Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre sociale, 14 avril 2021, n° 19/05576

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 3e ch. soc., 14 avr. 2021, n° 19/05576
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 19/05576
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Montpellier, 2 juillet 2019
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

SD/MM/KC

Grosse + copie

délivrée le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre sociale

ARRET DU 14 AVRIL 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/05576 – N° Portalis

DBVK-V-B7D-OJHB

ARRET n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 JUILLET 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER POLE SOCIAL

N° RG19/0053

APPELANT :

Monsieur Y Z

[…]

[…]

Représentant : Me Thomas GONZALES, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/014417 du 25/09/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEE :

MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES DES PYRENEES-ORIENTALES (MDPH)

[…]

Site A B

[…]

Mme F G H (Représentante de la MDPH 66) en vertu d’un pouvoir du 23/02/2021

En application de l’article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l’audience.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 MARS 2021,en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Karine CLARAMUNT, Conseillère et Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Karine CLARAMUNT, Conseillère, pour le Président empêché , Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet

Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère

Madame Marianne FEBVRE, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRET :

— Contradictoire.

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour ;

— signé par Madame Karine CLARAMUNT, Conseillère, pour le Président empêché, Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES:

Le 18 octobre 2016, Monsieur Y Z a déposé une demande d’allocation aux adultes handicapés (AAH), de carte mobilité inclusion (CMI), de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) et de prestation de compensation du handicap (PCH), auprès de la maison des personnes handicapées (MDPH) des Pyrénées-Orientales.

Dans sa séance du 19 janvier 2017, la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) des Pyrénées-Orientales lui a reconnu la qualité de travail handicapé pour la période du 1er août 2016 au 31 juillet 2021, a estimé un taux d’incapacité compris entre 50% et 79%, et lui a refusé l’octroi de l’AAH au motif qu’il ne connaissait pas de restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi (RSDAE).

Le 20 mars 2017, Monsieur Y Z a exercé un recours administratif gracieux auprès de la MDPH des Pyrénées-Orientales.

Le 9 novembre 2017, la CDAPH des Pyrénées-Orientales a maintenu sa décision de refus d’attribution de l’AAH, pour les mêmes motifs.

Le 18 décembre 2017, Monsieur Y Z a dès lors saisi le tribunal du contentieux de l’incapacité de Montpellier, dont le contentieux a été transféré au pôle social du tribunal de grande instance de Montpellier, lequel, suivant jugement réputé contradictoire du 3 juillet 2019, a reçu le recours de Monsieur Y Z et joint les différentes procédures engagées par celui-ci; lui a donné acte de sa renonciation à demander la carte mobilité inclusion (CMI); a dit mal fondé son recours tendant à obtenir le bénéfice de l’AAH et a rejeté sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par pli recommandé du 31 juillet 2019 reçu au greffe de la cour le 6 août 2019, Monsieur Y Z a interjeté appel de cette décision.

La cause, enregistrée sous le numéro RG 19/05576, a été appelée à l’audience des plaidoiries du 4 mars 2021 à 9 heures.

Monsieur Y Z a demandé à la cour :

— d’infirmer le jugement rendu le 3 juillet 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Montpellier;

— d’annuler la décision de la CDAPH du 10 novembre 2017;

— de dire et juger qu’il bénéficie d’un taux d’incapacité compris entre 50% et 79%, et subit une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi;

— de lui attribuer en conséquence L’AAH;

— de condamner la MDPH des Pyrénées-Orientales à lui verser la somme de 1500 euros en application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

La MDPH des Pyrénées-Orientales a, pour sa part, demandé à la cour :

— de rejeter l’appel formé par Monsieur Y Z;

— de confirmer le jugement de première instance;

— de dire et juger, en conséquence, qu’il ne peut pas bénéficier de l’AAH a défaut de justifier d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

I.- Sur la carte mobilité inclusion (CMI)

Monsieur Y Z avait initialement saisi la juridiction de premier degré d’une demande relative à l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et d’une demande relative à la carte mobilité inclusion (CMI).

Il a renoncé à cette dernière, ce dont il lui a été donné acte aux termes du jugement rendu le 3 juillet 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Montpellier, frappé d’un appel total.

En cause d’appel, Monsieur Y Z n’est pas revenu sur sa renonciation à sa demande de carte mobilité inclusion.

Il convient donc de confirmer le jugement de première instance sur ce point.

II.- Sur la demande d’allocation aux adultes handicapés (AAH)

En vertu des dispositions combinées des articles L 821-1, L 821-2, et D 821-1 du code de la sécurité sociale dans leurs versions applicables au litige, l’allocation aux adultes handicapés est servie, notamment sous réserve de conditions de ressources et de résidence, à toute personne:

— dont le taux d’incapacité permanente est au moins égal à 80%;

— dont le taux d’incapacité permanente est compris entre 50 et 79%, avec reconnaissance, compte tenu du handicap, d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

Le pourcentage d’incapacité est apprécié à la date de la demande, d’après le guide barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées figurant à l’annexe 2-4 du code de l’action sociale et des familles.

En outre, selon l’article D 821-1-2 du code de la sécurité sociale, la restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi est appréciée ainsi qu’il suit:

'1° La restriction est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d’accès à l’emploi. A cet effet, sont à prendre en considération:

a) les déficiences à l’origine du handicap;

b) les limitations d’activités résultant directement de ces mêmes déficiences;

c) les contraintes liées aux traitements et prises en charge thérapeutiques induits par le handicap;

d) les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations d’activité.

Pour apprécier si les difficultés importantes d’accès à l’emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d’une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d’accès à l’emploi.

2° La restriction pour l’accès à l’emploi est dépourvue d’un caractère substantiel lorsqu’elle peut être surmontée par le demandeur au regard:

a) soit des réponses apportées aux besoins de compensation mentionnés à l’article L.114-1-1 du code de l’action sociale et des familles qui permettent de faciliter l’accès à l’emploi sans constituer des charges disproportionnées pour la personne handicapée;

b) soit des réponses susceptibles d’être apportées aux besoins d’aménagement du poste de travail de la personne handicapée par tout employeur au titre des obligations d’emploi des handicapés sans constituer pour lui des charges disproportionnées; c) soit des potentialités d’adaptation dans le cadre d’une situation de travail.

3° La restriction est durable dès lors qu’elle est d’une durée prévisible d’au moins un an à compter du dépôt de la demande d’allocation aux adultes handicapés, même si la situation médicale du demandeur n’est pas stabilisée. La restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi est reconnue pour une durée de un à cinq ans.

4° Pour l’application du présent article, l’emploi auquel la personne handicapée pourrait accéder s’entend d’une activité professionnelle lui conférant les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale.

5° Sont compatibles avec la reconnaissance d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi:

a) l’activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé par un demandeur admis au bénéfice de la rémunération garantie mentionnée à l’article L.243-4 du code de l’action sociale et des familles;

b) l’activité professionnelle en milieu ordinaire de travail pour une durée de travail inférieure à un mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap du demandeur;

c) le suivi d’une formation professionnelle spécifique ou de droit commun, y compris rémunérée, résultant ou non d’une décision d’orientation prise par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées mentionnée à l’article L.241-5 du code de l’action sociale et des familles.'

En l’espèce, le premier juge a ordonné une mesure de consultation sur-le-champ confiée au Docteur D E, lequel, après avoir pris connaissance du dossier médical de Monsieur Y Z et avoir procédé à son examen clinique, a établi un rapport faisant apparaître que celui-ci présentait, au jour de la demande d’AAH du 18 octobre 2016, des séquelles d’une poliomyélite antérieure aigüe depuis l’âge d’un an, ainsi qu’une diminution de la force musculaire du membre supérieur gauche et des membres inférieurs avec une paraparésie prédominante à droite, de type amyotrophie, ayant engendré un trouble de la marche et de l’équilibre qui s’est aggravé avec l’apparition de douleurs sur cheville et pied plat en valgus de 20°et d’une discopathie séquellaire L5-S1 ainsi que d’une hernie discale séquellaire L4-L5 postéro latérale gauche. L’expert assermenté a dès lors confirmé la fixation du taux d’incapacité compris entre 50% et 79% qui avait été retenu par la MDPH des Pyrénées-Orientales.

Le premier juge a entériné ce rapport et considéré que Monsieur Y Z ne justifiait pas d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi (RSDAE), de sorte qu’il ne pouvait pas bénéficier de l’AAH.

En cause d’appel, Monsieur Y Z ne conteste pas le taux d’incapacité fixé par la MDPH des Pyrénées-Orientales entre 50% et 79%, et confirmé par le premier juge. Il prétend toutefois subir une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi (RSDAE), laquelle, combinée à son taux d’incapacité, lui ouvrirait droit à l’attribution de l’AAH.

A ce titre, il expose rencontrer les plus grandes difficultés dans la recherche d’un emploi dans la mesure où se sont ajoutées, à ses pathologies, des douleurs au niveau de l’épaule droite ainsi qu’une déficience visuelle par décollement de la rétine, le tout limitant son périmètre de recherche compte tenu de sa motricité restreinte et

l’empêchant d’exercer une activité tant physique qu’administrative. Il précise également que son état de santé ne lui permet pas de se prévaloir d’une formation, ni d’envisager une réinsertion professionnelle, se prévalant, au soutien de sa supplique, de divers certificats médicaux.

Cependant, il convient de rappeler que la situation de Monsieur Y Z doit être examinée au jour de sa demande d’AAH du 18 octobre 2016, ce qui fait obstacle à la prise en compte des éléments postérieurs dont il se prévaut, telle que la survenance du décollement de la rétine et des douleurs de l’épaule droite consécutives à une chute dont il a été victime en 2017.

En outre, si le certificat médical initial annexé à la demande d’AAH fait état de difficultés modérées dans les déplacements de Monsieur Y Z à l’intérieur et à l’extérieur, ainsi que d’une limitation du périmètre de marche à 100 mètres, ce même certificat mentionne par ailleurs que l’intéressé n’éprouve aucune difficulté à s’orienter dans l’espace et dans le temps, et qu’il n’a pas besoin d’accompagnement pour ses déplacements extérieurs, précision y étant faite que son état de santé n’exclut pas l’exercice d’une activité adaptée ni la conduite d’un véhicule aménagé, de sorte que l’existence des difficultés précitées sont insuffisantes à établir à elles seules un retentissement sur l’emploi, à la date de la demande, étant observé que Monsieur Y Z ne démontre pas en quoi il lui aurait été impossible d’aménager son véhicule ou d’acquérir un véhicule adapté, afin d’élargir son périmètre de recherche d’une activité, ou d’une formation, en vue de favoriser sa réinsertion professionnelle.

Quant aux autres éléments médicaux utiles et contemporains à la demande du 18 octobre 2016, versés par Monsieur Y Z, à savoir le compte-rendu de consultation du Professeur Laffont du 21 juillet 2016 et celui du Docteur X du 27 septembre 2016, ils ne relatent aucune autre déficience que celles relevées par le médecin consultant ou que celles figurant dans le certificat médical initial susvisé, et, s’ils permettent de caractériser une contre indication à la pratique d’une marche prolongée, ou à la station debout prolongée, ou encore au port de charges, ils ne mettent toutefois en évidence aucune pénibilité à la station assise prolongée, ni n’interdisent l’exercice d’une activité compatible aux restrictions précitées.

Or, Monsieur Y Z ne produit aucun élément susceptible de démontrer que son handicap entraverait l’exercice d’une activité adaptée dans une durée supérieure ou égale à un mi-temps, en milieu ordinaire ou protégé, et ce alors même qu’il ne conteste pas avoir obtenu une maîtrise en droit privé, ni avoir suivi une formation à distance en comptabilité, ni avoir été gérant d’une société de 2004 à 2010 dans le domaine de l’informatique, et qu’il ne démontre aucunement que son handicap aurait été à l’origine de l’interruption de cette dernière activité, dont l’incompatibilité avec son état de santé n’est nullement avérée, ni que sa formation et que l’obtention de son diplôme n’auraient abouti sur aucun emploi du fait de ses déficiences.

De surcroît, Monsieur Y Z ne justifie d’aucune autre démarche contemporaine à la demande d’AAH du 18 octobre 2016 qui aurait été accomplie, compte tenu de ses diverses qualifications professionnelles, en vue de la recherche d’un emploi adapté à son état de santé, ni de difficultés rencontrées lors de ces éventuelles démarches qu’il aurait été impossible de compenser par un aménagement de poste sans que cela ne constitue des charges disproportionnées pour un employeur, ni même de la moindre tentative de reprise d’une activité professionnelle qui aurait échoué du fait de son handicap.

Il y a donc lieu de considérer, au regard de ce qui précède, que Monsieur Y Z, âgé de 42 ans et 10 mois au jour de la demande d’AAH du 18 octobre 2016, ne justifie pas, à ce moment-là, du caractère insurmontable de l’accès à l’emploi dû à son handicap, nécessaire à la reconnaissance d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

C’est donc à bon droit que le premier juge a considéré que l’intéressé ne remplissait pas les conditions requises pour l’attribution de l’AAH. Le jugement dont appel sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 juillet 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Montpellier;

Y ajoutant;

Déboute Monsieur Y Z de sa demande d’attribution de l’allocation aux adultes handicapées formée le 18 octobre 2016;

Dit n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991;

Laisse les dépens de la présente instance à la charge de Monsieur Y Z en application des dispositions de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1991 et des articles 695 et 696 du code de procédure civile;

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la juridiction le 14 avril 2021, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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