Tribunal de grande instance de Paris, 1re chambre 2e section, 20 décembre 2017, n° 15/18467

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 1re ch. 2e sect., 20 déc. 2017, n° 15/18467
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 15/18467

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

1/2/1 nationalité A

N° RG : 15/18467

N° PARQUET : 16/120

N° MINUTE :

Assignation du :

03 Décembre 2015

Extranéité

M. P.

JUGEMENT

rendu le 20 Décembre 2017

DEMANDEUR

Monsieur X Z

[…]

DIAWARA

SENEGAL

représenté par Me Vanina ROCHICCIOLI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0127

DÉFENDEUR

M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE

[…]

[…]

[…]

Monsieur A B, Vice-Procureur

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Marion Y, Vice-président

Président de la formation

Madame Carole CHEGARAY, Vice-Président

Monsieur Julien SENEL, Vice-Président

Assesseurs

assistés de Madame Aline LORRAIN, Greffier

DÉBATS

A l’audience du 04 Octobre 2017 tenue publiquement sans opposition des représentants des parties, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile par Madame Marion Y, Magistrat rapporteur, qui a entendu les plaidoiries et en a rendu compte au tribunal dans son délibéré.

JUGEMENT

Contradictoire

en premier ressort

Prononcé en audience publique, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

Signé par Mme Marion Y, Président et par Mme Aline LORRAIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l’article 455 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions de M. X Z notifiées par la voie électronique le 29 juillet 2016,

Vu les dernières conclusions du ministère public notifiées par la voie électronique le 3 novembre 2016,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 16 mars 2017,

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s’élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l’assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé. En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 14 mars 2016. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée.

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.

Au regard des règles posées par les articles 17-1 et 17-5 du code civil et compte tenu de sa date de naissance revendiquée en 1991, la situation de la demanderesse est régie par les dispositions de l’article 18 du code civil selon lequel est français l’enfant dont l’un au moins des parents est français.

Aux termes de l’article 47 du code civil en effet, tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Enfin, nul ne peut revendiquer à quelque titre que ce soit, la nationalité française, s’il ne dispose d’un état civil fiable et certain.

En l’espèce M. X Z produit en pièce n° 1 une copie intégrale (délivrée le 15 juillet 2015) de son acte de naissance dressé par l’officier d’état civil du centre de Diawara, département de Bakel, au Sénégal selon lequel il est dit né le […] de E Z né le […] et de C D née le […].

Cet acte précise qu’il a été dressé le 11 juin 2008 et enregistré sous le n°225 dans le registre de l’année 2008 en exécution d’un jugement n°4354 du 31 mars 2007 rendu par le tribunal départemental de Bakel.

Le Ministère public ne conteste pas que M. E Z a été naturalisé français par décret en date du 24 septembre 1990 et a donc la nationalité française. Il interroge en revanche l’état civil de M. X Z et son lien de filiation avec celui-ci.

La minute du jugement n°4354 du 31 mars 2007 est produite en pièce n°2, délivrée par le greffier en chef du tribunal départemental de Bakel. Il s’agit d’un jugement d’autorisation d’inscription de naissance rendu sur le fondement des articles 51, 86, 87, 832 et 3 du code de la famille sénégalais.

L’article 51 du code de la famille sénégalais prévoit en effet que toute naissance doit être déclarée à l’officier de l’état civil dans le délai franc d’un mois. Il ajoute que lorsqu’un mois et quinze jours se sont écoulés depuis une naissance sans qu’elle ait fait l’objet d’une déclaration, l’officier de l’état civil peut néanmoins en recevoir une déclaration tardive pendant le délai d’une année à compter de la naissance à condition que le déclarant produise à l’appui de sa déclaration un certificat émanant d’un médecin ou d’une sage-femme ou qu’il fasse attester la naissance par deux témoins majeurs. Il précise enfin que passé le délai d’un an après la naissance, l’officier de l’état civil ne peut dresser l’acte de naissance que s’il y est autorisé par une décision du juge de paix rendue dans les conditions prévues par la Section III du présent chapitre.

En l’espèce, la naissance du demandeur a été portée sur les registres de l’état civil en 2008 suite à une requête formée en 2007, soit plus de 16 années après la naissance, la procédure suivie devant donc être celle pour les naissances déclarées au-delà d’une année.

La section III à laquelle renvoie l’article 51 contient les dispositions propres à la procédure à suivre. A ce titre, l’article 87 du code de la famille sénégalais compris dans cette section, énonce que lorsqu’un acte de naissance n’aura pas été dressé ou que la demande d’établissement en aura été présentée tardivement, le juge de paix dans le ressort duquel l’acte aurait dû être reçu, pourra, par jugement, en autoriser l’inscription par l’officier de l’état civil. Il ajoute que le juge est saisi sur requête des personnes dont l’acte de l’état civil doit établir l’état, de leurs héritiers et légataires, des

personnes autorisées ou habilitées à procéder à la déclaration de l’événement, ou du ministère public et que si la requête n’émane pas de lui, elle est obligatoirement communiquée au Procureur de la République qui procède comme en matière de procédure civile.

En l’espèce, il n’apparaît à aucun moment sur la minute du jugement que la procédure aurait été transmise au Procureur de la République, ou que celui-ci aurait été à l’origine de la requête, la minute nouvellement produite en pièce n°12 et délivrée le 29 juin 2016 par le greffier en chef de la juridiction précisant que le requérant est M. E Z.

Si le décret n°84-1194 du 22 octobre 1984 fixant la composition et la compétence des cours d’appel, des tribunaux régionaux et des tribunaux départementaux au Sénégal prévoit en son article 43 que les tribunaux départementaux et les tribunaux régionaux peuvent, si les besoins du service l’exigent, tenir des audiences en dehors du lieu où ils siègent habituellement et statuent, au cours de ces audiences foraines, dans la plénitude de leur compétence et avec leur composition habituelle, comme cela a été le cas en l’espèce, cette disposition ne dispense pas de la transmission de la procédure au Procureur de la République telle que prévue par l’article 87 du code de la famille.

M. X Z invoque l’article 3 du même décret n°84-1194 du 22 octobre 1984 qui prévoit que pour les tribunaux départementaux qui ne comportent pas de ministère public, ou en cas d’absence du délégué du procureur, l’action publique est exercée par le chef de la juridiction qui est investi des pouvoirs du procureur de la république dans les conditions fixées aux articles 36 et 38 du code de procédure pénale.

Le tribunal relève toutefois que cet article ne peut s’appliquer à la procédure prévue par l’article 51 du code de la famille sénégalais pour l’établissement tardif des actes de naissance, puisque la procédure prévue à cet effet est régie par l’article 87 du code de la famille qui renvoie à l’article 1 du code de procédure civile sénégalais et non au code de procédure pénale. Ainsi, la faculté pour le chef de la juridiction concernée d’exercer les pouvoirs du procureur de la république n’est-elle prévue qu’en matière de procédure pénale.

Il y a lieu d’ailleurs de constater qu’à aucun moment le jugement n°4354 du 31 mars 2007 ne fait mention de ce que le chef de juridiction aurait été investi des pouvoirs du procureur de la république.

Ne répondant pas aux dispositions légales en vigueur au Sénégal au moment où il est sensé avoir été prononcé, le jugement n°4354 du 31 mars 2007 ne peut, en application de l’article 47 du code civil français, se voir reconnaître aucune force probante, quelque soient les attestations établies par le greffier en chef du tribunal d’instance de Bakel, qui ne peuvent pallier l’absence de procédure légalement suivie.

L’acte de naissance dressé en vertu d’un jugement qui n’a pas de force probante n’a lui-même aucune force probante. L’état civil de M. X Z n’est donc pas rapporté de manière certaine et fiable. Il ne peut donc, de ce seul fait, revendiquer la nationalité française et il sera jugé qu’il n’est pas français.

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l’acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l’acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

En application de l’article 696 du code de procédure civile, M. X Z, débouté, sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffeྭ:

JUGE que M. X Z, se disant née le […] à […], n’est pas français,

ORDONNE la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

CONDAMNE M. X Z aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 20 Décembre 2017

Le Greffier Le Président

[…] M. Y

1:

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