Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 10 septembre 2020, n° 18/06391

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, ch. 1 sect. 1, 10 sept. 2020, n° 18/06391
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 18/06391
Décision précédente : Tribunal d'instance de Lille, 4 octobre 2018, N° 16-003461
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 10/09/2020

****

N° de MINUTE :

N° RG 18/06391 – N° Portalis DBVT-V-B7C-R7NA

Jugement (N° 16-003461)

rendu le 05 octobre 2018 par le tribunal d’instance de Lille

APPELANTE

SA Cofidis venant aux droits de la SA Groupe Sofemo

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social […]

[…]

représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai

assistée de Me Xavier Helain, avocat au barreau d’Essonne

INTIMÉES

Madame Z Y épouse X

née le […] à Neuf-Brisach

demeurant […]

[…]

représentée par Me Guillaume Ghestem, avocat au barreau de Lille

assistée de Me Ariane Vennin, membre de la SELAS A7 Avocats, avocat au barreau de Paris substitué à l’audience par Me Audric Dupuis, avocat au barreau de Paris.

SASU Gef Negoces exerçant sous l’enseigne Domuneo Environnement

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social […]

[…]

représentée par Me Loïc Le Roy, avocat au barreau de Douai

assistée de Me Bruno Metral, avocat au barreau de Lyon

DÉBATS à l’audience publique du 04 juin 2020 tenue par D-Laure Aldigé magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : B C

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

D-E F, président de chambre

Emmanuelle Boutié, conseiller

D-Laure Aldigé, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 10 septembre 2020 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par D-E F, président et B C, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 12 mars 2020

****

Suivant bon de commande en date du 21 novembre 2011, Mme Z X née Y a conclu avec la société Gef Négoces exerçant sous l’enseigne 'Domuneo', dans le cadre d’un démarchage à domicile, un contrat de fourniture et de pose de panneaux photovoltaïques moyennant un coût de 13 500 euros, financé par un crédit affecté du même montant souscrit le même jour auprès de la société Sofemo par Mme Y.

Mme Y a, par actes d’huissiers de justice en date des 29 septembre 2016, fait assigner devant le tribunal d’instance de Lille la société Gef Négoces et la société Cofidis aux droits de laquelle vient la société Sofemo, aux fins d’obtenir l’annulation du contrat principal et du crédit affecté.

Par jugement du 5 octobre 2018 le tribunal d’instance a :

— prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 21 novembre 2011 entre Mme Y et la société GEF Negoces exerçant sous l’enseigne 'Domuneo',

constaté la nullité du contrat de crédit affecté n°L 284372 8 conclu entre la société Sofemo et Mme Y en date du 21 novembre 2011,

— condamné la société Cofidis venant aux droits de la société Sofemo à restituer à Mme Y l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté n°L 284372 8 conclu le 21 novembre 2011,

— débouté le société Cofidis de toutes ses demandes,

— ordonné à la société Cofidis de procéder à la radiation de Mme Y du FICP,

— débouté Mme Y du surplus de ses demandes,

— condamné in solidum la société Cofidis et la société GEF Negoces exerçant sous l’enseigne 'Domuneo’ à payer à Mme Y la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné in solidum la société Cofidis et la société GEF Negoces exerçant sous l’enseigne 'Domuneo’ aux dépens,

— ordonné l’exécution provisoire de la décision.

La banque a interjeté appel de ce jugement.

Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 24 février 2020, l’appelante demande à la cour de :

A titre principal :

• juger n’y avoir lieu à nullité ou résolution des conventions pour quelque cause que ce soit ;

• en conséquence, après avoir constaté que le prêt avait été remboursé par anticipation, juger qu’aucune somme n’est due ;

A titre subsidiaire, si la cour venait à prononcer la nullité ou la résolution du contrat de crédit, par suite de la nullité ou de la résolution du contrat de vente :

• juger que la SA Cofidis n’a commis aucune faute à quelque titre que ce soit ;

• en conséquence, après avoir constaté que le prêt avait été remboursé par anticipation, juger qu’aucune somme n’est due ;

A titre plus subsidiaire, si la cour venait à juger que la SA Cofidis avait commis une quelconque faute,

• juger que la notion de préjudice relève de l’appréciation souveraine des juges du fond ;

• juger que Mme X n’apporte nullement la preuve d’un préjudice de nature à priver la banque de sa créance de restitution du capital,

• juger que la société GEF Negoces étant in bonis, l’emprunteur peut parfaitement récupérer les fonds directement entre les mains de la société, à charge pour eux de rembourser la banque ;

• en conséquence, après avoir constaté que le prêt avait été remboursé par anticipation, juger qu’aucune somme n’est due ;

A titre infiniment subsidiaire

• condamner la société GEF Negoces à payer à la SA Cofidis la somme de 13 500 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir ;

En tout état de cause

• la condamner à relever et garantir la SA Cofidis de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge à l’encontre de Mme X ;

• condamner tout succombant à payer à la SA Cofidis une indemnité d’un montant de 2 500

• euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, condamner solidairement la société GEF Negoces et Mme X aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 24 juillet 2019, Mme Y demande à la cour de:

A titre principal

• confirmer la décision déférée en ce qu’elle a prononcé la nullité du contrat conclu entre Mme X et la société GEF Negoces le 21 novembre 2011 ;

• en conséquence, la confirmer en ce qu’elle a prononcé la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre Mme X et la banque Cofidis le 21 novembre 2011 ;

A titre subsidiaire, si la Cour d’appel ne confirmait pas la nullité des contrats, il lui est demandé de statuer à nouveau et de :

• prononcer la résolution pour inexécution du contrat conclu entre Mme X et la société GEF Negoces le 21 novembre 2011 ;

• en conséquence, prononcer la résolution du contrat de crédit affecté ;

En tout état de cause

• confirmer la décision déférée en ce qu’elle a jugé que la banque Cofidis a commis une faute qui la prive de son droit à restitution du capital et des intérêts prêtés, et qui l’oblige à restituer l’ensemble des sommes versées par Mme X ;

• en conséquence, confirmer le jugement du tribunal d’instance de Lille qui a jugé que Mme X n’est plus débiteur de la SA Cofidis ;

• condamner la société GEF Negoces à procéder à la désinstallation du matériel et à la remise en état à ses frais ;

• condamner solidairement la société GEF Negoces et la SA Cofidis à payer à Mme X la somme de 2 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 27 février 2020, la société Gef Négoces demande à la cour de :

• débouter Mme X de l’ensemble de ses demandes comme injustifiées et mal fondées ;

• confirmer la décision déférée en ce qu’elle a caractérisé la faute de la SA Cofidis ;

• débouter la SA Cofidis de l’ensemble de ses demandes ;

• condamner Mme X ou la SA Cofidis à payer à la société GEF Negoces la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

• condamner l’un ou l’autre aux entiers dépens d’appel et de première instance.

L’affaire a été plaidée à l’audience du 4 juin 2020. A l’issue de l’audience, la cour a communiqué aux conseil des parties un arrêt rendu dans un litige similaire et leur a adressé la note en délibéré suivante :

« La cour met aux débats le caractère de plein droit attaché à la restitution de la chose et du prix par suite du prononcé de la nullité et de la résolution de la vente au vu de la jurisprudence constante de la cour de cassation selon laquelle la restitution de la chose et du prix est une conséquence légale de la résolution du contrat ou de son annulation. La cour de cassation considère ainsi de manière constante que le fait que le juge n’ordonne pas les restitutions n’est pas de nature à affecter les droits des parties dès lors que de telles restitutions sont virtuellement comprises dans la décision d’annulation ou de résolution du contrat (1re Civ., 12 février 1975,pourvoi no 73-10.960), jurisprudence appliquée par la première chambre civile à des contrats de vente et pose de panneaux photovoltaiques ( par exemple 1re Civ., 6 février 2019, pourvoi n° 17-25.859). La cour de cassation a jugé également que si le juge n’est pas tenu d’ordonner la restitution du prix lorsqu’elle n’est pas demandée, il ne statue pas ultra petita lorsqu’il l’ordonne ni ne viole le principe de la contradiction s’il ne soumet pas ce point aux débats puisqu’il s’agit d’une conséquence légale ( Cour de cassation, Chambre civile 3, 12 avril 2018, 17-15.569 ).La cour autorise les parties à produire une note en délibéré sur ce point jusqu’au 25 juin 2020. »

La SA Cofidis, la société GEF Negoces, et Mme X ont communiqué une note en délibéré respectivement les 8 juin, 15 juin et 24 juin 2020. La SA Cofidis indique que selon la jurisprudence de la cour de cassation, l’annulation du contrat de crédit en conséquence du contrat principal emporte l’obligation par l’emprunteur de rembourser le capital emprunté et ce indépendamment du fait que les fonds ont été adressés initialement au vendeur. La société GEF Negoces soutient que la cour ne saurait ordonner à son encontre la restitution du prix alors même qu’une telle demande n’est pas formée par Mme X sans se substituer aux parties, que la demande de reprise du matériel et de remise en état formée par cette dernière pour la première fois en appel est irrespirable comme nouvelle, et qu’en tout état de cause la restitution du prix n’est pas possible s’agissant d’un louage d’ouvrage. Mme X conclut qu’elle n’entend pas solliciter la restitution du prix à l’égard de l’entrepreneur mais qu’elle ne fait valoir sa créance pécuniaire qu’à l’encontre de la banque dans la mesure où il s’agit d’une relation triangulaire, que « l’argent de la commande a été directement versé par le prêteur sans transiter ».

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures des parties pour l’exposé des moyens.

MOTIVATION

Sur la validité du contrat principal

A titre liminaire, il y a lieu de préciser qu’il sera fait application des dispositions du code de la consommation dans leur version issue de la loi n° 93-949 du 27 juillet 1993 applicable au cas d’espèce.

En vertu de l’article L. 121-23 du code de la consommation, dans sa version issue de la loi n° 93-949 du 27 juillet 1993 applicable au cas d’espèce, les opérations de démarchage doivent faire l’objet d’un contrat don’t un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter notamment, à peine de nullité, le nom du démarcheur, la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés, les conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens ou d’exécution de la prestation de services ainsi que la mention du prix global à payer et des modalités de paiement. Doit encore à être mentionné la faculté de renonciation prévue à l’article L. 121-25 du même code, ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du code de la consommation.

L’article L. 121-24 du code de la consommation précise que l’exemplaire du contrat laissé au client doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice la faculté de renonciation prévue à l’article L. 121-25, laquelle doit être rappelée avec cette mention : « Si vous annulez votre commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable ci-contre ». Le formulaire détachable doit contenir les mentions décrites aux articles R. 121-3 à R. 121-6 du code de la consommation et doit pouvoir en être facilement séparé.

Sur ce

En l’espèce, le bon de commande litigieux porte sur la fourniture et l’installation d’un « kit

photovoltaïque 1,5 kwc Domu Solar » avec une « intégration au bâti avec écran sous toiture », un « ondulateur garanti 20 ans », la constitution d’un avant-projet ainsi que la pose et la mise en service de l’installation avec un test d’étanchéité, un contrat d’accompagnement de contrôle de l’installation et d’assistance, le tout pour un prix global de 13 500 euros avec une TVA à 5,5 %. Il est spécifié que prix du matériel est de 11 390 euros et celui de la pose et de la mise en service de l’installation de 2 110 euros. Il est indiqué que ce prix est hors frais de raccordement au réseau ERDF et que cette prestation sera prise en charge à hauteur de 1 000 euros. Concernant les modalités d’exécution du contrat, il est prévu une date de visite technique le 19 décembre 2011 et un délai maximum de livraison au 19 mai 2012.

Le tribunal a retenu que ce bon de commande n’était pas conforme à ces dispositions légales en ce qu’il ne précise par la composition du kit photovoltaïque, c’est-à-dire le nombre de panneaux photovoltaïques commandés, ne distingue pas le prix de chaque matériau, ni celui des matériaux et celui de la main-d''uvre et ne précise pas les modalités et la durée des travaux.

Or, il résulte de l’examen du bon de commande que celui-ci distingue bien le prix du matériel du prix de pose et de mise en service de l’installation hors frais de raccordement.

L’article 121-23 du code de la consommation, dans sa version issue de la loi n° 93-949 du 27 juillet 1993 qui exige la mention d’un prix global n’emporte pas obligation de mentionner le prix détaillé de chaque matériau, il apparaît que la mention du prix global exigé par cet article est satisfaite.

Concernant les modalités d’exécution du contrat, les mentions relatives à la date de la visite technique et au délai maximum sont suffisantes au regard des prescriptions du code de la consommation. Le lieu de livraison est bien précisé puisque l’adresse de livraison désigne le domicile de Mme Y.

Le bon de commande comprend bien un formulaire détachable conforme aux stipulations du code de la consommation.

En revanche, c’est à raison que le tribunal a considéré que la désignation de la nature et des caractéristiques des biens offerts était insuffisamment précise. En effet, si le bon de commande indique la puissance et la marque de l’installation ' contrairement à ce que soutient l’intimée ' il ne précise pas le nombre de panneaux photovoltaïques mais se contente d’évoquer un « kit », ce qui désigne dans le langage courant un ensemble de pièces d’un objet à assembler. La cour observe que l’article 4 des conditions générales impose à l’acheteur de s’assurer au moment de la livraison des produits de la conformité de ceux-ci avec la commande, et « si les produits livrés ne sont pas conformes en nature ou en quantité aux spécifications indiquées sur le bon de livraison joint à l’envoi » de formuler des réserves. Les spécifications relatives à la quantité des produits livrés constituent une caractéristique des biens commandés qui ne doit pas figurer seulement sur le bon de livraison comme le prévoit ces conditions générales mais aussi sur le bon de commande.

En effet, si le texte précité du code de la consommation n’exige pas, contrairement à ce que soutient l’intimée, que soient précisés le poids, la dimension, la puissance unitaire et le prix de chaque panneau, il apparaît que la seule référence à un « kit » correspond à une description trop générale et sommaire ne permettant pas de déterminer la quantité du matériel livré.

Il s’ensuit que le contrat principal n’est pas conforme aux exigences de formalisme prévu par le code de la consommation à peine de nullité, sans qu’il y ait lieu comme le soutient la banque de caractériser que cet élément était déterminant du consentement du consommateur.

Sur la confirmation de la nullité alléguée par le prêteur

Si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et

qui a pour finalité la protection des intérêts de l’acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l’article 1338 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 que la confirmation tacite d’un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l’affectant et qu’il ait eu l’intention de le réparer.

Sur ce

En l’espèce, les conditions générales figurant au verso sur le bon de commande reproduisent intégralement les dispositions des articles L 121 à L 121-6 du code de la consommation de manière lisible et compréhensible et Mme Y a fait précéder sa signature d’une mention par laquelle elle déclare avoir pris connaissance des conditions générales figurant au verso de ce document.

Par ailleurs, l’article 4 précité des conditions générales attire l’attention du consommateur sur la nécessité de vérifier la conformité des spécifications indiquées sur le bon de livraison relativement à la quantité des produits livrés. C’est donc en toute connaissance de cause de l’absence de précision de la quantité de la marchandise livrée et de ce que cette description sommaire pouvait être une cause de nullité du bon de commande qu’elle a accepté la livraison des marchandises14 mars 2012.

Or, Mme Y, qui produit la facture éditée le 29 mars 2012 par la société Gef Négoces, qui contient une description précise du kit solaire comme comprenant « 6 modules photovoltaïques et un ondulateur » n’a pas alors excipé de l’imprécision du bon de commande sur le nombre de panneaux, ni allégué d’une discordance entre cette facture et le nombre de panneaux effectivement livrés, alors qu’elle ne pouvait ignorer au regard de cette facture détaillée que le nombre de panneaux n’avait pas été indiqué sur le bon de commande et que cette imprécision n’était pas conforme aux dispositions du code de la consommation don’t elle avait eu pleinement connaissance. Par ailleurs, Mme Y s’est acquittée des mensualités du crédit affecté, et si elle allègue d’un manque de rentabilité de l’installation, elle ne conteste pas qu’elle fonctionne.

Ce n’est que par mise en demeure du 23 septembre 2016 adressée à la banque, soit après plus de quatre années après l’exécution du contrat de livraison et de pose de l’installation photovoltaïque et alors que le contrat de financement était en cours d’exécution, que son conseil a excipé de la nullité du bon de commande, en termes généraux, et sans se prévaloir spécifiquement de l’absence de mention du nombre de panneaux photovoltaïques. En revanche, la mise en demeure du 23 septembre 2016 adressée à la société Gef Négoces ne mentionne aucune non-conformité du bon de commande mais seulement des « malfaçons avérées » et « l’absence d’auto-financent des installations ».

Au vu de ces éléments, il apparaît que Mme Y a eu pleinement connaissance du vice affectant le bon de commande, c’est-à-dire son caractère sommaire eu égard à l’absence d’indication du nombre de panneaux photovoltaïques installés, mais qu’elle a entendu confirmer tacitement ce vice en exécutant le contrat de crédit affecté et en bénéficiant de l’énergie générée par l’installation pendant plus de quatre années sans alléguer de la moindre difficulté.

Le jugement déféré sera infirmé en qu’il a prononcé l’annulation du contrat principal. La cour, statuant à nouveau de ce chef, rejettera la demande d’annulation du contrat principal fondée sur la conformité du bon de commande.

Sur la nullité demandée par l’intimée pour dol

L’article 1109 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, énonce qu’il n’y a point de consentement valable, si le consentement n’a été donné que par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol.

L’article 1116 du même code dispose : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man’uvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces man’uvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé. »

Sur ce

En l’espèce, Mme Y qui reproche à la société Gef Négoces de lui avoir sciemment menti en s’engageant à un autofinancement de la centrale photovoltaïque ne vise ni ne produit la moindre pièce aux soutient de ses allégations. Elle ne justifie aucunement de l’existence d’un engagement du vendeur quant à la quantité d’énergie électrique devant être produite par l’installation vendue et, par suite, quant aux recettes attendues par les clients.

Elle n’apporte ainsi aucune preuve des man’uvres alléguées et ne peut qu’être déboutée de sa demande de nullité fondée sur le dol.

Sur la résolution judiciaire du contrat principal

Conformément aux dispositions de l’article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l’une des deux parties ne satisfait pas à son engagement. Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible ou d’en demander en justice la résolution avec des dommages et intérêts.

Aux fins de déterminer les obligations à la charge des parties, il convient au préalable de qualifier le contrat. A ce titre, il importe de relever que la société Gef Négoces n’a pas seulement la qualité de venderesse mais qu’elle a procédé elle-même à l’installation du matériel. Il en résulte que le contrat liant les parties est un contrat d’entreprise au sens de l’article 1787 du code civil et que la société Gef Négoce avait l’obligation de résultat de livrer une installation exempte de vices.

Sur ce

En l’espèce, il est établi que les travaux de pose du kit photovoltaïque ont été exécutés, que l’installation a été raccordée, qu’elle fonctionne et génère même des bénéfices.

Pour solliciter la résolution judiciaire du contrat, Mme Y reproche à la société Gef Négoces :

• de lui avoir livré une centrale photovoltaïque qui ne permet pas un autofinancement ;

• de ne pas lui avoir remis une « attestation sur l’honneur » permettant d’obtenir le contrat de rachat avec EDF la contraignant à recourir à une société tierce pour la remise de ce document ;

• d’avoir procédé à une pose des panneaux « irrégulière » et non respectueuse des règles en matière d’intégration du bâti de sorte qu’en cas de contrôle réel par EDF OA, elle risque de voir son contrat rompu.

Au mépris des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, Mme Y ne vise aucune pièce au soutien de ce moyen tiré d’une inexécution contractuelle, et produit une seule pièce susceptible de se rattacher à sa demande de résolution, à savoir sa pièce 12 intitulée « rapport d’audit de la centrale photovoltaïque » établi à la demande de l’intimée par une société dénommée « Hydro Alsace » qui conclut en ces termes : « La pose des panneaux photovoltaïques ne respecte pas la règle d’intégration au bâti comme précisé dans le décret ministériel du 4 mars 2011. En cas de contrôle par EDF AOA, Mme X A son contrat rompu avec remboursement des sommes préalablement reçues. L’installateur a par ailleurs dû attester de l’intégration totale pour que Mme X puisse bénéficier du tarif obligation d’achat. L’ondulateur peut recevoir jusqu’à 2 650 W photovoltaïque or

seulement 1 500 ont été branchés. Ce sur-dimensionnement peut induire des pertes de production par démarrage tardif le matin et arrêt prématuré en fin de journée ».

Force est de constater que ce document établi de manière unilatérale à la demande de Mme Y qui n’est corroboré par aucune autre pièce ne permet aucunement d’établir à lui seul la non-conformité alléguée et encore moins une gravité suffisante de l’inexécution alléguée pour justifier une résolution judiciaire.

Par ailleurs, comme cela a été développé supra, Mme Y échoue à établir l’existence d’un engagement de la société Gef Négoces relatif à un autofinancement de la centrale, de sorte l’insuffisance de rentabilité alléguée ne saurait caractériser une inexécution contractuelle du contrat de livraison et de pose des panneaux photovoltaïques. Elle ne prouve pas plus que la société Gef Négoces n’aurait pas accompli les démarches administratives nécessaires au raccordement et au rachat de l’énergie par EDF OA.

Au contraire, elle produit des factures de rachat par EDF OA dont il ressort que la production d’électricité générée par la centrale photovoltaïque a été rachetée par EDF OA à hauteur de :

• 366,98 euros pour la période du mois d’octobre 2012 à octobre 2013 pour une production livrée de 903 kWh,

• 499,98 euros pour la période du mois d’octobre 2013 à octobre 2014 pour une production livrée de 1226 kWh,

• 569,83 euros pour la période du mois d’octobre 2014 à octobre 2015 pour une production livrée de 1394 kWh,

• 519,74 euros pour la période du mois d’octobre 2015 à octobre 2016 pour une production livrée de 1269 kWh,

• 596,23 euros pour la période du mois d’octobre 2016 à octobre 2017 pour une production livrée de 1455 kWh,

• 533,06 euros pour la période du mois d’octobre 2017 à octobre 2018 pour une production livrée de 1301 kWh.

Au vu de ces éléments, Mme Y échoue à établir l’existence d’un manquement contractuel suffisamment grave pour justifier une résolution du contrat principal.

Mme Y sera donc déboutée de sa demande de résolution judiciaire.

Sur la demande de nullité du contrat de crédit

Le tribunal a constaté l’annulation de plein droit du contrat de crédit affecté à la suite de l’annulation du contrat principal.

Le contrat de vente n’étant pas annulé, le jugement ne peut qu’être réformé sur ce point ; le contrat de prêt ne faisant l’objet d’aucun débat quant à sa régularité formelle.

Sur la demande de résolution du contrat de crédit

La demande de résolution du contrat de crédit n’est formée par Mme Y que comme étant une conséquence de sa demande de résolution du contrat principal, laquelle a été rejetée. Par ailleurs, les fautes qu’elle reproche à la banque ne sont alléguées qu’au soutien de sa demande tendant à voir la banque privée de sa créance de restitution et non au soutien d’une demande de résolution judiciaire du contrat de crédit autonome de la résolution du contrat principal.

En conséquence, il y a lieu de débouter Mme Y de sa demande de résolution du contrat de crédit

affecté.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l’équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l’autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il y a lieu d’infirmer la décision déférée du chef des dépens et des frais irrépétibles, et statuant à nouveau, de condamner Mme Y au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel et à payer, au titre des frais non compris dans les dépens de première instance et d’appel, la somme de 1 000 euros à la société Gef Négoces et celle de 500 euros à la société Cofidis.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré en l’ensemble de ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

Déboute Mme Y épouse X de sa demande d’annulation du contrat principal conclu le 21 novembre 2011 avec la société GEF Negoces exerçant sous l’enseigne « Domuneo » ;

Déboute Mme Y épouse X de sa demande d’annulation du contrat de crédit affecté conclu le 21 novembre 2011 avec la société Sofemo ;

Déboute Mme Y épouse X de sa demande de résolution judiciaire du contrat principal conclu le 21 novembre 2011 avec la société GEF Negoces exerçant sous l’enseigne « Domuneo » ;

Déboute Mme Y épouse X de sa demande de de résolution judiciaire du contrat de crédit affecté conclu le 21 novembre 2011 avec la société Sofemo ;

Condamne Mme Y épouse X à payer à la société Gef Négoces la somme de 1 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens de première instance et d’appel ;

Condamne Mme Y épouse X à payer à la société Gef Négoces la somme de 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens de première instance et d’appel ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes non-présentement satisfaites ;

Condamne Mme Y épouse X au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel.

Le greffier, Le président,

B C. D-E F.

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Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 10 septembre 2020, n° 18/06391