Cour d'appel de Paris, 15 septembre 2016, n° 14/11428

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 15 sept. 2016, n° 14/11428
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 14/11428
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Bobigny, JAF, 9 décembre 2013, N° 13/2797

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 3 – Chambre 3

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2016

(n° 277, 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 14/11428

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Décembre 2013 -Juge aux affaires familiales de BOBIGNY – RG n° 13/2797

APPELANT

M. E Y

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté et assisté de Me Amanda TARTOUR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1724,

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/019681 du 26/05/2014 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMÉE

Mme A Z épouse Y

née le XXX à XXX

XXX

XXX

Représentée et assistée de Me Thierry BENKIMOUN, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 16 Juin 2016, en chambre du conseil, devant la Cour composée de :

M. Christian RUDLOFF, Président de chambre

Mme Marie-Caroline CELEYRON-BOUILLOT, Conseillère

Mme C D, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Véronique LAYEMAR

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Christian RUDLOFF, président et par Véronique LAYEMAR, greffier.

Le mariage de M. E Y et Mme A Z, tous deux de nationalité sri-lankaise, a été célébré le 8 juin 1991, à Paris XVIIe, sans contrat préalable.

Trois enfants, dont une aujourd’hui majeure, sont issus de cette union :

Charuya, née le XXX,

Madoucha, née le XXX,

et Harsan, né le XXX.

Par jugement rendu le 10 décembre 2013, auquel il est référé pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny a notamment :

— prononcé le divorce des époux, aux torts exclusifs du mari,

— ordonné les mesures de publicité légale,

— dit que le divorce produirait ses effets dans les rapports entre les époux, en ce qui leurs biens, le 31 mai 2012, date de l’ordonnance de non-conciliation,

— condamné M. Y à payer à Mme Z une prestation compensatoire en capital de 80 000 € ,

— dit que les deux parents continueraient d’exercer conjointement l’autorité parentale,

— dit que le père exercerait un droit de visite et d’hébergement sur l’enfant Charuya librement et en accord avec la mère et l’enfant,

— dit que le père exercerait un droit de visite sur les enfants Madoucha et Harsan dans un espace rencontre (association ACPE), deux fois par mois, sans possibilité de sortie,

— dit que le père pourrait téléphoner à ses enfants une fois par semaine entre 17 heures 30 et 19'heures 30,

— fixé la contribution de M. Y à l’entretien et à l’éducation des enfants à la somme de 600 € , soit 200 € par mois et par enfant, avec indexation,

— condamné M. Y à payer à Mme Z la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— et condamné M. Y aux dépens.

M. Y a interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 27 mai 2014. Mme Z a constitué avocat le 8 octobre 2014 et n’a pas conclu.

Dans ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 31 mai 2016, M. Y demande à la cour de :

— le recevoir en son appel et le déclarer bien fondé,

— dire et juger applicable la loi française,

— infirmer le jugement en ses dispositions relatives à la prestation compensatoire, au droit de visite, à la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants et à l’article 700 du code de procédure civile,

— dire n’y avoir lieu à octroi d’une prestation compensatoire, en l’absence de disparité entre les parties crées par la rupture du lien conjugal,

— dire n’y avoir lieu à fixation d’un montant de la part contributive à l’entretien et à l’éducation des trois enfants communs, eu égard à son état d’impécuniosité,

— dire qu’il peut obtenir un droit de visite classique,

— confirmer le jugement entrepris en ses autres dispositions,

— condamner Mme Z aux entiers dépens de première instance et d’appel.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 7 juin 2016.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Sur la compétence et la loi applicable :

Considérant que les époux ayant tous les deux leur résidence habituelle en France, le juge français est compétent pour statuer sur les demandes relatives au divorce, quelle que soit leur nationalité, en application de l’article 3 du règlement 2201-2003 du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale ;

Considérant que les enfants mineurs ont leur résidence habituelle en France; que le juge français est compétent pour statuer sur les modalités d’exercice de la responsabilité parentale à l’égard des enfants, en application de l’article 8 de ce même règlement ;

Qu’en raison de la résidence en France de toutes les parties, le juge français est compétent pour statuer sur les demandes relatives aux obligations alimentaires, prestations compensatoire et contribution à l’éducation et l’entretien des enfants, en application de l’article 3 du règlement n° 4/2009 du 18 décembre 2008, relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions et la coopération en matière d’obligations alimentaires ;

Considérant qu’à la date à laquelle l’action en divorce a été introduite par Mme Z, le 3 avril 2012, le règlement règlement (UE) n° 1259/2010 du 20 décembre 2010 mettant en 'uvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps n’était pas entré en application; qu’aucune convention relative à la loi applicable au divorce n’avait été passée entre les époux qui aurait justifié l’application de ce règlement à l’instance en vertu de l’alinéa 2 de l’article 18 1.; que le divorce des époux Y/Z est régi par la loi française en application de l’alinéa 2 de l’article 309 du code civil, les époux ayant l’un et l’autre leur domicile en France ;

Considérant qu’en application de l’article 15 de la convention de La Haye du 19 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection concernant les enfants, entrée en vigueur en France antérieurement à l’introduction de la présente procédure, le juge français compétent pour statuer en matière de responsabilité parentale applique sa loi ;

Considérant que le règlement CE n° 4/2009 renvoie pour la loi applicable au protocole de la Haye du 23 novembre 2007 sur la loi applicable aux obligations alimentaires qui lui-même prévoit que la loi de l’État de la résidence habituelle du créancier régit les obligations alimentaires sauf quand celle-ci ne permet pas au créancier d’obtenir d’aliments du débiteur, auquel cas le juge saisi applique sa loi; que toutes les parties résidant en France, c’est la loi française qui s’applique en matière alimentaire ;

Sur l’étendue de la saisine de la cour :

Considérant que bien que l’appel soit général, et nonobstant les observations développées dans les motifs de ses conclusions sur le prononcé du divorce, l’appelant n’entend, aux termes de son dispositif, voir infirmer le jugement qu’en ce qui concerne la prestation compensatoire, la contribution à l’éducation et l’entretien des enfants, le droit de visite et la condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile; que les autres dispositions du jugement, non critiquées, sont confirmées ;

Sur la prestation compensatoire :

Considérant que le divorce met fin au devoir de secours entre époux Xque selon les dispositions des articles 270 et 271 du code civil, l’un des conjoints peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage créé dans les conditions de vie respectives; que cette prestation, qui a un caractère forfaitaire, est fixée selon les besoins de l’époux à qui’ elle est versée et les ressources de l’autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ;

Considérant que dans la détermination des besoins et des ressources, le juge a notamment égard à :

— la durée du mariage,

— l’âge et l’état de santé des époux,

— leur qualification et leur situation professionnelles,

— les conséquences des choix professionnels fait par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faut encore y consacrer ou’ pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne,

— le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital’ qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial,

— leurs droits existants et prévisibles,

— leur situation respective en matière de pension de retraite ;

Considérant que le mariage a duré 25 ans, dont 21 ans jusqu’à l’ordonnance de non conciliation; que les époux sont âgés, le mari de 55 ans et l’épouse de 48 ans; qu’il n’est pas allégué de problème de santé ;

Considérant qu’en première instance, l’épouse avait déclaré percevoir 1 112 € d’allocation sociales et familiales et avoir travaillé de façon non déclarée pour le compte de l’agence Money Gram gérée par son mari; que la production par M. Y de bulletins de salaire de la société MS TELECOM d’avril à octobre 2011 confirme les dires de l’épouse sur le fait qu’elle aurait travaillé pour cette société; que le cumul imposable perçu par celle-ci pour cette période s’élevait à 2 379 € ;

Considérant qu’il résulte du relevé des trimestres travaillés par M. Y établi par la caisse de retraite que celui-ci a régulièrement travaillé dans des commerces de restauration ou de bar depuis 1987, chez le même employeur de 1991 à 2010, son dernier salaire de référence pour une année complète étant de 20 121 € en 2009; qu’il a alterné par la suite les périodes de CDD et les allocations de Pôle emploi; que son avis d’imposition 2013 sur revenus 2012 fait état d’un revenu de 13 929 € et l’avis 2014 sur les revenus 2013 d’un revenu de 6 392 € ; qu’il a déclaré en 2014 un revenu de 12 128 € ; qu’il a été admis au bénéfice de l’ASS le 30 octobre 2013 et que le dernier relevé produit fait état d’un montant d’indemnités de 467 € pour novembre 2014 et de 499 € pour décembre 2014; qu’il a conclu le 28 janvier 2015 un contrat à durée indéterminée partiel, de barman de 21 heures par semaine moyennant un salaire mensuel brut de 960 € ;

Considérant que le premier juge a constaté l’existence de mouvement de fonds importants, dépôts et retraits, sur le compte de l’époux, d’août à décembre 2011 et également sur le compte joint des époux, dont M. Y ne contestait pas avoir la seule gestion; que M. Y ne donne en appel aucune explication sur ces mouvements; qu’il conteste avoir exercé la gérance de fait de la société MS TELECOM mais reconnaît y avoir été salarié; qu’il peut être noté que la société MS TELECOM était une structure qui travaillait avec la société Money Gram dont l’activité est le transfert d’argent et que la première a perçu de la seconde des commissions (sur les transactions de février 2011, 358 € , de mars 2011, 813 €, de novembre 2011, 6 536 €, de décembre 2011, 4'350'€, de janvier 2012, 3 130 €, de février 2012, 4 229 €, de mars 2012, 10 119 €, d’ avril 2012, 8 322 €, de mai 2012, 12 194 €, de juin 2012, 14 684 € ) ;

Considérant que le premier juge a justement observé que le train de vie de M. Y était en disproportion avec la faiblesse de ses ressources allégués; qu’il résulte du plan établi par la Commission de surendettement pour M. Y que les mensualités de crédits immobilier et à la consommation du couple s’élevaient à 1 198 € , soit un montant supérieur à ce qu’il déclarait percevoir, y compris avant la séparation du couple, mensualités qui ont été réglées jusqu’à la survenance des problèmes de couple; que devant la cour encore, M. Y qui se disait hébergé par sa s’ur puis par un ami, justifie avoir souscrit un contrat de location meublé pour un an de septembre 2015 à septembre 2016, pour un loyer de 620 € par mois, alors que le seul revenu qu’il déclare percevoir à cette époque est de 960 € brut; qu’il résulte de ces éléments que les ressources réelles de M. Y sont supérieures à celles qu’il déclare; que si l’opacité qu’il entretient sur sa situation effective ne permet pas d’en apprécier la mesure, il peut être retenu qu’il se trouve dans une situation plus favorable que celle de son épouse ;

Considérant que l’épouse n’a pas revendiqué devant le premier juge avoir fait des choix professionnels ayant bénéficié à son époux ;

Considérant que compte tenu du montant des revenus déclarés par les époux, leur situation de retraite sera très modeste ;

Considérant que les époux sont propriétaires d’un pavillon acquis le 18 octobre 2006 pour 215 000 € et dont la valeur retenue par la Commission de surendettement en avril 2015 est de 300 000 € ; qu’il résulte du plan de surendettement qu’à cette date, le passif de communauté s’élevait à 256'601 € , se décomposant 83 413 € de mensualités impayées et 173 188 € de capital restant dû (156 998 € pour le crédit immobilier et 16 189 € pour les crédits à la consommation) ;

Considérant qu’il résulte de ces éléments que le divorce crée une disparité dans les conditions de vie respectives des parties qu’il y a lieu de compenser par l’allocation d’une somme de 25 000 € à l’épouse; que la décision dont appel est infirmée de ce chef ;

Sur la contribution à l’éducation et l’entretien des enfants :

Considérant qu’il résulte des dispositions des articles 371-2 et 373-2-2 du Code civil que chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses capacités contributives et des besoins des enfants, soit directement, soit par le versement d’une pension versée par l’un des parents à l’autre; que cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l’enfant est majeur, le parent qui assume à titre la charge principale d’un enfant majeur qui ne peut lui-même subvenir à ses besoins pouvant demander à l’autre de verser une contribution à son éducation et son entretien ;

Considérant que compte tenu de l’opacité entretenue par M. Y sur sa situation effective, il n’y a pas lieu de faire droit à sa demande visant à voir dire qu’il n’y a pas lieu à fixation d’une contribution à l’éducation et l’entretien des enfants compte tenu de son état d’impécuniosité; qu’il y a donc lieu de maintenir la pension alimentaire telle que fixée par le premier juge; que la décision dont appel est confirmée de ce chef ;

Considérant en revanche qu’il n’est pas établi que l’enfant majeure soit toujours à la charge de sa mère, alors même que Mme Z elle-même déclarait devant le premier juge qu’elle avait travaillé pour la société Money Gram; qu’il y a donc lieu de supprimer la pension fixée pour elle à compter de la présente décision ;

Sur le droit de visite :

Considérant que chacun des père et mère doit maintenir des relations avec l’enfant et respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent; qu’il est de l’intérêt de l’enfant et du devoir de chacun des parents de favoriser ces relations ; que selon les dispositions de l’article 373-2-1 du Code civil, l’exercice du droit de visite et d’hébergement ne peut être refusé à l’autre parent que pour des motifs graves ;

Considérant que le droit de visite en lieu neutre organisé dans la décision dont appel avait une durée de douze mois à compter du premier entretien ;

Considérant que M. Y soutient que ces visites médiatisés n’ont pas pu se mettre en place compte tenu du refus de la mère et des horaires du centre désigné; que cependant les visites médiatisées prévues par le premier juge n’étaient en aucun cas sous tendues à l’accord de la mère comme le soutient l’appelant; que s’il rencontrait des difficultés de coordination entre son emploi du temps et les heures d’ouverture du lieu d’accueil, il lui appartenait de soumettre ces difficultés au juge afin de voir désigner un autre centre en donnant son propre emploi du temps, ce qu’il ne fait pas devant la cour; que selon le père il ne voit plus ses enfants depuis des années, ce qui rend nécessaire une reprise de contact médiatisée; que compte tenu de ces éléments, il y a lieu de confirmer la décision dont appel sur ce point ;

Sur les frais et dépens :

Considérant que c’est par une exacte application de la loi que le premier juge a condamné le mari aux torts de qui le divorce était prononcé aux dépens et l’ a condamné en conséquence à régler les frais et honoraires non compris dans les dépens; que la décision dont appel est confirmée sur ce point ;

Considérant que si le montant de la prestation compensatoire à sa charge a été modifié par la cour, M. Y succombe en ses autres demandes en appel; que le divorce prononcé à ses torts exclusifs est confirmé; qu’il y a donc lieu de mettre à sa charge les dépens de l’appel ;

PAR CES MOTIFS :

Infirme partiellement le jugement prononcé le 10 décembre 2013 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris en ses dispositions relatives à la prestation compensatoire ainsi qu’à la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant Charuya pour la période postérieure à cet arrêt,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Fixe à 25 000 € la prestation compensatoire due par le mari à l’épouse,

Supprime à compter du présent arrêt la contribution due par le père pour l’entretien et l’éducation de l’enfant majeure Charuya,

Confirme pour le surplus le jugement déféré,

Condamne M. Y aux dépens.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel de Paris, 15 septembre 2016, n° 14/11428