Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 4e section, 23 octobre 2014, n° 14/04686

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 4e sect., 23 oct. 2014, n° 14/04686
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 14/04686
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : YVES SAINT LAURENT ; YVESSAINTLAURENT ; SAINT LAURENT
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 1252675 ; 3146625 ; 1412766 ; 6845622 ; 11445905
Classification internationale des marques : CL08 ; CL09 ; CL14 ; CL16 ; CL18 ; CL21 ; CL24 ; CL25 ; CL26 ; CL28 ; CL34 ; CL35 ; CL37 ; CL41 ; CL43
Référence INPI : M20140663
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Texte intégral

TRIBUNAL D E GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 23 Octobre 2014

3e chambre 4e section N° RG : 14/04686

Assignation du 25 Mars 2014

DEMANDERESSE S.A.S. YVES SAINT LAURENT […] V 75008 PARIS agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège. représentée par Maître Gaétan CORDIER du PUK EVERSHEDS LLP, avocats au barreau de PARIS, avocats postulant, vestiaire #J0014

DÉFENDERESSE Madame Aissatou I défaillante, faute d’avoir constitué avocat

COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Claude H. Vice-Présidente Thérèse A. Vice-Présidente François THOMAS. Vice-Président assistés de Sarah BOUCRIS, Greffier.

Conformément à l’article 779 alinéa 3 du code de procédure civile, l’affaire ne requérant pas de plaidoirie, l’instruction a été clôturée le 19 juin 2014 et les parties invitées à déposer leur dossier au greffe. A l’audience du 09 juillet 2014, tenue en audience publique devant Marie-Claude H et François THOMAS, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l’audience, et, sur dépôt de dossiers, en ont rendu compte au tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du code de procédure civile.

JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Réputé contradictoire En premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Yves Saint Laurent crée et commercialise des articles de luxe, notamment de prêt-à-porter et d’accessoires. Elle est titulaire de plusieurs marques, notamment :

-la marque française YVESSAINTLAURENT déposée le 29 novembre 1983 sous le numéro 1252675 en classes 8, 16, 21, 28, 34,

— la marque internationale YVESSAINTLAURENT désignant la France, déposée sous le numéro 314625 le 7 juin 1966 en classes 14, 18, 24, 25, 26,
- la marque française YVESSAINTLAURENT déposée le 13 avril 1987 sous le numéro 1412766 en classes 14, 18, 24, 25, 26,
- la marque communautaire YVESSAINTLAURENT déposée le 9 avril 2008 sous le numéro 0068454622 en classes 9, 14, 18, 25,
- la marque communautaire SAINTLAURENT déposée le 7 décembre 2012 sous le numéro 011445905 en classes 9, 14, 16, 18, 24, 25, 34, 35, 37, 41, 43. La société Yves Saint Laurent a été informée le 13 mars 2014 par la direction régionale des douanes de Roissy d’une mise en retenue douanière de 754 étiquettes cartonnées, revêtues de l’inscription «Yves Saint Laurent », susceptibles de contrefaire ses marques. Ces étiquettes ont été expédiées par une société basée à Hong-Kong et avaient pour destinataire madame Aissatou I, demeurant chez madame Aminata I, sise […]. Par acte d’huissier en date du 25 mars 2014, la société Yves Saint Laurent a fait citer madame Aissatou I devant le tribunal de grande instance de Paris et demande au tribunal de :

-juger que les étiquettes «Yves Saint Laurent » retenues en douanes le 13 mars 2014 et destinés à Monsieur Aissatou I constituent la contrefaçon des marques «Yves Saint Laurent » n° 1252675, 314625, 1412766,006845622, et « Saint Laurent » n°011445905,
- interdire sous astreinte de 5000 € par produit et par infraction à partir de la signification du jugement, à madame Aissatou I d’importer, d’exporter, de détenir et d’utiliser, de quelle que manière que ce soit, des produits contrefaisants,
- ordonner la destruction par les douanes de l’ensemble des étiquettes retenues en douane le 13 mars 2014,
- se réserver la liquidation des astreintes,
- condamner madame Aissatou I à verser à la société Yves Saint Laurent la somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts, à parfaire, au regard de l’atteinte économique portée aux marques précitées,
-condamner madame Aissatou I à lui verser la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice moral pour avilissement des marques précitées,
- ordonner la publication judiciaire de la décision, dans 5 journaux à son choix et aux frais du défendeur, sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder 5.000 euros,
- ordonner l’exécution provisoire du jugement,
- condamner madame Aissatou I à lui verser la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamner Madame Aissatou I aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Gaétan Cordier, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

A l’appui de ses demandes, la société Yves Saint Laurent soutient que les produits litigieux retenus reproduisent les marques dont elle est titulaire pour être apposées sur des vêtements, de sorte que la contrefaçon est établie en application des articles L 713-2, L713-3 et L 713-5 du code de la propriété intellectuelle. Elle fait état de l’identité et de la similitude des produits en question, et détaille ses demandes.

Madame Aissatou I, assignée selon les modalités de l’article 658 du code de procédure civile, n’a pas constitué avocat de sorte qu’un jugement réputé contradictoire sera rendu par application de l’article 473 du code de procédure civile. L’ordonnance de clôture a été prononcée le 19 juin 2014. MOTIVATION L’article 472 du code de procédure civile dispose que « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée. » Sur les actes de contrefaçon L’article L713-2 du code de la propriété intellectuelle prévoit que « Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire : a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que : « formule, façon, système, imitation, genre, méthode », ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement […]. » L’article L713- 3 prévoit que « sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public : a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ; b) L’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement. »

L’article 9 du règlement communautaire n°207/2009 sur la marque communautaire prévoit que « la marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, défaire usage dans la vie des affaires: a) d’un signe identique à la marque communautaire pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée; b) d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque communautaire et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque communautaire et le signe, il existe un risque de confusion dans

l’esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque; c) d’un signe identique ou similaire à la marque communautaire pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque communautaire est enregistrée, lorsque celle-ci jouit d’une renommée dans la Communauté et que l’usage du signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque communautaire ou leur porte préjudice.»

Il ressort des documents versés que la société Yves Saint Laurent a été prévenue par courrier daté du 6 mars 2014 des services des douanes de Roissy, de la mise en retenue de marchandises présumées contrefaisantes, constituées de 754 étiquettes cartonnées. Ces étiquettes, qui présentent sur un fond blanc l’inscription en noir YVESSAINTLAURENT, avaient pour destinataire madame Aissatou I, chez madame Aminata I, […]. Ces étiquettes présentent une proximité visuelle très importante avec les marques n°1252675, 3146625, 1412766 et 006845622, en ce que les signes qui y figurent sont composés des trois mêmes termes accolés les uns aux autres, orthographiés de manière identique, en lettres majuscules de caractères noirs, dans une police très proche de celles des marques en question, et les premières lettres de chaque terme YSL étant chacune de taille plus importante que les autres lettres comme dans les signes protégés par les marques. Par ailleurs, les signes apparaissant sur ces étiquettes ont la même identité phonétique que les marques précitées, aucune différence acoustique ne pouvant être relevée entre les signes. Au niveau conceptuel, le signe YVES SAINT LAURENTest évocateur des marques YVES SAINT LAURENT, lesquelles disposent d’une notoriété importante et sont identifiées au luxe français. S’agissant de la marque n°011445905, le signe apparaissant sur les étiquettes cartonnées reprend les deux éléments SAINT LAURENT constituant cette marque communautaire, éléments qui y sont précédés du prénom Yves, de sorte que ce signe présente une grande proximité visuelle avec la marque nominative considérée. Au niveau phonétique également, le signe sur les étiquettes parait, malgré l’attaque par le terme « Yves » absent de la marque communautaire, très proche de la marque communautaire, trois sur quatre de ces syllabes correspondant à la reprise de l’intégralité de cette marque.

Enfin, le signe des étiquettes cartonnées évoque le savoir-faire du luxe français, induit également par la marque communautaire SAINT LAURENT pour le consommateur.

Les produits litigieux sont des étiquettes en carton, de sorte qu’elles correspondent aux produits « papier, carton et produits en ces matières, papeterie » visés par la marque n° 1252675, ainsi qu’aux « étiquettes non en tissus » désignés par la marque communautaire n°011445905, qui vise également les produits « papier, carton et produits en ces matières ». Ces étiquettes cartonnées sont dépourvues d’usage propre, elles ne sont que l’accessoire du produit sur lequel elles sont destinées à être apposées ou cousues, de sorte qu’elles apparaissent indissociables des produits visés. Les marques 3146625 et 1412766 visent notamment les « vêtements et accessoires, robes, manteaux, fourrures, souliers…» et la marque communautaire 006845622 les « vêtements, ceintures (habillement), gants (habillement), chaussures et chapellerie », soit des produits sur lesquels sont apposés de telles étiquettes cartonnées. De plus, il convient de reconnaître aux marques YVES SAINT LAURENT, du fait de leur notoriété internationale, une protection étendue à des produits et des services non similaires à ceux désignés dans les enregistrements antérieurs, et ces étiquettes cartonnées sont manifestement destinées à être apposées sur des vêtements et produits visés par les marques 3146625, 1412766 et 006845622 auxquelles elles portent atteinte. Les étiquettes cartonnées objets de la retenue douanière étant de nature à créer un risque de confusion dans l’esprit du consommateur, qui leur attribuera la même origine -la maison Yves Saint Laurent – que les produits portant les marques protégées, elles constituent l’imitation des marques précitées dont la société Yves Saint Laurent est titulaire, ce qui caractérise la contrefaçon. La demande présentée par la société Yves Saint Laurent sera par conséquent accueillie. Il sera fait interdiction à madame Aissatou I de poursuivre de tels agissements dans les conditions fixées par le dispositif. Sur la réparation du préjudice Les actes de contrefaçon auxquels s’est livrée madame Aissatou I participent à une dévalorisation des marques et produits de la société Yves Saint Laurent, et à une dépréciation de leur valeur. Aussi sera-t-il fait une juste appréciation du préjudice subi au titre de l’atteinte aux marques de la société Yves Saint Laurent en condamnant madame Aissatou I au paiement d’une somme de 10 000 euros.

La demande au titre d’un préjudice matériel économique n’est pas justifiée et sera rejetée.

Par ailleurs, la destruction de la marchandise retenue par les services des douanes sera ordonnée, sans être assortie d’une astreinte. Sur la publication La teneur de la décision ne justifiant pas que sa publication soit ordonnée, il ne sera pas fait droit à cette demande. Sur l’exécution provisoire L’exécution provisoire de la décision sera ordonnée, sauf en ce qui concerne la destruction du stock . Sur les dépens Madame Aissatou I succombant au principal, elle sera condamnée au paiement des dépens. Sur les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile Il apparaît justifié en l’espèce de condamner madame Aissatou I au paiement de la somme de 3000 euros à la société Yves Saint Laurent sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS.

Le tribunal, statuant publiquement par jugement réputé contradictoire rendu en premier ressort, et par mise à disposition au greffe le jour du délibéré, Dit que madame Aissatou I a commis des actes de contrefaçon des marques n°1252675, 3146625, 1412766, 006845622 et 011445905 au préjudice de la société YVES SAINT LAURENT, Interdit en tant que de besoin à madame Aissatou I de détenir et d’utiliser de quelle que manière que ce soit des produits contrefaisants, Ordonne la destruction des produits objets de la retenue douanière, aux frais de madame Aissatou I, Condamne madame Aissatou I au paiement de la somme de 10.000 euros à la société Yves Saint Laurent, en réparation de l’atteinte portée à ses droits sur les marques,

Dit n’y avoir lieu à ordonner la publication de la décision.

Ordonne l’exécution provisoire de la décision, sauf s’agissant de la destruction,

Condamne madame Aissatou I au paiement à la société Yves Saint Laurent de la somme de 3000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Condamne madame Aissatou I aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Gaëtan Cordier.

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