Cour d'appel d'Angers, 21 mai 2013, n° 12/00263

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, 21 mai 2013, n° 12/00263
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 12/00263
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Le Mans, 19 décembre 2011, N° 10/01734

Texte intégral

COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – CIVILE

XXX

ARRÊT N°:

AFFAIRE N° : 12/00263

Jugement du 20 Décembre 2011

Tribunal de Grande Instance du MANS

n° d’inscription au RG de première instance 10/01734

ARRET DU 21 MAI 2013

APPELANT :

Monsieur E Y

né le XXX à XXX

XXX

représenté par Maître Philippe LANGLOIS, avocat postulant au barreau d’Angers – N° du dossier 50161, et par Maître PAVET, avocat plaidant au barreau du Mans.

INTIMÉE :

La Société AXA FRANCE VIE

XXX – XXX

représentée par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avocats postulants au barreau d’Angers – N° du dossier 40091, et par Maître BESSY, avocat plaidant au barreau de Rennes.

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 25 Mars 2013 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur HUBERT, Président de chambre, qui a été préalablement entendu en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur HUBERT, Président de chambre

Madame GRUA, Conseiller

Madame MONGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur X

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 21 mai 2013 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Monsieur HUBERT, Président et par Monsieur X, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

XXX

FAITS ET PROCÉDURE

Le 13 avril 1993, M. E Y a souscrit un plan MODUL’ PLAN (MODULOR) MODUL 1 n° 805975 90B auprès de la société UAP VIE devenue AXA sur lequel il a effectué des versements mensuels pendant plusieurs années.

Le 24 septembre 1993, il a souscrit un nouveau contrat numéro 806491100Q sur lequel il a effectué deux versements de 30'000 fr. et de 200'000 fr.

Le 17 janvier 2008, ce contrat a été racheté, les fonds, d’un montant total de 65'597 euros étant réinvestis sur le contrat MODUL’ PLAN n° 805975 90B.

Le 31 janvier 2008, bénéficiant d’un contrat d’assurance vie souscrit en sa faveur par un de ses proches, M. E Y a décidé de placer sur le contrat MODUL’PLAN 1 n° 805975 90B la somme de 264'016 euros correspondant au capital de ce contrat d’assurance vie.

Constatant, en mars 2009 la diminution du capital investi sur les contrats MODUL’PLAN n° 800080597590 et n° 800080649100, M. Y a, par l’intermédiaire de son assureur protection juridique, la compagnie MMA, demandé des explications à la compagnie AXA et entrepris des investigations sur la destination des fonds versés en 2008.

Sur le fondement de ces investigations et alléguant qu’il souhaitait placer ses fonds sur des supports garantis, M. E Y a, par acte d’huissier du 19 mars 2010, fait assigner la société AXA FRANCE VIE.

Dans ses dernières conclusions devant le tribunal de grande instance du Mans, il a sollicité l’annulation des demandes de versement des 17 et 31 janvier 2008 pour dol, et, subsidiairement, de voir juger que la compagnie d’assurances a manqué à son obligation contractuelle d’information et de l’entendre, en tout état de cause, condamner à lui payer les sommes suivantes :

—  65'927 euros et 264'016 euros outre celle de 55'320 euros au titre des intérêts perdus,

—  3500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 20 décembre 2011, le tribunal de grande instance du Mans a

— débouté M. E Y de l’ensemble de ses demandes ;

— débouté la société AXA FRANCE VIE de sa demande pour frais irrépétibles ;

— condamné M. E Y aux dépens avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le tribunal n’a retenu ni l’existence d’un dol, ni la méconnaissance des dispositions des articles L. 132-21 et L. 132-22 du code des assurances exclusivement applicables à la conclusion de contrats. Il a considéré que la société AXA FRANCE VIE ne justifiait pas avoir satisfait à son obligation d’information et de conseil mais il a estimé que la preuve n’était rapportée ni du refus d’un placement à risque financier, ni de celle d’un préjudice.

M. E Y a interjeté appel de ce jugement le 6 février 2012.

Les parties ont conclu.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2013.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement

— du 4 mai 2012 pour M. E Y,

— du 12 février 2013 pour la société AXA FRANCE VIE ,

qui peuvent se résumer ainsi qu’il suit.

M. E Y , poursuivant l’infirmation du jugement, demande à la cour

— de prononcer la nullité des demandes de versement en date du 17 et 31 janvier 2008 en application des dispositions de l’article 1116 du code civil ;

Subsidiairement,

— de dire que la compagnie AXA a manqué à son obligation prè-contractuelle d’information sur le fondement des dispositions de l’article 1147 du code civil;

En conséquence,

— de condamner AXA à lui verser les sommes suivantes :

—  65'627 euros au titre de la demande de versement en date du 17 janvier 2008,

—  264'016 euros au titre de la demande de versement en date du 31 janvier 2008,

outre les intérêts qu’il aurait pu percevoir si les fonds avaient été investis sur des supports garantis, intérêts qu’elle devra calculer sous astreinte de 100 euros par jour de retard;

et, à titre subsidiaire,

— la somme de 55'300 euros au titre des intérêts perdus ;

— de dire que la compagnie d’assurances AXA devra établir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, le calcul des intérêts que le concluant aurait dû percevoir si les fonds avaient été investis sur des supports garantis et sûrs et la condamner à lui verser ;

subsidiairement,

— de condamner la compagnie AXA à lui verser une somme de 77'118 euros au titre des intérêts dus sur la somme de 347'071 euros;

En toute hypothèse,

— de condamner la compagnie AXA à lui verser la somme de 4000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

et rejetant toutes prétentions contraires comme non recevables en tout cas non fondées,

— de condamner la compagnie AXA aux dépens de première instance et d’appel lesquels seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

M. E Y fait valoir que l’ambiguïté résultant de la rédaction de la demande de versement n° 599481 en date du 17 janvier 2008 n’a pas été levée par la demande de versement modificative n° 655420 reçue par AXA le 11 février 2008 confirmant le choix d’un versement sur le support en unités de compte 'Stratégie Équilibre’ pour une somme brute de 65'957 euros. Il soutient n’avoir pas adressé cette demande modificative à la société AXA et relève qu’il est impossible qu’elle soit datée du 17 janvier 2008 comme la demande de versement qu’elle prétend modifier. Il affirme avoir toujours voulu effectuer son placement sur un support en euros et relève que le choix d’un support en unités de compte a été rajouté à la main sur le double de la demande de versement. Il estime que, en application de l’article L. 133-2 du code de la consommation, la compagnie AXA doit assumer les conséquences de l’ambiguïté du document qu’elle a elle-même rédigée.

S’agissant de la demande de versement en date du 31 janvier 2008, M. Y fait observer que le montant des fonds versés n’y est pas précisé et que l’agent d’assurance aurait dû l’informer sur les risques inhérents au compte « Stratégie Équilibre » et respecter sa volonté de conserver des fonds disponibles et sécurisés afin de pouvoir les utiliser pour financer l’achat d’un immeuble.

M. E Y allègue en outre que les demandes de versement ne sont pas conformes aux articles L. 132-21, L. 132-22 et R. 132-4 du code des assurances.

À titre subsidiaire, il soutient que la compagnie AXA a manqué à son obligation d’information puisqu’elle aurait dû, au moment des versements complémentaires quinze années après la souscription du contrat initial, satisfaire à nouveau cette obligation compte tenu du changement de conjoncture économique.

Il assure avoir toujours souhaité placer ses fonds sur des supports garantis et sécurisés ainsi que le démontre sa démarche auprès du CRÉDIT AGRICOLE le 16 janvier 2008 et le courrier de la compagnie AXA du 25 février 2009 et insiste sur le grave préjudice moral que lui a causé cette compagnie en ne tenant pas compte de son souhait de bénéficier d’un support garanti le contraignant à subir une perte substantielle de son capital du fait de la crise économique.

En réparation de ce préjudice, M. Y sollicite le remboursement des sommes versées les 17 et 31 janvier 2008 (264'016 euros) augmenté des intérêts perdus qui devront être calculés sous astreinte par la compagnie AXA.

Il fait valoir que la somme de 347'071 euros placée sur un support sécurisé au taux de rendement annuel de 4,5 % lui aurait procuré une valeur de rachat, au 31 décembre 2011, de 413'888 euros alors qu’il n’a pu racheter le contrat litigieux, le 27 février 2012, qu’à la valeur de 336'770 euros. Il demande donc, à titre subsidiaire, la somme de 77'118 euros (413'888 – 336'770).

La société AXA FRANCE VIE demande à la cour :

— de confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance du Mans le 20 décembre 2011 en ce qu’il a débouté M. E Y de toutes ses demandes à l’encontre de la société AXA FRANCE VIE;

— de débouter notamment M. Y de sa demande en nullité des demandes de versement en date du 17 janvier et 31 janvier 2008 en application de l’article 1116 du Code civil ;

— de débouter également M. Y de sa demande tendant à ce que la société AXA FRANCE VIE soit déclarée responsable pour manquement à son obligation pré-contractuelle d’information sur le fondement de l’article 1147 du Code civil ;

— de débouter par conséquent M. E Y de toutes ses demandes, fins et conclusion à l’encontre de la société AXA FRANCE VIE;

À titre infiniment subsidiaire,

— de débouter en tout état de cause M. E Y de sa prétention à paiement d’une somme de 65'627 euros et d’une somme de 264'018 euros compte tenu de la somme de 336'770 euros déjà versée à l’appelant au titre du contrat d’assurance-vie MODUL’PLAN n° 80597590 ;

— de débouter également M. Y de sa prétention subsidiaire à paiement d’une somme de 77'118 euros au titre des intérêts dus sur la somme de 347'071 euros ;

— de dire et de juger que la somme due au titre des intérêts sur la somme investie en janvier 2008, soit 342'711 euros ne saurait excéder 59'623, 11 euros;

— de dire et de juger qu’en tout état de cause, il y a lieu d’appliquer sur l’ensemble des sommes allouées à M. Y le pourcentage correspondant à la perte de chance imputable à la société AXA FRANCE VIE;

— de condamner M. Y à verser à la société AXA FRANCE VIE une somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société AXA FRANCE VIE (la société AXA) explique que le contrat MODUL PLAN peut être souscrit soit sous la forme d’un contrat d’assurance-vie, soit sous la forme d’un contrat de capitalisation au porteur pour une durée de trente ans. Il se compose d’un volet « MODUL 1 » destiné à la constitution progressive d’un capital par des versements périodiques déterminés à la souscription soumis à un rendement fixe convenu à l’adhésion, et d’un volet optionnel « MODUL 2 » permettant des versements supplémentaires libres, chaque versement étant converti en unités de compte sous réserve du règlement des primes prévu au « MODUL 1 ». Elle indique que M. Y a d’abord souscrit le 13 avril 1993 un contrat d’assurance-vie MODUL PLAN n° 80597590 dans le cadre duquel il s’est engagé à verser à titre de primes (volet MODUL 1) une somme annuelle de 1219,59 euros pendant 15 ans (8000 francs), puis, le 24 septembre 1993, un contrat de capitalisation au porteur MODUL PLAN n° 80649100 en répartissant son épargne sur des supports en unités de compte.

Elle ajoute que, le 17 janvier 2008, M. Y a racheté son contrat de capitalisation MODUL PLAN n° 80649100 pour en réinvestir le montant de 63'597 euros sur le contrat d’assurance vie MODUL PLAN n° 80597590. La société AXA admet que la première demande de versement (n° 599481K) était entachée d’une ambiguïté qui a nécessité une seconde demande signée par M. Y précisant que l’investissement s’effectuerait sur un support en unités de compte. Une demande semblable de versement d’une somme de 264'016 euros (n° 655418L) a été faite à la même époque sur le support UC «Stratégie Équilibre» du contrat d’assurance vie MODUL PLAN n° 80597590 comme en atteste non seulement la demande de versement elle-même mais aussi l’attestation de Mme Y en date du 31 janvier 2008 qui précise souhaiter inversement sur le MODUL 2.

Elle fait observer que, en octobre 1999, M. Z avait déjà effectué un versement supplémentaire de 1829,39 euros sur le support en UC COMPT-EUROP qui apparaît sur l’avis de situation du contrat n° 80597590 pour l’année 2004 qu’il produit lui-même.

La société AXA en déduit que l’appelant ne peut prétendre se prévaloir uniquement de la première demande de versement en date du 17 janvier 2008 entachée d’ambiguïté pour affirmer sa décision de verser les fonds sur un support sécurisé et pour invoquer un dol alors que, le 30 mai 2008, elle lui a fait parvenir un récapitulatif de ses placements précisant les valeurs des unités de compte.

La société AXA soutient en outre que les articles L. 132-21 et L. 132-22 du code des assurances ne sont pas applicables aux versements en cours de contrat.

Elle conteste tout manquement à son devoir d’information puisque le fonctionnement des unités de compte était exposé dans la notice d’information remise à M. Y au moment de la souscription du contrat et que ce dernier avait déjà utilisé sa faculté d’effectuer des versements supplémentaires en unités de compte.

La société AXA nie à la fois l’existence d’une faute et celle d’un préjudice.

Elle indique que M. Z a procédé, en février 2012, au rachat du contrat d’assurance-vie MODUL PLAN n° 80597590 sur lesquels les sommes de 63'273 euros et de 264'016 euros avaient été investies pour une valeur de rachat total de 368'731 euros (MODUL 1 + MODUL 2) dont 336'770 euros au titre des investissements sur les unités de compte « Stratégie Équilibre » (MODUL 2). Elle en déduit que, en cas d’annulation des deux versements effectués les 17 et 31 janvier 2008, M. Y ne pourrait pas prétendre à leur remboursement.

Elle s’oppose aussi à la demande subsidiaire de versement de la somme de 77'118 euros en invoquant que l’appelant ne rapporte pas la preuve que, avisé des risques de l’investissement proposé, il n’aurait pas choisi d’investir sur un support en unités de compte (Équilibre).

Elle relève que la simple consultation, par M. Y, du CRÉDIT AGRICOLE afin d’envisager un autre placement, notamment sans risque, ne prouve pas sa volonté d’exclure tout investissement en unités de compte. Elle ajoute que l’existence d’un projet immobilier n’est pas incompatible avec un tel investissement lui permettant d’espérer des gains plus importants. Elle souligne que M. Y n’a pas donné suite à sa proposition en date du 25 février 2009 lui proposant de réorienter ses placements vers des supports moins exposés. Elle affirme qu’en tout état de cause, l’appelant ne peut prétendre au versement de l’intégralité des intérêts qui auraient perçus si les fonds avaient été investis sur le support garantis puisque l’indemnisation de la perte de chance ne peut jamais être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée. La société AXA indique enfin que la somme de 77'118 euros réclamée à titre subsidiaire est calculé sur les sommes versées et non pas sur les sommes investies après déduction des frais. Elle considère donc que le montant des intérêts au taux de rendement de 4,5 % ne peut excéder la somme de 59'623, 11 euros (4,5 % de 342'711 euros du 19 février 2008 au 31 décembre 2011).

MOTIFS DE LA DÉCISION

1°) Sur la demande d’annulation des demandes de versement des 17 et 31 janvier 2008 pour dol

Il résulte des articles 1109 et 1116 du code civil qu’un contrat peut être annulé lorsque l’une des parties n’a contracté qu’en raison des manoeuvres dolosives pratiquées par l’autre partie. Il appartient à la partie qui se prétend victime de dol de le prouver.

M. E Y soutient que la société AXA a volontairement versé les fonds sur des supports en unités de compte en dépit de ses demandes de versement sur des supports sécurisés et qu’elle lui a volontairement dissimulé les risques inhérents au compte « Stratégie Équilibre ».

Il résulte des pièces versées aux débats que M. E Y a successivement souscrit auprès de UAP VIE (AXA FRANCE VIE) deux contrats MODUL PLAN :

— le premier le 13 avril 1993 sous la forme d’un contrat d’assurance-vie n° 80597590B dans lequel il s’est engagé à verser, au titre des primes (MODUL 1) la somme annuelle de 8000 fr. (1219,59 euros) pendant 15 ans,

— le second le 24 septembre 1993 sous la forme d’un contrat de capitalisation au porteur n° 806491100Q dans lequel il s’est engagé à verser au titre des primes (MODUL 1) la somme annuelle de 30'000 fr. pendant 15 ans et dans lequel il a versé 200'000 fr. au titre de l’option MODUL 2 sur des supports en unités de compte (Actions, Obligations, Immobilier).

Il n’est pas contesté que, le 17 janvier 2008, M. E Y a demandé le rachat total de son contrat de capitalisation au porteur MODUL PLAN n°806491100Q pour en investir le montant de 65'957 euros sur le contrat d’assurance-vie MODUL PLAN n° 80597590B.

Comme l’ont à juste titre relevé les premiers juges, la demande de versement du 17 janvier 2008 n° 599481K est entachée d’une ambiguïté puisqu’elle fait référence à un investissement en supports en euros et, par mention manuscrite ajoutée, à un versement du même montant sur le support « Équilibre », c’est-à-dire en unités de compte. Cependant, il est produit aux débats une demande n°655420N portant la même date reçue par la société AXA le 11 février 2008 aux termes de laquelle M. Y demande que la somme soit investie en unités de compte sur le support Équilibre. Cette seconde demande qui a, seule, été satisfaite par la société AXA, porte la signature de M. Y précédée de la mention manuscrite « lu et approuvé ». À sa lecture ainsi qu’à celle des autres pièces du dossier, il est possible d’affirmer qu’elle vise à lever l’ambiguïté figurant sur la demande n° 599481K tout en maintenant, au profit de M. Y, le bénéfice d’intérêts à compter du 17 janvier 2008. L’appelant, qui ne conteste ni son écriture ni sa signature figurant sur la demande n° 6554 20 N, affirme cependant, sans produire d’éléments de preuve, que cette seconde demande de versement n’a pas été effectuée par lui.

La volonté des époux Y de procéder, en janvier 2008, à des versement sur des supports en unités de compte plutôt que sur des supports sécurisés est confortée par l’attestation de Mme G Y du 31 janvier 2008 par laquelle elle demande que la part qui lui revient du Modul Plan° 80280594 Q suite au décès de M. C D soit investie en totalité, avec la part revenant à son époux, « sur son Modul Plan n° 80597590 en Equilibre sur le Modul 2 » . Cette attestation permet d’affirmer que la demande de versement n° 655418 L du 31 janvier 2008 , comme celle du 17 janvier 2008, avait pour objet de nouveaux investissements en unités de compte identiques à celui que M. Y avait déjà effectué sur son contrat d’assurance-vie n° 80597590B en octobre 1999 à hauteur de 1829,39 euros.

Il résulte de ce qui précède que M. Z ne peut utilement affirmer que son « choix s’est toujours porté sur un support en euros et non sur un support en unités de compte nettement moins sécurisant ».

En conséquence, M. E Y ne rapporte la preuve qui lui incombe ni de manoeuvres de la compagnie AXA qui n’a fait qu’exécuter ses ordres de versement en unités de compte, ni du caractère intentionnel de l’ambiguïté figurant dans la demande de versement du 17 janvier 2008 alors que les pièces produites aux débats permettent de lever cette ambiguïté.

Aucune nullité n’est donc encourue du chef de dol étant précisé que , comme l’ont pertinemment relevé les premiers juges, les articles L. 132-21 et L. 132-22 du code des assurances ne sont pas applicables en l’espèce s’agissant de l’alimentation de contrats déjà existants.

2°) Sur la demande d’annulation des demandes de versement des 17 et 31 janvier 2008 pour manquement de la compagnie AXA à son obligation pré-contractuelle d’information et de conseil

Les premiers juges ont justement rappelé que, outre la remise des conditions générales et particulières du contrat et de la notice exigée par la loi, l’agent d’assurance doit se renseigner sur l’environnement familial et patrimonial de son client et rechercher les caractéristiques principales du placement souhaité, au niveau fiscal et financier, afin de l’éclairer et de le conseiller sur les produits vers lesquels il doit orienter son choix.

Il convient donc de déterminer, si, en janvier 2008, Monsieur A Y été suffisamment informé des risques inhérents à ses versements en unités de compte, c’est-à-dire qu’il était informé que le rendement de ses investissements dépendrait de l’évolution de la valeur des fonds de placement choisis.

Les conditions particulières du contrat MODUL PLAN n° 8064 9100Q versées aux débats par la société AXA décrivent la répartition de l’épargne au titre des fonds communs de placement, les valeurs étant exprimées en unités de compte, et précisent in fine : « la valeur des unités de compte évolue chaque semaine, le mardi (sauf jours fériés), selon la valeur liquidative de la part de chaque fonds commun de placement. » Il en résulte que M. Y était informé, depuis 1993, du caractère nécessairement fluctuant de ses investissements en unités de compte qu’il a pourtant poursuivis d’abord en 1999 puis le 17 janvier 2008 lors du rachat du contrat numéro 806491100Q et le 31 janvier 2008 lors du versement de la somme de 264'016 euros sur le MODUL 2 de son contrat n° 80597590B support Equilibre. Disposant de cette information, M. Y n’a réagi ni lorsque, le 27 février 2008, la société AXA lui a confirmé le 'versement libre’ de la somme de 281'114 euros sur les supports en unités de compte « Stratégie Equilibre », ni le 30 mai suivant lorsque la même société l’a informé de la répartition et de la valorisation de ses investissements tant en euros qu’en unités de compte « Stratégie Équilibre » et « Compte Europe ».

Dans ces conditions, il apparaît que la société AXA n’a commis aucun manquement à son devoir d’information.

M. Y prétend qu’en raison de son âge de soixante-quatre ans et de son intention d’investir dans l’immobilier dont il avait fait part à la compagnie AXA, celle-ci aurait dû lui conseiller des investissements liquides et moins exposés que des investissements en unités de compte.

Cependant, l’appelant ne rapporte la preuve ni de sa décision de modifier la nature de son épargne pour l’investir à court terme dans l’immobilier, ni de la communication de cette décision à la société intimée avant les deux demandes de versement qu’il conteste. Les premiers juges ont justement relevé que l’attestation du CRÉDIT AGRICOLE selon laquelle il a pris rendez-vous le 16 janvier 2008 « en vue d’un placement d’environ 300'000 euros, placement disponible sans risque » n’apparaît pas contradictoire avec ses demandes d’investissement en unités de compte des 17 et 31 janvier suivant en l’absence de toute information sur la composition de son patrimoine et sur les raisons pour lesquelles les propositions de la banque ont été refusées. Il en est de même d’un éventuel projet immobilier.

Les attestations produites aux débats par M. Y ne font que rapporter ses plaintes à l’encontre de la société AXA et son importante préoccupation au constat de ses investissements déficitaires.

Par ailleurs, avant le 17 janvier 2008, M. Y n’a demandé aucun conseil à l’agent d’assurance AXA alors qu’il a effectué une telle démarche auprès du CRÉDIT AGRICOLE. Dans ces conditions, l’appelant ayant déjà procédé à des investissements en unités de compte, il ne peut être reproché à la société AXA de ne lui avoir pas dispensé des conseils qu’il ne sollicitait pas.

Au surplus, il convient de relever qu’il n’a donné aucune suite à la proposition de la société AXA faite le 25 février 2009 de réorienter son épargne vers des supports moins exposés.

En tout état de cause, un manquement de la société AXA à son devoir d’information et de conseil serait-il démontré qu’il appartiendrait à M. Y de prouver l’existence d’un préjudice résultant directement de ce manquement, un tel préjudice ne pouvant résulter que de la perte d’une chance de percevoir des intérêts à un taux garanti. Il lui appartiendrait aussi de démontrer que, dûment informé et conseillé, il n’aurait pas poursuivi ses investissements en unités de compte. Sur ces points, la cour, adoptant les motifs des premiers juges, considère que M. E Y succombe dans l’administration de la preuve qui lui incombe de l’existence et du montant d’un préjudice.

En conséquence, la cour déboutera M. Y de sa demande d’annulation des demandes de versement des 17 et 31 janvier 2008 sur le fondement de l’article 1147 du code civil, ainsi que de ses demandes subséquentes.

3°) Sur les autres demandes

En rejetant la demande d’annulation présentée par M. E Y, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles engagés tant en première instance qu’en cause d’appel.

L’appelant succombant en l’intégralité de ses demandes sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 décembre 2011 par le tribunal de grande instance du Mans ;

Y ajoutant,

Déboute M. E Y de l’intégralité de ses demandes ;

Rejette les demandes des parties fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. E Y au paiement des entiers dépens d’appel, lesquels seront recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

D. X J. HUBERT

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Cour d'appel d'Angers, 21 mai 2013, n° 12/00263