Cour d'appel de Montpellier, 2° chambre, 28 mai 2019, n° 16/07370

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 2° ch., 28 mai 2019, n° 16/07370
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 16/07370
Sur renvoi de : Cour de cassation, 27 septembre 2016, N° 1041F@-@P+B
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE :

X

Société civile DOMAINE DE LA LIEUTENANTE

C/

Société OLEICOLE DE LA VALLEE DES BAUX

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

2° chambre

ARRET DU 28 MAI 2019

N° RG 16/07370 – N° Portalis DBVK-V-B7A-M3FV

Décisions déférées à la cour ;

Arrêt de la Cour de cassation, décision attaquée en date du 28 Septembre 2016, enregistrée sous le n° 1041 F-P+B

Arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 26 Février 2015, enregistrée sous le n° 2015/110

Jugement du tribunal de grande instance de Tarascon, du 27 Mai 2014, enregistrée sous le n° 12/00206

DEMANDEURS A LA SAISINE :

Monsieur Z X

né le […] à […]

de nationalité Française

'Mas de la Lieutenante’ […]

[…]

Représenté par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, substitué par Me Lola JULIE de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER et assisté de Me Jacques GRANGE, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

Société civile DOMAINE DE LA LIEUTENANTE S.C.E.A. (anciennement dénommée société civile d’exploitation agricole de la Lieutenante et de Rousty)agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis

[…]

[…]

Représenté par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au

barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, substitué par Me Lola JULIE de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER et assisté de Me Jacques GRANGE, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

DEFENDERESSE A LA SAISINE

OLEICOLE DE LA VALLEE DES BAUX S.I.C.A. représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social

LA CRAVENCO

[…]

[…]

Représentée par la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Xavier MAILLY, avocat au barreau d’AVIGNON, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 19 mars 2019

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 AVRIL 2019, en audience publique, Madame Anne-Claire BOURDON, conseiller ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre

Madame Anne-Claire BOURDON, conseiller

Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré.

GREFFIER :

Madame Hélène ALBESA, greffier lors des débats et Madame Hélène ALBESA, greffier lors de la mise à disposition

DEBATS :

en audience publique le NEUF AVRIL DEUX MILLE DIX NEUF

L’affaire a été mise en délibéré au 28 Mai 2019.

ARRET :

contradictoire, prononcé par mise à disposition de l’arrêt le 28 Mai 2019, par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre et par Madame Hélène ALBESA, greffier.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

La société civile coopérative d’intérêt collectif agricole, dénommée Y Oléicole de la vallée des Baux, a pour objet la récolte, la conservation et la commercialisation d’olives ainsi que la fabrication et la commercialisation d’huile d’olives, et en général toutes opérations se rapportant directement ou indirectement à cet objet.

Monsieur Z X détient 36 parts et la société civile d’exploitation agricole (SCEA) de la Lieutenante et de Rousty (devenue Domaine de la Lieutenante), dont il est le dirigeant, détient 4 978 parts, soit au total 5 014 parts sur les 17 500 parts composant le capital social (c’est-à-dire 28,65 %, le reste étant détenu par d’autres exploitants).

Le 21 février 2011, le conseil d’administration de la Y Oléicole de la vallée des Baux a convoqué une assemblée générale extraordinaire, aux fins de statuer sur les exclusions de Monsieur X et de la SCEA de la Lieutenante et de Rousty, au motif que « Monsieur Z X est en mésentente chronique avec les autres associés concernant la gestion de la société. Il a de plus pris des intérêts dans une société concurrente « Terroirs oléicoles de France ''.

L’assemblée générale extraordinaire du 20 mai 2011 de la Y Oléicole de la vallée des Baux a prononcé l’exclusion immédiate de Monsieur Z X et de la SCEA de la Lieutenante et de Rousty.

Cette décision a été notifiée par lettres recommandées du 24 mai 2011 (avis de réception non produits).

Par lettres recommandées du 1er août 2011 (avis de réception non produits), la Y Oléicole de la vallée des Baux a précisé le montant du remboursement des parts sociales (sur la base de la valeur nominale de 4 euros) et fixé un échelonnement sur cinq années.

Saisi par acte d’huissier du 26 janvier 2012 délivré par Monsieur Z X et la SCEA de la Lieutenante et de Rousty, le tribunal de grande instance de Tarascon, par jugement du 27 mai 2014, a :

« - dit que la Y Oléicole de la vallée des Baux est soumise au statut de la coopération tel que fixé par la loi du 10 septembre 1947 modifié ;

- débouté la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et M. X de leur demande tendant à ce qu’il soit jugé qu’ils conservent la qualité d’associé jusqu’à complet remboursement de leurs droits sociaux ;

- débouté la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et M. X de leur demande tendant à ce qui soit jugé que M. X conserve son mandat d’administrateur jusqu’à complet remboursement de ses droits sociaux ;

- dit que les parts sociales des associés de la Y Oléicole de la vallée des Baux doivent être remboursées au regard de leur valeur nominale ;

- débouté la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et M. X de leur demande d’expertise pour évaluer les parts sociales de la Y Oléicole de la vallée des Baux ;

- constaté que l’article 16 des statuts de la Y Oléicole de la vallée des Baux est valable ;

- débouté la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et M. X de leur demande tendant à ce qu’il soit jugé que l’article 16 des statuts de la Y Oléicole de la vallée des Baux est nul ;

- dit fondée l’exclusion de la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et de M. X votée par l’assemblée générale extraordinaire du 20 mai 2011 ;

- débouté la SCEA de la Lieutenante et M. X de leurs demandes de dommages et intérêts ;

- constaté qu’en refusant de triturer la partie hors quota de la récolte de la SCEA de la Lieutenante et de Rousty pour l’année 2010 la Y Oléicole de la vallée des Baux n’a pas commis de faute ;

- débouté la SCEA de la Lieutenante de sa demande de dommages et intérêts ;

- constaté que la SCEA de la Lieutenante et de Rousty ne justifie d’aucune créance sur la Y Oléicole de la vallée des Baux au titre des récoltes 2008 et 2009 ;

- débouté la SCEA de la Lieutenante et de Rousty de sa demande en paiement de la somme de 95 645, 40 euros TTC ;

- constaté que le caractère abusif de la présente procédure n’est pas établi ;

- débouté la Y Oléicole de la vallée des Baux de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- dit la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et M. X infondés en leurs prétentions au titre des frais irrépétibles ;

- condamné la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et M. X à payer à la Y Oléicole de la vallée des Baux 5 000 euros au visa de l’article 700 du code de procédure civile ;

- dit sans objet la demande d’exécution provisoire ;

- laissé les dépens, avec distraction (…). »

Par arrêt du 26 février 2015, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions et y ajoutant, a débouté la Y Oléicole de la vallée des Baux de sa demande de dommages-intérêts et condamné solidairement la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et Monsieur X à payer à la Y Oléicole de la vallée des Baux une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par arrêt du 28 septembre 2016, la première chambre civile de la Cour de cassation a cassé et annulé cet arrêt, mais seulement en ce qu’il rejette la demande tendant à ce qu’il soit jugé que la SCEA et M. X conservent la qualité d’associé jusqu’au complet remboursement de leurs droits sociaux, et en ce qu’il rejette la demande d’expertise de la SCEA et de M. X aux fins de détermination de la valeur nominale de leurs parts sociales au jour de leur exclusion, aux motifs que :

— la cour d’appel a violé l’article R. 523-5 du code rural et de la pêche maritime par fausse application et l’article 1860 du code civil par refus d’application en retenant que la soumission de la Y au statut de la coopération emporte l’application de l’article R. 523-5 du code rural et de la pêche maritime, si bien que l’exclusion des associés a pour effet immédiat de les priver de leur qualité d’associé coopérateur pour rejeter la demande de la SCEA et de M. X tendant à voir dire qu’ils conservent leur qualité d’associé jusqu’au complet remboursement de leurs droits sociaux, et que M. X conserve son mandat d’administrateur jusqu’à cette date alors que si le défaut de remboursement de la valeur des parts d’un associé coopérateur qui a fait l’objet d’une mesure d’exclusion, n’a pas pour effet de maintenir son mandat d’administrateur, en revanche, la perte de la qualité d’associé d’une société d’intérêt collectif agricole constituée sous la forme d’une société civile ne peut être antérieure au remboursement des droits sociaux,

— la cour d’appel a violé l’article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 en retenant que la soumission de la Y au statut de la coopération emporte l’application de l’article 18 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947, ce dont il résulte que l’associé coopérateur a droit au remboursement de ses parts sociales à leur valeur nominale pour rejeter la demande de la SCEA et de M. X tendant à voir ordonner une expertise aux fins d’évaluation de leurs parts sociales alors que la SCEA et M. X contestaient la valeur de rachat de leurs parts sociales en raison de l’existence d’une augmentation de capital antérieure à la décision d’exclusion, en sorte que la valeur nominale des parts au jour de l’exclusion devait être déterminée par un expert.

Désignée comme juridiction de renvoi, cette cour a été saisie par Monsieur Z X et la SCEA Domaine de la Lieutenante (anciennement SCEA de la Lieutenante et de Rousty) par déclaration reçue le 10 octobre 2016.

Monsieur Z X et la SCEA Domaine de la Lieutenante demandent à la cour, en l’état de leurs conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 14 avril 2017, de :

« -vu l’arrêt de la Cour de cassation du 28 septembre 2016,

- déclarer recevable et bien fondé leur appel à l’encontre du jugement rendu par le tribunal de grande Instance de Tarascon le 27 mai 2014,

- y faisant droit, dans les limites de la cassation, vu les articles 1860 du code civil et R. 523-5 du code rural, réformer le jugement entrepris,

- dire et juger que n’ayant toujours pas été intégralement remboursés de leurs droits sociaux, ils sont encore associés coopérateurs de la Y Oléicole de la vallée des Baux,

- en conséquence, condamner cette dernière au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la privation depuis 2011 de leur qualité d’adhérents et du bénéfice des droits afférents, lesquels ne sauraient être inférieurs à 256 302,68 euros,

- ordonner une expertise, aux frais avancés de la Y Oléicole de la vallée des Baux, aux fins d’évaluation des parts sociales et à cette fin désigner tel expert qu’il plaira avec mission de :

' se faire remettre tous documents utiles,

' évaluer les parts de la Y Oléicole de la vallée des Baux détenues par Monsieur X d’une part et la SCEA Domaine de la Lieutenante d’autre part,

' déposer son rapport après avoir répondu aux dires des parties,

- condamner la Y Oléicole de la vallée des Baux au paiement d’une provision de 20 000 euros à valoir dans l’attente du rapport d’expertise,

- condamner la Y Oléicole de la vallée des Baux au paiement d’une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Y Oléicole de la vallée des Baux aux entiers dépens de première instance et d’appel. »

Ils font essentiellement valoir que :

— il existe une distinction entre le statut des coopératives régi par la loi du 10 septembre 1947, dont

relève, en partie, la Y, et le régime juridique des sociétés coopératives agricoles régi par le titre II du code rural, qui ne s’applique pas aux sociétés d’intérêt collectif agricole. Les Y ont été rattachées à la loi-cadre du 10 septembre 1947, portant statut de la coopération, sans être rattachées au statut de la coopération agricole,

— dès lors, l’exclusion n’a pu avoir pour effet immédiat de les priver de leur qualité d’associés coopérateurs ; ils n’ont pas été intégralement remboursés de leurs droits sociaux, puisque la Y étant une société civile, ceux-ci doivent être évaluées en application de l’ancien article 1843-4 du code civil, or, le bilan au 30 septembre 2010 révèle une valeur de parts de 39,69 euros (contre 4 euros lors de sa constitution),

— ils ont subi différents préjudices économiques du fait de la perte immédiate de leur qualité d’associé.

La Y Oléicole de la vallée des Baux sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 15 juin 2017 :

« - vu l’arrêt de la cour de cassation du 28 septembre 2016, vu les dispositions de la loi du 10 septembre 1947 modifiés par la loi du 13 janvier 1992, vu les articles L531-1, R 522-8, R 531-6, R. 533-1 et R 534-3 du code rural, (…)

- dire et juger que la loi du 10 septembre 1947 relative aux coopératives agricoles s’applique bien aux Y, à l’exception de ses articles 3,3 bis, 4,9, des deux derniers alinéas de l’article 11, de l’article 11 bis, du deuxième alinéa de l’article 16 et les deuxièmes et troisièmes alinéas de l’article 27,

- dire et juger que Monsieur Z X et la SCEA la Lieutenante n’ont plus la qualité d’associé de la Y depuis la date de leur exclusion,

- dire et juger que le prix de départ devant être remboursé aux associés exclus doit être établi à la valeur nominale fixée dans les statuts sans qu’il soit besoin d’ordonner une expertise,

- débouter Monsieur Z X et la SCEA la Lieutenante de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamné Monsieur X et la SCEA la Lieutenante à lui verser solidairement une somme de 25'000 euros au titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- condamner Monsieur Z X et la SCEA la Lieutenante à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction (…) »

Elle expose en substance que :

— concernant la date de la perte de la qualité d’associé, contrairement à la décision de la Cour de cassation, il convient d’appliquer l’article 7 de la loi du 10 septembre 1947, qui est applicable aux Y, repris dans les statuts (articles 16 et 17). L’article 1860 du code civil n’est pas applicable, puisque s’agissant de règles particulières, seules les dispositions de l’article L. 531-1 du code rural, qui renvoient aux dispositions de la loi du 10 septembre 1947, doivent être appliquées,

— le remboursement des parts doit être effectué à hauteur de leur valeur nominale en application de l’article 18 de la loi du 10 septembre 1947. Les conditions d’application de l’article 1843-4 du code civil étaient remplies, dès lors que la valeur des parts sociales était discutée (augmentation du capital social antérieure à l’exclusion) et que la cour d’appel a apprécié souverainement cette contestation,

— aucun des préjudices réclamés n’est justifié.

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

C’est en l’état que l’instruction a été clôturée par ordonnance du 19 mars 2019.

MOTIFS de la DECISION :

La cour est tenue de statuer sur renvoi après une cassation partielle de l’arrêt du 28 septembre 2016, dans la limite de sa saisine, à savoir la date de la perte de la qualité d’associé d’une société d’intérêt collectif agricole constituée sous la forme d’une société civile en cas d’exclusion de cet associé et la valeur de rachat des parts sociales de l’associé exclu.

L’article L. 531-1 du code rural et de la pêche maritime, inséré au titre III dudit code, intitulé « sociétés d’intérêt collectif agricole », dispose que les sociétés d’intérêt collectif agricole peuvent se constituer soit sous le régime des sociétés civiles particulières régies par les articles 1832 et suivants du code civil, soit dans les formes prévues pour les sociétés par actions et les sociétés à responsabilité limitée par le code de commerce.

Les sociétés d’intérêt collectif agricole ont pour objet de créer ou de gérer des installations et équipements ou d’assurer des services soit dans l’intérêt des agriculteurs d’une région rurale déterminée, soit de façon plus générale dans celui des habitants de cette région sans distinction professionnelle.

Les sociétés d’intérêt collectif agricole ont le statut de société coopérative et sont régies par la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, à l’exception des articles 3, 3 bis, 4, 9, des deux derniers alinéas de l’article 11, de l’article 11 bis, du deuxième alinéa de l’article 16 et des deuxième et troisième alinéas de l’article 27.

La loi n°47-1775 du 10 septembre 1947, portant statut de la coopération, prévoit dans son article 2 que les coopératives sont régies par la présente loi sous réserve des lois particulières à chaque catégorie d’entre elles.

Elle dispose, dans son article 7, que les statuts des coopératives déterminent notamment le siège de la société, son mode d’administration, en particulier les décisions réservées à l’assemblée générale, les pouvoirs des administrateurs ou gérants, les modalités du contrôle exercé sur ses opérations au nom des associés, les formes à observer en cas de modification des statuts ou de dissolution. Ils fixent les conditions d’adhésion, de retraite et d’exclusion des associés, l’étendue et les modalités de la responsabilité qui incombe à chacun d’eux dans les engagements de la coopérative.

L’article 18 de cette même loi prévoit que l’associé qui se retire ou qui est exclu, dans le cas où il peut prétendre au remboursement de ses parts, a droit au remboursement de leur valeur nominale.

Lorsqu’ils ne prévoient pas le recours aux dispositions de l’article 16, les statuts peuvent prévoir que l’associé sortant ayant cinq ans d’ancienneté révolus a droit, en outre, en proportion de sa part de capital social et dans la limite du barème en vigueur fixant le taux de majoration applicable aux rentes viagères, à une part de la réserve constituée à cet effet.

Le remboursement des parts de l’associé sortant et la part de la réserve visée à l’alinéa précédent sont réduits a due concurrence de la contribution de l’associé aux pertes inscrites au bilan. Toutefois, les statuts peuvent prévoir, préalablement à cette réduction, l’imputation des pertes, en premier lieu sur la réserve mentionnée ci-avant, et en second lieu sur les réserves statutaires.

L’article 17 des statuts de la Y Oléicole de la vallée des Baux, relatif au remboursement des parts sociales, précise que le sociétaire qui se retire, pour quelque cause que ce soit, ou qui est exclu ou radié, a droit au remboursement de ses parts sociales, y compris les parts gratuites attribuées le cas échéant lors d’une décision d’incorporation de réserves disponibles au capital social. Le montant nominal de ces parts sociales est réduit, s’il y a lieu, à due concurrence de la contribution du sociétaire aux pertes inscrites au bilan.

Ainsi, ni la loi portant statut de la coopération, ni les règles propres définies par le code rural, qui ne comprennent pas le titre II consacré aux « sociétés coopératives agricoles », ni les statuts de la Y Oléicole de la vallée des Baux ne précisent la date de la perte de la qualité d’associé en cas d’exclusion.

Chaque Y est également soumise au droit commun de la forme sociale sous laquelle elle a été constituée, soit, en l’espèce, celui de la société civile prévu aux articles 1845 et suivants du code civil.

En application de l’article 1860 du code civil, la perte de la qualité d’associé ne peut être préalable au remboursement des droits sociaux et la décision de l’assemblée générale extraordinaire d’exclure un associé n’a donc pas d’effet immédiat, ce dernier conservant l’intégralité de ses droits jusqu’au complet remboursement de ses parts sociales.

Dès lors, la décision de l’assemblée générale extraordinaire du 20 mai 2011 de la Y Oléicole de la vallée des Baux, qui a prononcé l’exclusion de Monsieur X et la SCEA Domaine la Lieutenante, ne prendra effet qu’à la date du remboursement de leurs droits sociaux et la date de l’exclusion sera fixée à la date de remboursement de la valeur des droits sociaux.

Les parties s’opposent sur le calcul du montant de ces droits sociaux, les appelants considérant que le bilan au 30 septembre 2010 révèle une valeur de parts de 39,69 euros (contre 4 euros lors de la constitution de la Y) et l’intimée que la valeur nominale des parts n’a pas évolué depuis la constitution de la société en dépit d’une augmentation de capital en 1999 au regard des règles applicables en matière d’affectation en réserve.

Toutefois, la Y reconnaît a minima que la valeur nominale des parts sociales a évolué, puisqu’elle peut être fixée à la somme de 6,35 euros au bilan arrêté au 31 août 2016 (sous réserve de la déduction des réserves).

Le désaccord sur l’évaluation et de la liquidation des droits sociaux des sociétaires exclus est ainsi réel.

L’article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2014-863 du 31 juillet 2014, dispose que dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d’un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d’accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible.

Ainsi, la demande d’expertise relevant des dispositions d’ordre public de cet article, ainsi que la demande subséquente de provision, seront déclarées irrecevables et les parties seront renvoyées, à la charge de la plus diligente d’entre elles, à mieux se pouvoir devant la juridiction compétente.

Le jugement sera donc réformé.

Du fait de leur exclusion, Monsieur X et la SCEA Domaine la Lieutenante soutiennent avoir subi un préjudice résultant de la privation depuis 2011 de leur qualité d’adhérents et du bénéfice des droits afférents.

Ils font état d’un préjudice découlant du refus de trituration des olives par la Y Oléicole de la vallée des baux dans le cadre d’un surcoût lié à la prestation confiée à un autre moulin, d’un préjudice commercial au titre de la perte du réseau et de la marque, entraînant une recherche de nouveaux modes de distribution et d’une perte de chiffre d’affaires ainsi que de la perte des rétrocessions commerciales non perçues.

Toutefois, leur exclusion était motivée par des plantations à grande échelle (environ 5 000 arbres) sans concertation, en violation du règlement intérieur, qui prévoit, dans son article 4, une autorisation du conseil d’administration pour la plantation cumulée de plus de 500 arbres, le non-respect des quotas, adoptés en conseil d’administration, Monsieur X ayant récolté toute sa production pour la mettre sur le marché et par l’existence d’un conflit d’intérêts, Monsieur X entretenant des intérêts directs ou indirects avec une société commerciale concurrente en violation des statuts généraux des coopératives agricoles.

Les appelantes ne contestent ni la réalité de la plantation de plus de 5 000 arbres supplémentaires entre 2008 et 2011 sans autorisation ni souscription de parts supplémentaires dans le capital de la Y, ni le développement de produits concurrents dans le cadre d’une filière parallèle.

Ainsi, le refus de trituration et le préjudice commercial allégué, mais non établi, découlent du propre comportement de Monsieur X et de la SCEA Domaine la Lieutenante.

Par ailleurs, la Y Oléicole de la vallée des Baux établit, à l’appui des documents comptables (bilan et compte de résultat), qui ne sont pas contestés, qu’aucune ristourne n’a pu être allouée aux associés entre 2009 et 2016, du fait de cette exclusion, qui a engendré une chute du chiffre d’affaires et des résultats ainsi qu’une diminution des capitaux propres.

En conséquence, les demandes d’indemnisation formées par Monsieur X et la SCEA Domaine la Lieutenante seront rejetées. Le jugement sera donc confirmé et complété.

Au regard du rejet de ses demandes principales, la demande de dommages-intérêts, visant à indemniser une procédure qualifiée d’abusive par la Y Oléicole de la vallée des Baux, ne pourra prospérer. Le jugement sera donc confirmé.

Celle-ci, qui succombe à titre principal, sera condamnée aux dépens d’appel.

Ni l’équité, ni aucune considération d’ordre économique ne commande faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la présente instance et les demandes des parties sur ce fondement seront rejetées.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire, dans la limite de sa saisine après renvoi de cassation,

Réforme le jugement du tribunal de grande instance de Tarascon du 27 mai 2014 en ce qu’il a débouté la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et M. X de leur demande tendant à ce qu’il soit jugé qu’ils conservent la qualité d’associé jusqu’à complet remboursement de leurs droits sociaux, dit que les parts sociales des associés de la Y Oléicole de la vallée des Baux doivent être remboursées au regard de leur valeur nominale et débouté la SCEA de la Lieutenante et de Rousty et Monsieur Z X de leur demande d’expertise pour évaluer les parts sociales de la Y Oléicole de la vallée des Baux,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Fixe la date de l’exclusion de Monsieur Z X et la SCEA Domaine la Lieutenante au

jour du remboursement de la valeur de leurs droits sociaux ;

Déclare irrecevables les demandes d’expertise et de provision formées par Monsieur Z X et la SCEA Domaine la Lieutenante,

Renvoie les parties, en application de l’article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2014-863 du 31 juillet 2014, à mieux se pourvoir quant à l’évaluation des droits sociaux de Monsieur Z X et la SCEA Domaine la Lieutenante devant la juridiction compétente et ce, à la charge de la partie la plus diligente,

Y ajoutant,

Rejette la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur Z X et la SCEA Domaine la Lieutenante au titre d’un préjudice commercial et de la perte des rétrocessions commerciales,

Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions non contraires au présent arrêt,

Rejette les demandes de Monsieur Z X et la SCEA Domaine la Lieutenante ainsi que de la Y Oléicole de la vallée des Baux fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Y Oléicole de la vallée des Baux aux dépens d’appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

le greffier le président

ACB

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