Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 19 janvier 2017, n° 15/09973

  • Associations·
  • Trouble manifestement illicite·
  • Saisie conservatoire·
  • Chercheur·
  • Lot·
  • Invention·
  • Ordonnance·
  • Demande·
  • Huissier de justice·
  • Dépositaire

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 2, 19 janv. 2017, n° 15/09973
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/09973
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 11 décembre 2014, N° 14/60224
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 1 – Chambre 2 ARRET DU 19 JANVIER 2017 (n° 43, 7 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 15/09973

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Décembre 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 14/60224

APPELANTS

Monsieur J K

XXX

XXX

né le XXX à XXX

Monsieur D E

XXX

XXX

né le XXX à XXX

Monsieur T U

XXX

XXX

né le XXX à XXX

Monsieur AC AD

XXX

XXX

né le XXX à XXX

Monsieur H I

XXX

né le XXX à XXX

Monsieur AK-AL AM

XXX

XXX

né le XXX à TUNIS

Association CHERCHEURS DE LA CHOUETTE D’OR

XXX

XXX

Représentés et assistés par Me Geneviève SROUSSI de la SARL ALIENCE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0072

INTIMES

Monsieur AE AF

XXX

XXX

Représenté par Me Sabrina DUSZ, avocat au barreau de PARIS, toque : PC 63

Assisté par Me Pascal COUTURIER, avocat au barreau de LYON

Maître Sandrine MANCEAU

XXX

XXX

Représenté par Me Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS,

toque : P0241

Assisté par Me Marie Françoise MONNET, avocat au barreau de PARIS, toque : A0444

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Décembre 2016, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant M. Bernard CHEVALIER, Président, et Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard CHEVALIER, Président Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. N O

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Bernard CHEVALIER, président et par M. N O, greffier.

En avril 1993, les éditions Manya ont publié un livre intitulé « Sur les traces de la Chouette d’or », écrit par L B, aujourd’hui décédé, sous le pseudonyme de Max VALENTIN et illustré par M. AE AF, artiste peintre et sculpteur.

Cet ouvrage propose une chasse au trésor composée de onze énigmes afin de trouver la contremarque en bronze, enterrée en France, d’une 'uvre de joaillerie représentant une chouette, appelée « chouette d’or » réalisée par M. AE AF et lot de ce jeu.

Selon cet ouvrage, la chouette d’or était initialement déposée dans un coffre dont Me Llouquet, huissier de justice dépositaire du règlement du jeu, auquel a succédé Me Manceau, détenait la clé.

En 2004, la société IN FOLIO, dernier éditeur du livre et détenteur de ce coffre a été déclarée en liquidation judiciaire et tant L B que M. AE AF en ont revendiqué la propriété, le liquidateur, Me Z de X, considérant la Chouette d’or comme un actif de cette société.

Par un arrêt du 15 janvier 2009, la Cour d’appel de Versailles a, notamment :

— 'statuant sur l’action en revendication de M. AE AF déclarée recevable, fait droit à cette action dans les limites d’exercice du droit de propriété,

— ordonné à Me Z de X, es qualités, de restituer la chouette d’or à M. AE AF en la remettant, dans le mois de la signification de l’arrêt, à Me MANCEAU, huissier de justice dépositaire du règlement du jeu dont la statuette est le lot'.

Me Manceau ayant refusé de se voir remettre la chouette d’or, Me Z de X l’a remise à M. AE AF.

Poursuivant la saisie conservatoire de la chouette d’or et l’obtention de diverses informations, l’Association des chercheurs de la Chouette d’or (l’association) et six de ses membres (les chouetteurs), ont fait assigner au visa de l’article 809-1 du code de procédure civile M. AE AF, Me Manceau et Me Z de X, en qualité de liquidateur de la société In Folio devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris qui, par ordonnance contradictoire du 12 décembre 2014, a :

— dit les demandeurs recevables en leurs demandes ;

— dit M. C recevable en son intervention volontaire aux côtés des demandeurs ; – constaté que les informations réclamées à Me Manceau et à Me Z de X soit étaient connues des demandeurs avant l’audience, soit ressortent des éléments échangés dans le cours du débat ;

— dit en conséquence n’y avoir lieu de leur ordonner de les fournir à nouveau ; '

— dit, en l’absence de trouble manifestement illicite, n’y avoir lieu à référé sur les demandes formées à l’encontre de M. AE AF ;

— déclaré être incompétent pour statuer sur la demande reconventionnelle en mainlevée de saisie conservatoire formulée par M. AE AF ;

— dit n’y avoir lieu de déclarer la présente décision opposable à Mme B ;

— dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 code de procédure civile;

— condamné les demandeurs aux dépens.

L’association des chercheurs de la Chouette d’or et six chouetteurs , appelants de cette décision, demandent à la cour, par conclusions transmises par Y le 29 novembre 2016, de :

— la confirmer en ce qu’elle a jugé recevables leurs demandes,

— l’infirmer en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à faire cesser un trouble manifestement illicite,

— 'faire droit à leur demande de saisie conservatoire',

— ordonner, sous astreinte, à M. AE AF de remettre l’original de l''uvre à Me AL Farruch, Huissier de justice à XXX, qui accepte d’en assumer la garde jusqu’à la découverte de la contremarque,

— prendre acte de leur engagement d’assumer le coût de la location du coffre dans lequel sera entreposé l’oeuvre originale ainsi que le coût des honoraires de Me Farruch,

— débouter Me Manceau de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. AE AF à leur payer une indemnité de procédure de 600 € chacun et aux dépens.

Ils soutiennent que le jeu a motivé plus de 100.000 chouetteurs et donné lieux à trois éditions du livre, en 1993, 1994 et 1997, qui a été tiré à 70.000 exemplaire et que M. AE AF a récupéré la chouette d’or dans des conditions irrégulières puisque :

— le règlement du jeu fait du gagnant le propriétaire de la chouette d’or,

— l’arrêt précité rendu par la cour d’appel de Versailles a restreint le droit de propriété de M. AE AF et a ordonné à Me Z de X, es qualités, la remise de la statuette d’Or à Me Manceau, es qualités,

— M. AE AF ne peut révoquer unilatéralement son engagement s’agissant d’une oeuvre commune.

M. AE AF, intimé, par conclusions transmises par Y le 17 novembre 2016, demande à la cour de : – l’infirmer en ce qu’elle a jugé recevables les demandes de l’Association et des « chouetteurs » formées à son encontre,

— dire ces demandes irrecevables et non fondées,

Reconventionnellement,

— réformer l’ordonnance entreprise en ce que Mme la présidente du tribunal de grande instance de Paris s’est déclarée incompétente pour ordonner la main levée de la saisie conservatoire de la Chouette d’Or pratiquée entre ses mains ,

— ordonner pareille main levée en conséquence,

— rejeter la suggestion des appelants de substituer Me Farruch, huissier de justice à Me Manceau, huissier de justice également,

— condamner l’Association à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive, et chacun des « Chouetteurs » à lui payer la somme de 500 euros au même titre,

— condamner l’Association à lui payer une indemnité de procédure de 5. 000 euros et chacun des « Chouetteurs » à lui payer la somme de 500 euros, au même titre,

— condamner les mêmes aux dépens.

Il soutient que les appelants ne démontrent aucun intérêt à agir motif pris de ce que la découverte de la contremarque est devenue chimérique et qu’il est fondé, en l’absence d’inventeur, à révoquer l’engagement unilatéral pris il y a de plus de 20 ans de remettre la chouette d’or au gagnant puisque le code civil prohibe les engagements perpétuels.

Me Manceau, intimée, par conclusions transmises par Y le 16 novembre 2016, demande à la cour de :

— confirmer l’ordonnance entreprise,

— condamner l’Association et les chouetteurs à lui payer chacun une indemnité de procédure de 1.000 € et aux dépens dont distraction.

Elle soutient que si elle est dépositaire du règlement de jeu en sa qualité d’héritière de Me Llouquet, elle ne s’est vue confier aucun mandat la désignant comme gardien de l’oeuvre originale jusqu’à son invention et qu’on ne peut lui reprocher de n’avoir pas exécuté un arrêt auquel elle n’était pas partie.

M. A C et Me Z de X, es qualités, ne sont ni appelants ni intimés.

La cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Les chefs du dispositif de l’ordonnance entreprise relatifs à la communication d’information, à l’opposabilité de l’arrêt à intervenir à Mme B et à l’intervention volontaire de M. A C n’étant pas critiqués doivent être confirmés.

Sur l’intérêt à agir de l’association et des 'chouetteurs’ Vu l’article 32 du code de procédure civile,

L’ordonnance entreprise a retenu la recevabilité des demandes de l’association et des chouetteurs par des motifs pertinents que la cour adopte, tirés de ce que la conservation du lot du jeu litigieux jusqu’à son invention entre dans l’objet social de la première et que les chouetteurs disposent d’un principe de créance pour obtenir cet lot.

En appel, M. AE AF ne s’explique pas sur les conditions requises par les statuts de l’association pour agir en justice que celle-ci n’aurait pas respectées et n’étaye pas non plus son affirmation sur le caractère désormais chimérique de l’espoir de découverte de la contremarque.

Sa demande tendant à l’irrecevabilité des demandes des appelants ne peut donc être accueillie et l’ordonnance entreprise doit en conséquence être confirmée de ce chef.

Sur le trouble manifestement illicite

Aux termes de l’article 809 alinéa 1er du code de procédure civile, la juridiction des référés peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite désigne toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou non, constitue une violation évidente de la règle de droit.

Pour prétendre à la remise de la chouette d’or à un huissier jusqu’à son invention, l’association et les chouetteurs soutiennent que l’inexécution de l’arrêt précité de la cour d’appel de Versailles comme la conservation de la statuette par son créateur qui entend en disposer librement constituent un trouble manifestement illicite.

Toutefois, l’inexécution de l’arrêt de la cour d’appel de Versailles en ce qu’il a ordonné la remise par Me Z de X, es qualités, de la chouette d’or à Me Manceau, en qualité de dépositaire du règlement du jeu dont cette chouette est le lot ne constitue un tel trouble.

En effet, le refus de cette dernière de la recevoir n’apparaît pas manifestement préjudiciable aux appelants dès lors que :

— elle n’était pas partie à cet arrêt,

— la réalité de sa mission de garde de ce prix jusqu’à son invention, qu’elle conteste, n’est établie par aucun document contractuel qui l’engage à l’évidence,

— aucune disposition du règlement du jeu, qui se borne à indiquer que celui-ci est déposé chez Maître Llouquet, huissier de justice, ne concerne la préservation du lot,

— la mention portée en page 18 de l’ouvrage selon laquelle la chouette d’or 'est placée depuis l’été 1993 sous la garde de [cet huissier] et a fait l’objet d’un procès verbal de mise en coffre en bonne et due forme’ n’est pas corroborée par la production de ce document ni d’aucune pièce qui détaille les conditions et limites de cette mission.

De même, le refus de restitution de ce lot par M. AE AF dont il n’est pas contesté qu’il en est le propriétaire ne constitue pas un trouble manifestement illicite.

En effet, ainsi que l’a justement retenu le juge des référés, en l’absence dans le débat actuel des pièces visées par la cour d’appel de Versailles dans les motifs de l’arrêt cité ci-dessus, la nature et l’étendue des restrictions au droit de propriété de M. AE AF, qu’il conteste, demeurent ignorées.

A cet égard, le règlement du jeu n’est à l’évidence d’aucun secours en ce que, comme il a été dit, il ne comporte aucune disposition relative à la préservation du lot de ce jeu dont il est seulement précisé qu’il est une statuette représentant une chouette en or, argent et pierres sculptée par M. AE AF d’une valeur d’environ un million de francs et que son inventeur, qui en sera de ce fait propriétaire, devra respecter les obligations que ce règlement détaille.

Il en est de même, ainsi qu’il a été dit de la mention précitée portée en page 18 de l’ouvrage.

Il s’ensuit qu’à supposer même que M. AE AF et L B soient coauteurs de ce prix, les conditions de l’exploitation de l’oeuvre prétendument commune n’étant pas connues, les appelants ne sont pas fondés à prétendre que la détention de la chouette d’or par son propriétaire et son intention d’en disposer librement portent manifestement préjudice à son exploitation, au sens de l’article L113-3 du code de la propriété intellectuelle, alors au demeurant que les héritiers de L B ne sont pas dans la cause.

Il n’y a donc pas lieu à référé sur les demandes formées à l’encontre de M. AE AF concernant la saisie conservatoire de la chouette d’or et l’ordonnance entreprise doit être confirmée de ce chef.

Sur la demande reconventionnelle de M. AE AF

M. AE AF sollicite l’infirmation de l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a dit la juridiction saisie incompétente pour ordonner la main levée de la saisie conservatoire de la chouette d’or pratiquée entre les mains de M. AE AF, sans plus de précision.

La cour en déduit qu’il s’agit de la rétractation de l’ordonnance rendue le 12 juin 2014 par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Brive la Gaillarde.

Cette demande d’infirmation qui n’est nullement étayée n’est manifestement pas sérieuse, l’ordonnance en cause n’étant pas même citée précisément, ne serait-ce que par renvoi aux pièces produites, ni versée aux débats par les soins de M. AE AF.

L’ordonnance entreprise sera donc confirmée de ce chef par motifs adoptés, tirés de ce que cette demande relève de la compétence exclusive du juge de l’exécution qui a rendu la décision contestée.

Sur les demandes accessoires

La demande en dommages-intérêts de M. AE AF qui n’est pas soutenue ne peut être accueillie.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Les appelants, partie perdante, doivent supporter la charge des dépens conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

Il s’ensuit que l’ordonnance entreprise doit être confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant , REJETTE toute autre demande ;

DIT n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l’Association des chercheurs de la Chouette d’or ainsi que M. J K, M. D E, M. T U, M. AC AD, M. H I et M. AK-AL AM, appelants, aux dépens d’appel, distraits conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 19 janvier 2017, n° 15/09973