Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 5, 11 juin 2019, n° 19/06494

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 5, 11 juin 2019, n° 19/06494
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/06494
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Rennes, 13 février 2019, N° 18/00788
Dispositif : Radie l'affaire pour défaut d'exécution de la décision de première instance

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 5

ORDONNANCE DU 11 JUIN 2019

(n° /2019)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/06494 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7S3L

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Février 2019 Tribunal de Grande Instance de RENNES – RG n° 18/00788

Nature de la décision : Contradictoire

NOUS, Anne BEAUVOIS, Présidente, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Cécilie MARTEL, Greffière.

Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :

DEMANDERESSE :

SOCIÉTÉ COOPERL ARC ATLANTIQUE

[…]

[…]

[…]

Représenté par la SELARL BDL Avocats, avocats postulant au barreau de PARIS, toque : P0480

Assistée de Me Frédéric BELOT de l’AARPI BELOT MALAN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0574

à

DÉFENDERESSE :

SAS KWS MOMONT

[…]

[…]

Représentée par Me Mathilde DAUMAS-CONDOMINES substituant Me Raphaël DALMAS de l’AARPI ASTURA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1044

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 14 Mai 2019 :

Par ordonnance rendue le 14 février 2019, le tribunal de grande instance de Rennes a, en substance, rejeté l’exception d’incompétence de la société coopérative agricole COOPERL Arc Atlantique, lui a ordonné de reprendre la relation commerciale précédemment établie avec la société par actions simplifiée KWS Momont pour l’année 2017-2018 en lui passant commandes d’un certain nombres de doses de semences de maïs, ce sous astreinte, l’a condamnée à lui payer une provision de 344 642,95 euros, outre une indemnité de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Le 5 mars 2019, la société COOPERL Arc Atlantique a interjeté appel de cette décision.

Par acte d’huissier de justice en date du 19 avril 2019, la société COOPERL Arc Atlantique a fait assigner la société KWS Momont sur le fondement de l’article 524 du code de procédure civile devant le premier président de la cour d’appel de Paris.

A l’audience du 14 mai 2019, la société COOPERL Arc Atlantique, reprenant oralement ses conclusions déposées à l’audience, demande au premier président , à titre principal, la suspension de l’exécution provisoire de droit de la décision précitée, à titre subsidiaire, son aménagement et l’autorisation de consigner la provision mise à sa charge par l’ordonnance précitée auprès de la CARPA, à titre infiniment subsidiaire, au titre de l’article 917 alinéa 2 du code de procédure civile, de constater que ses droits sont en périls et de l’autoriser à assigner la société KWS Momont à jour fixe le 17 juin 2019 dès lors qu’une audience est déjà fixée à cette date, en tout état de cause, de condamner la société KWS Momont à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société KWS Momont, développant oralement ses écritures déposées au greffe de la cour le 30 avril 2019, demande, à titre principal, le débouté de la société COOPERL Arc Atlantique de l’ensemble de ses demandes principale et subsidiaire, en conséquence, la confirmation de l’exécution provisoire de droit, ainsi que la condamnation de la société COOPERL Arc Atlantique à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens et reconventionnellement, sollicite la radiation du rôle de la cour d’appel de Paris de l’affaire enregistrée au fond sous le n° RG 19/04464.

Il est expressément renvoyé à l’acte introductif d’instance et aux écritures déposées et soutenues à l’audience pour un exposé détaillé des moyens et des arguments des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la demande de suspension de l’exécution provisoire de droit

En application de l’article 524, dernier alinéa, du code de procédure civile, le premier président peut arrêter l’exécution provisoire de droit en cas de violation manifeste du principe de la contradiction ou de l’article 12 du code de procédure civile et lorsque l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

Ces conditions sont cumulatives.

Les conséquences manifestement excessives s’apprécient par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision assortie de l’exécution provisoire.

Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d’infirmation.

La société COOPERL Arc Atlantique soutient que le président du tribunal de grande instance de Rennes, statuant en référé, en la condamnant au-delà des mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposaient, non seulement à reprendre la relation commerciale sous astreinte à des tarifs supérieurs à ceux proposés par la société KWS Momont mais également au paiement d’une provision, réparant deux fois le même préjudice, a contrevenu au principe de réparation intégrale du préjudice, et ainsi commis un excès de pouvoir, ajoutant que la société KWS Momont n’apporte pas la preuve du caractère certain du préjudice qu’elle prétend avoir subi aux motifs que les sentences de maïs n’ont pas de durée limitée et qu’elles peuvent convenir à n’importe quel utilisateur final.

Aux termes de l’article 489 du code de procédure civile, l’ordonnance de référé est exécutoire à titre provisoire.

L’erreur commise par un juge dans l’interprétation ou l’application d’une règle de droit ne constitue pas une violation de l’article 12 du code de procédure civile.

En l’espèce, la société KWS Momont soutenait devant le juge des référés que la société COOPERL Arc Atlantique qui lui passait commande chaque année depuis 2003 de semences de maïs, à l’automne 2017, avait brutalement refusé, sans préavis et pour des motifs fallacieux, d’y procéder, et sollicitait en conséquence, au visa des articles 446-2 du code de commerce et 809 du code de procédure civile, la reprise de la relation commerciale établie et à titre provisionnelle une somme correspondant selon elle à sa perte de marge. La société COOPERL Arc Atlantique a fait valoir ses moyens en droit et en fait devant le juge des référés qui a statué par une décision motivée.

A considérer même que le juge des référés ait alloué à la société KWS Momont une indemnité provisionnelle qui excéderait le montant du préjudice réellement subi ou sans que ce préjudice soit certain, comme le soutient la société COOPERL Arc Atlantique, cette circonstance ne constituerait pas une violation manifeste de l’article 12 du code de procédure civile.

En outre, il n’entre pas dans les pouvoirs du premier président d’apprécier la validité et le bien-fondé de la décision entreprise de sorte que les observations faites sur ce point par la société COOPERL Arc Atlantique sont inopérantes.

Dès lors, après avoir dit qu’à l’évidence, la rupture de la relation commerciale établie entre la société COOPERL Arc Atlantique et la société KWS Momont était brutale, le juge des référés n’a pas manifestement contrevenu à l’article 12 du code de procédure civile, en ordonnant d’une part, en application des articles L. 442-6 du code de commerce et 809 alinéa 1er du code de procédure civile, des mesures de nature à faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de cette rupture brutale, d’autre part, en condamnant la société COOPERL Arc Atlantique à une provision en application de l’article 809 alinéa 2 du code de procédure civile, destinée à réparer un préjudice dont il a estimé qu’il était déjà subi, malgré la reprise de la relation ordonnée.

La société COOPERL Arc Atlantique doit, en conséquence, être déboutée de sa demande de suspension de l’exécution provisoire de l’ordonnance de référé, l’une des conditions exigées par de l’article 524, dernier alinéa, du code de procédure civile n’étant pas remplie.

Sur la demande de mise sous séquestre de la provision

La société COOPERL Arc Atlantique sollicite subsidiairement à être autorisée à séquestrer la provision au paiement de laquelle elle a été condamnée au motif qu’elle craint que la société KWS Momont ne la lui restitue pas en cas d’infirmation de l’ordonnance par la cour d’appel de Paris. Elle fait valoir que l’ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance de Rennes représente le versement d’une somme totale supérieure à 900 000 € et que la société KWS Momont présente depuis plusieurs années des éléments comptables faisant état d’une très mauvaise santé financière.

En application de l’article 524, 3e alinéa, lorsque que l’exécution provisoire est de droit, le premier président peut prendre les mesures prévues au 2e alinéa de l’article 521 et à l’article 522 du même code.

Le 2e alinéa de l’article 521 du code de procédure civile est réservé au condamnation au versement d’un capital en réparation d’un dommage corporel et l’article 524 du même code autorise la substitution d’une garantie équivalente à la garantie primaire.

Ainsi, aucune de ces dispositions n’autorise le délégataire du premier président à ordonner le séquestre de la provision à valoir sur la réparation du préjudice résultant de la rupture brutale de la relation commerciale établie au paiement de laquelle la société COOPERL Arc Atlantique a été condamnée. La demande de cette société de ce chef est donc rejetée.

Sur la demande de radiation de la société KWS Momont

La société KWS Momont sollicite reconventionnellement dans ses écritures reçues au greffe de la cour le 30 avril 2019 la radiation de l’appel sur le fondement de l’article 526 du code de procédure civile.

L’article 526 du code de procédure civile dispose que : « Lorsque l’exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu’il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d’appel, décider, à la demande de l’intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l’affaire lorsque l’appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d’appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l’article 521, à moins qu’il lui apparaisse que l’exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l’appelant est dans l’impossibilité d’exécuter la décision.

La demande de l’intimé doit, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, être présentée avant l’expiration des délais prescrits aux articles 905-2,909,910 et 911. »

Il résulte de la combinaison des articles 905-2 et 526 du code de procédure civile que la société KWS Momont qui a présenté sa demande de radiation dans ses conclusions du 30 avril 2019 est recevable en cette demande, ce que ne conteste pas la société COOPERL Arc Atlantique laquelle ne discute pas avoir signifié ses conclusions d’appelant le 2 avril 2019.

La société COOPERL Arc Atlantique ne justifie pas de l’exécution de la décision dont elle a relevé appel. Elle dispose manifestement des ressources financières nécessaires pour régler la provision puisqu’elle a proposé d’en consigner le montant et ne fait pas valoir qu’elle ne serait pas en mesure de procéder aux commandes prescrites au titre de l’année 2017-2018.

En revanche, elle soutient que l’exécution de la décision aurait des conséquences manifestement excessives eu égard aux facultés de remboursement de la société KWS Momont dans l’hypothèse où l’ordonnance serait infirmée.

Cependant, la société KWS Momont soutient à juste titre que même si elle a connu un résultat déficitaire sur l’exercice 2017-2018 lequel pourrait au moins en partie résulter des agissements de la société COOPERL Arc Atlantique à son égard et qui motivent la décision du juge des référés, ses comptes font apparaître un résultat net bénéficiaire au 30 juin 2017, une croissance constante de son chiffre d’affaires et un ratio d’endettement modéré, de sorte que le risque de conséquences manifestement excessives allégué par la société COOPERL Arc Atlantique, en cas d’exécution par celle-ci de l’ordonnance rendue, n’est pas avéré, devant être rappelé que l’exécution provisoire est poursuivie aux risques et périls du créancier lequel n’ignore pas qu’en cas d’infirmation, il devra restituer les sommes encaissés.

Il y a donc lieu de faire droit à la demande de radiation de la société KWS Momont.

Sur la demande de fixation prioritaire de la société COOPERL Arc Atlantique

A titre infiniment subsidiaire, la société COOPERL Arc Atlantique sollicite d’être autorisée à assigner à jour fixe la société KWS Momont, en application de l’article 917 alinéa 2 du code de procédure civile.

Mais, au regard de ce qui précède, la société COOPERL Arc Atlantique ne justifie pas que ses droits seraient en péril. Sa demande de ce chef est rejetée.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

La société COOPERL Arc Atlantique qui succombe en ses prétentions, doit supporter la charge des dépens conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de la condamner à payer à la société KWS Momont une indemnité de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Rejetons toutes les demandes de la société COOPERL Arc Atlantique.

Ordonnons la radiation de l’affaire opposant la société COOPERL Arc Atlantique à la société KWS Momont (déclaration d’appel n°19/05134, RG n°19/04464), du rôle de la cour d’appel.

Condamnons la société COOPERL Arc Atlantique à payer à la société KWS Momont une indemnité de 4 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamnons la société COOPERL Arc Atlantique aux dépens.

ORDONNANCE rendue par Mme Anne BEAUVOIS, Présidente, assistée de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente de la mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente

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Textes cités dans la décision

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  2. Code de procédure civile
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