Tribunal de grande instance de Paris, 2e chambre 2e section, 28 novembre 2014, n° 13/09023

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 2e ch. 2e sect., 28 nov. 2014, n° 13/09023
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 13/09023

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S(footnote: 1)

2e chambre

2e section

N° RG : 13/09023

N° MINUTE : 5

Assignations du :

6 février 2013

7 février 2013

JUGEMENT

rendu le 28 Novembre 2014

DEMANDEUR

Monsieur AC N AD Y

[…]

[…]

représenté par Maître Philippe POUX JALAGUIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0955

DÉFENDEURS

Maître K C, notaire associé de la SCP L M d’X, S T et K C

15 rue des Saints-Père

[…]

représenté par Maître Q RONZEAU de la SCP RONZEAU & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0499

Maître AF Q-R, notaire associé de la SCP Q R

[…]

[…]

[…]

représenté par Maître L-O AI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0090

[…]

[…]

[…]

représentée par Maître Marie-Laure A, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0335

S.A.S. U V W (DEP)

[…]

[…]

[…]

représentée par Maître Stéphane B, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0118

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Vice-Présidente

Joëlle PLO, Vice-Présidente

Jérôme HAYEM, Vice-Président

assistés de Aurélie BOUIN, Greffier

DÉBATS

A l’audience du 22 octobre 2014 tenue en audience publique devant Mme Plo, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du code de procédure civile. Avis a été donné aux avocats des parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2014.

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

En premier ressort

*****

Exposé du litige

Le 20 mai 2011, M. N Y a signé avec la SCI Sovic représentée par M. O F, une promesse de vente portant sur le local commercial et sa cave formant les lots n°39 et 40 de la copropriété située 19, rue Laplace dans le 5e arrondissement de Paris moyennant un prix de 420.000 euros.

Cette promesse authentique a été régularisée par l’intermédiaire de Me K C, notaire de la SCI Sovic et de Me AF Q-R, notaire assistant M. Y.

L’acte authentique a été dressé le 5 août 2011 par P C et Q-R.

M. Y a découvert par la suite que l’immeuble devait faire l’objet d’un traitement anti-termites et que des travaux avaient été votés lors de l’assemblée générale des copropriétaires du 30 juin 2011 à laquelle il n’avait pas été mis en mesure d’assister.

Une assemblée générale extraordinaire des copropriétaires s’est ensuite tenue le 3 octobre 2011 qui vota la réalisation de travaux de réfection de “poutres et termites” pour un montant de 203 500 euros en raison d’une infestation massive par les termites suivie d’une seconde assemblée réunie le 12 mars 2012 qui vota des travaux complémentaires pour une somme de 280 000 euros.

Les deux lots dont M. Y est propriétaire forment les 124/1000ème de la copropriété.

Au titre des travaux de poutres et sondages, il a dû acquitter les sommes suivantes:

— Le 01.01.2012 : 25.234 euros en exécution des travaux votés lors de l’assemblée du 3 octobre 2011.

— Le 01.04.2012 : 37.200 euros en exécution des travaux votés lors de l’assemblée du 12 mars 2012.

— Le 18.02.13 : 11.904 euros en exécution des travaux de poutres.

Un litige oppose depuis lors les parties, relatif à la prise en charge du coût de ces travaux.

Procédure

Par assignations délivrées les 6 et 7 février 2013 à la SCI Sovic, à la société U V W (DEP), à Me K C ainsi qu’à Me AF Q-R, puis dans ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 4 mars 2014, M. N Y demande au tribunal de :

“1. Sur la responsabilité de la SCI SOVIC :

1.1 Sur le manquement à son obligation d’information :

Vu les articles 1134, 1147 et 1602 du code civil :

CONSTATER que la SCI SOVIC a été convoqué et a participé seule à l’assemblée générale du 30 juin 2011 au cours de laquelle il a été débattu de la question des travaux de grande importance à effectuer dans les parties communes de l’immeuble.

CONSTATER que la SCI SOVIC n’a pas informé son cocontractant de l’étendue et de la nature des travaux projetés lors de cette assemblée

En conséquence,

DIRE ET JUGER que la SCI SOVIC n’a pas respecté son obligation contractuelle d’information et de renseignement.

CONDAMNER la SCI SOVIC à réparer, le cas échéant solidairement, l’entier préjudice subi par M. Y

1.2 Sur la garantie des vices cachés :

Vu les articles 1641 et suivants du code civil :

CONSTATER qu’au moment de la vente M. Y n’a pu se convaincre de la présence de termites actives dans les parties communes de l’immeuble.

CONSTATER que de son côté la SCI SOVIC ne pouvait ignorer avant la vente l’existence de termites actives dans les parties communes et ne peut donc arguer de l’exonération de la garantie des vices cachés.

En conséquence,

DIRE ET JUGER que la présence de termites actives dans les parties commune constitue un vice caché dont la SCI SOVIC doit garantie.

CONDAMNER la SCI SOVIC à réparer, le cas échéant solidairement, l’entier préjudice subi par M. Y,

2. Sur la responsabilité des notaires chargés de la vente :

Vu les articles 1382 et suivants du code civil

Vu l’acte authentique signé par l’intermédiaire de Maître K C avec le concours de Maître Q R

2.1 Sur les travaux à effectuer en grande urgence par le cabinet Z :

CONSTATER que les notaires chargés de la vente ont été informés avant la signature de l’acte authentique de l’existence de travaux de grande importance à effectuer en urgence dans la copropriété.

CONSTATER que l’acte régularisé par leurs soins ne fait pas mention de ces travaux et prévoit uniquement une clause qui laisse à la charge du vendeur les travaux voté le 30 juin 2011 alors que ceux-ci sont tout à fait dérisoires par rapport à ceux qui allaient être irrémédiablement entrepris dans la copropriété.

En conséquence,

DIRE ET JUGER que les notaires chargés de la vente n’ont pas respecté leur obligation de conseil.

CONDAMNER Maître K C et Maître Q R solidairement à réparer l’entier préjudice subi par M. Y

2.2 Sur la présence de termites actives dans les parties communes :

CONSTATER que les notaires chargés de la rédaction de l’acte authentique ont été clairement et complètement informés par le syndic des découvertes effectuées par le cabinet Z et l’entreprise TAC mettant à jour l’existence de termites actives dans les parties communes, le syndic ayant pris le soin d’alerter les notaires par l’apposition du signe :

CONSTATER que M. Y n’a pas été informé de façon claire et non équivoque de l’existence de termites actives dans les parties communes et sur l’importance des travaux en résultant.

En conséquence,

DIRE ET JUGER que les notaires chargés de la vente ont manqué à leur obligation de conseil.

CONDAMNER Maître K C et Maître Q R solidairement à réparer l’entier préjudice subi par M. Y.

3. Sur la responsabilité de l’entreprise DEP :

Vu les articles 1382 et suivants du code civil

CONSTATER que l’entreprise DEP a dans un premier effectué le 14 juin 2011 un rapport constatant l’absence de termites actives dans les parties communes sans autre préconisation et sans alerter son cocontractant sur la nécessité d’effectuer des recherches complémentaire eu égard à la présence constatée de traces anciennes d’attaques de termites.

CONSTATER qu’au mois de juillet 2011, l’entreprise TAC et le cabinet Z ont mis à jour l’existence de termites actives au 4e et 5e étage de l’immeuble puis également au 2e étage

CONSTATER que dans son rapport du 16 septembre 2011, l’entreprise DEP a également conclu à l’existence de termites actives.

En conséquence,

DIRE ET JUGER que les propres constatations de l’entreprise DEP auraient dû la conduire à plus de prudence dans la rédaction de ses conclusions.

DIRE ET JUGER que les conclusions du 14 juin 2011 du cabinet DEP ont empêché M. Y de se convaincre avant la vente définitive de la présence de termites actives dans les parties communes.

CONDAMNER l’entreprise DEP à réparer, le cas échéant solidairement, l’entier préjudice subi par M. Y

4. Sur le préjudice de M. Y :

4.1 Sur les appels de fonds exceptionnels :

CONSTATER que M. Y s’est vu appeler la somme de 74.338 € au titre de sa quote-part des travaux sur les parties communes.

En conséquence,

CONDAMNER solidairement la SCI SOVIC, Maître K C et Maître Q R et l’entreprise DEP à lui verser la somme de 74.338 € à titre de dommages intérêts

4.2 Sur le préjudice lié au retard pris dans l’ouverture de son fonds de commerce du fait des travaux sur les parties communes :

CONSTATER que du fait des travaux entrepris sur les parties communes, M. Y a dû repousser d’un an ses propres travaux et décaler de ce fait l’ouverture de son fonds de commerce au début de l’année 2013 au lieu de 2012.

En conséquence,

CONDAMNER solidairement, la SCI SOVIC, Maître K C et Maître Q R et l’entreprise DEP à lui verser la somme de 48.000 € à titre de dommages intérêts compensant le retard dans l’ouverture de son fonds de commerce de 12 mois ainsi qu’à la somme de En outre, les défendeurs devront être condamnés au paiement des charges courantes de 6.485, 24 Euros correspondant au montant des charges de copropriété réglées par M. Y pendant la période d’une année.

5. Sur les frais irrépétibles :

CONDAMNER solidairement, la SCI SOVIC, Maître K C et Maître Q R et l’entreprise DEP à lui verser la somme de 8.000 € au titre de ses frais irrépétibles.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 septembre 2013, la SCI Sovic demande au tribunal de :

“1. Débouter M. Y de toutes ses demandes fins et conclusions à l’égard de la SCI SOVIC.

2. Condamner toute partie succombant à payer à la société SOVIC la somme de 6000 € au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de maître A, conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC”.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 septembre 2013, la société DEP demande au tribunal de :

“- DÉBOUTER M. Y de l’ensemble de ses demandes à l’égard de la société DEP ;

- CONDAMNER toute partie succombant à payer à la société DEP la somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du CPC, ainsi qu’aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître B, conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC.”

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 12 mai 2014, Me C demande au tribunal de :

“Vu l’article 1382 du Code Civil,

DÉBOUTER M. Y de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de Maître C, notaire, membre de la SCP L M D’X, S T ET K C.

DIRE ET JUGER que M. Y ne rapporte pas la preuve d’une faute de Maître C dans le cadre de ses fonctions qui soit à l’origine pour lui d’un préjudice certain, réel et actuel.

En conséquence,

LE DÉBOUTER de l’intégralité de ses demandes indemnitaires dirigées à l’encontre de Maître C et de ses demandes au titre de l’article 700 et des dépens.

CONDAMNER M. Y solidairement avec tout succombant à payer à Maître C, notaire, la somme de 4 500 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER M. Y solidairement avec tout succombant aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Q RONZEAU qui pourra les recouvrer directement en application de l’article 699 du Code de Procédure Civile.”

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 janvier 2014, Me AF Q-R demande au tribunal de :

“Vu l’article 1382 du Code Civil,

Déclarer tant irrecevables que mal fondées les demandes formées par M. Y à l’encontre de Maître Q-R.

L’en débouter.

Condamner M. Y à payer à Maître Q-R la somme de 4.500 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Le condamner en tous les dépens solidairement avec tout succombant aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître L-O AI qui pourra les recouvrer directement en application de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

Pour l’exposé des moyens des parties, le tribunal se référera expressément à leurs dernières conclusions récapitulatives en application de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

M. Y fait valoir que :

* La SCI Sovic a manqué à son obligation d’information en s’abstenant de l’éclairer sur l’existence de travaux importants à intervenir au sein de la copropriété au mépris de l’article 1602 du code civil alors que « Le vendeur est tenu d’une obligation d’information envers l’acquéreur. En imposant à l’acquéreur de supporter le coût des travaux de ravalement de façade d’immeuble votés mais non encore exécutés, le vendeur avait l’obligation de le renseigner sur l’existence et le coût des travaux. En ne le renseignant pas, il a manqué à son obligation contractuelle et a causé à l’acquéreur, à laquelle le syndicat des copropriétaires a demandé le paiement de sa quote-part dans le coût des travaux, un préjudice certain » ; que la SCI SOVIC prétend déduire de la lettre que lui a adressée son gérant, M. E, le 1er juillet 2011, qu’elle l’aurait pleinement informé de l’ampleur des travaux qui ont été débattus et votés lors de l’assemblée du 30 juin 2011 et soutient qu’elle lui aurait régulièrement communiqué l’ensemble des éléments joints à l’appui de la convocation et notamment le rapport du Cabinet Z sur l’état de la copropriété ; que ce courrier ne prouve pas que le vendeur a rempli son obligation d’information ; que la SCI aurait dû l’informer de façon complète des travaux, certes non votés, mais dont le principe a été arrêté lors de l’assemblée générale des copropriétaires du 30 juin 2011 dés lors qu’elle ne l’avait pas mis en mesure d’y assister ; que la SCI ne peut dés lors se prévaloir de la clause de la promesse selon laquelle « le bénéficiaire doit répondre des futurs appels de fonds sans recours contre le promettant ».

* que l’existence de termites actives dans l’immeuble constitue un vice caché dont la SCI Sovic doit répondre sans pouvoir invoquer la clause de non garantie de l’acte authentique de vente dés lors qu’elle avait connaissance de la présence de ces insectes ayant été destinataire des avertissements répétés du syndic relatifs à l’état des poutres et de la présence de termites actives dans l’immeuble ; que l’existence de termites actives telle que constatée par le cabinet Z, l’entreprise DEP et l’entreprise TAC est bien un vice caché qui rend l’immeuble impropre à l’usage auquel il est destiné et diminue tellement cet usage qu’il ne l’aurait pas acquis, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il l’avait connu ; qu’elle devra en conséquence le garantir de l’ensemble des sommes mises à sa charge au titre des travaux entrepris par la copropriété pour les traitements anti-termites.

La SCI Sovic conclut au débouté de ces demandes en faisant valoir que :

* La promesse de vente du 20 mai 2011 comprend la clause suivante : « le bénéficiaire prendra en charge les travaux qui viendraient à être décidés depuis la date de signature des présentes, des lors que le promettant aura mis le bénéficiaire en mesure d’assister à l’assemblée des copropriétaires, en lui adressant aux plus tard sept jours à l’avance, par lettre recommandée avec avis de réception, la copie de la convocation à cette assemblée, l’ordre du jour et un pouvoir dûment signé à l’effet de prendre part au vote sans aucune restriction. À défaut ces travaux resteront à la charge définitive du promettant. Le promettant remettra à titre forfaitaire et définitif au bénéficiaire le jour de la vente, le montant des travaux lui incombant mais non encore exigible, et le bénéficiaire devra répondre des futurs appels de fonds, quelle que soit leur montant et sans recours contre le promettant. » ; qu’ayant omis d’aviser M. Y de la tenue de l’assemblée générale des copropriétaires du 30 juin 2011, elle a réglé lors de la vente le montant des travaux votés à son issue soit la somme de 44 473 euros ainsi qu’il résulte de l’acte authentique de vente du 5 août 2011 (page 15) ; que par courrier du 1er juillet 2011 son gérant, M. E, a attiré l’attention de M. Y sur les travaux, objet des ordres du jour et en particulier sur ceux concernant les poutres maîtresses, « affectant la sécurité de l’immeuble et ses occupants et donc l’intérêt global des copropriétaires » ; qu’il lui a également transmis le rapport du cabinet LAM ; qu’aucune assemblée générale antérieure n’avait évoqué cette question ; qu’elle n’a donc commis aucune faute ; qu’en outre, selon les termes de la promesse du 20 mai 2011 “le bénéficiaire doit répondre des appels de fonds postérieurs à l’assemblée du 30 juin 2011, quelle que soit leur montant et sans recours contre le promettant” ;

* que l’acte de vente – comme la promesse de vente – comprend une clause excluant la garantie des vices cachés et mentionne que « Le bien objet des présentes est située dans une zone délimitée par arrêté préfectoral en application de l’article L 133-5 du code de la construction et de l’habitation, c’est-à-dire dans un secteur contaminé ou susceptible d’être contaminé par les termites » ; que l’acheteur était donc informé que le bien acheté se situait dans une zone contaminée ou susceptible d’être contaminé par les termites ; que l’ensemble des pièces du dossier démontre que toutes les parties au litige, ainsi que le syndic de l’immeuble, ignoraient la présence de termites actives lors de l’assemblée générale du 30 juin 2011 au cours de laquelle ont été votés des travaux de renforcement des poutres sans que soit évoquée la présence de termites, pas plus que le rapport LAM joint à la convocation de cette assemblée ; que M. Y indique lui-même qu’à la lecture du premier rapport de l’entreprise DEP, il ne pouvait être conclu à la présence de termites actives dans l’immeuble ; que cette présence n’a été révélée qu’à l’occasion de la réalisation des travaux votés en juin lors du sciage des poutres par l’entreprise TAC qui s’est alors rendue compte que les travaux initialement prévus ne suffiraient pas et qu’ il y avait des termites, information relatée dans sa lettre du 22 juillet 2011 adressée au syndic, dont elle-même ne fut pas destinataire mais qui a été annexée à l’acte de vente ; que cette lettre fait référence à la nécessité de procéder à des investigations complémentaires (mise à nu de l’ensemble des solivages charpente bois de l’appartement du quatrième étage, et nécessité d’une nouvelle étude de l’ingénieur structure pour un renforcement de l’appartement du deuxième étage pour permettre d’établir un chiffrage du traitement des travaux curatifs à exécuter) ;

Qu’en ce qui concerne les termites l’acte de vente mentionne :

« En ce qui concerne les parties privatives,

En application de l’article L 133-6 du code précité, un état relatif à la présence de termites établis par le cabinet BCE, le 10 mai 2011, soit depuis moins de six mois, ne révélant la présence d’aucun termite dans le bien est demeuré ci-annexé après mention. En ce qui concerne les parties communes :

En application de l’article L 133-6 du code précité un état relatif à la présence de termites établis par le cabinet DEP le 14 juin 2011, soit depuis moins de six mois, ne révélant la présence d’aucun termite dans les parties communes (mais présence d’un traitement anti termites par injection) est demeuré ci-annexée après mention. Étant ici précisé que des termites ont été visualisés dans l’appartement sis au quatrième étage droite de l’immeuble (propriétaire H), ainsi qu’il résulte du courrier du cabinet TAC en date à Chilly-Mazarin du 22 juillet 2011 dont une copie est demeuré ci-annexée après mention » ; qu’il est ainsi démontré que lors de la vente, M. Y avait connaissance du courrier de l’entreprise TAC qui mentionnait :

— la présence de termites constatés dans l’immeuble ;

— d’importants travaux curatifs et de structures non encore chiffrés devant être encore entrepris ;

qu’ainsi, M. Y devra être débouté des demandes formulées à son encontre en l’absence de manquement à son devoir d’information et en l’absence de preuve qu’elle avait connaissance d’un vice caché.

Sur la responsabilité des notaires

M. Y rappelle que les notaires sont tenus d’un devoir de conseil envers leurs clients auquel ils ne peuvent se soustraire, et il reproche aux deux notaires de la vente de l’avoir très insuffisamment éclairé :

* sur les travaux de grande ampleur à intervenir au sein de la copropriété alors qu’ils en étaient informés par l’état adressé par le syndic le 25 juillet 2011, suivi d’une télécopie adressée à Me C le 27 juillet 2011 précisant que :

— « La présence de termites avait été constatée dans l’immeuble ;

- D’importants travaux curatifs et de structure non encore chiffrés allaient devoir être entrepris ».

Vu la gravité de la situation, le syndic apposait sur son fax le signe “Attention!!”,

que l’annexion de ces courriers ne suffit pas à justifier que les notaires ont rempli leur devoir de conseil alors en outre que la clause d’exclusion de garantie des vices cachés doit conduire le notaire à une particulière vigilance quant aux informations portées à la connaissance de l’acquéreur quant à l’état du bien.

* sur la présence de termites actives alors que la teneur de l’acte authentique de vente qui comporte des mentions contradictoires ne pouvait que l’induire en erreur sur la portée des informations qui venaient d’être révélées ; qu’en effet, l’acte authentique de vente est ainsi rédigé en page 17 au paragraphe II en ce qui concerne les parties communes) :

« Un état relatif à la présence de termites établi par le Cabinet DEP le 14 juin 2011, soit depuis moins de 6 mois ne révélant la présence d’aucun termite dans les parties communes est demeuré ci-annexé après mention »

Puis, l’acte se contente d’évoquer la lettre du Cabinet TAC qu’il relègue en annexe (pièce n°8) :

« Étant précisé que des termites ont été visualisées dans l’appartement sis au 4e étage droite de l’immeuble ainsi qu’il résulte d’un courrier du cabinet TAC du 22 juillet 2011, dont une copie est demeurée ci-annexée après mention »

Enfin, en page suivante (p.18), l’acte reprend in extenso les conclusions du cabinet DEP du 14 juin 2011 et est ainsi inséré :

« En conclusion et au vu des éléments observés : (en gras dans le texte)

- Nous pouvons constater que le problème reste localisé dans le logement situé au niveau 4 Gauche.

- Aucun indice complémentaire ne permet de conclure à ce jour, à une infestation plus étendue sur cet immeuble ».

M. Y fait valoir que le notaire n’avait pas besoin de disposer de compétences techniques particulières pour comprendre que le courrier du cabinet TAC était alarmiste ou que des travaux considérables étaient à prévoir dans l’immeuble à la suite de la réception des informations du syndic ; que la jurisprudence exige du notaire qu’il « avertisse les contractants de toutes les conséquences prévisibles que peut entraîner l’acte juridique projeté » et que le notaire est responsable lorsqu’il a connaissance, lors de l’établissement de l’acte, du vice affectant l’immeuble ».

Me C comme Me Q-R font valoir en réplique que :

* M. Y ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la faute commise dans le cadre de leurs fonctions ni celle d’un préjudice certain, réel et actuel ayant un lien de causalité direct avec la faute reprochée ; qu’au contraire, les éléments du dossier et le contenu même de l’acte authentique de vente démontrent qu’il était parfaitement informé de la situation des biens et que l’ensemble des informations dont disposait le notaire chargé de recevoir l’acte authentique de vente ont été portées à sa connaissance à savoir :

— L’état relatif à la présence de termites dans les parties privatives établi par le cabinet BCE à la date du 11 mai 2011, ainsi que l’état relatif aux parties communes établi par le cabinet DEP le 14 juin 2011 lequel indiquait clairement dans ses conclusions : « - Aucune trace apparente d’infestation par les termites dans les parties communes au jour du U. – Présence d’un traitement anti-termites par injection ».

— Du rapport d’intervention du cabinet DEP établi le 14 juin 2011 concernant l’appartement au niveau 4 gauche indiquant dans ses conclusions ce qui suit littéralement rapporté : « Nous pouvons constater que le problème reste localisé dans le logement situé au niveau 4 gauche. Aucun indice complémentaire ne permet de conclure à ce jour à une infestation plus étendue sur cet immeuble. »

— Le courrier de la société TAC en date du 22 juillet 2011 adressé au syndic de l’immeuble concernant la présence de termites dans l’appartement H situé au 4e étage de l’immeuble et dans les appartements du 2e étage (tous lots privatifs), informations concordant avec la mention du résultat positif de la recherche de termites par le syndic sur son état daté du 25 juillet 2011 ;

Que M. Y est dès lors parfaitement mal fondé à déclarer que la teneur de l’acte ne pouvait que l’induire en erreur.

* M. Y est mal fondé à reprocher au notaire de ne pas avoir su anticiper sur l’ampleur des travaux qui pourraient résulter de situations constatées postérieurement à l’acte de vente.

La responsabilité du notaire doit s’apprécier au moment où il reçoit l’acte de vente et il faut tenir compte des limites juridiques de sa compétence qui ne s’étendent pas à l’appréciation technique de l’ampleur de travaux qui pourraient être envisagés dans l’avenir.

En l’espèce, il est manifeste que l’ensemble des informations portées à la connaissance du notaire chargé de recevoir l’acte de vente relatif à la présence de termites dans l’immeuble, ont été portées à la connaissance de l’acquéreur.

Au vu des informations dont il disposait, celui-ci a fait choix de persister dans sa volonté d’acquérir.

Sur la responsabilité de la société DEP

M. Y fait valoir que selon la Cour de Cassation, le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; que la société DEP, comme tout diagnostiqueur, est responsable vis-à-vis des acquéreurs sur le fondement de l’article 1382 du code civil des fautes qu’elle commet ; qu’il considère que la société DEP a manqué à son obligation en relevant que :

« Des traces d’attaques par les termites de type « reticulitermes » sur une partie de la charpente traditionnelle »

« Les propriétés mécaniques des bois étant dans certaines cas atteintes »

tout en concluant que :

« Nous pouvons constater que le problème reste localisé dans le logement situé au niveau 4 gauche. Aucun indice complémentaire ne permet de conclure à ce jour à une infestation plus étendue sur cet immeuble ».

Qu’en considération du rapport en date du 14 juin 2011, repris in extenso dans l’acte, il a pu se rassurer sur l’état de l’immeuble eu égard à la présence de termites ;

Que les diagnostiqueurs sont tenus d’une obligation de conseil et sont délictuellement responsables des manquements commis dans l’exercice de leur mission vis-à-vis des tiers acquéreurs ;

Qu’en conséquence, l’entreprise DEP devra être condamnée solidairement avec le vendeur et les notaires chargés de la vente à la réparation du préjudice subi par lui ;

La société DEP expose qu’elle a été chargée par le syndic de l’immeuble d’établir un état parasitaire des parties communes et d’un U tous prédateurs de bois portant sur une partie privative (appartement gauche du 4e étage) et non d’un U réglementaire EBRPT (Etat du Bâtiment Relatif à la Présence de Termites) exigé par la réglementation dans le cadre des ventes immobilières ; qu’elle est une société spécialisée dans la gestion globale du risque sanitaire dans l’habitat privé et les immeubles du tertiaire et notamment dans les diagnostics de recherche de termites ; qu’elle a donc été surprise d’apprendre par la suite que la société SOVIC, propriétaire d’un local commercial au rez-de-chaussée avait utilisé ce U dans le cadre de la vente de son bien immobilier, sans son accord et sans même qu’elle en soit informée.

Elle rappelle qu’elle a remis deux rapports, le 14 juin 2011 :

— le premier qui indique l’absence de trace de termites dans les parties communes suivantes : local poubelle au niveau RDC ; – cage escalier au niveau RDC->4 ; – WC au niveau 3 et qui précise que cet état parasitaire se limite aux constatations visuelles, qu’il a été effectué par sondage non destructifs et “que des investigations plus approfondies nécessitent des travaux complémentaires” ;

— le second, qui concerne deux locaux commerciaux au RDC droite et gauche ;

— un appartement au niveau 1 face ; un appartement au niveau 4 gauche et qui a révélé une infestation : “Traces d’attaques par les termites de type Reticulitermes sur une partie de la charpente traditionnelle” ;

Elle fait valoir que la présence de termites a été révélé à la suite de travaux invasifs dans un appartement qu’elle n’avait pas visité, n’ayant pas été mandatée ; qu’elle a rappelé l’ensemble de ces faits dans son courrier du 20 juillet 2012 en réponse aux doléances de M. Y ;

* Qu’elle n’a commis aucune faute ; que sa responsabilité au titre du rapport « constat parasitaire des parties communes » ne pourrait être engagée que si elle avait reçu une mission complète de U c’est-à-dire si elle avait reçu le mandat d’établir le U réglementaire Etat du Bâtiment Relatif à la Présence de Termites (EBRPT) destiné à être produit dans le cadre d’une transaction immobilière.

* M. Y ne rapporte pas la preuve d’une quelconque défaillance de la société DEP qui a au contraire très clairement identifié une infestation de termites dans l’immeuble et ce dans l’appartement du 4e étage gauche.

Sur ce,

Il résulte de la lecture des procès-verbaux d’assemblée générale antérieurs à la vente que la présence de termites dans l’immeuble n’a jamais été évoqué avant celle du 30 juin 2011.

L’acte authentique de vente précise que l’immeuble se trouve dans une zone contaminée ou susceptible de l’être par les termites.

A l’issue de l’assemblée générale des copropriétaires du 30 juin 2011, M. F, gérant de la SCI Sovic, a adressé un courrier dés le lendemain 1er juillet pour l’informer du vote de travaux urgents concernant des poutres maîtresses et lui a communiqué la convocation en vue de cette assemblée. Cette convocation comporte en annexe les documents suivants :

— le rapport de l’architecte de l’immeuble en vue de l’établissement d’un U et d’une mise en concurrence pour les travaux de structure de l’immeuble,

— la proposition de travaux de renforcement de la poutre maîtresse de l’appartement de M. G, copropriétaire du 2e étage gauche face et des poutres de l’appartement de M. H, copropriétaire au 4e étage gauche.

Le rapport de l’architecte mentionne, en page 7, la nécessité de régulièrement s’assurer que le bâti n’est pas attaqué par des insectes et préconise en page 10 de faire contrôler les charpentes contre les risques de dégradation par insectes et champignons lignivores.

Il résulte du devis des travaux de renforcement de poutre chez M. I que ces travaux ont été votés en raison de son endommagement par la pourriture et par des gerces suite à des dégâts des eaux.

Le rapport du cabinet d’architecture Lam fait essentiellement allusion à la recherche systématique de fuites d’eau en raison des désordres constatés dans les parties communes et privatives de l’immeuble.

Le tribunal constate au vu de ces pièces que la présence de termites n’a jamais été évoquée ni portée à la connaissance des copropriétaires ; que cette présence n’a été connue qu’à la suite des travaux votés le 30 juin 2011 puis réalisés par l’entreprise Tac qui a découvert la présence active de termites en sciant la poutre concernée dans l’appartement du quatrième étage et qui en a immédiatement avisé le syndic par un courrier du 22 juillet 2011, transmis au notaire et annexé à l’acte authentique de vente ; que, dans son état de l’immeuble daté du 25 juillet 2011, le syndic a par ailleurs informé le notaire et les parties de la découverte de termites dans l’appartement en ces termes “ La recherche de termites a été effectuée par J, elle est positive voir courrier Tac 22/07/11".

Par ailleurs, ni le U de l’entreprise BCE du 11 mai 2011, ni le rapport de la société DEP ne révélaient la présence de termites mais uniquement des traces anciennes d’infestation et d’un traitement par injection et ce, à l’issue de constatations que ces sociétés précisaient avoir faites sans sondages destructifs dont il n’est pas établi qu’ils auraient dû être pratiqués.

L’acte de vente du 5 août 2011 mentionne que si les diagnostics techniques n’ont révélé que de traces anciennes de termites dans les parties privatives – aucune dans les parties communes – en revanche, des éléments postérieurs ont révélé la visualisation de termites actives dans l’appartement du quatrième droite et mentionne l’annexion du courrier de l’entreprise TAC du 22 juillet 2011.

Ainsi, il résulte de ces divers documents qui ont été communiqués à l’acquéreur avant la vente que ce dernier a eu connaissance de la présence de termites actives dans l’immeuble.

Le tribunal relève encore que le constat de l’état parasitaire de l’immeuble entier établi par la société DEP en septembre 2011, également dressé sans sondages destructifs, n’a pas davantage révélé la présence active de termites mais uniquement des traces ou des dégâts dans activité apparente.

Il est également établi, au moyen des procès-verbaux des assemblées générales des copropriétaires postérieures à la vente que l’ampleur des dégradations dues aux termites n’a été révélée que par la suite et de façon successive uniquement au fur et à mesure de la réalisation des travaux.

Il ressort de l’ensemble de ces documents et circonstances que M. Y n’est fondé ni à reprocher à la SCI Sovic un manquement à son obligation d’information, ni aux notaires instrumenteurs un manquement à leur devoir de conseil.

Aucun manquement ne saurait être davantage reproché à la société DEP dont la mission était limitée à des constatations visuelles et dont M. Y ne prouve pas qu’elle aurait pu déceler la présence active de termites d’autant qu’elle n’était chargée que des parties communes dans lesquelles il n’est pas établi que des termites auraient été actives, les travaux votés après la vente concernant les parties privatives.

La preuve d’un vice caché n’étant pas davantage rapportée, il convient de débouter M. Y de l’ensemble de ses demandes.

Sur les frais irrépétibles

Compte tenu de la solution apportée au litige, il serait inéquitable de laisser aux défendeurs la charge de leurs frais d’instance non compris dans les dépens.

Il y a lieu en conséquence de condamner à ce titre M. Y à payer à chacun des défendeurs la somme de 3 000 euros.

Sur l’exécution provisoire

Il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire compte tenu de la solution apportée au litige.

Sur les dépens

Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens. A la demande des défendeurs, il sera en outre fait application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire en premier ressort,

Déboute M. N Y de ses demandes,

Condamne M. N Y à payer, à la SCI Sovic, à la société U V W, à Me K C et à Me AF Q-R chacun la somme de 3 000 euros au titre de leurs frais d’instance non compris dans les dépens,

Condamne M. N Y au paiement des dépens avec distraction au profit de Me Q Ronzeau, de Me Marie-Laure A, de Me Stéphane B et de Me L-O AI, avocats, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile pour des frais dont ils auraient fait l’avance sans recevoir provision,

Dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire de la présente décision.

Fait et jugé à Paris le 28 Novembre 2014

Le Greffier Le Président

A. BOUIN B. CHAMPEAU-RENAULT

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Tribunal de grande instance de Paris, 2e chambre 2e section, 28 novembre 2014, n° 13/09023