Cour d'appel de Bordeaux, 11 mars 2015, n° 13/01969

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 11 mars 2015, n° 13/01969
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 13/01969
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Périgueux, 4 mars 2013, N° 12/00852

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION B


ARRÊT DU 11 MARS 2015

(Rédacteur : Madame Catherine COUDY, Conseiller)

N° de rôle : 13/01969

Madame F G

c/

Monsieur H B

Madame O-P Q épouse B

LA S.A.R.L. J2S DIAGNOSTICS

LA S.A. M. M.A. IARD

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 5 mars 2013 (R.G. 12/00852) par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d’appel du 29 mars 2013,

APPELANTE :

Madame F G, née le XXX à XXX, de nationalité française, demeurant XXX,

Représentée par Maître O-Hélène LAVIGNE, substituant la S.C.P. Yves DELAVALLADE – Xavier DELAVALLADE – Françoise GELIBERT – Fabrice DELAVOYE, Avocats Associés au barreau de BO-RDEAUX,

INTIMÉS :

1°/ Monsieur H B, né le XXX à XXX, de nationalité française, menuisier,

2°/ Madame O-P Q épouse B, née le XXX à XXX, de nationalité française,

lesdits époux demeurant ensemble XXX,

Représentés par Maître Stéphanie GAULTIER, Avocat au barreau de PERIGUEUX,

3°/ LA S.A.R.L. J2S DIAGNOSTICS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis XXX,

Régulièrement assignée, non représentée,

ASSIGNÉE EN INTERVENTION suivant assignation du 17 septembre 2013:

LA S.A. M. M.A. IARD, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis 14, boulevard O et Alexandre Oyon 72030 LE MANS CEDEX,

Représentée par la S.C.P. Xavier LAYDEKER et Gilles SAMMARCELLI, Avocats Associés au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Jean-René ETCHEGARAY, Avocat au barreau de BAYONNE,

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 19 janvier 2015 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Michel BARRAILLA, Président,

Madame Catherine FOURNIEL, Président,

Madame Catherine COUDY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marceline LOISON

ARRÊT :

— de défaut

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Par assignation délivrée à jour fixe le 10 mai 2012, madame F Z a attrait devant le tribunal de grande instance de Périgueux monsieur et madame B et la société J2S afin de voir le tribunal prononcer la nullité pour dol de la vente intervenue entre elle et les époux B avec restitution du prix et condamnation des vendeurs à paiement de dommages-intérêts, et subsidiairement, d’obtenir la condamnation de la Société J2S Diagnostics au paiement de traitement curatif et de dommages-intérêts, suite à la découverte de termites infestant l’immeuble acquis par elle le 10 avril 2009, pour un prix de 80.000 €, étant précisé qu’elle était locataire du bien lors de la vente.

Par jugement du 5 mars 2013, le tribunal de grande instance de Périgueux a déclaré madame Z irrecevable en ses demandes, l’a condamnée à payer à monsieur et madame B et à la SARL J2S Diagnostics la somme de 800 € chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamnée aux dépens de l’instance avec distraction au profit de l’avocat de la société sus-indiquée, au motif que la demanderesse n’avait pas justifié devant le tribunal la publication de l’assignation en nullité de la vente.

Par déclaration du 29 mars 2013, madame F Z a interjeté appel total du jugement.

Elle a par ailleurs assigné en intervention forcée la SA MMA IARD, assureur de la société J2S Diagnostics par acte d’huissier du 17 septembre 2013.

Après échange des conclusions des parties, l’ordonnance de clôture a été rendue le 5 janvier 2015 et a fixé l’affaire au 19 janvier 2015, à laquelle elle a été retenue et l’arrêt mis en délibéré à ce jour.

Dans ses dernières conclusions et déposées le 12 mars 2014, madame F Z demande à la cour d’ :

— annuler le jugement en ce qu’il a soulevé d’office le moyen tiré du défaut de publication de l’assignation,

subsidiairement,

— réformer ce jugement en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes et l’a condamnée à payer 800 € aux défendeurs au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

Elle demande dans tous les cas à la cour de :

A titre principal:

— constater l’existence de man’uvres dolosives commises par les époux B qui ont sciemment dissimulé la présence de termites dans l’habitation objet de la vente survenue le 10 avril 2009 et en conséquence, ordonner la nullité de cette vente et la restitution du prix de vente, condamner en outre les époux B à lui verser 50.000 € titre du préjudice de jouissance et 10.000 € au titre du préjudice moral ;

A titre subsidiaire :

— vu les dispositions de l’article L 124-3 du code des assurances, condamner la société MMA IARD, assureur de la société JS2 Diagnostics à lui payer à titre provisionnel la somme de 5.827,76 € au titre des travaux de traitement curatif anti-termites, la somme de 4.133,91 € au titre des travaux de reprise des pièces de bois de l’immeuble, la somme de 50.000 € au titre du préjudice de jouissance et la somme de 10.000 € au titre du préjudice moral,

— en ce cas ordonner un complément d’expertise confié à Monsieur X ou tel autre expert qu’il plaira avec mission de chiffrer tous chefs de préjudice subis par elle après réalisation des travaux et surseoir à statuer jusqu’au dépôt du rapport final par l’expert;

En toute hypothèse,

— condamner toute partie succombante à lui verser la somme de 5.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, dire que les intérêts des sommes allouées porteront le même intérêt en application de l’article 1154 du code civil, condamner en outre in solidum monsieur et madame B et la société MMA IARD à lui rembourser sur justificatifs les frais de recouvrement de huissier et aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise de référé.

Elle expose qu’elle a acquis la maison le 10 avril 2009 et qu’à cette occasion le diagnostic termites était négatif et précisait qu’il n’avait pas été constaté la présence de traces de termites au jour de l’expertise, mais que, 10 jours après la signature de l’acte, elle avait constaté l’apparition d’un nombre important d’insectes à l’intérieur de sa maison, ce qui s’était renouvelé le 5 mai 2009 et le 11 août 2010 et qui l’avait incitée à solliciter l’organisation d’une expertise auprès du juge des référés du tribunal de grande instance de Périgueux, lequel avait désigné monsieur X par ordonnance du 4 juin 2009.

Elle ajoute qu’après dépôt du rapport d’expertise le 11 mars 2011 et au vu des conclusions de ce rapport qui était accablantes, tant pour les époux B que pour la société de diagnostic, elle avait saisi le juge du fond qui avait statué par le jugement déféré.

Elle soulève la nullité du jugement déféré en faisant valoir que la fin de non recevoir tirée du défaut du publicité foncière est édictée en vue de la protection des intérêts particuliers et ne pouvait donc être soulevée d’office par le tribunal dont le jugement doit donc être annulé ou réformé.

Sur le fond, elle demande à la cour de prononcer la nullité de la vente sur le fondement de l’article 1116 du code civil, en se référant aux déclarations de monsieur A de la société J2S ayant relaté l’attitude curieuse de monsieur B, menuisier de son état, lui ayant indiqué de ne pas trop parler à la locataire qui était capable d’introduire des termites dans le bien, et aux déclarations faites par monsieur B à elle-même lui ayant indiqué que les insectes vus par elle étaient des fourmis volantes et qui avait reconnu lors du diagnostic avoir traité l’immeuble trois ou quatre ans avant la vente du fait qu’il avait découvert des termites. Elle conclut que le mensonge commis par son ancien propriétaire au sujet des insectes qualifiés de fourmis volantes et la dissimulation du traitement pratiqué constituent une dol justifiant l’annulation du contrat de vente et que ses vendeurs doivent être condamnés à l’indemniser de son préjudice car, depuis le 1er avril 2010, elle était contrainte de séjourner dans un camping.

À titre subsidiaire, elle fait valoir que la société de diagnostic a engagé sa responsabilité sur le fondement de l’article 1382 du code civil car l’expert judiciaire avait noté que l’essaimage constaté quelques jours après la vente permettait de déduire l’existence d’une forte activité au moment du passage du diagnostiqueur, d’autant que la commune dans laquelle le bien était situé était connue pour être infestée de termites, ce qui justifiait sa demande de paiement des travaux de traitement curatif et de changement des pièces de bois ainsi que l’indemnisation de son préjudice de jouissance durant la réfection de son bien et jusqu’à ce jour.

Elle précise agir contre l’assureur de la société de diagnostic, du fait que cette société a cessé son activité.

Elle répond à cet assureur ayant soulevé la prescription qu’elle agit au titre de l’action directe et que, dans ce cadre, le délai de prescription est de cinq ans et non de deux ans, de sorte que son action n’est pas prescrite et, que contrairement à ce que cet assureur soutient, elle n’avait pas connaissance lors de l’achat de son immeuble de la présence de termites dans la mesure où son propriétaire, professionnel, lui avait affirmé que les insectes vus était des fourmis volantes, ajoutant que la société de diagnostic aurait dû, au vu des conclusions de l’expert, constater l’infestation de termites.

Elle demande un complément d’expertise au motif que l’expert n’a pu chiffrer que les altérations les pièces de bois accessibles et n’a pas dès lors chiffré tous les désordres.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 18 juillet 2013, monsieur H B et madame O-P Q épouse B demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter madame Z de l’ensemble de ses demandes, de la condamner à leur payer la somme de 5.000 € pour procédure abusive et 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et enfin de la condamner en tous les dépens en ce compris les éventuels frais d’exécution des décisions intervenir.

Ils soutiennent que leur ancienne locataire ne prouve pas qu’ils avaient connaissance de l’infestation des termites avant l’achat du bien, mais que, par contre, elle-même devait en avoir connaissance car elle était locataire lors de ladite vente, ajoutant qu’ils avaient acquis l’immeuble en 1991 et appliqué un traitement uniquement préventif.

Ils contestent les attestations rédigées par le salarié et le gérant de la société J2S en considérant qu’ils tentent ce faisant de dégager leur responsabilité.

Ils ajoutent que madame Z ne pouvait ignorer le risque encouru en faisant l’acquisition d’un immeuble ancien dans une région particulièrement sujette à l’infestation de termites et alors qu’elle savait pertinemment que la maison voisine était elle-même infestée de termites.

Enfin, ils font valoir que les demandes indemnitaires de madame Z sont démesurées, d’autant qu’elle affirme débourser 2.976 € par an de location de camping, et concluent que l’action initiée par elle est abusive et leur cause préjudice car ils subissent depuis quatre ans de nombreuses procédures initiées par elle.

Dans ses dernières conclusions déposées le 24 janvier 2014, la société Mutuelles du Mans Assurances, appelée en intervention forcée, demande à la cour, au visa des articles 1116 et 1382 et suivants du code civil et des dispositions du code de la construction et de l’habitation et au visa de l’arrêt de la 5e chambre de la cour d’appel de Bordeaux du 5 janvier 2012, de confirmer le jugement toutes ses dispositions.

Elle demande, pour le cas où la cour réformerait le jugement, de constater la prescription de l’action de madame Z à son encontre, de déclarer irrecevables et en tout cas mal fondées toutes demandes faites en conséquence de la nullité de la vente contre elle et, s’agissant de la demande d’indemnisation formulée à titre subsidiaire, de dire que la société J2S Diagnostics n’a pas failli dans sa mission et en conséquence mettre hors de cause son assureur.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour, dans cette hypothèse, de rejeter les demandes de madame Z formées à son encontre, de constater qu’elle avait connaissance du vice allégué et fait preuve de négligence et que les époux B ont commis un dol, en conséquence de dire que les époux B devront la relever indemne de toute condamnation prononcée contre elle, société d’assurances.

A titre infiniment subsidiaire, elle demande à la cour, dans le cas où la responsabilité de la société de diagnostic serait retenue, de fixer un pourcentage de la part contributive de chacun des codébiteurs de l’obligation de réparation des dommages subis par madame F Z.

Enfin, elle demande en toute hypothèse d’évaluer le préjudice de l’appelante à de plus justes proportions et notamment aux seuls travaux de réparation, de lui allouer une indemnité de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner la ou les parties succombantes aux entiers dépens avec distraction au profit de son avocat.

À l’appui de ses demandes, la société MMA IARD souligne que l’expert judiciaire a préconisé un traitement curatif immédiat au vu de l’infestation peu étendue, mais que madame Z avait refusé de le financer et avait été déboutée de sa demande de provision par le juge des référés selon ordonnance du 22 juillet 2010, confirmée par arrêt de la cour d’appel du 5 janvier 2012 relevant que Madame Z savait que la maison voisine avait subi un traitement curatif contre les termites, que l’immeuble se trouvait dans une commune exposée et que les traces qu’elle avait vues en 2008 auraient dû l’alerter.

La société Mutuelle du Mans Assurances soulève en premier lieu la prescription de l’action en se fondant sur le délai biennal de l’article L 114 -1 du code des assurances, et ajoute que le délai de deux ans ne court qu’à compter du recours de tiers lorsque l’action de l’assuré a pour cause le recours du tiers, ce qui s’applique à l’action directe à l’encontre de l’assureur responsabilité de l’auteur du dommage.

Sur le fond, elle estime ne pas être concernée par l’action en nullité de la vente et la demande de restitution du prix.

S’agissant de la faute reprochée par madame Z à son assurée, elle met en avant que l’acquéreur occupait les lieux avant d’acheter le bien et avait constaté la présence de poussière lors de la réfection de lambris en 2008, qu’elle avait eu connaissance de l’infestation de l’immeuble voisin par les termites et qu’il était peu plausible qu’elle ait pris les termites pour des fourmis volantes, tous éléments de nature à la priver de son droit à réparation, et que le vendeur, menuisier de profession, ne pouvait ignorer la présence des termites et était dès lors tenu à garantie.

A titre subsidiaire, elle estime que son assurée n’a pas commis de faute, car elle n’avait pas été informée d’éléments connus par l’acquéreur et les vendeurs, et elle conteste tout lien de causalité avec le préjudice dont seul le propriétaire doit répondre.

Enfin elle conteste le préjudice en faisant valoir que les demandes sont démesurées et en soulignant que son assurée a proposé devant l’expert de faire les travaux de traitement curatif rapidement, comme celui-ci le demandait, mais que madame Z l’avait refusé.

La Société J2S exerçant sous l’enseigne Diagnostics Immo n’a pas comparu.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La recevabilité de l’appel interjeté par madame Z contre le jugement du tribunal de grande instance de Périgueux en date du 5 mars 2013 n’est pas contestée.

L’appel diligenté par madame Z et la signification de ses conclusions par acte d’huissier du 9 juillet 2013 ont été faits au dernier domicile connu après recherches demeurées vaines.

En l’absence de signification à personne et de comparution de la société J2S Diagnostics, la décision rendue en dernier ressort sera qualifiée par défaut.

Sur la demande de nullité du jugement du 5 mars 2013 :

La demande de nullité du jugement est fondée sur l’impossibilité pour le tribunal de relever d’office le défaut de publicité de l’assignation au jour du jugement.

Il sera rappelé que selon l’article 122 du code de procédure civile 'constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.

L’article 125 du code de procédure civile énonce que :

'les fins de non-recevoir doivent être relevées d’office lorsqu’elles ont un caractère d’ordre public, notamment lorsqu’elles résultent de l’inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l’absence d’ouverture d’une voie de recours.

Le juge peut relever d’office la fin-de non-recevoir tiré du défaut d’intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée'.

Il résulte de ces articles que, hors le cas de fins de non-recevoir d’ordre public et hors le cas du défaut de qualité, d’intérêt ou de la chose jugée, les fins de non-recevoir ne peuvent être soulevées d’office par le juge saisi d’une action en nullité de vente.

En l’espèce, après avoir, par un premier jugement du 11 septembre 2012 renvoyé l’affaire à la mise en état dans l’attente de la justification de la publication de l’assignation en nullité de vente à la conservation des hypothèques, le tribunal de grande instance de Périgueux, a, dans son jugement du 5 mars 2013, retenu que l’article 30 5° du décret du 4 janvier 1955 relatif à la publicité foncière imposait à peine d’irrecevabilité de faire publier à la conservation des hypothèques les demandes tendant à faire prononcer la résolution, la révocation, l’annulation, ou la rescision des droits résultant d’actes soumis à publicité foncière, qu’il n’est prévu aucun délai pour y procéder et qu’au jour de la clôture des débats la publicité doit avoir été faite, un dépôt pour publication étant insuffisant, et il conclut que dans la mesure où la demande présentée par madame Z tend à l’annulation de la vente pour dol et où madame Z ne justifie pas de la publicité de l’assignation en cause, la demande en nullité de vente est irrecevable.

Le défaut de publicité foncière est une fin-de non recevoir édictée en vue de la seule protection des intérêts particuliers des parties.

Le juge ne peut donc la soulever d’office.

En l’espèce, la lecture du jugement comme des conclusions des parties permet de vérifier que l’irrecevabilité de la demande en nullité de vente pour dol pour défaut de publication de l’assignation n’avait été sollicitée par aucune des parties au litige.

Le tribunal ne pouvait donc soulever ce moyen d’office et, pour ce motif, son jugement sera annulé comme demandé par madame Z.

Sur la demande de nullité de la vente pour dol des vendeurs :

Il sera statué sur le fond, au vu des conclusions de l’appelante ayant conclu au fond à titre principal.

Il s’évince des pièces produites par les parties que :

— madame Z était locataire, moyennant un loyer hors charges de 500 € par mois, depuis le 8 octobre 2007, de la maison située à Saint Vincent de Connezac en Dordogne, qui appartenait à monsieur et madame B pour l’avoir acquise en 1991;

— lors de la mise en vente de cette maison, la locataire s’est portée acquéreur de cet immeuble ;

— la vente a été régularisée par acte de Maître Vigara-Climent, notaire à Saint-Astier, selon acte du 10 avril 2009 pour un prix de 80.000 €;

l’acte de vente mentionnait que :

'L’immeuble se trouve dans une zone délimitée par arrêté préfectoral comme étant une zone contaminée ou susceptible de l’être par les termites;

En conséquence, un rapport a été délivrée par le cabinet Diagnostics Immo sis à Périgueux, le XXX, et est demeuré annexé après mention.

L’acquéreur déclare en avoir pris parfaite connaissance et en faire ainsi son affaire personnelle’ ;

— à l’occasion de cette vente, la Société J2S Diagnostics a rendu un rapport relatif à la présence de termites dans un immeuble indiquant au niveau de chaque pièce 'une absence d’indices d’infestations de termites', une absence de traitement antérieur et des indices sur certaines parties de présences d’agents de dégradation biologiques du bois, insectes à larves xylophages et champignons, autres que les termites puisque l’absence d’indice d’infestation de termites était dans le même temps relevé dans ces pièces, et concluant:

'nous n’avons pas constaté la présence de traces de termites le jour de l’expertise'.

La société J2S exerçant sous l’enseigne 'Diagnostics Immo’ ne préconise du reste aucun renforcement de pièces de bois.

— madame Z a constaté l’apparition de nombreux insectes à l’intérieur de sa maison, ce qu’elle a fait constater par M° D, Huissier de Justice, le 21 avril 2009, qui a noté la présence d’insectes xylophages vivants porteurs d’ailes et de larves ayant dégradé des linteaux, apparition qui s’est renouvelée le 5 mai 2009 et le 11 août 2010, ce qu’elle a à nouveau fait constater par constat d’huissier de maître D en date du 11 août 2010 mentionnant l’existence de nombreux termites en activité sur les linteaux et fenêtres, avant de solliciter l’organisation d’une expertise ordonnée par décision de référé du 22 juillet 2010.

Le rapport de monsieur X permet de conclure que, lors de la vente, l’immeuble était infesté de termites car il a constaté la présence de termites vivants ou morts dans l’immeuble et il indique que ces termites étaient présents lors de la vente car, d’une part , les murs du rez-de-chaussée étaient habillés de lambris lorsque la demanderesse était locataire et monsieur Z a indiqué avoir déposé à cette époque les lambris sur une grande partie de ces murs et les lames de lambris présentaient une poussière qui était selon l’expert sans doute des restes de cordons de termites et, d’autre part, madame Z avait vu un essaimage au printemps 2008 mais, ne connaissant pas les termites, avait pensé qu’il s’agissait de fourmis volantes.

L’expert note à ce sujet qu’il n’a pas les moyens de vérifier l’ampleur de l’infestation de 2008 mais qu’un essaimage se produit quand la termitière est trop peuplée et qu’une partie des individus la quitte pour aller chercher une nouvelle implantation, de sorte qu’il ne s’agit pas de quelques unités mais d’une population suffisante pour créer une nouvelle colonie.

L’infestation de termites lors de la vente de l’immeuble se déduit également du fait que les dégradations figurant sur le premier constat d’huissier de M° D n’ont pu se faire en 11 jours.

l’article 1116 du code civil énonce que :

'le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.'

Il résulte de la conjonction des divers éléments, qui seraient insuffisants pris chacun de manière isolée, que monsieur et madame B, vendeurs, avaient connaissance de l’infestation des termites et ont commis une réticence dolosive à l’égard de leur acquéreur en taisant la présence de cette infestation lors de la vente :

— tout d’abord dans une attestation du 21 avril 2009 qui n’a pas été attaquée pour faux, monsieur A, salarié de la société J2S Diagnostics, affirme qu’avant de commencer ses opérations, monsieur B a demandé de dire au diagnostiqueur de ne pas parler avec la locataire et a rappelé son patron pour leur indiquer que la locataire pourrait être capable d’introduire des termites dans le bien, et que monsieur B a vanté devant eux les mérites de l’immeuble en indiquant qu’il n’était pas infesté par les termites car il avait badigeonné l’ensemble des pièces de bois avec du Xylophène.

Dans cette même attestation monsieur A indique avoir été appelé par madame Z le 17 avril 2009, au motif qu’elle avait vu des insectes ressemblant à des termites, s’être rendu chez elle, avoir constaté la réalité de la présence de termites et avoir appris à cette occasion de madame Z qu’elle avait vu de tels insectes avant la vente, en avait parlé à monsieur B qui l’avait rassurée en disant qu’il s’agissant de fourmis volantes.

Monsieur A ajoute enfin, que le lendemain, 18 avril, son patron avait téléphoné à monsieur B qui avait avoué avoir traité des termites dans l’immeuble 3 ou 4 ans auparavant.

— monsieur Y, patron de monsieur A, a produit une attestation dans laquelle il indique confirmer les propos tenus par son employé, monsieur A, au sujet des dires de monsieur B, alors que leur intérêt était de taire ces éléments qu’ils n’ont pas été capables de déceler ;

— l’attestation de monsieur A est pour l’essentiel confirmée par le rapport de l’expert judiciaire qui mentionne que, lors des opérations d’expertise, madame Z a indiqué avoir vu un essaimage au printemps 2008 et avoir pensé qu’il s’agissait de fourmis volantes et que monsieur B avait reconnu avoir traité les bois et murs de l’immeuble avec du xylophène, il y a une quinzaine d’années, à titre préventif.

L’expert a ajouté que monsieur B avait dit à monsieur A que le voisin immédiat avait fait traiter les termites juste avant la vente et il note que le traitement réalisé par le vendeur avait été fait dans les murs, par perçage de puits et mise en oeuvre de produit insecticide, ce qui avait amené ledit expert à s’interroger sur les motifs de ce traitement ;

— enfin, monsieur B exerçait lors de la vente l’activité de menuisier, de sorte qu’il savait nécessairement ce qu’étaient les termites et était à même de reconnaître les dégradations qu’elles peuvent créer dans les pièces de bois.

Le traitement opéré laisse penser qu’il avait connaissance de la présence de termites dans l’immeuble.

Monsieur et madame B, vendeurs, avaient l’obligation de porter à la connaissance de l’acquéreur l’existence du traitement pratiqué comme ils se devaient de lui faire connaître que la maison contiguë était infestée et venait d’être traitée lors de la vente.

La connaissance de termites par madame Z et par voie de conséquence son acceptation des risques liés à leur présence n’est en rien démontrée.

Aucun élément ne permet de retenir que madame Z avait connaissance que les insectes aperçus et considérés comme des fourmis volantes sans danger étaient en réalité des termites dégradant généralement les structures en bois de l’immeuble.

Comme l’expert l’a souligné, il est parfaitement plausible que madame Z ait confondu des termites avec des fourmis volantes en raison de la ressemblance existant entre ces insectes.

Elle a été confortée dans cette erreur par le diagnostic réalisé lors de la vente l’informant de l’absence de traces de termites dans l’immeuble acquis.

Il est certain qu’elle ne se serait pas portée acquéreur du bien en connaissant les dégradations que les termites peuvent occasionner et en sachant qu’elle pourrait être tenue de demander la nullité de la vente peu de temps après.

En réalité, si madame Z avait connu l’existence d’infestation de termites et ses conséquences possibles, elle n’aurait pas acquis le bien.

Enfin le risque encouru du fait de l’achat d’un bien ancien ne dispense en aucun cas le vendeur d’une information loyale portant sur les vices ou dégradations pouvant affecter le bien vendu et connus de lui.

Le silence des vendeurs portant sur des éléments essentiels qu’ils devaient porter à la connaissance de leur acquéreur, tenant à la présence de termites susceptibles de générer des dégradations importantes sans que l’acquéreur ne puisse en avoir connaissance constitue une réticence dolosive à l’égard de madame Z qui devait être correctement informée pour donner un consentement éclairé.

La nullité de la vente du 10 avril 2009 pour dol sera en conséquence prononcée, avec pour conséquence la restitution du prix par les vendeurs à madame Z et la restitution du bien acquis par elle aux époux B.

Madame Z est fondée à solliciter l’indemnisation des préjudices subis par suite du dol commis.

Elle réclame une somme de 50.000 € de dommages et intérêts en arguant qu’elle est contrainte de résider dans un camping depuis le 10 avril 2009 pour 248 € par mois et qu’elle subit un préjudice de jouissance en étant empêchée de profiter du bien acquis, et la somme de 10.000 € en réparation du préjudice moral au vu des conséquence physiques et psychologiques de cette affaire attestées par son médecin.

Le caractère limité des dégradations n’imposait pas le déménagement de madame Z qui a préféré aller résider depuis le mois de janvier 2010 dans un gîte puis dans un camping.

Mais il est indéniable que celle-ci n’a pas pu profiter du bien acquis comme elle en aurait profité si elle l’avait acquis en étant correctement informée, et il ressort du certificat médical de son médecin qu’elle a été affectée par la dissimulation de l’état réel du bien acquis.

Monsieur et madame B seront condamnés à lui payer une somme de 20.000 € au titre des préjudices subis s’analysant en un préjudice de jouissance et un préjudice moral.

Cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la présente décision et il y aura lieu à capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil.

Sur la demande de dommages et intérêts présentée par monsieur et madame B pour procédure abusive :

Monsieur et madame B présentent une demande sur le fondement de l’article 559 du code de procédure civile contre madame Z en exposant que l’appel est abusif car ses demandes présentées sur le fond sont non fondées et l’accumulation des procédures inspirées par une attitude malveillante a fini par altérer leur état de santé.

Dans la mesure où la procédure initiée par madame Z est apparue fondée, ce qui a amené la cour d’appel à prononcer la nullité de la vente, l’appel interjeté par celle ci contre un jugement déclarant son action irrecevable ne peut être fautif.

Sur la demande de responsabilité de la société J2S Diagnostics et la demande de garantie de la compagnie MMA ASSURANCES :

Dans la mesure où la cour retient le dol commis par les vendeurs et prononce la nullité de la vente passée entre madame Z et les époux B, la demande subsidiaire présentée par madame Z tendant à voir retenir la responsabilité de l’entreprise chargée d’établir le diagnostic anti-parasitaire et à voir l’assureur de ce dernier l’indemniser de ses préjudices, avec paiement d’indemnités provisionnelles et organisation d’une expertise pour chiffrer tous les chefs de préjudices subis, s’avère sans objet.

Sur les demandes présentées par la Compagnie MMA Assurances :

L’ensemble des demandes présentée par la compagnie MMA Assurances, que ce soit au titre de la prescription ou au titre de la responsabilité de son assuré, des demandes indemnitaires et de la demande tendant à être relevée indemne par les époux B s’avèrent dénuées d’intérêt et d’objet.

Sur les autres demandes :

La présente procédure a obligé madame Z à engager des frais irrépétibles qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge. Monsieur et madame B seront condamnés à lui verser une indemnité de 3.500 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

Eu égard à la décision retenue, il n’apparaît pas équitable d’allouer une indemnité sur le fondement de ce même article 700 du code de procédure civile à monsieur et madame B.

Même si la compagnie MMA ne fait pas l’objet de condamnation, du fait que la cour fait droit aux demandes principales de madame B et en l’absence de demande présentée par les époux B à l’encontre de l’assuré de la compagnie MMA Assurances ou de cette dernière, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de MMA Assurances les frais irrépétibles exposés en cause d’appel, son appel en cause réalisé par madame Z ayant été motivé par l’erreur de diagnostic commise par l’assurée de la compagnie MMA Assurances.

Les dépens seront supportés par monsieur et madame B, au vu de la décision prononçant la nullité de la vente et condamnant les vendeurs à indemnisation de l’acquéreur.

Il n’a y a pas lieu de condamner les époux B au paiement des frais de recouvrement qui ne font pas partie des dépens et ne peuvent en l’état être contrôlés dans leur opportunité.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe, par défaut et en dernier ressort,

Après en avoir délibéré, conformément à la loi :

— Déclare recevable l’appel interjeté par madame F Z contre le jugement du tribunal de grande instance de Périgueux du 5 mars 2013 ;

— Annule le jugement déféré ;

Statuant à nouveau :

— Prononce sur le fondement du dol la nullité de la vente passée entre monsieur H B et madame O P Q épouse B d’une part et madame F Z d’autre part, par acte dressé par Maître Vigara-Climent, notaire à Saint-Astier (24), le 10 avril 2009, portant sur l’immeuble sis à Saint-Vincent-de- Connezac (Dordogne) 24190 'le bourg', cadastré section XXX d’une contenance de 01 a et 80 ca, ayant donné lieu à assignation des 10 et 11 mai 2012 publiée à la conservation des hypothèques de Ribérac (24) le 11/09/2012 sous le numéro 2012 D 3110 ;

— Condamne monsieur H B et madame O P Q épouse B à restituer à madame Z le prix de vente de 80.000 € et madame F Z à restituer le bien vendu aux époux B ;

— Condamne en outre monsieur H B et madame O P Q épouse B à payer à madame F Z une somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices de jouissance et moral subis, avec capitalisation des intérêts en application de l’article 1154 du code civil ;

— Déboute monsieur H B et madame O P Q épouse B de leur demande de dommages et intérêts présentée contre madame Z pour procédure abusive ;

— Déclare sans objet les demandes présentées par madame Z contre la Société J2S Diagnostics et son assureur et les demandes présentées par la société Mutuelles du Mans Assurances IARD et dit n’y avoir lieu de statuer sur ces demandes ;

— Condamne monsieur H B et madame O P Q épouse B à payer à madame F Z une indemnité de 3.500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Déboute monsieur et madame B de leur demande d’indemnité présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Dit n’y avoir lieu d’allouer une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à la société MMA IARD ;

— Condamne monsieur H B et madame O P Q épouse B aux entiers dépens de la procédure de première instance et d’appel, en ce compris les dépens de la procédure de référé-expertise, les frais d’expertise et les frais de publication du présent arrêt au service des hypothèques compétent ;

— Déboute madame F Z de sa demande de condamnation des époux B aux frais d’exécution.

Signée par monsieur Michel Barrailla, président, et par madame Marceline Loison, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Bordeaux, 11 mars 2015, n° 13/01969