Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 12 mars 2020, n° 18/05277

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Chronologie de l’affaire

Commentaires2

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Charles-édouard Bucher · L'ESSENTIEL Droit de la distribution et de la concurrence · 1er juillet 2020
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Sur la décision

Référence :
CA Douai, ch. 2 sect. 2, 12 mars 2020, n° 18/05277
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 18/05277
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Dunkerque, 29 juillet 2018, N° 2016J103
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 12/03/2020

****

N° de MINUTE :20/

N° RG 18/05277 – N° Portalis DBVT-V-B7C-R3OM

Jugement (N° 2016J103) rendu le 30 juillet 2018 par le tribunal de commerce de Dunkerque

APPELANTS

M. [O] [R] (présent)

né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 4]), de nationalité française

Et

Mme [G] [W] épouse [R] (présente)

née le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 4]), de nationalité française

demeurant ensemble [Adresse 2]

représentés par Me François Deleforge, avocat au barreau de Douai

assistés de Me Didier Cattoir, substitué à l’audience par Me Fatima Ait Bamar, avocat au barreau de Dunkerque

INTIMÉE

SARL Duymes’Motors prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social

ayant son siège social [Adresse 7]

représentée et assistée par Me Antoine Bruffaerts, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l’audience publique du 19 novembre 2019 tenue par Laurent Bedouet magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Valérie Roelofs

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Laurent Bedouet, président de chambre

Nadia Cordier, conseiller

Agnès Fallenot, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 mars 2020 après prorogation du délibéré initialement prévu le 30 janvier 2020 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Laurent Bedouet, président et Stéphanie Hurtrel, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 15 octobre 2019

****

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [R] a exploité pendant plusieurs années un fonds de commerce de réparation, de transformation et de revente de cycles et motocyclettes sur la commune de [Localité 4] (59).

Il était notamment spécialiste de la transformation de motos en tricycle à moteur ('trike').

Dans le cadre de cette activité, il commercialisait notamment des kits fabriqués par la société EML W TEC située à [Localité 6], aux Pays Bas, en vue de la transformation des motos en trike.

Par acte authentique du 25 juillet 2011, établi devant Maître [Y], notaire à [Localité 5], M. et Mme [R] ont cédé à la société Duyme’s Motors le dit fonds de commerce, moyennant un prix global de cession de 358 878,64 euros.

Une clause de non concurrence d’une durée de 7 ans a été incluse dans cet acte.

Considérant avoir été victime de manoeuvres dolosives et de violations répétées de la clause de non concurrence de la part des cédants, la société Duyme’s Motors a assigné M. et Mme [R] devant le tribunal de commerce de Dunkerque aux fins, selon ses dernières écritures, de les voir condamnés à lui payer, les sommes de 88.988,00 euros au titre du dol et de 106 500,00 euros au titre de la clause de non concurrence, et qu’il leur soit fait injonction de cesser toute activité contrevenante à la dite clause.

Par jugement contradictoire du 30 juillet 2018, le tribunal de commerce de Dunkerque a :

— condamné les époux [R]-[W] à payer à la S.A.R.L. DUYME’S MOTORS la somme de Quatre Vingt Huit Mille Neuf Cent Quatre Vingt Huit Euros (88.988 euros) en dédommagement du dol commis lors de la cession, en date du 25 juillet 2011, de tous droits attachés aux documents permettant la transformation de motos avec des kits de marque « EML » et « W-TEC », celle de Cinquante Mille Euros (50.000 euros) en réparation des violations de la clause restrictive de concurrence jusqu’au 14 mai 2018, date de clôture des débats, et celle de Mille Cinq Cents Euros (1.500 euros) pour indemnité procédurale,

— enjoint en tant que de besoin aux époux [R]-[W] de cesser jusqu’à l’expiration du délai convenu, soit jusqu’au 25 juillet 2018, toute activité contraire à la clause restrictive de concurrence stipulée dans l’acte susvisé du 25 juillet 2011,

— fixé à la somme de Mille Euros (1.000 euros) le montant de l’indemnité qui sera due par eux à la S.A.R.L. DUYME’S MOTORS au cas de nouvelle violation de cette clause sur la période du 14 mai 2018 (date de clôture des débats) au 25 juillet 2018 (date de fin du délai convenu de sept ans),

— vu la nature du litige et l’injonction ci-avant disposée, prononcé l’exécution provisoire du jugement,

— condamné les époux [R]-[W] aux dépens, dont frais de greffe liquidés pour débours et formalités sur la présente décision à la somme de 99,31 euros TTC.

Suivant déclaration du 21 septembre 2018, M. [O] [R] et Mme [G] [W] ép. [R] ont relevé appel total de ce jugement.

Aux termes de leurs conclusions notifiées par voie électronique le 15 octobre 2019, ils demandent à la cour de :

Vu les articles 1134 et suivants du code civil ;

Vu les articles 1116, 1138, 1139, 1231-5 du Code Civil,

Vu les articles 9 et 700 du code de procédure civile,

Vu le jugement querellé,

Vu les pièces produites aux débats,

— INFIRMER le jugement du Tribunal de Commerce de DUNKERQUE en toutes ses dispositions en ce qu’il a :

« Condamné les époux [R]-[W] à payer à la SARL DUYME’S MOTORS la somme de Quatre Vingt Huit Mille Neuf Cent Quatre Vingt Huit Euros (88.988 €) en dédommagement du dol commis lors de la cession en date du 25/07/2011 de tous droits attachés aux documents permettant la transformation de motos avec des kits de marque « EML » et « W-TEC », celle de Cinquante Mille Euros (50.000 €) en rparation des violations de la clause restrictive de concurrence jusqu’au 14/05/2018, date de clôture des débats, et celle de Mille Cinq Cents Euros (1.500 €) pour indemnité procédurale,

Enjoint en tant que de besoin aux époux [R]-[W] de cesser jusqu’à l’expiration du délai convenu, soit jusqu’au 25/07/2018, toute activité contraire à la clause restrictive de concurrence stipulée dans l’acte susvisé du 25/07/2011,

Fixé la somme de Mille Euros (1.000 €) le montant de l’indemnit qui sera due par eux à la SARL DUYME’S MOTORS au cas de nouvelle violation de cette clause sur la période du 14/05/2018 (date de clôture des débats) au 25/07/2018 (date de fin du délai convenu de sept ans),

Vu la nature du litige et l’injonction ci-avant exposée, prononcé l’exécution provisoire du présent Jugement,

Condamné les époux [R]-[W] aux dépens, dont frais de greffe liquidés pour débours et formalités sur la présente décision à la somme de 99,31 € TTC (=tarifs 05-2016 n18, n°19, n°22, n°20 x 3) »,

En conséquence, statuant de nouveau,

— DEBOUTER la SARL DUYME’S MOTORS de ses demandes, fins et conclusions,

— DIRE ET JUGER que l’acte de cession de fonds de commerce conclu le 25 juillet 2011 n’est entaché d’aucun vice du consentement,

— DEBOUTER la SARL DUYME’S MOTORS de sa demande de condamnation pécuniaire sur le fondement de l’article 1137 du Code Civil,

— CONSTATER la nullité de la clause de non concurrence stipulée dans l’acte de cession de fonds de commerce du 25 juillet 2011,

— DEBOUTER la SARL DUYME’S MOTORS de sa demande de condamnation pécuniaire sur le fondement de l’article 1103 et 1104 du Code Civil,

Subsidiairement,

— CONSTATER l’absence de tout préjudice lié à la prétendue violation de ladite clause, et modérer, en application de l’article 1231-5 du Code Civil, le montant des dommages et intérêts réclamés au titre de la clause de non concurrence à la somme de 2.000 euros,

En tout état de cause,

— Condamner la SARL DUYME’S MOTORS à verser la somme de 4.000,00 euros Monsieur et Madame [R] au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— Condamner la SARL DUYME’S MOTORS aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 5 octobre 2019, la SARL Duyme’s Motors demande à la cour de :

— confirmer le Jugement du Tribunal de commerce de DUNKERQUE en toutes ses dispositions,

— condamner les époux [R] à payer à la société DUYME’S MOTORS la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— les condamner aux entiers frais et dépens de la procédure.

SUR CE, LA COUR

Sur le dol

Il résulte des article 1110, 1116 et 1117 du code civil dans sa version applicable à la cession du 25 juillet 2011,que le dol peut donner lieu à nullité du contrat ou à indemnisation lorsque les manoeuvres pratiquées par une des parties sont telles, qu’il est évident que sans ces manoeuvres l’autre partie n’aurait pas contracté.

***

La société Duyme’s Motors soutient que le dol est constitué par le fait que les vendeurs n’ont pas précisé au moment de la vente qu’ils ne détenaient pas les droits nécessaires aux transformations des véhicules.

Elle ajoute que M. [R] ne lui a en effet jamais précisé qu’il ne bénéficiait d’aucun agrément pour effectuer les transformations des véhicules Harley Davidson de type Sportser en trike de sorte que lorsqu’un de ses clients souhaite transformer ce type de véhicule, elle ne peut pas en assurer elle même le montage qui doit être effectué exclusivement dans les ateliers de la société EML W TEC aux Pays-Bas.

Elle ajoute encore que M. [R] s’est présenté à elle comme étant l’importateur exclusif de la société EML W TEC de kits de transformation en trike de motos de la marque Harley Havidson de type Sportser.

Elle fait observer que dans l’acte de cession, les vendeurs ont pourtant cédé, la propriété et tous droits attachés aux documents, dossiers et procès verbaux d’homologation à l’UTAC concernant les trike et side-car transformés avec les kits de la marque EML et W -TEC suivants (…), et qu’en outre, en annexe du dit acte de cession, M. [R] a attesté céder à la société Duyme’s Motors, 'l’autorisation exclusive d’utiliser les procès verbaux d’homologation suivants, au nom de [R], [R]-EML, EML [R], [R] Motos, EML sides cars et/ou Trikes France (…)' pour modification en trike des motos neuves Harley Davidson de type Sportser ayant une réception européenne n° e24*2002/24*0084*00 validée par W Tec EML Holland.'

M. et Mme [R] contestent toute manipulation ou réticence dolosive à l’égard de la SARL Duyme’sMotors, qui est un professionnel averti du commerce et de la réparation de motocyclettes.

Ils soulignent pour l’essentiel que l’interprétation qui est faite par la dite société de l’acte de cession du fonds de commerce et de la déclaration qui y est annexé est erronée, que cette dernière tente de créer volontairement une confusion à propos de la vente des kits de transformation, de leur montage, et de l’utilisation du procès-verbal de réception européenne des dits kits.

Ils ajoutent :

— qu’il résulte de l’acte de cession que les vendeurs ont cédé la propriété des droits attachés aux procès-verbaux d’homologation que M. [R] avait lui-même réalisés auprès de l’UTAC,

— que l’acte de cession ne garantissait aucunement le transfert d’une activité exclusive de montage des kits de transformation en trike des motos Harley Davidson de type Sporster,

— que la SARL Duyme’s Motors était parfaitement informée des conditions particulières du partenariat existant entre le vendeur et la société W-TEC EML Holland.

***

La page 2 de l’acte notarié de cession de fonds de commerce fait apparaître que ladite cession porte sur un 'fonds de commerce de REPARATION ET VENTE DE CYCLES, MOTOCYCLES ET ACCESSOIRES NEUFS ET D’OCCASION ET DE CONSTRUCTION ET DE COMMERCIALISATION DE TRIKES ET SIDE-CARS (…)'.

Il est par ailleurs indiqué en page 3 de l’acte que sont transmis à la société cessionnaire 'la propriété de tous droits attachés aux documents, dossiers et procès-verbaux d’homologation à l’UTAC concernant les Trikes et Side Car transformés avec les kits de marque 3EML’ et W TEC’suivants :

— pour modification des motos Honda GL 1500 Goldwing type SC 22B de 1997 à 2001 devenant type THE002 et SC 22B-MOD,

— pour modification des motos Honda GL 1800 Goldwing type SC47 à partie de 2001 devenant type Westel,

— pour modificiation des motos Harley-Davidson 1450 cc Type FLH de 2000 à 2006 devenant type Lebuwes,

(…)

— pour modification en trike des motos neuves Harley-Davidson de type Sporster ayant une récéption européenne n° e24*2002/24*0084*00 par W TEC EML Holland.

Il est ultérieurement précisé sur cette page que ces procès verbaux sont au nom de [O] [R], [R], [R], [R] Motos, EML [R], Westerlynck EML, EML sides cars et EML Trikes France (…)' , référence étant faite à la liste annexée à l’acte de cession mentionnée plus haut.

Les parties s’accordent sur le fait que la cession des procès verbaux d’homologation permet au cessionnaire du fonds de commerce, d’effectuer les transformations de motos en trike, par type de motos concernées, visées aux dits procès-verbaux, tels que mentionnés dans l’acte de cession et dans la déclaration annexe.

Le présent litige porte sur l’homologation des motos neuves Harley-Davidson de type Sporster dès lors que la société EML W TEC, a, le 24 novembre 2014, adressé un courrier rédigé en anglais, à la société Duyme’s Motors (dont le sens n’est pas contesté par les parties), pour rappeler à cette dernière qu’elle était seule propriétaire de la réception européenne n°e24*2002/24*0084*00 et que tous les types de véhicules approuvés par elle n’étaient pas transformables ou ne pouvaient être vendus à d’autres.

La mention relative aux motos neuves Harley Davison de type Sporster qui figure dans l’acte de cession est effectivement rédigée de manière différente de celles relatives aux autres motos puisque celle ci contient explicitement, et contrairement aux autres modèles, une précision relative à 'la modification en trike des motos neuves’ et qu’il est indiqué s’agissant de l’acte de cession, et contrairement aux autres modèles, qu’il s’agit de motos 'ayant une réception européenne n° e24*2002/24*0084*00 par W-TEC EMI Holland'.

La déclaration annexée à la cession indique pour sa part qu’il s’agir de la 'modification en Trike des motos neuves HARLEY-DAVIDSON de Type Sporster ayant une réception européeenne n°e24*2002/24*0084*00 validée par X -TEC EML Holland.'

Si la rédaction de ces stipulations, quoiqu’établies devant notaire, peuvent susciter des interrogations quant à l’étendue et la portée des droits cédés et des conséquences que cela induit quant aux obligations du cessionnaire, il convient néanmoins d’observer :

— qu’il n’est pas contesté que la société Duyme’s Motors est, elle aussi, un professionnel de la commercialisation des motos et de leur transformation,

— que figure en page 21 de l’acte de cession, sous la rubrique 'déclarations obligatoires,' les mentions selon lesquelles 'le cessionnaire déclare s’être, par ses investigations personnelles, informé et rendu compte des potentialités du fonds vendu,' ; 'le cessionnaire déclare (…) Être parfaitement éclairé sur le type et les caractéristiques du fonds ainsi que sur les méthodes commerciales appliquées par le cédant',

— que les parties s’accordent sur le fait qu’au mois de mai 2011, M. [R] a organisé avec le gérant de la société Duyme’s Motors , un déplacement dans les usines de la société W TEC, aux Pays Bas, au cours duquel il a pu rencontrer le dirigeant de cette dernière.

Bien qu’ayant affirmé, en sa qualité de professionnelle du secteur, avoir pleinement pris la mesure et de l’étendue de ses engagements contractuels, la société Duyme’s Motors, pouvait toujours, le cas échéant, et avant la signature de l’acte de cession, obtenir des cédants, les éclaircissements qu’elle souhaitait, particulièrement sur la transformation des motos Harley-Davidson de type Sporster, ce qu’elle aurait notamment pu faire à l’occasion du déplacement aux Pays Bas dans les locaux de la société W TEC, en présence de son dirigeant et de M. [R], celle-ci ne pouvant sérieusement invoquer dans ses écritures, sur ce point, la barrière de la langue.

Il résulte de tout ce qui précède qu’aucune manoeuvre dolosive ayant déterminée le consentement de la société Duyme’s Motors n’est établie.

Il s’ensuit que celle-ci sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts de ce chef

Sur la clause de non concurrence

Figure en page 19 de l’acte de cession, la stipulation suivante:

'Engagement de non-concurrence

A titre de condition essentielle et déterminante sans laquelle le CESSIONNAIRE n’aurait pas contracté, le CEDANT s’interdit expressément la faculté:

— de créer, acquérir, exploiter, prendre à bail ou faire valoir, directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit, aucun fonds similaire en tout ou partie à celui présentement cédé,

— de s’intéresser directement ou indirectement ou par personne interposée, et même en tant qu’associé ou actionnaire de droit ou de fait, même a titre de simple commanditaire ou de gérant, dirigeant social, salarié ou préposé, fut-ce à titre accessoire, à une activité concurrente ou similaire en tout ou partie à celle exercée par lui dans le fonds présentement cédé.

Cette interdiction s’exerce à compter du jour de l’entrée en jouissance sur la France entière et ce pendant 7 ans.

En ca d’infraction le CEDANT sera de plein droit redevable d’une indemnité forfaitaire de 300 euros par jour de contravention ; le cessionnaire se réservant en outre le droit de demander à la juridiction compétente d’ordonner la cessation immédiate de la dite infraction.'

La société Duyme’s Motors fait valoir que M. [R] a, pendant la période de janvier 2013 à juillet 2015, fait paraître une multitude d’annonces sur le site 'Le Bon Coin’ pour vendre des motos et accessoires de motos, et qu’il a acheté des motos à des grossistes belges ou hollandais puis les a revendu après réparation.

Elle ajoute que les motos et le matériel vendus étaient réparés chez lui, au profit d’acquéreurs situés sur la France entière, et qu’il a perçu au titre de ces ventes, la somme de 102 237,50 euros.

Elle considère que ces ventes constituent une activité concurrente à celle du fonds de commerce qui lui a été cédé de sorte que la violation de la clause de non concurrence est parfaitement établie.

Les époux [R] font valoir que la société Duyme’s Motors ne peut se prévaloir de cette clause dès lors qu’elle est nulle puisqu’elle empêche purement et simplement

M. [R] d’exercer une activité commerciale dans son domaine d’activité.

Pour être valide, une clause de non concurrence doit être limitée dans le temps et dans l’espace.

Elle doit en outre être justifiée par la légitime protection des intérêts du créancier, et ne pas être disproportionnée dans son objet.

En ce qu’elle constitue une limitation de la liberté du commerce et de l’industrie, elle doit être interprétée restrictivement.

En l’espèce l’obligation de non concurrence de M [R] stipulée, recouvre l’ensemble de l’activité commerciale concernée par la cession du fonds de commerce.

Elle est d’une durée de 7 ans et s’applique sur l’ensemble du territoire national.

Elle apparaît dès lors, au regard de sa durée et de son étendue, comme injustifiée pour la sauvegarde des intérêts de la société cessionnaire, cette dernière faisant valoir de manière inopérante que l’interdiction d’exercer sur l’ensemble du territoire n’empêche pas

M. [R] d’exercer son activité en Belgique, alors que le fait de lui imposer de transférer son activité commerciale dans un autre pays que la France, fut il frontalier et proche, constitue une atteinte disproportionnée à la protection de ses intérêts légitimes.

Ladite clause de non concurrence est en conséquence nulle, la société Duyme’s Motors qui ne peut dès lors s’en prévaloir doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts ainsi que de sa demande tendant à ce que soit enjoint aux époux [R] de cesser toute activité contraire à ladite clause.

***

Il résulte de tout ce qui précède que le jugement doit être infirmé en toutes ses dispositions.

Le sens de l’arrêt conduit à dire que la société Duyme’s Motors sera condamnée à payer aux époux [R] la somme de 4 000,00 euros aux titres des frais irrépétibles de première instance et d’appel et qu’elle sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Dit que la cession de fonds de commerce conclue entre M. et Mme [R] et la société Duyme’s Motors n’est entachée d’aucun vice du consentement ;

Dit que la clause de non-concurrence qui y est stipulée est nulle ;

En conséquence,

Déboute la société Duyme’s Motors de toutes ses demandes ;

La condamne à payer à M. et Mme [R] la somme de 4 000,00 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel ;

La condamne aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffierLe président

Stéphanie HurtrelLaurent Bedouet

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