Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 20 décembre 2019, n° 17/12108

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-1, 20 déc. 2019, n° 17/12108
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 17/12108
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Marseille, 5 juin 2017, N° F15/00124
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1

ARRÊT AU FOND

DU 20 DÉCEMBRE 2019

N° 2019/534

Rôle N° RG 17/12108 – N° Portalis DBVB-V-B7B-BAYXQ

SASU MONDIAL RELAY

C/

Q X

Copie exécutoire délivrée

le :

20 DÉCEMBRE 2019

à :

Me Françoise BOULAN,

avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Me Julien BERNARD, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARSEILLE en date du 06 Juin 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 15/00124.

APPELANTE

SASU MONDIAL RELAY

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

demeurant […]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, Me Mathieu INFANTE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame Q X

née le […] à […]', […], […]

AUBAGNE

Représentée par Me Julien BERNARD, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame T U, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Nathalie FRENOY, Conseiller

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Malika REZIG.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Décembre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Décembre 2019

Signé par Madame T U, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Mme M X a été embauchée par la SASU MONDIAL RELAY suivant contrat à durée indéterminée du 29 juillet 2003 en qualité d’employée service clients au sein de l’Agence de Marseille située à Aubagne.

Par lettre du 12 décembre 2014, Mme X a été convoquée à un entretien préalable fixé le 22 décembre suivant et par lettre du 26 décembre 2014, elle a été licenciée pour faute grave.

Contestant son licenciement, Mme X a saisi le conseil de prud’hommes de Marseille qui, par jugement du 6 juin 2017, a :

— dit que licenciement de Mme X ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

— condamné la société MONDIAL RELAY à payer à Mme X les sommes suivantes :

* 25 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 4 099,78 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 409,97 € au titre des congés payés afférents,

* 5 035,90 € à titre d’indemnité légale de licenciement,

* 1 200 € à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

le tout avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil,

— dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire s’élève à la somme de 2 049,83 €,

— ordonné la remise des documents sociaux rectifiés, attestation de travail, attestation Pôle Emploi, bulletins de salaire, conformément au présent jugement,

— débouté Mme X du surplus de ses demandes,

— débouté la société MONDIAL RELAY de sa demande reconventionnelle,

— dit que le présent jugement bénéficiera de l’exécution provisoire de droit sur les créances et dans les limites des plafonds définis par l’article R1454-28 du code du travail ,

— condamné la société MONDIAL RELAY aux dépens.

La société MONDIAL RELAY a interjeté appel de ce jugement.

Suivant conclusions n°2 signifiées par voie électronique le 15 novembre 2017, elle demande à la cour de :

Sur le licenciement,

— dire que la rupture pour faute grave du contrat de travail de Mme X est justifiée,

— infirmer le jugement du conseil de prud’hommes,

— débouter Mme X de l’ensemble de ses demandes s’y rapportant,

Sur la procédure de licenciement,

— constater le caractère régulier de la procédure de licenciement,

— confirmer le jugement sur ce point,

— débouter Mme X de l’ensemble de ses demandes s’y rapportant,

Sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire,

— constater que la rupture du contrat de travail et ses conditions ne présentent aucun caractère vexatoire,

— confirmer le jugement sur ce point,

— débouter Mme X de l’ensemble de ses demandes s’y rapportant,

En tout état de cause,

— rejeter l’ensemble des demandes de Mme X,

— condamner Mme X à rembourser à la société MONDIAL RELAY les sommes perçues au titre de l’exécution provisoire de droit de la décision de première instance

(8 512,98€),

— condamner Mme X à verser à la société MONDIAL RELAY la somme de 3 500 € au titre l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE Avocats aux offres de droit.

Suivant conclusions signifiées par voie électronique le 26 septembre 2017, Mme X demande à la cour de :

— déclarer irrecevable et non fondé l’appel formé par la Société MONDIAL RELAY,

— la recevoir en son appel incident et le dire bien fondé,

— ce faisant, confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Marseille le 6 juin

2017,

En conséquence,

— dire que le licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,

— ce faisant, condamner la société MONDIAL RELAY à lui payer :

* la somme brute de 4 099,78 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

* la somme brute de 409,98 € à titre de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

* la somme brute de 5 035,90 € à titre d’indemnité légale de licenciement, avec intérêts au taux

légal à compter de la demande en justice,

— réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Marseille le 6 juin 2017,

— statuant à nouveau, condamner la Société MONDIAL RELAY à lui payer :

* la somme de 30 000,00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement illégitime et dépourvu de cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

* la somme de 5 000,00 € à titre de dommages-intérêts pour abus de droit et licenciement vexatoire, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

* la somme brute de 2 049,89 € à titre d’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

— condamner la société MONDIAL RELAY à lui remettre, sous astreinte de 150,00 € par jour de retard passé le délai de 10 jours à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir, les bulletins de salaires relatifs aux condamnations ci-dessus, ainsi qu’une attestation Pôle Emploi rectifiée intégrant

notamment l’indemnité de préavis,

— l’enjoindre, sous astreinte identique, d’avoir à régulariser la situation de la salariée auprès des

organismes sociaux au bénéfice desquels ont été prélevées les cotisations figurant sur les bulletins de salaire édités par l’employeur (articles L 131-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution),

— faire application de l’article 1154 du code civil et dire que les intérêts de retard seront capitalisés année par année et qu’ils produiront eux-mêmes des intérêts,

— condamner la société MONDIAL RELAY à lui payer la somme de 2 000,00 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société MONDIAL RELAY à supporter les entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 septembre 2019.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ressort de la lettre du 26 décembre 2014 que Mme X a été licenciée pour les motifs suivants :

(sic) : '… Vous avez été engagée en tant qu’employée service client et à ce titre, êtes tenue à certaines obligations en terme d’attitude, de professionnalisme, de rigueur et de productivité. Or, il s’avère que votre comportement est à l’exact opposé de ce que l’on peut attendre de nos salariés au sein de Mondial Relay.

D’une part,vous adoptez un comportement destructeur et toxique.

En effet, vous vous permettez d’insulter et de mépriser non seulement vos collègues de travail mais également vos supérieurs hiérarchiques.

A titre d’exemple, vous avez osé dire de votre Responsable d’exploitation, Madame R A qu’elle était une 'salope’ et ce, devant l’une de vos collègues. De tels propos sont particulièrement choquants, humiliants et agressifs. Ils démontrent également votre irrespect le plus total à l’égard de votre hiérarchie.

Vous n’aidez pas vos nouveaux collègues de travail dans leur prise de fonction et pire encore, vous les mettez en situation d’échec professionnel. En effet, soit vous ne passez pas les consignes, soit elles sont incomplètes. Vous ne les intégrez absolument pas et êtes agressive quand vous leur adressez la parole. Votre comportement à l’égard de Madame S Y, nouvelle salariée intérimaire Employée Service Clients, est inqualifiable. Preuve en est, depuis janvier 2014, quatre intérimaires ont préféré quitter l’entreprise plutôt que de continuer à travailler avec vous! Vous rejetez systématiquement les nouveaux intérimaires et sabotez toute tentative d’intégration. En effet, vous ricanez derrière leur dos et vous abstenez de les saluer. Votre comportement n’est absolument pas professionnel. Eu égard à votre ancienneté et à vos connaissances il vous incombait de les former lors de leur prise de fonction. Au contraire, vous avez préféré pratiquer la 'guerre des nerfs’ au sein de l’agence en ayant mené une cabale avec certains de vos collègues contre Madame Y.

Lors de la réunion du 21 octobre, Madame R A, Responsable d’exploitation, a voulu rétablir un climat davantage professionnel au sein de l’agence. Toutefois, vous n’avez pas accepté ses remarques. L’ambiance s’est depuis dégradée par votre fait. En effet, vous refusez de la saluer et de lui adresser la parole. Enfin, vous faites preuve d’arrogance à l’égard du personnel de quai, comme s’il y avait une agence à deux niveaux. Vous vous permettez de dire au Responsable de Quai 'tes gars font des conneries…'. Ce n’est ni votre rôle et certainement pas dans vos missions de le faire. Vos collègues ne souhaitent plus collaborer avec vous en raison notamment de votre attitude. Certains vous fuient et d’autres redoutent même de se rendre au travail ayant la 'boule au ventre’ ou souffrant d’insomnies, de céphalées ou de tremblements. Or, en cette période de forte activité, nous avons encore plus besoin de travailler en synergie. De votre fait, les valeurs de l’entreprise (Proximité, Engagement, Performance, Solidarité) sont bafouées alors qu’elles constituent le socle de notre fonctionnement.

Vous faites preuve d’une insubordination manifeste et manquez à toutes les règles élémentaires de respect et de politesse. Vous avez ainsi instauré un climat social extrêmement malsain au sein de l’agence ce qui nous met dans l’impossibilité absolue de poursuivre toute collaboration avec vous.

D’autre part, votre assiduité au travail est déplorable

En effet, vous refusez de prendre certains appels clients bien que vous connaissez la réponse à apporter et que vous n’êtes pas en ligne avec un autre client. Vous vous permettez également de prendre de longues pauses et de discuter avec vos collègues de travail alors que le téléphone sonne. Vous ne renseignez pas nos clients alors qu’il s’agit justement de votre mission principale en tant qu’employée service client.

Ainsi à titre d’exemple, le jeudi 4 décembre, lors d’un gros litige avec un client chargeur, la nouvelle salariée intérimaire, Madame S Y vous a demandé de l’aide et vous lui avez répondu : 'tu as voulu gérer le cas, maintenant tu te démerdes, je ne prendrai pas l’appel…'. De par votre désinvolture, votre Responsable d’exploitation doit gérer des appels clients et former Madame S Y. Votre attitude est tout simplement choquante en ce qu’elle met votre collègue en difficulté et empêche d’apporter une réponse à nos clients.

Depuis la réception de votre convocation à un entretien préalable, votre assiduité au travail est devenue plus que déplorable. En effet, vous avez décidé de gérer uniquement vos produits, de ne plus prendre les appels et de ne plus faire les drives. Cette attitude est particulièrement révélatrice de votre manque d’implication, de sérieux et de rigueur au sein de notre entreprise.

Enfin, vous mettez en péril l’activité de notre entreprise

En prenant des pauses excessives et en ne répondant pas aux appels téléphoniques, vous ne donnez satisfaction ni à nos clients, ni à nos fournisseurs et instaurez un climat social destructeur.

Or, en ces périodes de fêtes, il est important d’apporter des réponses à nos clients et à nos fournisseurs quant à la livraison de leurs colis. Votre comportement entraîne un mécontentement de la part de certains de nos clients, ce qui n’est clairement pas compatible avec votre fonction.

De plus, en ayant favorisé le départ de quatre de vos collègues, vous avez dégradé notre productivité et réduit à néant notre accord générationnel par lequel nous nous sommes engagés à embaucher un certain nombre de jeunes. Le mauvais climat instauré par votre fait ne permet pas de travailler dans de bonnes conditions ce qui impacte clairement notre productivité et la qualité de nos services. Malgré l’écoute, l’accompagnement quotidien et l’empathie de vos managers à votre égard, vous avez volontairement instauré un climat délétère au sein de l’agence. Vous mettez non seulement à mal la bonne marche de notre entreprise mais également notre image et notre renommée, ce que nous ne pouvons pas accepter.

Vous avez ainsi pratiqué la politique de la 'terre brûlée’ en décidant de mettre en oeuvre toutes les actions possibles et inimaginables pour porter atteinte à l’intégrité physique et mentale de certains de vos collègues, peu important pour vous les conséquences de vos actes.

Lors de l’entretien, vous avez nié les faits en bloc, mis à part qu’au sujet de l’époque de l’insulte, vous avez admis 'je n’ai pas dit – salope- mais j’ai pu le penser'. Au sujet de la conversation téléphonique où Mme Y était en difficulté, vous avez reconnu avoir refusé de prendre l’appel et donc, de lui venir en aide et satisfaire le client. Vous avez nié avoir des problèmes relationnels, alors que vous nous dites que votre responsable vous a déjà reçu afin de faire le point à ce sujet. Ces explications ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.

C’est pourquoi, eu égard à l’ensemble des faits susvisés, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave, qui prend effet immédiatement dès l’envoi de cette lettre…'

La société appelante soutient que, même si Mme Y ( principale accusatrice de Mme X) et Mme Z ont rétracté les propos qu’elles avaient tenus dans les attestations qu’elles avaient établies, et ce plus d’un an et demi après le licenciement, au jour de la rupture du contrat de travail, date à laquelle la cour devra se placer pour apprécier la réalité et la pertinence des griefs reprochés à la salariée, les motifs énoncés dans la lettre de licenciement étaient parfaitement fondés et reposaient également sur d’autres attestations de salariés; qu’elle n’a pas agi avec légèreté ou empressement et au contraire a diligenté une véritable enquête afin de faire la lumière sur les faits qui lui avaient été rapportés; qu’ainsi avant même la tenue de l’entretien préalable de Mme X, elle s’est vu remettre pas moins de douze attestations (sur un total de seize salariés) émanant de salariés ou d’intérimaires qui illustraient et confirmaient en tous points la réalité des griefs reprochés à Mme X; qu’elle ne pouvait laisser perdurer cette situation qui avait déjà été la cause de plusieurs départs de salariés ou de non renouvellement de contrats d’intérim; que les nombreuses attestations produites par Mme X ne présentent pas d’intérêt puisqu’il ne s’agit pas de conduire une enquête de moralité et elles émanent d’anciens salariés qui n’ont pas été témoins des faits à l’origine du licenciement ou qui sont en conflit avec la société MONDIAL RELAY; que n’ayant pas fait l’objet d’un licenciement pour insuffisance professionnelle, l’invocation de ses comptes rendus d’entretiens professionnels est sans objet surtout que c’est à la fin de l’année 2014 que Mme X a adopté un comportement acceptable.

Mme X conteste les faits qui lui sont reprochés et soutient que la société appelante ne rapporte pas la preuve de ses allégations; qu’elle n’a jamais insulté Madame A et verse aux débats des attestations émanant des seules femmes salariées de la société MONDIAL RELAY, travaillant au sein de la même agence ( celle de Mme B, agent de quai, qui déclare que Mme X « n’est en aucun cas une personne agressive et grossière envers ses collègues de travail et ses supérieurs hiérarchiques » et celles de Mmes Z et Y qui ont rétracté leurs accusations); que Madame Y témoigne de ce qu’elle a été instrumentalisée par Madame A afin de mener à bien son projet de licencier Madame X et Madame C; qu’elle verse encore de nombreuses attestations émanant de salariés qui ont tous travaillé à ses côtés et qui la décrivent comme une personne souriante, disponible, dévouée, très professionnelle et toujours attentive; que la réunion du 21 octobre 2014 a été organisée à son initiative pour aborder les problématiques de la répartition des tâches et de la qualité de travail de l’équipe en prévision du surcroît d’activité de Noël et des congés et que Mme A a immédiatement évoqué le problème de l’entente avec Mlle Y qui ne se sentait pas intégrée, sans possibilité d’échanges et de compréhension de la part de Mme A; que ses qualités professionnelles étaient reconnues et appréciées comme l’attestent les comptes rendus d’entretiens d’évaluation des années 2007 à 2014; que le grief relatif à la mise en péril de l’activité de la société MONDIAL RELAY n’est pas démontré alors qu’elle établit qu’elle a toujours exercé ses fonctions avec rigueur, professionnalisme, dans un souci constant de la satisfaction des clients, dont les mécontentements allégués ne sont pas prouvés; que le «mauvais climat » dont se prévaut l’employeur ne lui est pas imputable dès lors que l’ensemble des salariés décrivent un climat de travail et de tensions relationnelles présent au sein de l’agence dont Madame A a été à l’origine; que l’employeur avait déjà édité une offre d’emploi pour son poste le 11 décembre 2014 alors que l’entretien préalable a eu lieu le 12 décembre 2014 et le licenciement est intervenu le 26 décembre 2014, ce qui révèle que la société MONDIAL RELAY avait déjà pris la décision de la licencier avant

même de l’avoir convoquée à un entretien préalable.

* * *

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis. Elle doit être prouvée par l’employeur.

Pour démontrer la réalité, l’imputabilité à la salariée et la gravité des faits commis et reprochés dans la lettre de licenciement, la société MONDIAL RELAY verse notamment les attestations de M. F, M. G, Mme A, M. H, Mme Y, Mme Z, les mails des 21 novembre 2014, 17 décembre 2014 et 22 décembre 2014 de M. I et des mails de Mme Y des 26 et 28 novembre 2014.

Ces pièces ne font pas mention et n’établissent pas les griefs relatifs à des insultes proférées notamment à l’encontre de Mme A, aux départs de collègues de travail ou d’intérimaires en raison de l’attitude de Mme X (le courrier de M. J faisant état de façon générale de conditions de travail qui n’étaient pas acceptables sur un plan relationnel au sein de la société), au mécontentement des clients ou des fournisseurs, à la mise en péril de la société et à la dégradation de la productivité.

La société MONDIAL RELAY produit les attestations de Mme A

(pièce 6) et de M. H (pièce 8) qui sont dactylographiées et qui ne respectent pas les autres prescriptions de l’article 202 du code de procédure civile de sorte que la cour considère que leur valeur probante est insuffisante pour être retenue dans le débat.

La société MONDIAL RELAY produit également l’attestation de Mme Z qui déclare avoir vu Mme X épier Mme Y et être 'toujours sur son dos'. Cependant, par lettre du 8 juin 2015, Mme Z indique qu’elle veut 'exercer son droit de rétractation pour l’attestation que j’ai écrite à MONDIAL RELAY le 11 décembre 2014", de sorte que la fluctuation des déclarations de Mme Z rend celles-ci peu crédibles.

Par contre, il ressort de l’attestation de M. G, coordinateur logistique, rédigée le 14 décembre 2014 que, depuis quatre à cinq semaines et suite à une altercation avec Mme X 'qui s’en est pris à moi pour un colis sur le quai', il ne peut plus collaborer avec elle et Mme C qui se 'permettent de critiquer notre travail sur le quai et de trouver la moindre petite erreur ou faille de notre part pour nous tomber dessus' et décrit 'une situation pesante'. Ces constatations sont corroborées par l’attestation de M. F qui indique que Mme X et Mme C ont une 'attitude hautaine', profèrent des 'propos désobligeants' et 'des propos déplacés' 'parlant sur un ton virulent', ce qui ne lui permet pas d’avoir 'des contacts professionnels sereins' et décrit également une 'situation très pesante pour moi et mon équipe'.

La société MONDIAL RELAY produit l’attestation de Mme Y (pièce 5) dans laquelle elle soutient que Mme X, qui l’épiait toute la journée, avait refusé de prendre un appel téléphonique et de lui délivrer une information. Si Mme Y est revenue le 9 septembre 2015 sur cette attestation en indiquant qu’elle a été victime 'd’un complot, ou plutôt d’une machination' et d’une 'manipulation' de la part de Mme A et de M. H (pièce 25 produite par Mme X), il n’en reste pas moins que les 26 et 28 novembre 2014, Mme Y avait adressé à M. H deux mails (pièce 16 et 17) pour se plaindre que Mme X et Mme C ne répondaient plus à ses appels 'et quant bien même elles ne sont pas en ligne. J’ai beau insister, cela n’y fait rien. Sachant que K ne prend même plus la peine de me dire ne serait-ce que bonjour, je ne vois pas comment nous pouvons travailler correctement'.

M. L a également écrit dans un mail envoyé le 17 décembre 2014: 'depuis la réception de leur courrier (convocation à l’ entretien préalable), K et M se contentent uniquement de gérer leurs produits respectifs (LD1 et LDS). Elles ne prennent plus d’appels (ou très peu), ne font plus de drive, n’aide pas Sophie qui est seule au relais'.

Il ressort donc de ces éléments que les relations au sein de la société MONDIAL RELAY se sont manifestement dégradées à la fin de l’année 2014 et que Mme X y a amplement participé par son comportement, notamment par la mise à l’écart de Mme Y, intérimaire, avec qui elle se devait de collaborer.

Cependant, en l’état d’une période incriminée très limitée dans le temps (entre octobre et décembre 2014), d’une absence de sanction disciplinaire antérieure, des très nombreuses attestations d’anciens salariés de la société MONDIAL RELAY qui ont travaillé avec Mme X avant la période incriminée, qui indiquent ne pas avoir rencontré de difficulté relationnelle avec Mme X et qui louent ses compétences professionnelles, des entretiens annuels et professionnels mentionnant ses qualités professionnelles et son investissement, Mme X étant reconnue comme 'un maillon fort du service ESC' et des mails adressés par M. H les 3 avril 2014, 18 juillet 2014, 7 octobre 2014 dans lesquels il félicite Mme X pour la qualité de son travail ('juste un petit mot pour te dire un grand bravo et merci pour le travail que tu fournis, qui comme d’habitude est de très bonne qualité', 'félicitation pour votre travail et votre implication', 'un seul mot : respect, non 2 mots: félicitations'), il doit être considéré que la sanction du licenciement immédiatement prononcé, est assurément disproportionnée eu égard à l’ensemble de ces circonstances dont finalement Mme Y rend également responsables Mme A et M. H.

Enfin, il ressort de l’offre d’emploi publiée le 11 décembre 2014 que l’employeur cherchait à recruter un salarié sur le poste de chargé de clientèle sur le site d’Aubagne et de l’attestation de Mme N, indiquant qu’elle a été contactée par Mme A le 16 décembre 2014 pour occuper un poste au sein de la société MONDIAL RELAY suite 'à une restructuration de l’équipe du plateau téléphonique de l’agence la société MONDIAL RELAY Marseille', que la société MONDIAL RELAY avait pris la décision de licencier Mme X avant même l’ entretien préalable qui s’est tenu le 22 décembre 2014.

Ainsi, les dispositions du jugement qui ont dit que le licenciement de Mme X ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et alloué à Mme X les sommes de

4 099,78 € à titre d’indemnité de préavis, de 409,98 € au titre des congés payés afférents et de 5 035,90 € à titre d’indemnité de licenciement, non contestées en leur montant par l’employeur, seront confirmées.

Mme X soutient qu’au cours de l’entretien préalable, qu’elle qualifie 'd’entretien policier', elle n’a pas été en mesure de s’exprimer et de se défendre pleinement et sollicite à ce titre des dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement. La société MONDIAL RELAY fait valoir que la procédure de licenciement est parfaitement régulière et que Mme X, ayant plus deux ans d’ancienneté, les dommages-intérêts pour irrégularité de procédure et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peuvent se cumuler.

Mme X produit l’attestation de M. O, qui l’a assistée lors de l’ entretien préalable, qui indique que 'Mme X n’a pas pu se défendre pleinement sur les faits que l’employeur lui reproche. Mme X n’a jamais pu finir ses explications sur les faits (…) ou argumenter pleinement. La DRH Mme P à plusieurs reprises a coupé et n’a pas laissé terminer ses explications sur les faits reprochés. L’entretien a duré 10 minutes'. Dès lors qu’il appartient à l’employeur d’écouter les explications du salarié concernant les reproches qui lui sont fait et éventuellement de vérifier ses affirmations, la société MONDIAL RELAY n’a pas respecté les prescriptions de l’article L1232-3 du code du travail. Cependant, Mme X ayant plus de deux

d’ancienneté et la société MONDIAL RELAY employant au moins onze salariés, les indemnités pour irrégularité de la procédure et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peuvent donner lieu à deux indemnités distinctes.

En application des dispositions de l’article L1235-3 du code du travail, et compte tenu de son âge au moment de la rupture du contrat de travail (34 ans), de son ancienneté (11 ans), de sa qualification, de sa rémunération (2 049,89 €), des circonstances de la rupture, de l’irrégularité de la procédure, de la période de chômage qui s’en est suivie qui est justifiée jusqu’au 31 décembre 2016 et des recherches d’emplois effectuées produites, il convient de confirmer la disposition du jugement qui a alloué à Mme X une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un montant de 25 000 €.

La société MONDIAL RELAY devra remettre à Mme X les documents sociaux rectifiés, l’attestation de travail, l’attestation Pôle Emploi et un bulletin de salaire rectifiés conformément au présent arrêt. Il n’y a pas lieu d’ordonner une astreinte pour garantir l’exécution de cette obligation.

La société MONDIAL RELAY sera enjointe d’avoir à régulariser la situation de la salariée auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels ont été prélevées les cotisations figurant sur les bulletins de salaire édités par l’employeur. Il n’y a pas lieu d’ordonner une astreinte pour garantir l’exécution de cette obligation.

Sur la demande de dommages-intérêts pour abus de droit et licenciement vexatoire

Mme X fait valoir qu’elle a été profondément bouleversée par la mesure de licenciement, que ses explications n’ont pas été prises en compte par l’employeur, qu’elle a été licenciée le même jour et pour les mêmes motifs qu’une autre employée, Mme C; que ce comportement vexatoire relève de l’abus de droit.

La société MONDIAL RELAY soutient que le licenciement dont a fait l’objet Mme X n’est en rien brutal ni vexatoire et que cette dernière ne démontre pas de préjudice distinct de celui résultant du licenciement.

Aucune circonstance ne vient caractériser une intention malicieuse ou une mauvaise foi de l’employeur et la salariée ne démontre pas l’existence de circonstances brutales et vexatoires ayant entouré son licenciement.

En outre Mme X ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui qui a été indemnisé par l’allocation de la somme au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Par confirmation du jugement, la demande de dommages intérêts sera donc rejetée.

Sur les intérêts

Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation soit à compter du 20 janvier 2015 et les sommes allouées de nature indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jugement.

Il convient d’ordonner la capitalisation des intérêts qui est de droit lorsqu’elle est demandée.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées et il est équitable de condamner la société MONDIAL RELAY à payer à Mme X la somme de 1 500 € au titre des frais non compris dans les dépens qu’elle a engagés en cause d’appel.

Les dépens d’appel seront à la charge de la société MONDIAL RELAY, partie succombante par application de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Confirme le jugement déféré sauf en ses dispositions relatives aux intérêts et à la régularisation de la situation de la salariée auprès des organismes sociaux,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2015 et les sommes allouées de nature indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jugement,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par la loi,

Enjoint la SASU MONDIAL RELAY d’avoir à régulariser la situation de Mme Q X auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels ont été prélevées les cotisations figurant sur les bulletins de salaire édités par l’employeur,

Y ajoutant,

Condamne la SASU MONDIAL RELAY à payer à Mme Q X la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en cause d’appel,

Condamne la SASU MONDIAL RELAY aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 20 décembre 2019, n° 17/12108