Cour d'appel de Lyon, n° 12/06005

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, n° 12/06005
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 12/06005

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 12/06005

Y

C/

XXX

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

CPH de GRASSE

du 27 janvier 2010

RG n°F09/00753

Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE

du 28 mars 2011

n°2011/402

Cour de Cassation de PARIS

du 05 Juin 2012

RG : K.11.18660

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 22 FEVRIER 2013

APPELANT :

X Y

XXX

XXX

représenté par Me VININSKY avocat au barreau de PARIS substitué par Me SUBREVILLE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

XXX

XXX

XXX

représentée par Me PETREL, avocat au barreau de LYON substitué par Me Jonathan AZERAD, avocat au barreau de LYON

PARTIES CONVOQUÉES LE : 21 Septembre 2012

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Janvier 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Nicole BURKEL, Président de chambre

Michèle JAILLET, Conseiller

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 Février 2013, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Attendu que monsieur Y a été engagé par la société SFMI MICROMANIA, suivant contrat à durée indéterminée du 1er avril 2002, en qualité de directeur administratif et financier à compter du 4 février 2002 ;

Attendu que monsieur Y a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 21 janvier 2008, par lettre remise en main propre contre décharge du 10 janvier 2008 et mis à pied à titre conservatoire;

Qu’il a été licencié par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 janvier 2008 pour faute grave ;

Attendu que le conseil de prud’hommes de Grasse, section encadrement, par jugement contradictoire du 27 janvier 2010, a :

— dit que le licenciement de monsieur X Y repose sur une faute grave

— condamné la société Micromania à verser à monsieur Y la somme de 40000 euros à titre de dommages intérêts pour respect d’une clause de non concurrence nulle

— condamné la société Micromania à verser à monsieur Y la somme de 53 347, 20 euros bruts au titre du bonus dû pour l’exercice 2007

— prononcé l’exécution provisoire uniquement pour les sommes pour lesquelles l’exécution provisoire est de droit

— laissé à chacune des parties, conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la charge de leurs dépens ;

Attendu que la cour d’appel d’Aix en Provence, par arrêt du 28 mars 2011, statuant sur appel de monsieur Y, a:

— confirmé le jugement

Y ajoutant,

— condamné monsieur Y aux dépens d’appel et au paiement de 1000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel;

Attendu que la Cour de Cassation, statuant sur le pourvoi formé par monsieur Y, par arrêt du 5 juin 2012, a:

— cassé et annulé, sauf en ce qu’il a condamné la société SFMI Micromania à payer au salarié la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la clause de non concurrence et celle de 53 347,20 euros au titre du bonus pour l’exercice 2007, l’arrêt rendu le 28 mars 2011, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence

— remis, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d’appel de Lyon ;

Que la motivation adoptée est la suivante:

« Sur le premier moyen :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail ;

Attendu que pour dire le licenciement justifié par une faute grave, l’arrêt retient que les faits connus de l’employeur le 10 décembre 2007, ne sont pas prescrits et se borne à énoncer qu’ils rendent impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; Attendu, cependant, que la faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, la mise en 'uvre de la rupture du contrat de travail doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits allégués dès lors qu’aucune vérification n’est nécessaire ;

Qu’en se déterminant ainsi sans vérifier, comme elle y était invitée par les conclusions du salarié, si la procédure de rupture avait été mise en 'uvre dans un délai restreint, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; Attendu que pour dire le licenciement justifié, la cour d’appel retient que l’employeur, auquel incombe la preuve de la faute grave, la rapporte en l’espèce par la production du compte rendu de l’entretien préalable par le délégué du personnel témoignant que le salarié a dit « si c’était à refaire, je le referais », ce qui équivaut à reconnaître ses agissements ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le compte rendu précisait que le salarié" « nie avoir dit que si cela était à refaire, il le referait », la cour d’appel a violé le principe susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l’article 625 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation prononcée du chef des dispositions de l’arrêt relatives au licenciement entraîne par voie de conséquence, celle des dispositions relatives à la demande de dommages-intérêts pour la perte d’une chance de céder les actions gratuites » ;

Attendu que la cour de renvoi a été saisie par déclaration de monsieur Y;

Attendu que la société Micromania emploie plus de 11 salariés et est dotée d’institutions représentatives du personnel;

Que la convention collective applicable est celle du commerce de détail non alimentaire;

Attendu que monsieur Y demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 11 janvier 2013, visées par le greffier le 11 janvier 2013 et soutenues oralement, de :

A titre principal,

— au visa de l’article L1332-4 du code du travail, constater la prescription des faits qui lui sont reprochés au moment de l’enclenchement de la procédure de licenciement et juger que son licenciement pour faute grave n’est pas intervenu dans un délai restreint

— dire que son licenciement ne repose sur aucune cause réelle ni sérieuse

A titre subsidiaire,

— au visa de l’article L1222-1 du code du travail, dire que son licenciement ne repose sur aucune cause réelle ni sérieuse

En conséquence,

— confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a condamné la société Micromania à lui payer :

* la somme de 53 347,20 euros au titre du bonus

* la somme de 40000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la clause de non concurrence

— condamner la société Micromania à lui payer

* la somme de 7 078,91 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied du 11 au 31 janvier 2008

* la somme de 707,89 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire

* la somme de 23303,91 euros bruts à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement

* la somme de 60792,81 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis

* la somme de 6079,28 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

* la somme de 243171,24 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* les intérêts légaux sur l’ensemble des condamnations prononcées ci-dessus à compter de la date de saisine du conseil de prud’hommes soit le 16 avril 2008

* la somme de 733 146,12 euros à titre de dommages et intérêts pour perte d’une chance au titre des actions gratuites et assortir cette somme des intérêts légaux à compter de la date du 19 novembre 2008, date à laquelle le manque à gagner s’est réalisé

* la somme de 50000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice distinct

* la somme de 20264,09 euros au titre du non respect de la procédure statutaire prévoyant une autorisation préalable du conseil de surveillance

* la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

— ordonner à la société Micromania le remboursement des allocations assurance chômage dans la limite de 6 mois de salaire ;

Attendu que la société SFMI Micromania demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 11 janvier 2013, visées par le greffier le 11 janvier 2013 et soutenues oralement, de:

— confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Grasse en ce qu’il a dit que le licenciement de monsieur Y reposait sur une faute grave

— débouter monsieur Y de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions

— condamner monsieur Y à lui payer 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la procédure ;

Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l’article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement;

MOTIFS DE LA DECISION:

Attendu que la cour de renvoi n’est saisie que du litige relatif à la rupture des relations contractuelles et à ses conséquences financières ;

Que la cassation n’a nullement remis en cause la condamnation de l’employeur à payer au salarié la somme de 40000 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la clause de non concurrence et celle de 53347,20 euros au titre du bonus pour l’exercice 2007 ;

Que ces dispositions n’ont plus à être débattues, ayant force de chose jugée ;

Sur la rupture des relations contractuelles

Attendu que monsieur Y a été licencié pour faute grave par lettre du 28 janvier 2008 rédigée en ces termes :

« Vous avez été embauché par la société SFMI – MICROMANIA en qualité de Directeur Administratif et Financier avec le statut de cadre supérieur, par le biais d’un contrat à durée indéterminée signé le 4 février 2002.

Dans votre contrat de travail, il est clairement spécifié les missions que vous devez exercer, fixant le cadre de vos fonctions.

A cet égard, votre contrat de travail prévoit expressément votre devoir de rendre compte régulièrement à la direction générale.

Par ailleurs, vous êtes tenu de manière générale à une obligation de loyauté envers votre employeur.

Or, nous avons été amené à constater que vous avez violé vos obligations contractuelles et professionnelles, et que vous avez adopté un comportement en totale inadéquation avec les responsabilités qui était les vôtres, notamment compte tenu du poste occupé.

En effet, nous avons appris par un mail en date du 10 décembre 2007, qu’entre juillet et octobre 2007, vous aviez entretenu, à notre insu, ainsi qu’à celui de nos actionnaires, des conversations suivies avec un fonds d’investissement, des conseils, et au moins une banque, en vue de vendre le Groupe MICROMANIA.

Ainsi, entre le 30 octobre et le 10 décembre 2007, l’offre de rachat de ce fonds a été présentée au représentant de notre actionnaire majoritaire, mais toujours sans en informer votre Direction.

Vous avez pendant 5 mois régulièrement informé et impliqué la totalité des Directeurs du Groupe, tout en le dissimulant aux actionnaires et à votre Direction, déstabilisant particulièrement le fonctionnement du Comité de Direction.

En effet, c’est en dehors de tout mandat et en outrepassant largement vos prérogatives que vous avez agi au nom de l’entreprise, dans une opération d’une envergure considérable – la vente de l’entreprise -, en dissimulant l’ensemble de celle-ci à votre employeur, et portant ainsi gravement atteinte au pouvoir de direction de l’entreprise, prérogative essentielle de l’employeur.

De plus, le fait que les tiers impliqués dans l’opération de rachat aient pu formuler une offre à l’actionnaire majoritaire nous laisse penser que ceux-ci ont eu accès à un certain nombre de données ou informations confidentielles.

En outre, vous avez manqué à votre devoir élémentaire d’obéissance en ne respectant pas vos obligations contractuelles d’information et de transparence envers la Direction, a fortiori compte tenu de l’envergure de l’opération envisagée.

De plus, vous avez, au cours de cette opération, particulièrement méconnu vos obligations de réserve et de confidentialité inhérentes à votre poste, portant une atteinte considérable à la réputation de l’entreprise et de ses effectifs.

Vous avez, à cet égard, particulièrement méconnu votre devoir essentiel de loyauté et vous êtes mis par la même occasion en porte à faux vis-à-vis de la ligne stratégique adoptée par l’entreprise’ » ;

Attendu que monsieur Y soutient que les faits reprochés sont prescrits en application de l’article L1332-4 du code du travail, son employeur en ayant eu connaissance dès le 26 octobre 2007, comme l’atteste monsieur C président de la société Micromania ;

Que l’employeur soutient que si la lettre de rachat du fond d’investissement Sagard est datée du 26 octobre 2007 et que le nom de monsieur C y figure bien, monsieur H n’en a eu connaissance que beaucoup plus tard ;

Qu’il objecte également que messieurs H et Z n’ont eu une connaissance exacte et complète des faits que le 10 décembre 2007 par le biais de l’e-mail envoyé à ce dernier;

Attendu qu’aux termes de l’article L1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner à lui seul à l’engagement des poursuites disciplinaires au-delà de 2 mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales ;

Attendu que la société Micromania reproche à son salarié d’avoir entrepris des démarches à son insu aux fins de cession de la société à un investisseur ;

Que l’employeur date la connaissance des faits du courriel d’information adressé par messieurs F, E, Y, G, Maincent et A, se présentant comme l’ « équipe historique de management » à monsieur Z le 10 janvier 2007, dans lequel il est indiqué : « B, Le temps est venu de porter à ta connaissance l’action que nous avons menée depuis cet été’en réaction à l’annonce de l’existence de discussions avec le groupe Gamestop en vue de la cession de Micromania par les actionnaires actuels’notre projet a donc été de préserver l’indépendance, les valeurs et les structures de l’entreprise Micromania, trouver un partenaire financier’les financements associés’d'être associés capitalistiquement au développement de la société. Ces étapes franchies nous avons présenté le 30 octobre dernier une offre de rachat de 100% des parts de SMFI à M D’ Après plusieurs rendez-vous et échanges avec le « sponsor », M D lui a fait part ce vendredi 7 décembre qu’il ne souhaitait pas s’associer à ce projet’ » ;

Que monsieur H, dont il n’est pas contesté qu’il soit le président de la société Micromania à l’époque des faits, dans le cadre de l’attestation produite aux débats par l’employeur lui-même, a indiqué :

« A la fin du mois d’octobre 2007, j’ai été informé par monsieur M D, président de L Capital Management, la société gérant le fonds L Capital détenteur de la majorité des actions de SFMI Micromania qu’il avait reçu une offre de rachat du fonds Sagard pour la majorité des actions de la société. Cette offre avait été constituée pendant l’été 2007 à l’initiative de X Y, directeur financier de SFMI Micromania qui entendait en devenir le dirigeant en cas de succès » ;

Qu’est également versée aux débats l’offre relative au projet d’acquisition adressée par messieurs Spencer, F, E, Y, G, Maincent et A et signée par eux, datée du 26 octobre 2007 à messieurs D et H ;

Qu’il est indiqué « notre offre vous est présentée conjointement avec l’équipe de direction (messieurs F, E, G, Maincent et A) emmenée par monsieur X Y » ;

Que cette offre est par ailleurs circonstanciée, présentant Sagard, l’intérêt pour Micromania, la valorisation proposée, le partenariat avec le management, le réinvestissement proposé, la structure d’acquisition, les garanties, les conditions de réalisation et en annexe comportant les lettres d’offre de financement de la Société Générale et de ING Finance France ;

Attendu que monsieur H, président de la société employant monsieur Y, a eu personnellement connaissance fin octobre 2007 de l’action menée par monsieur Y aux fins de cession de la société l’employant ;

Que le témoignage de monsieur H, non empreint de la moindre ambigüité, et la teneur de la lettre qui lui a été adressée le 26 octobre 2007, permettent de retenir que fin octobre 2007 l’employeur avait une totale et complète information sur le rôle joué par monsieur Y dans le cadre de ce projet de cession ;

Que le courriel adressé le 10 décembre 2007 n’a eu pour objet que d’en informer monsieur Z, président du conseil de surveillance et directeur général ;

Attendu que les frais fautifs sont atteints par la prescription, la procédure de licenciement n’ayant été mise en mouvement qu’à la date du 10 janvier 2008, soit plus de deux mois après que l’employeur en ait eu connaissance ;

Attendu que le licenciement dont monsieur Y a été l’objet est dès lors dépourvu de toute cause réelle et sérieuse ;

Sur la demande de rappel de salaire au titre de la mise à pied

Attendu que monsieur Y poursuit son employeur à lui payer un rappel de salaire à hauteur de la somme de 7078,91 euros outre les congés payés y afférents, correspondant à la mise à pied prononcée avant son licenciement ;

Que l’employeur ne conteste aucunement le calcul opéré par le salarié ;

Qu’il convient de condamner la société SFMI Micromania à payer à monsieur Y la somme de 7078,91 euros outre 707,89 euros au titre des congés payés y afférents ;

Sur la demande d’indemnité conventionnelle de licenciement

Attendu que monsieur Y réclame à ce titre la somme de 23303, 91 euros ;

Que l’employeur ne conteste aucunement le quantum de la demande présentée ;

Qu’il convient d’y faire droit ;

Sur la demande d’indemnité compensatrice de préavis

Attendu que monsieur Y poursuit son employeur à lui payer une indemnité compensatrice de préavis de 3 mois, outre les congés payés y afférents ;

Que cette demande n’est ni contestée en son principe et en son quantum ;

Qu’il convient de condamner la société SFMI Micromania à payer à monsieur Y la somme de 60792,81 euros outre 6079,28 euros au titre des congés payés y afférents ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour non respect de la procédure statutaire

Attendu que selon l’article 12 des statuts de SFMI Micromania, il est prévu qu’aucune décision de licenciement d’un cadre dirigeant ne pourra être prise avant que le conseil de surveillance n’ait approuvé la décision projetée ;

Attendu que monsieur Y a été licencié par lettre en date du 28 janvier 2008 et le conseil de surveillance a autorisé la prise de toute mesure concernant monsieur Y « pouvant aller jusqu’au licenciement éventuel » de ce dernier lors de la réunion du 18 janvier 2008 ;

Attendu qu’à la date à laquelle le salarié a été licencié, la procédure statutaire a été respectée ;

Attendu que monsieur Y doit être débouté de ce chef de demande injustifiée ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Attendu qu’au moment de la rupture de son contrat de travail, monsieur Y avait plus de deux années d’ancienneté, l’entreprise employant habituellement au moins onze salariés ;

Qu’en application de l’article L. 1235-3 du code du travail, le salarié peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts perçus pendant les six derniers mois précédant son licenciement, salaires reconstitués s’élevant à 121585,62 euros ;

Attendu que monsieur Y réclame indemnisation à hauteur de 12 mois de salaires, somme qualifiée d’exorbitante par l’employeur ;

Attendu que monsieur Y considère avoir fait l’objet d’une discrimination eu égard à l’implication d’autres salariés dans les faits qui lui sont reprochés, de manipulations quant à de prétendus aveux qu’il aurait faits au cours de l’entretien préalable, souligne le caractère brutal de son éviction en l’absence de tout passé disciplinaire ;

Qu’il précise avoir été au chômage pendant presqu’un an, avoir retrouvé un emploi moins bien rémunéré, après une mobilité géographique, comportant moins de prérogatives et insiste sur les difficultés financières et familiales qui en ont résulté ;

Attendu que monsieur Y verse aux débats une attestation Assedic du 2 janvier 2009 établissant qu’il a été indemnisé du 7 février 2008 au 30 septembre 2008, justifie avoir signé un bail locatif pour un appartement à Mulhouse à compter du 1er octobre 2008 ;

Qu’il produit le courriel adressé le 20 janvier 2008 à monsieur Z par messieurs F, E, G, Maincent et A invitant ce dernier avant de prendre une mesure contre monsieur Y de bien avoir à l’esprit qu’il s’agit d’une « démarche collective et réfléchie’X n’est qu’à ce titre qu’un des cosignataire de cette proposition et son élimination ne balaiera pas les raisons qui ont amené chacun d’entre nous à faire ce choix » ;

Attendu que l’employeur se contente d’indiquer « monsieur Y avait moins de 6 ans d’ancienneté au moment de son licenciement.

De plus, monsieur Y a rapidement trouvé un emploi ; Il est d’ailleurs surprenant que celui-ci se contente d’affirmer qu’il a retrouvé un emploi sans préciser à quelle date ni le nom de la société qui l’emploie et le montant de sa rémunération » ;

Qu’il n’oppose aucun argument à la discrimination évoqué et n’établit nullement que les agissements dénoncés ne soient pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Attendu que la cour dispose d’éléments suffisants, au regard des circonstances particulières ayant entouré la rupture des relations contractuelles, aux difficultés réelles de reconversion professionnelle rencontrées, pour allouer à monsieur Y une indemnité définitive devant lui revenir personnellement, pouvant être justement évaluée à la somme de 180.000 euros ;

Attendu qu’en application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner le remboursement par l’employeur aux organismes concernés, parties au litige par l’effet de la loi, des indemnités de chômage qu’ils ont versées au salarié à concurrence de 6 mois;

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct

Attendu que monsieur Y réclame à ce titre la somme de 50000 euros motivée comme suit :

« Compte tenu du caractère brusque et frivole de la mesure de licenciement ayant frappé monsieur Y, il est légitime de penser que cette mesure a été prise volontairement afin d’éviter d’avoir à lui régler les sommes auxquelles il pouvait légitimement prétendre dans le cadre de la « sortie » du LBO et de la cession à Gamestop.

L’exécution de bonne foi et la loyauté imposent que le salarié peut obtenir réparation de son préjudice résultant des circonstances dans lesquelles le licenciement est effectué.

Ainsi Micromania a créé à monsieur Y un préjudice distinct de la perte d’emploi en se comportant d’une manière qui confine à la malveillance pure et en lui imposant des mesures vexatoires » ;

Que l’employeur est au débouté de cette demande « qui ne repose sur aucun fondement » ;

Attendu que cette demande ne repose pas sur des fondements juridiques et des faits distincts de ceux retenus pour fixer l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Que monsieur Y sera débouté de ce chef de demande;

Sur la demande de dommages et intérêts pour perte d’une chance au titre des actions gratuites

Attendu que d’une part, l’employeur démontre que monsieur Y détenait 3000 actions acquises le 26 septembre 2006 au prix unitaire de 10 euros qui lui ont été rachetées le 21 février 2009 par la société Micromania au prix unitaire de 31,08 euros, conformément à l’article 5-1 du pacte des actionnaires ;

Attendu que d’autre part, monsieur Y a bénéficié le 30 septembre 2006 de l’attribution gratuite de 12389 « actions ordinaires à émettre » correspondant à une tranche A pour lesquelles il est précisé que l’attribution ne deviendra définitive qu’au terme d’une période d’acquisition de 2 ans soit le 30 septembre 2008 et sous réserve de la condition de présence au sein du groupe SFMI Micromania et impossibilité de céder ces actions pendant 2 ans à compter du 30 septembre 2008 ;

Qu’il a également bénéficié le 4 décembre 2007 de 11200 actions gratuites correspondant à une tranche B pour lesquelles il est précisé que l’attribution ne deviendra définitive qu’au terme d’une période d’acquisition de 2 ans soit le 4 décembre 2009 et sous réserve de la condition de présence au sein du groupe SFMI Micromania et possibilité de céder ces actions qu’à compter du 4 décembre 2011 ;

Attendu que selon le règlement du plan d’attributions gratuites, il est prévu qu’en cas de licenciement du bénéficiaire au cours de la période d’acquisition, le bénéficiaire perdrait immédiatement ses droits aux actions gratuites au jour de la réception de la lettre de notification de licenciement ;

Attendu que monsieur Y soutient que l’ensemble des titres Micromania ont été cédés à Gamestop le 19 novembre 2008 et que les membres du comité de direction ont cédé leurs actions gratuites par anticipation au prix unitaire de 31,08 euros ;

Qu’il demande n’ayant pu conserver le bénéfice des 23589 actions gratuites et exercer, du fait de son licenciement injustifié, son droit de cession de se voir allouer à titre de dommages et intérêts la somme de 733146,12 euros correspondant à la valorisation de ces actions au prix unitaire de 31,08 euros ;

Que l’employeur est au rejet de cette demande ;

Attendu que monsieur Y ne démontre aucunement que les membres du comité de direction ont cédé leurs actions gratuites par anticipation ;

Attendu que monsieur Y ne pouvait être présent dans l’entreprise à la date de l’acquisition définitive des actions gratuites de la tranche A et de la tranche B, ayant fait l’objet d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Qu’il a été privé de la possibilité d’une chance de gain ne pouvant ni acquérir définitivement ces actions ni les négocier à l’expiration des délais définis ;

Qu’il ne s’agit que d’une perte d’une chance ;

Attendu que cette perte de chance doit être compensée, la cour disposant des éléments suffisants d’attribution, par l’octroi de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 50000 euros ;

Sur la demande afférente aux intérêts légaux

Attendu que les créances de nature salariale sont productrices d’intérêts au taux légal à compter de la notification de la demande à l’employeur, en application de l’article 1153 du code civil ;

Que les autres créances de nature indemnitaire sont productrices d’intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt ;

Qu’il n’est pas démontré de préjudice spécifique justifiant que le point de départ soit fixé à une date antérieure;

Attendu que la cour de renvoi, statuant dans la limite de sa saisine, infirme le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que le licenciement de monsieur Y repose sur une faute grave ;

Attendu que les dépens d’appel doivent être laissés à la charge de la société SFMI Micromania qui succombe sur le principal de ses demandes et doit être déboutée de sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile;

Attendu que les considérations d’équité justifient que soit allouée à monsieur Y une indemnité de 3000 euros au titre des frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en application de l’article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt contradictoire, sur renvoi de cassation et dans la limite de notre saisine

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que le licenciement de monsieur Y repose sur une faute grave

Statuant à nouveau

Dit que le licenciement dont monsieur Y a été l’objet est dépourvu de cause réelle et sérieuse

Condamne la société SFMI Micromania à payer à monsieur Y les sommes suivantes :

—  7 078,91 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied outre 707,89 euros bruts au titre des congés payés y afférents

—  23303,91 euros bruts à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement

—  60792,81 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 6079,28 euros bruts au titre des congés payés y afférents

—  180000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l’article L1235-3 du code du travail

—  50000 euros à titre de dommages et intérêts pour perte d’une chance au titre des actions gratuites

Dit que les créances salariales sont productrices d’intérêts au taux légal à compter de la notification de la demande à l’employeur et celles indemnitaires à compter du prononcé de l’arrêt

Ordonne le remboursement par l’employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage qu’ils ont versées à monsieur Y à concurrence de 6 mois

Déboute monsieur Y de ses demandes de dommages et intérêts au titre d’un préjudice distinct et au titre du non respect de la procédure statutaire prévoyant une autorisation préalable du conseil de surveillance

Condamne la société SFMI Micromania à payer à monsieur Y 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d’appel devant la cour de renvoi.

Le Greffier Le Président

Mailka CHINOUNE Nicole BURKEL

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Cour d'appel de Lyon, n° 12/06005