Tribunal administratif de Paris, 17 mai 2016, n° 1409787

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Paris, 17 mai 2016, n° 1409787
Juridiction : Tribunal administratif de Paris
Numéro : 1409787

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PARIS

N° 1409787/5-3

___________ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Mme A X

___________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

M. Coz

Rapporteur

___________

Le Tribunal administratif de Paris

Mme Laporte

Rapporteur public (5e Section – 3e Chambre)

___________

Audience du 4 mai 2016

Lecture du 17 mai 2016

___________

36-08-02

C

Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement le 13 juin 2014, le

31 octobre 2014 et le 12 mai 2015, Mme A X, représentée par la SCP Nicolaÿ – de Kabiyvekke – Hannotin, demande au tribunal :

1°) d’annuler le titre de paiement de 9 531,81 euros émis à son encontre par l’université Paris Descartes le 11 avril 2014 ;

2°) d’enjoindre à l’université Paris Descartes de lui verser la somme de 9 531,81 euros ;

3°) à titre subsidiaire, de ramener à 3 698,93 euros la créance détenue par l’université Paris Descartes à son encontre.

Elle soutient que :

— Le titre n’indique pas les bases de sa liquidation et est insuffisamment motivé ;

— L’université a commis une erreur de droit en se fondant sur le code du travail pour déterminer le nombre maximal d’heures que la requérante pouvait effectuer ;

— L’université a commis une erreur d’appréciation en déterminant le montant de la créance ;

— L’université ne peut répéter des sommes versées avant le mois d’avril 2010, en application de l’article 37-1 de la loi n° 2000-321.

Par deux mémoires en défense, enregistré le 2 octobre 2014 et le 21 avril 2015, l’université Paris Descartes conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme X la somme de 2500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— Le titre est suffisamment motivé ;

— Elle n’a commis ni erreur de droit, ni erreur d’appréciation dans la détermination du montant de la créance ;

— Le nombre d’heures de vacation accomplies par la requérante empêche de considérer ces heures comme une activité accessoire, si bien qu’elles ne peuvent être légalement rémunérées ;

— La requérante n’a pas demandé d’autorisation de cumul à son employeur ;

— La retenue sur traitement effectuée en mai 2011 a interrompu la prescription.

Par un courrier du 8 mars 2016, le tribunal a informé les parties, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, qu’il était susceptible de fonder sa décision sur un moyen d’ordre public tiré de l’absence de réclamation préalable adressée au comptable chargé du recouvrement de l’ordre de recouvrer, en méconnaissance de l’article 118 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

Des observations en réponse à la communication de ce moyen relevé d’office, présentées par Mme X, ont été enregistrées le 1er avril 2016.

Par ordonnance du 5 avril 2016 la clôture d’instruction a été fixée au 28 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la directive n° 93/104/CE du Conseil de l’Union européenne du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail ;

— la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

— la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l’administration ;

— la loi n° 2011-1978 de finances rectificatives pour 2011 ;

— le décret n°2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l’organisation du travail dans les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

— le décret n° 2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d’activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l’État ;

— le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

— le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Coz,

— les conclusions de Mme Laporte, rapporteur public,

— les observations de Me Chevalier pour la requérante et de Me Moreau pour l’université Paris Descartes.

Sur la recevabilité :

Considérant qu’aux termes de l’article 2 du décret n° 2012-1246 : « Les dispositions du titre II sont applicables à l’État. » : que le titre II inclut l’article 118 ; que l’université Paris Descartes est un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel ; que dès lors, les dispositions de l’article 118 du décret n° 2012-1246 ne sont pas applicables aux titres de perception émis par l’université Paris Descartes ; qu’ainsi, la requête de Mme X n’avait pas à être précédée d’une réclamation préalable ; qu’elle est dès lors recevable ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

Considérant que Mme A X, assistante médico-administrative affectée à l’hôpital Necker en tant que secrétaire médicale dans le service du professeur des universités praticien hospitalier, M. Y Z, a effectué des vacations au sein de l’université Paris Descartes auprès de ce professeur, responsable de trois diplômes au sein de cette université, à savoir le DIU d’échographie et d’imagerie en gynécologie obstétrique, le master « Sciences et technologies biomédicales : Diagnostic prénatal » et le DIU en médecine fœtale ; qu’au titre de l’année 2009-2010, Mme X soutient sans être sérieusement contredite avoir effectué 1 628 heures de vacation dans le cadre de l’organisation de ces trois diplômes ; que par un courrier de l’université Paris Descartes en date du 27 mai 2011, Mme X a été informée qu’elle ferait l’objet d’un ordre de reversement pour un montant de 9 531,81 euros en raison de vacations payées en dehors de la réglementation ; qu’un prélèvement a été effectué sur son salaire de mai 2011 pour un montant de 801,87 euros ; qu’un état exécutoire en date du 27 avril 2012 a été notifié à Mme X le 16 mai 2012 pour un montant de 9 531,81 euros ; que ce titre de paiement a été annulé par le jugement n° 1211690/5-3, 1211695/5-3, rendu le 5 février 2014 par le tribunal administratif de Paris, pour insuffisance de motivation ; que ce jugement a été confirmé par l’arrêt n°14PA01450 de la cour administrative d’appel de Paris, rendu le 15 décembre 2015 ; que le 11 avril 2014, l’université Paris- Descartes a émis un nouveau titre exécutoire d’un montant de 9 531,81 euros ; que Mme X en demande l’annulation et la condamnation de l’Université Paris Descartes à lui verser une somme de 9 531,81 euros par une requête introduite le 13 juin 2014 ;

Considérant qu’aux termes de l’article 24 du décret n° 2012-1246 « (…) Toute créance liquidée faisant l’objet d’une déclaration ou d’un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation (…) » ; qu’il en résulte que tout titre de perception doit indiquer les bases de liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il a été émis, à moins que ces bases n’aient été préalablement portées à la connaissance du débiteur ;

Considérant que le titre exécutoire du 13 juin 2014 précise qu’il porte sur un « Remboursement de salaire perçu à tort suite à heures de vacations effectuées en dehors du cadre légal sur l’année universitaire 2009 – 2010 » pour un montant total de 9 531,81 euros ; qu’il mentionne que le remboursement déjà effectué se monte à 801,87 euros ; qu’il renvoie au jugement du tribunal administratif de Paris du 22 janvier 2014, à l’état liquidatif intitulé « Détail du nombre de vacations (rémunérations accessoires) », au « PLV des titres à émettre par l’ordonnateur des trop perçus constatés à l’issue de la paye de mai 2011 », aux bulletins de paye de Mme X décembre 2010 et mai 2011 ; au courrier d’information adressé par la directrice des ressources humaines à Mme X le 27 mai 2011, à la demande d’émission d’un titre de perception du 27 mai 2011 et au certificat pour ordre de reversement du 21 mars 2011 de la direction des services administratifs de la faculté de médecine ; qu’il ressort de ces documents que Mme X a perçu 15 712,91 euros au titre des rémunérations complémentaires ; que, notamment, le « détail du nombre de vacations », émis le 21 mars 2011, précise le nombre d’heures et le montant concerné, pour la formation initiale et la formation continue ; qu’il indique que sur les 1628 heures effectuées en 2010, seules 462 peuvent être perçues pour 4 093,32 euros ; que ces documents mettaient la requérante en état de comprendre que la somme à percevoir correspondait à la différence entre le montant total perçu et le montant qu’elle « aurait dû percevoir » ; qu’ainsi les bases de liquidation de la créance ont été portées à la connaissance de la débitrice ; que le moyen tiré du défaut motivation doit dès lors être écarté ;

Considérant qu’aux termes de l’article 37-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, dans sa rédaction issue du V de l’article 94 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 : « Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive (…) » ; qu’aux termes de l’article 2224 du code civil, dans sa rédaction issue de l’article 1er de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer » ; qu’aux termes du second alinéa de l’article 2222 du code civil : « En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure » ; que le versement à Mme X des sommes dont le reversement est demandé est intervenu entre janvier 2010 à octobre 2010 ; que le délai de prescription de cinq ans applicable, en vertu de l’article 2224 du code civil, aux créances en cause antérieurement à l’entrée en vigueur des dispositions prévues par l’article 94 de la loi n° 2011-1978 modifiant l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, n’avait pas expiré à cette date ; qu’ainsi, un nouveau délai de prescription de deux ans a couru à compter de la date d’entrée en vigueur, le 30 décembre 2011, de ces dispositions ; que le titre de perception émis le 27 mai 2012 a interrompu la prescription ; que dès lors, à la date d’émission du titre attaqué, le 11 avril 2014, la créance n’était pas prescrite ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la requérante, le titre attaqué ne se fonde pas sur les dispositions du code du travail pour déterminer le temps de travail hebdomadaire maximal de Mme X, qui relève de la fonction publique hospitalière ; qu’aux termes de l’article 9 du décret du 4 janvier 2002 sur le temps de travail dans la fonction publique hospitalière « Il ne peut être accompli par un agent plus de 44 heures par semaine. » ; que, toutefois, le visa de la « directive n° 93/104/CE du Conseil de l’Union européenne du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail » implique que ce décret a été pris pour la transposer ou, à tout le moins, en congruence avec les objectifs de cette directive ; que l’objet de cette directive est ainsi défini : « La présente directive fixe des prescriptions minimales de sécurité et de santé en matière d’aménagement du temps de travail » ; que la limitation du nombre d’heures accomplies par un agent ne saurait avoir pour objectif de le priver de rémunération, mais qu’elle vise à protéger sa santé ; que par conséquent, en application de cette règle, l’université Paris Descartes était tenue de prendre les mesures nécessaires pour limiter le nombre d’heures effectuées chaque semaine par Mme X, mais qu’elle ne peut se fonder sur ces dispositions pour lui refuser le paiement des heures de vacation effectuées ;

Considérant qu’aux termes de l’article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : « I.-Les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public consacrent l’intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées. Ils ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. (…) Les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public peuvent toutefois être autorisés à exercer, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, à titre accessoire, une activité, lucrative ou non, auprès d’une personne ou d’un organisme public ou privé, dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui leur sont confiées et n’affecte pas leur exercice.(…)» ; qu’aux termes de l’article 1er du décret n° 2007-658 « Dans les conditions fixées au dernier alinéa du I de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée et celles prévues par le présent décret, les fonctionnaires, les agents non titulaires de droit public et les ouvriers régis par le régime des pensions des établissements industriels de l’État peuvent être autorisés à cumuler une activité accessoire à leur activité principale, sous réserve que cette activité ne porte pas atteinte au fonctionnement normal, à l’indépendance ou à la neutralité du service » ; que Mme X a effectué 1628 heures de vacation en une année ; que ce total implique un temps de travail total supérieur à celui qu’elle doit fournir dans le cadre de son activité principale, puisqu’aux termes de l’article 1 du décret n° 2002-9 : « … La durée du travail est fixée à 35 heures par semaine dans les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. » ; que Mme X disposait toutefois d’une autorisation de cumul pour un maximum mensuel de 48h, soit 576 heures annuelles ; que l’université Paris Descartes ne s’est jamais opposée à ce qu’elle accomplisse ces heures et ne lui a jamais mentionné la possibilité qu’elles ne soient pas rémunérées ; que ce nombre d’heures doit être considéré comme revêtant, dans les circonstances de l’espèce, le caractère d’une activité exercée à titre accessoire ; qu’en revanche, les heures accomplies au-delà de cet total ne revêtent pas un tel caractère ; que, par conséquent, l’université Paris Descartes a pu légalement refuser de verser les sommes correspondant à la différence entre le nombre d’heures totales accomplies par la requérante et le nombre d’heures prévu par l’autorisation de cumul dont elle disposait ; qu’ainsi, Mme X est fondée à demander l’annulation du titre de perception attaqué uniquement en tant qu’il porte sur la différence entre les 576 heures prévues par son autorisation de cumul et les 462 heures payées et dont l’université Paris Descartes ne demande pas le remboursement, soit 114 heures ; qu’au taux horaire de 8,86 euros brut, le total se monte à 1 010,04 euros ; qu’ainsi, le titre de perception doit être ramené à 8 521,77 euros ;

Considérant que la requérante n’établit pas avoir versé à l’université Paris Descartes une somme supérieure à celle à laquelle le présent jugement ramène le titre de perception ; que ses conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint à l’université de lui reverser la somme de

9 531,81 euros ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il n’y a pas lieu de condamner Mme X, qui n’est pas la partie perdante, à verser une somme de 2 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le titre de perception émis par l’université Paris Descartes du 11 avril 2014 est annulé en tant qu’il retient comme montant du trop-perçu la somme de 9 531,81 euros en lieu et place de la somme de 8 521,77 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A X est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de l’université Paris-Descartes sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme A X et à l’université Paris Descartes.

Délibéré après l’audience du 4 mai 2016, à laquelle siégeaient :

M. Duboz, président,

M. Le Broussois, premier conseiller,

M. Coz, conseiller,

Lu en audience publique le 17 mai 2016.

Le rapporteur, Le président,

Y. COZ C. DUBOZ

Le greffier,

S . BIRCKEL

La République mande et ordonne à la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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Tribunal administratif de Paris, 17 mai 2016, n° 1409787