article L. 122-45 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige et la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 ;

4°) ALORS QU’aucun salarié ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération en raison de sa situation de famille ; que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales protège le droit de toute personne au respect de sa vie familiale et interdit tout discrimination sur le fondement de ce droit ; que la Cour européenne des droits de l’homme juge que la notion de « famille » ne se borne pas aux seules relations fondées sur le mariage et peut englober d’autres liens familiaux, dès lors que les parties cohabitent en dehors du mariage, sans considération du sexe des membres du couple ; qu’en jugeant que ni la loi française ni les instruments internationaux ne prohiberaient une différence de traitement fondée sur la différence de régime juridique entre le mariage et le pacte civil de solidarité pour retenir que la convention collective nationale du Crédit agricole pouvait ne pas accorder aux salariés concluant un pacte civil de solidarité ceux accordés à l’occasion d’un mariage, la cour d’appel a violé ensemble, par refus d’application, l’article L. 122-45 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige et les articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

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