Cour de cassation, Chambre civile 1, 7 mars 2018, 17-10.292, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. 1re civ., 7 mars 2018, n° 17-10.292
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-10.292
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Fort-de-France, 23 juin 2016
Textes appliqués :
Article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Articles 15 et 16 du code de procédure civile.

Articles 16 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973, modifié, relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels.

Article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamenta.

Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000036718283
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2018:C100254
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Sur les parties

Texte intégral

CIV. 1

CH.B

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 7 mars 2018

Cassation

Mme BATUT, président

Arrêt n° 254 F-D

Pourvoi n° P 17-10.292

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. Claude X…, domicilié […] ,

contre l’arrêt rendu le 24 juin 2016 par la cour d’appel de Fort-de-France (chambre civile), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. Philippe Y…, domicilié […] , pris en qualité d’ancien président de la chambre interdépartementale des huissiers de justice de […] et de […],

2°/ à M. Corentin Z…, domicilié […] , pris en qualité d’actuel président de la chambre interdépartementale des huissiers de justice de […] et de […],

3°/ au procureur général près de la cour d’appel de Fort-de-France, domicilié en son parquet général, […] ,

4°/ à Mme Séverine A… , domiciliée […] , prise en qualité d’ancien administrateur de l’étude de M. X…, remplacée par M. William B… et Mme Déborah C…,

défendeurs à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 30 janvier 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Truchot, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Truchot, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de M. X…, de Me Le Prado, avocat de MM. Y…, Z… et Mme A… , ès qualités, l’avis de M. Sudre, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué et les productions, que, sur l’action disciplinaire exercée par le président de la chambre de discipline des huissiers de justice (la chambre de discipline), agissant au nom de celle-ci, M. X…, huissier de justice, a été condamné par un tribunal de grande instance à la peine disciplinaire de la destitution ; qu’il a interjeté appel de ce jugement ;

Sur le premier moyen :

Vu l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 15 et 16 du code de procédure civile ;

Attendu que l’arrêt, qui prononce la peine disciplinaire de l’interdiction temporaire d’exercice pour une durée de trois ans, mentionne que l’affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par M. F…, qui a fait connaître son avis ; qu’à l’audience, le parquet général a requis la confirmation du jugement et les parties ont repris leurs prétentions ;

Qu’en procédant ainsi, sans préciser si le ministère public avait déposé des conclusions écrites préalablement à l’audience et, si tel avait été le cas, sans constater que M. X… en avait eu communication afin de pouvoir y répondre utilement, la cour d’appel n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’exercer son contrôle, privant ainsi sa décision de base légale ;

Sur le deuxième moyen :

Vu l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Attendu que l’exigence d’un procès équitable implique qu’en matière disciplinaire la personne poursuivie ou son avocat soit entendu à l’audience et puisse avoir la parole en dernier ;

Attendu que l’arrêt mentionne qu’à l’audience, le parquet général a requis la confirmation du jugement et les parties ont repris leurs prétentions ;

Qu’en procédant ainsi, sans constater que M. X… ou son avocat avait eu la parole en dernier, la cour d’appel n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’exercer son contrôle, privant ainsi sa décision de base légale ;

Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 16 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973, modifié, relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels ;

Attendu qu’il résulte de ces textes que, lors des débats devant la cour d’appel statuant en matière disciplinaire, le président de la chambre de discipline présente ses observations, le cas échéant par l’intermédiaire d’un membre de la chambre ;

Attendu que l’arrêt mentionne, en qualité d’intimés devant la cour d’appel, l’ancien et le nouveau président de la chambre des huissiers, représentés par un avocat ;

Qu’en procédant ainsi, sans constater que le président de la chambre de discipline avait présenté ses observations personnellement ou par l’intermédiaire d’un membre de la chambre, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 24 juin 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Fort-de-France, autrement composée ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. X….

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR constaté les manquements de Maître Claude X…, huissier de justice, aux exigences de sa charge et, en conséquence, d’AVOIR prononcé une sanction disciplinaire d’interdiction temporaire d’exercice pour une durée de trois années, d’AVOIR confirmé la désignation de Maître Séverine A… en qualité d’administrateur de l’étude de Maître X… et d’AVOIR condamné Maître X… à payer à Maître Z…, ès qualités de président de la chambre interdépartementale des huissiers de justice de […] et de […] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « l’affaire a été communiquée au Ministère Public, représenté lors des débats par Monsieur Yann F…, qui a fait connaître son avis ; (

) à l’audience du 30 mai 2016, le parquet général a requis la confirmation du jugement et les parties ont repris leurs prétentions » ;

ALORS QUE le juge statuant en matière disciplinaire est tenu d’indiquer si le ministère public a déposé des conclusions écrites et, lorsque tel a été le cas, de constater que les parties ont eu communication de ces conclusions et ont eu la possibilité d’y répondre ; qu’en se bornant à mentionner qu’à l’audience du 30 mai 2016, le ministère public avait fait connaître son avis et requis la confirmation du jugement, sans préciser si le ministère public avait déposé des conclusions écrites préalablement à l’audience et, si tel avait été le cas, sans constater que M. X… en avait reçu communication afin d’être en mesure d’y répondre utilement, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 15 et 16 du code de procédure civile.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR constaté les manquements de Maître Claude X…, huissier de justice, aux exigences de sa charge et, en conséquence, d’AVOIR prononcé une sanction disciplinaire d’interdiction temporaire d’exercice pour une durée de trois années, d’AVOIR confirmé la désignation de Maître Séverine A… en qualité d’administrateur de l’étude de Maître X… et d’AVOIR condamné Maître X… à payer à Maître Z…, ès qualités de président de la chambre interdépartementale des huissiers de justice de […] et de […] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QU’ « à l’audience du 30 mai 2016, le parquet général a requis la confirmation du jugement et les parties ont repris leurs prétentions » ;

ALORS QUE l’exigence d’un procès équitable implique qu’en matière disciplinaire la personne poursuivie ou son avocat soient entendus à l’audience et puissent avoir la parole en dernier, et que mention en soit faite dans la décision ; que l’arrêt attaqué a condamné M. X… à une peine disciplinaire, sans constater que celui-ci ou son conseil avaient été invités à prendre la parole en dernier ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article 6, § 1, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR constaté les manquements de Maître Claude X…, huissier de justice, aux exigences de sa charge et, en conséquence, d’AVOIR prononcé une sanction disciplinaire d’interdiction temporaire d’exercice pour une durée de trois années, d’AVOIR confirmé la désignation de Maître Séverine A… en qualité d’administrateur de l’étude de Maître X… et d’AVOIR condamné Maître X… à payer à Maître Z…, ès qualités de président de la chambre interdépartementale des huissiers de justice de […] et de […] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

EN MENTIONNANT, en qualité d’intimés, « Maître Philippe Y…, Ancien Président de la Chambre des Huissiers (

) représenté par Me Danielle MARCELINE de la SELARD MARCELINE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARTINIQUE » et « Maître Corentin Z…, Actuel Président de la Chambre des Huissiers (

) représenté par Me Danielle MARCELINE de la SELARD MARCELINE& ASSOCIES, avocat au barreau de MARTINIQUE » et qu’ « à l’audience du 30 mai 2016, le parquet général a requis la confirmation du jugement et les parties ont repris leurs prétentions » ;

1. ALORS QUE lors des débats devant la cour d’appel statuant en matière disciplinaire, le président de la chambre de discipline présente ses observations, le cas échéant par l’intermédiaire d’un membre de la chambre ; que l’arrêt attaqué a relevé que tant l’ancien que le nouveau président de la chambre interdépartementale des huissiers de justice de […] et de […] étaient représentés par un avocat, de sorte que c’est ce dernier qui avait déposé des conclusions en leur nom et repris leurs prétentions à l’audience ; qu’en statuant ainsi, sans constater que le président de la chambre de discipline avait été entendu en ses observations personnellement, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences des articles 16 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973 ;

2. ALORS QUE lors des débats devant la cour d’appel statuant en matière disciplinaire, le président de la chambre de discipline présente ses observations, le cas échéant par l’intermédiaire d’un membre de la chambre ; que l’arrêt attaqué a relevé qu’à l’audience du 30 mai 2016, les parties avaient repris leurs prétentions ; qu’en statuant ainsi, quand le président de la chambre de discipline doit présenter personnellement ses observations en qualité de sachant et non pas comme partie à l’instance, ce qu’elle n’a pas constaté, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences des articles 16 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973.

QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR constaté les manquements de Maître Claude X…, huissier de justice, aux exigences de sa charge et, en conséquence, d’AVOIR prononcé une sanction disciplinaire d’interdiction temporaire d’exercice pour une durée de trois années, d’AVOIR confirmé la désignation de Maître Séverine A… en qualité d’administrateur de l’étude de Maître X… et d’AVOIR condamné Maître X… à payer à Maître Z…, ès qualités de président de la chambre interdépartementale des huissiers de justice de […] et de […] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QU’ « il résulte des pièces de la procédure que la chambre interdépartementale a réalisé un contrôle annuel de l’étude de Maître X… aboutissant à un rapport du 17 juin 2015, qui à la différence de celui réalisé courant 2014, a révélé des anomalies qui poussaient la chambre à faire réalis[er] un contrôle de 2ème niveau. Ainsi le 9 août 2015, les 3 contrôleurs déposaient un rapport dont les conclusions mettaient en évidence qu’au niveau de la comptabilité générale, l’office n’était pas en mesure de représenter le montant des fonds clients tel que figurant dans la balance dossiers du 13 juillet 2015 pour 481 918,69 euros et que ces rapprochements étaient erronés depuis de très nombreuses années, Ils précisaient par ailleurs que l’expert-comptable avait failli à sa mission puisqu’un simple contrôle visuel des écritures non rapprochées permettait de voir que les états de rapprochements étaient erronés. Des détournements d’espèces (44 602,11 euros) avaient eu lieu entre le 1er janvier et le 30 septembre 2013 et des sommes détournées sur un compte ouvert au CREDIT MUTUEL au nom de GREGOIRE B…, Grégoire étant le deuxième prénom du comptable de l’étude, Monsieur B…. Il était aussi relevé au niveau des comptes clients l’absence de comptabilisation de nombreux règlements de frais alors que dans le même temps, le montant des créances acquises (compte 411000) ne reflétait pas la réalité des sommes dues à l’étude. Il était souligné la mise en place ancienne de ces mauvaises pratiques de gestion, bien avant la suppléance de l’étude. Au surplus des faits constituant une immixtion dans la suppléance en cours peuvent être reprochés à Maître X… dans la mesure où il a reconnu avoir signé des chèques pendant le temps de cette suppléance, alors même qu’il n’était pas en mesure du fait de son accident de santé de voir ce qu’il signait, En effet, en violation de l’article 4 du décret n° 56-221 du 29 février 1956 Maître X… ne s’est ainsi pas abstenu de tout acte professionnel dès l’entrée en fonction du suppléant, en signant des chèques pour les besoins de l’étude sur un chéquier du compte clients, ce qui n’est pas seulement une erreur mais aussi une faute professionnelle. Le comportement négligent et ancien dans le contrôle de la gestion de son étude par Maître X… n’est pas celui auquel le public peut s’attendre de la part d’un officier ministériel dont en temps normal, la rigueur de la déontologie garantit la confiance qu’il est en droit de lui accorder. Il importe dès lors de ramener l’ampleur de la sanction à celle de la faute de négligence de Maître X… dont il n’est pas démontré qu’elle lui a permis un enrichissement personnel indu, mais qui représente par contre un préjudice pour le public par l’atteinte à la rigueur dans la gestion et à la confiance en l’officier ministériel, à défaut de manifestation d’une victime et d’établissement de son préjudice, Dès lors la sanction de l’interdiction temporaire pour une durée de 3 années correspond plus justement aux manquements retenus à l’encontre de Maître X… » ;

1. ALORS QUE l’huissier de justice ne répond pas des fautes professionnelles commises à l’occasion de la gestion de l’étude par son suppléant ; qu’en se bornant à relever que le rapport du 19 août 2015 diligenté par la chambre interdépartementale des huissiers de la […] et de la […] avait constaté la mise en place ancienne de mauvaises pratiques de gestion, « bien avant la suppléance de l’étude » de Maître X… et qui relevaient toutes de la comptabilité de l’étude, pour reprocher à ce dernier un comportement « négligent et ancien » dans le contrôle de gestion de celle-ci, sans rechercher précisément, comme elle y était invitée, si ces mauvaises pratiques de gestion n’étaient pas imputables à l’expert-comptable de l’étude et si Maître X… avait pu s’en apercevoir avant que son accident de santé du 19 novembre 2013 ne conduise à ce que la gestion de son étude soit assurée par des suppléants à compter du 2 janvier 2014, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2 et 3 de l’ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 et des articles 3 et 4 du décret n° 56-221 du 29 février 1956, dans leur rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-661 du 20 mai 2016 ;

2. ALORS QUE le juge ne peut pas dénaturer les termes du litige ; qu’en affirmant, pour lui reprocher une immixtion dans la suppléance en cours de son étude, que Maître X… reconnaissait avoir signé des chèques pendant le temps de cette suppléance, quand, dans ses conclusions d’appel du 13 janvier 2016 (p. 10-11), Maître X… soutenait avoir, juste après son accident en novembre 2013 et cependant que la suppléance de son étude n’avait débuté que le 2 janvier 2014 (ibid., p. 7, dernier alinéa), signé un certain nombre de chèques pour être remis au comptable de l’étude, dans l’hypothèse où se présenteraient des besoins urgents, la cour d’appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l’article 4 du code de procédure civile.

CINQUIÈME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR prononcé une sanction disciplinaire d’interdiction temporaire d’exercice pour une durée de trois années et, en conséquence, d’AVOIR confirmé la désignation de Maître Séverine A… en qualité d’administrateur de l’étude de Maître X… et d’AVOIR condamné Maître X… à payer à Maître Z…, ès qualités de président de la chambre interdépartementale des huissiers de justice de […] et de […] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QU’ « à l’audience du 30 mai 2016, le parquet général a requis la confirmation du jugement et les parties ont repris leurs prétentions ; (

) qu’il résulte des pièces de la procédure que la chambre interdépartementale a réalisé un contrôle annuel de l’étude de Maître X… aboutissant à un rapport du 17 juin 2015, qui à la différence de celui réalisé courant 2014, a révélé des anomalies qui poussaient la chambre à faire réalis[er] un contrôle de 2ème niveau. Ainsi le 9 août 2015, les 3 contrôleurs déposaient un rapport dont les conclusions mettaient en évidence qu’au niveau de la comptabilité générale, l’office n’était pas en mesure de représenter le montant des fonds clients tel que figurant dans la balance dossiers du 13 juillet 2015 pour 481 918,69 euros et que ces rapprochements étaient erronés depuis de très nombreuses années, Ils précisaient par ailleurs que l’expert-comptable avait failli à sa mission puisqu’un simple contrôle visuel des écritures non rapprochées permettait de voir que les états de rapprochements étaient erronés. Des détournements d’espèces (44 602,11 euros) avaient eu lieu entre le 1er janvier et le 30 septembre 2013 et des sommes détournées sur un compte ouvert au CREDIT MUTUEL au nom de GREGOIRE B…, Grégoire étant le deuxième prénom du comptable de l’étude, Monsieur B…. Il était aussi relevé au niveau des comptes clients l’absence de comptabilisation de nombreux règlements de frais alors que dans le même temps, le montant des créances acquises (compte 411000) ne reflétait pas la réalité des sommes dues à l’étude. Il était souligné la mise en place ancienne de ces mauvaises pratiques de gestion, bien avant la suppléance de l’étude. Au surplus des faits constituant une immixtion dans la suppléance en cours peuvent être reprochés à Maître X… dans la mesure où il a reconnu avoir signé des chèques pendant le temps de cette suppléance, alors même qu’il n’était pas en mesure du fait de son accident de santé de voir ce qu’il signait, En effet, en violation de l’article 4 du décret n° 56-221 du 29 février 1956 Maître X… ne s’est ainsi pas abstenu de tout acte professionnel dès l’entrée en fonction du suppléant, en signant des chèques pour les besoins de l’étude sur un chéquier du compte clients, ce qui n’est pas seulement une erreur mais aussi une faute professionnelle. Le comportement négligent et ancien dans le contrôle de la gestion de son étude par Maître X… n’est pas celui auquel le public peut s’attendre de la part d’un officier ministériel dont en temps normal, la rigueur de la déontologie garantit la confiance qu’il est en droit de lui accorder. Il importe dès lors de ramener l’ampleur de la sanction à celle de la faute de négligence de Maître X… dont il n’est pas démontré qu’elle lui a permis un enrichissement personnel indu, mais qui représente par contre un préjudice pour le public par l’atteinte à la rigueur dans la gestion et à la confiance en l’officier ministériel, à défaut de manifestation d’une victime et d’établissement de son préjudice, Dès lors la sanction de l’interdiction temporaire pour une durée de 3 années correspond plus justement aux manquements retenus à l’encontre de Maître X… » ;

1. ALORS QUE le juge ne peut méconnaître l’objet du litige tel qu’il résulte des conclusions des parties ; qu’il résulte de l’arrêt attaqué que le Ministère public sollicitait la confirmation du jugement qui avait prononcé la destitution de M. X…, ce que demandaient également MM. Y… et Z… en leur qualité respective d’ancien et d’actuel président de la chambre interdépartementale des huissiers de justice de […] et de […], quand M. X… soutenait que sa destitution n’était pas justifiée ; que, partant, en prononçant l’interdiction temporaire d’exercice de M. X… pour une durée de trois années qui n’avait été demandée ni par les parties, ni par le Ministère public, la cour d’appel a méconnu l’objet du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2. ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en prononçant l’interdiction temporaire d’exercice de M. X… pour une durée de trois années qui n’avait été demandée ni par les parties, ni par le Ministère public, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur cette sanction disciplinaire décidée d’office, la cour d’appel a violé l’article la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile et l’article 6 § 1 de la

convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

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