Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 5 janvier 2022, n° 20/07250

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Cabinet Neu-Janicki · 15 mai 2022

Un bailleur ne peut pas, après avoir offert le renouvellement du bail commercial, puis exercé son droit d'option, finalement exercer son droit de repentir. le renouvellement du bail commercial est acquis définitivement au bénéfice du Preneur. Pour mémoire: En application des dispositions de l'article L. 145-57 du code de commerce, le bailleur qui a proposé le renouvellement du bail commercial peut exercer son droit d'option et refuser le renouvellement du bail, même si le principe en est acquis, à la condition qu'aucun accord entre le preneur et le bailleur ne soit intervenu sur le …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 3, 5 janv. 2022, n° 20/07250
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/07250
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Évry, 7 décembre 2016, N° 16/08302
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRET DU 05 JANVIER 2022

(n° , 9 pages)


Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/07250 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB3EB


Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Décembre 2016 -Tribunal de Grande Instance d’EVRY


- RG n° 16/08302

APPELANTE

S.A.S. DMDA exerçant sous l’enseigne 'AU REPOS DE LA FORET’ prise en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS d’EVRY sous le numéro 803 670 199

[…]

[…]


Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753, avocat postulant


Assistée de Me Richard ARBIB de la SELARL A.K.A, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : 320, avocat plaidant substitué par Me Raphaël ARBIB de la SELARL A.K.A, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : 320, avocat plaidant

INTIMEE

S.C.I. FCY prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS d’EVRY sous le numéro 379 651 276

[…]

[…]


Représentée par Me François NIVOLLET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0295

COMPOSITION DE LA COUR :


L’affaire a été débattue le 02 Novembre 2021, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Gilles BALA', président de chambre

Madame Sandrine GIL, conseillère Madame Elisabeth GOURY, conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE

ARRET :


- contradictoire


- par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.


- signé par Monsieur Gilles BALA', président de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE


Par acte notarié du 11 juillet 2007, la SCI FCY a consenti un bail commercial à Mme B C D E, aux droits de laquelle vient la SAS DMDA, portant sur une maison dans laquelle est exploité au rez-de-chaussée un restaurant au Repos de la Forêt, sise […] à Quincy Sous Senart (9I), pour une durée de neuf années à compter du 2 juillet 2007 et moyennant un loyer annuel de 19.440 € HT indexé.


Par acte extrajudiciaire du 2 décembre 2015, la SCI FCY a signifié à la SAS DMDA un congé pour le 1er juillet 2016 avec offre de renouvellement du bail moyennant un nouveau loyer de 8.140 € HT par an soit 2.035 € HT par trimestre.


Par acte extrajudiciaire du 24 décembre 2015, la bailleresse a signifié à sa locataire un congé sans offre de renouvellement et avec offre d’indemnité d’éviction de 15.000'€'; cet acte mentionne qu’il «'annule et remplace un précédent congé du 2 décembre 2015» ; que par ce précédent acte du 2 décembre, le bailleur avait signifié un congé avec offre de renouvellement portant le montant du loyer à la somme erronée de 8.140 € HT par an au lieu de 24.420 € HT ; que dans le cadre de l’exercice de son droit d’option prévu par le code de commerce, le bailleur entend refuser le renouvellement du bail.


Par courrier recommandé avec accusé de réception du 27 juin 2016, la SAS DMDA a indiqué à la SCI FCY qu’elle acceptait l’offre de renouvellement moyennant un nouveau loyer de 8.140 C HT par an.


Par courrier recommandé avec accusé de réception du 29 juin 2016, le conseil de la SCI FCY a répondu à la SAS DMDA que le congé délivré le 2 décembre 2015 comportait une erreur manifeste et que c’est pour cette raison qu’un congé l’annulant et le remplaçant avait été délivré le 24 décembre.


Par exploit d’huissier du 8 août 2016, la bailleresse a fait délivrer à la locataire un commandement visant la clause résolutoire du bail et la mettant en demeure, dans le mois suivant le commandement de lui payer une somme de 1.447,99 € au titre d’un impayé de loyer du 1er au 31 juillet 2016 et de produire la quittance d’assurance des lieux couvrant la période du 1er janvier 2016 à ce jour.
Par ordonnance du 6 septembre 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance d’Évry a rejeté la demande de la SCI FCY tendant à la désignation d’un expert pour fixer le montant de l’indemnité d’éviction revenant à sa locataire compte tenu d’une contestation sérieuse au sujet des deux congés délivrés.


Autorisée à assigner à jour fixe par ordonnance du 8 septembre 2016, la SCI FCY a par acte d’huissier en date du 19 septembre 2016, assigné la SAS DMDA devant le tribunal de grande instance d’Évry aux fins de voir déclarer valable le congé sans offre de renouvellement et avec offre d’indemnité d’éviction, constater l’acquisition de la clause résolutoire du bail et condamner le preneur au paiement d’arriéré des loyers et d’indemnité d’occupation.

Par jugement du 8 décembre 2016, le Tribunal de grande instance d’Évry a':


- Constaté que le congé avec offre de renouvellement délivré le 2 décembre 2015 par la SCI FCY à la SAS DMDA a produit ses effets ;


- Constaté la nullité du congé avec refus de renouvellement délivré le 24 décembre 2015 par la SCI FCY à la SAS DMDA ;


- Constaté la résiliation, au 08 septembre 2016, du bail commercial du 11 juillet 2007 liant la SCI FCY et la SAS DMDA, portant sur une maison dans laquelle est exploité un restaurant au Repos la Forêt, sise […] ;


- Ordonné en conséquence à la SAS DMDA et à tous occupants de son chef de libérer les lieux dans les quinze jours suivant la date à laquelle la présente décision sera signifiée ;


- Ordonné, à défaut de libération volontaire des lieux dans ce délai l’expulsion de la SAS DMDA ainsi que celle de tous occupants de son chef, si besoin avec le concours de la force publique et d’un serrurier, ceci à défaut de libération volontaire des lieux dans un nouveau délai de quinze jours suivant la délivrance d’un commandement de quitter les lieux,


- Rappelé que cette expulsion devra être effectuée conformément aux dispositions des articles L411-1 et suivants, et R411-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;


- Dit que l’enlèvement des meubles et effets se trouvant dans les lieux sera effectué selon les règles fixées par les articles L433-1 et suivants, et R433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;


- Condamné la SAS DMDA à payer à la SCI FCY une somme de cinquante trois euros et cinquante deux centimes (53,52 €) par jour à titre d’indemnité d’occupation, ce à compter du 9 septembre 2016 et jusqu’à son départ effectif des lieux, caractérisé par la remise des clés ou un procès-verbal d’expulsion';


- Rejeté le surplus des demandes de chacune des parties';


- Condamné la SAS DMDA aux dépens, ainsi qu’à verser une somme de mille cinq cents euros (1.500 €) à la SCI FCY en application de l’article 700 du code de procédure civile';


- Ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,


- Autorisé maître X Y à procéder au recouvrement direct des dépens conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 13 janvier 2017, la société DMDA a interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt du 8 novembre 2017, la chambre 5-3 de la Cour d’appel de Paris a':


- Infirmé le jugement, à l’exception de sa disposition ayant constaté que le congé avec offre de renouvellement délivré le 2 décembre 2015 par la SCI FCY à la SAS DMDA a produit ses effets;


Statuant à nouveau et y ajoutant,


- Constaté que par l’effet du commandement du 8 août 2016 les conditions du jeu de la clause résolutoire sont réunies ;


- Accordé un délai de neuf mois à la SAS DMDA pour produire l’attestation d’assurance des locaux loués pour la période du 1er janvier au 8 août 2016 ;


- Suspendu pendant ce délai les effets de la clause résolutoire ;


- En conséquence, dit que la clause résolutoire n’a pas joué et déboute la SCI FCY de sa demande en constatation de résiliation de bail ;


- Dit que le congé délivré le 2 décembre 2015 a mis fin au bail à la date du 1er juillet 2016, et ouvre droit pour la société preneuse à une indemnité d’éviction ;


Avant dire droit sur l’indemnité d’éviction, ordonné une mesure d’expertise confiée à :

Monsieur Z A avec mission de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction, d’apprécier si l’éviction entraînera la perte du fonds ou son transfert, de déterminer le montant de l’indemnité due par le locataire pour l’occupation des lieux, objet du bail depuis le 1er juillet 2016 jusqu’à leur libération effective, ;


- Fixé à la somme de 3.000 (trois mille) euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, somme qui devra être consignée par la SCI FCY à la Régie de la cour d’appel de Paris, 34 quai des Orfèvres, […] avant le 31 décembre 2017 ;


- Dit que, faute de consignation de la provision dans ce délai, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet ;


- Dit qu’un des magistrats de la chambre sera délégué au contrôle de cette expertise,


- Renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état du jeudi 11 janvier 2018, à 13 heures pour contrôle du versement de la consignation ;


- Renvoyé l’affaire pour reprise des débats après dépôt du rapport de l’expert, à l’audience du juge de la mise en état de la 3ème chambre du pôle 5 (5-3) de cette cour à la date qui sera fixée ultérieurement par le juge de la mise en état ;


- Fixé le montant des indemnités d’occupation provisionnelles dû par la SAS DMDA pendant la durée de l’instance à la somme annuelle de 22 523,30 € HT, taxes et charges en sus, avec les intérêts au taux légal dus sur les arriérés d’indemnités d’occupation, qui seront dus à compter de la date de l’assignation du 19 septembre 2016 pour les indemnités d’occupation échues avant cette date et à compter de chaque échéance contractuelle pour les indemnités d’occupation échues après cette date ;


- Sursis à statuer sur les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;


- Réservé les dépens de première instance et d’appel.
La SCI FCY a notifié à la société DMDA son droit d’option offrant le renouvellement du bail avec un nouveau loyer de 2 135 euros HT soit 25 620 euros HT.


Après avoir fait l’objet d’une radiation, l’affaire a été réinscrite au rôle sous le numéro 20/07250 le 12 juin 2020.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 11 octobre 2021, la société DMDA exerçant sous l’enseigne «AU REPOS DE LA FORÊT» demande à la Cour de':


Vu l’article 1343-5 du Code civil,


Vu l’article L. 145-41 du Code de commerce,


- RECEVOIR la société DMDA en ses demandes, fins et conclusions ;


L’y déclarant bien fondée,


Et ayant d’ores et déjà infirmé le jugement déféré à l’exception de sa disposition ayant constaté que le congé avec offre de renouvellement délivré le 2 décembre 2015 avait produit ses effets, et y ajoutant :


- ORDONNER la révocation de l’ordonnance de clôture et accueillir les présentes écritures ;


- CONSTATER que par l’effet de l’exercice du droit d’option du bailleur en date du 9 juillet 2019, le congé du 24 décembre 2015 est de nul effet ;


- CONSTATER que par l’effet du congé du 2 décembre 2015, dont les termes ont été dûment acceptés par la société DMDA suivant courrier du 23 juin 2016, le bail a été renouvelé à compter du 2 juillet 2016 aux conditions figurant audit congé ;


- CONSTATER dès lors que le loyer en renouvellement s’élève à 8.140,00 euros HT par an à compter du 2 juillet 2016, soit une dette locative de 39.779,13 euros HT de juillet 2016 à mars 2021 ;


- CONSTATER cependant que la société DMDA a versé à la société FCY, la somme de 123.266,40 euros HT de juillet 2016 à octobre 2021 inclus ;


- CONSTATER qu’il en résulte un trop-perçu par la société FCY de 78.574,23 euros HT, soit 94.289,08 euros TTC.


En conséquence,


- CONDAMNER la SCI FCY à verser à la société DMDA, la somme de 78.574,23 euros HT soit 94.289,08 euros TTC au titre des loyers trop perçus ;


- CONDAMNER la SCI FCY à verser à la société DMDA, la somme de 10.000,00 euros à titre de dommages-intérêts ;


- CONDAMNER la SCI FCY à verser à la société DMDA, la somme de 8.000,00 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;


- DEBOUTER la société FCY de l’ensemble de ses demandes ;


- CONDAMNER la société FCY aux entiers dépens au profit de Maître Olivier BERNABE, avocat aux offres de droit, conformément à l’article 699 du Code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 15 mars 2021, la société FCY demande à la Cour de':


- Rappeler que, par arrêt partiellement avant dire droit du 8 novembre 2017, la cour a jugé que le congé signifié le 2 décembre 2015 avait mis fin au bail du 11 juillet 2017 et que le congé signifié le 24 décembre 2015 avait modifié les modalités du congé par l’exercice du droit de revenir sur l’offre de renouvellement.


- Dire que le courrier du 23 juin 2016, adressé à la SCI FCY en un temps où celle-ci avait modifié les modalités de son congé pour refuser le renouvellement et offrir le paiement d’une indemnité d’éviction, n’a pas eu pour effet de consacrer un accord des parties sur un renouvellement du bail au loyer mentionné dans le congé du 2 décembre 2015.


- Dire que l’exercice du droit de repentir du bailleur le 9 juillet 2019 entraîne irrévocablement, comme le précise l’article L 145-59 du code de commerce, le renouvellement du bail à la date du repentir et non pas à la date d’effet du congé initial.


- Dire dès lors que le loyer doit être fixé à la valeur locative à la date du repentir consacrant le renouvellement du bail.


- Fixer le montant du loyer de renouvellement au 9 juillet 2019 à la somme annuelle hors charges et hors taxes de 23.968,54 €.


- Condamner la société DMDA à son paiement.


- Fixer l’indemnité d’occupation définitive due du 2 juillet 2016 au 9 juillet 2019 par la société DMDA à la SCI FCY à la somme de 20.400 €/ an hors taxes et hors charges.


- Condamner la société DMDA à son paiement.


- Débouter la société DMDA de sa demande tendant au remboursement de la somme de 65.786,60 € TTC qu’elle soutenait avoir réglé en trop jusqu’au mois de mars 2020 inclus.


- Débouter la société DMDA de sa demande de dommages et intérêts.


- Dire n’y avoir lieu à article 700 au profit de la société DMDA.


- Condamner la société DMDA aux entiers dépens non liés à l’exercice du droit de repentir.


L’ordonnance de clôture a été prononcée le 8 avril 2021.

MOTIFS


Sur les conclusions de la société DMDA postérieures à l’ordonnance de clôture


Les conclusions de la société DMDA notifiées le 10 octobre 2021, postérieurement à l’ordonnance de clôture, ont actualisé ses demandes en arrêtant la créance locative qu’elle réclame à octobre 2021 inclus (au lieu de mars 2021 inclus) aux fins d’obtenir la condamnation de la SCI FCY à lui verser la somme de 78.574,23 euros HT soit 94.289,08 euros TTC au titre des loyers trop perçus, et elles sont inchangées pour le reste, tant dans le dispositif que dans la motivation.


Par conséquent par application de l’article 783 du code de procédure civile (devenu 802), les conclusions sont recevables, s’agissant de l’actualisation de la créance sollicitée par la société DMDA au titre d’un trop perçu de loyers pour une période postérieure à l’ordonnance de clôture.
Sur les demandes des parties de fixation du loyer du bail


L’appelante soutient que l’exercice du droit d’option en 2019 par la SCI FCY a neutralisé les effets du congé du 24 décembre 2015 en ce qu’il avait ouvert droit à une indemnité d’éviction ; qu’elle a accepté le 23 juin 2016 le renouvellement du bail au montant du loyer offert par la bailleresse dans le congé du 2 décembre 2015 ; que le congé du 2 décembre 2015 étant irrévocable, il n’a pas pu être annulé par celui du 24 décembre 2015. Elle rappelle que le droit d’option ne peut être exercé qu’à défaut d’accord des parties sur le prix du bail renouvelé ; que lorsqu’un accord est intervenu le bail se trouve définitivement renouvelé ; que lorsque le preneur accepte à la fois l’offre de renouvellement et le prix demandé, l’accord est parfait ; qu’elle a accepté le renouvellement du bail au montant du loyer proposé par la SCI FCY le 23 juin 2016 ce qui a scellé le renouvellement du bail à compter de la date du 2 juillet 2016 pour un loyer de 8 140 euros HT/HC par an. Elle soutient que si le bailleur pouvait mettre fin au bail après avoir délivré le congé portant renouvellement le 2 décembre 2015, il ne peut plus revenir sur les termes de ce congé dès lors qu’il opte finalement pour le renouvellement du bail ; qu’il n’a jamais argué d’une erreur matérielle du montant du loyer offert entre le 2 décembre 2015 et l’acceptation du 23 juin 2016 ; que l’acte du 9 juillet 2019 est inopérant puisque le bail a été renouvelé par l’acceptation du 23 juin 2016.


L’intimée soutient que le congé du 2 décembre 2015 a mis fin au bail ; que celui du 24 décembre 2015, revenant sur les modalités du congé initial, a ouvert le droit, selon l’arrêt de la cour du 8 novembre 2017, pour la société DMDA au paiement d’une indemnité d’éviction ; que le courrier du 23 juin 2016 de la société DMDA ne saurait valoir accord de la part de la bailleresse au renouvellement du bail au 1er juillet 2016 moyennant le loyer proposé dans le congé du 2 décembre 2015, lequel résultait au surplus d’une erreur, puisqu’elle était, avant ce courrier, revenue sur son offre initiale de renouvellement au loyer mentionné dans le congé du 2 décembre. La SCI FCY considère que l’exercice de son droit d’option n’a pas eu pour conséquence de revenir aux modalités du congé d’origine ; que le renouvellement du bail s’effectue à la date à laquelle elle a exercé ensuite son droit de repentir et non pas à la date d’effet du congé initial ; qu’à la date de l’exercice de son droit de repentir par acte du 8 juillet 2019, il s’est formé un nouveau bail aux clauses et conditions du précédent dont il reste à déterminer le montant du loyer. Elle prétend que le loyer du nouveau bail doit être fixé à la valeur locative, laquelle a été déterminée à la somme de 22 663,90 euros au 2 juillet 2016, somme qui doit être actualisée selon l’ILC à la date du 9 juillet 2019, soit en l’espèce la somme de 23 969,54 euros.


En application des dispositions de l’article L. 145-57 du code de commerce, le bailleur qui a proposé le renouvellement du bail peut exercer son droit d’option et refuser le renouvellement du bail, même si le principe en est acquis, à la condition qu’aucun accord entre le preneur et le bailleur ne soit intervenu sur le montant du loyer. Il s’agit de l’exercice par le bailleur de son droit d’option.


Par application des dispositions de l’article L. 145-8 du code de commerce, le bailleur peut se soustraire au paiement de l’indemnité d’éviction, à charge par lui de supporter les frais de l’instance et de consentir au renouvellement du bail dont les conditions, en cas de désaccord, sont fixées conformément aux dispositions réglementaires prises à cet effet. Il s’agit de l’exercice du droit de repentir.


Selon l’article L. 145-59 du code de commerce, 'La décision du propriétaire de refuser le renouvellement du bail, en application du dernier alinéa de l’article L. 145-57, ou de se soustraire au paiement de l’indemnité, dans les conditions prévues au dernier alinéa de l’article L. 145-58, est irrévocable.'.


En l’espèce, par acte extrajudiciaire du 2 décembre 2015, la SCI FCY, bailleresse, a signifié à la société DMDA, locataire, un congé pour le 1er juillet 2016 avec offre de renouvellement du bail moyennant un nouveau loyer de 8.140 € HT par an. Elle a ensuite signifié par acte extrajudiciaire du 24 décembre 2015, un nouveau congé sans offre de renouvellement et avec offre d’indemnité d’éviction de 15.000'euros dans lequel il est mentionné que 'dans le cadre de l’exercice de son droit d’option prévu par le Code de Commerce, le bailleur entend refuser le renouvellement du bail'. La bailleresse a ainsi exercé son droit d’option prévu par l’article L 145-57 du code de commerce, article au demeurant visé par la cour d’appel dans l’arrêt mixte du 8 novembre 2017.


Si par courrier recommandé avec accusé de réception du 27 juin 2016, la SAS DMDA a indiqué à la SCI FCY qu’elle acceptait l’offre de renouvellement moyennant un nouveau loyer de 8.140 euros HT par an, cette acceptation est intervenue plusieurs mois après que la SCI FCY eut exercé son droit d’option en refusant le renouvellement du bail, privant ainsi d’effet l’acceptation de la société DMDA.


Par conséquent, lorsque la SCI FCY a exercé son droit d’option, il n’y avait aucun accord des parties sur le montant du loyer du bail dont le renouvellement avait été initialement proposé par la SCI FCY. Elle a donc pu valablement exercer son droit d’option, ce qui a d’ailleurs été constaté par la Cour qui, tirant les conséquences de droit de l’acte extrajudiciaire du 24 décembre 2015 par laquelle la bailleresse a refusé le renouvellement du bail et a offert une indemnité d’éviction a, par arrêt du 8 novembre 2017, dit que le congé délivré le 2 décembre 2015 a mis fin au bail à la date du 1er juillet 2016 et a ouvert droit pour la société preneuse à une indemnité d’éviction.


Par acte d’huissier de justice, la bailleresse a ensuite exercé le 9 juillet 2019 le droit de repentir par application de l’article L 145-58 du code de commerce.


Toutefois, il est de principe que lorsque le bailleur a déjà exercé son droit d’option, il ne peut plus exercer ensuite son droit de repentir puisque l’option est irrévocable selon l’article L. 145-59 du code de commerce.


Par conséquent, l’exercice du droit de repentir par la SCI FCY le 9 juillet 2019 est sans effet puisque le droit d’option qu’elle a précédemment exercé, par lequel elle a refusé le renouvellement du bail, est irrévocable.


Il s’ensuit que les parties tirent des conséquences erronées de l’acte du 9 juillet 2019, la société DMDA en concluant au renouvellement du bail à la date du 2 juillet 2016 au prix initialement proposé et la SCI FCY concluant au renouvellement du bail à la date du date 9 juillet 2019 pour un prix devant être judiciairement fixé.


A défaut d’accord des parties sur la chose et le prix, un nouveau contrat de bail n’a donc pas pu se former.


Par conséquent, il convient de débouter la SCI FCY de ses demandes de renouvellement du bail à la date de l’exercice du repentir, de fixation du loyer à la valeur locative à la date 9 juillet 2019 et de condamnation de la société DMDA à son paiement.


La société DMDA sera également déboutée de ses demandes de voir déclarer le congé du 24 décembre 2015 de nul effet, de dire que le bail a été renouvelé à compter du 2 juillet 2016 et que le loyer de ce bail renouvelé s’élève à 8 140 euros HT/an à compter de cette date. Elle sera également déboutée de sa demande de condamnation de la SCI FCY à lui payer un trop perçu de loyers d’un montant de 94.289,08 euros TTC qu’elle réclame sur le fondement d’un loyer fixé à la somme de 8 140 euros/an.


Il convient de rappeler que le congé délivré le 2 décembre 2015 a mis fin au bail à la date du 1er juillet 2016 et a ouvert droit pour la société DMDA à une indemnité d’éviction. Toutefois celle-ci ne sollicite pas aux termes de ses dernières conclusions le paiement d’une indemnité d’éviction, étant relevé que la Cour, qui n’est saisie que par les prétentions des parties soutenues dans les dernières conclusions, ne peut pas statuer ultra petita.
Sur l’indemnité d’occupation


Il est admis que lorsque c’est le bailleur qui rétracte son offre de renouvellement et refuse le renouvellement en offrant le paiement d’une indemnité d’éviction, le locataire a droit au maintien dans les lieux, depuis la date d’expiration du bail conformément à l’article L. 145-57 du code de commerce et il est débiteur d’une indemnité d’occupation qui est déterminée selon les critères de l’article L. 145-28 du code de commerce.


En l’espèce, la SCI FCY sollicite que l’indemnité d’occupation soit fixée au montant déterminé par l’expert judiciaire, soit la somme de 20.400 €/ an hors taxes et hors charges. La société DMDA, qui sollicite le débouté de toutes les demandes de la SCI FCY, n’a toutefois pas développé de moyens dans ses conclusions sur le montant de l’indemnité d’occupation réclamée par la SCI FCY.


Il ressort du rapport d’expertise judiciaire que les locaux donnés à bail se situent dans un secteur résidentiel pavillonnaire dépourvu de toute commercialité ; que la clientèle, s’agissant d’une activité de restauration et compte tenu de l’emplacement, est locale ; que s’agissant de la partie commerciale, la capacité du restaurant est de 60 places outre une terrasse pouvant accueillir une douzaine de personnes et un jardin exploité en été ; que la partie habitation du 1er étage comprend une cuisine, salon, WC, salle de bain et 4 chambres. L’expert judiciaire a retenu une surface pondérée de la partie boutique de 97,50m² et une surface réelle de la partie habitation de 92,42m².


Les termes de comparaison pour l’activité commerciale relevés par l’expert judiciaire portent sur des communes environnantes, l’expert ayant précisé les différences de situation en terme notamment de commercialité, sur des activités diverses, dont celles de restauration; il convient donc de tenir compte des différences entre les références proposées et les locaux donnés à bail.


Les références sont les suivantes :


- fixation judiciaire : 120 euros/m²P (activité de restauration)


- renouvellements amiables : de 113 m²P à 235 euros/m²P pour des activités de banque et de produits surgelés


- nouvelles locations : de 147 euros/m²P à 361 euros/m²P pour des activités de banques, restauration, chocolaterie, salon de beauté.


S’agissant des loyers d’appartement, l’expert a relevé des loyers allant de 11 euros à 15,8euros/m²P sur le département de l’Essone selon l’observatoire des loyers de l’agglomération parisienne (OLAP) et selon les données indicatives de l’OLAP pour la commune de Quincy sous Sénart entre 6,4 euros/m² à 11,4 euros/m² et il a également relevé des propositions de location entre 17,24 euros/m² et 10,20 euros/m² à Quincy sous Sénart et sur les communes environnantes.


Au regard de l’ensemble de ces éléments, le prix proposé par l’expert judiciaire de 150 euros/m²P pour la partie commerciale et le prix de 10 euros/m²/mois pour la partie habitation sont justifiés, ils seront donc retenus.


Il s’ensuit que la valeur locative de la partie commerciale s’établit à la somme de (97,50 euros x 150 euros) soit 14 625 euros. Le bail mettant à la charge du preneur la taxe foncière et la mise aux normes, il convient de déduire la taxe foncière d’un montant de 2 759 euros et de procéder à un abattement de 2% pour la mise aux normes tel que proposé par l’expert judiciaire, soit une valeur locative de 11 573,50 euros. La valeur locative du logement s’établit à la somme de 11 090,40 euros (92,42m²x10 euros x12 mois).


La valeur locative est donc de 22 663,90 euros à laquelle il convient d’appliquer un abattement de précarité de 10% conforme aux usages s’agissant de la fixation d’une indemnité d’occupation statutaire.


Par conséquent l’indemnité d’occupation due par la société DMDA à compter du 2 juillet 2016 est de 20 397,51 euros/an HT/HC, arrondie à 20 400 euros/an, HC HT. La SCI FCY ayant sollicité au terme de ses écritures sa fixation sur la période du 2 juillet 2016 au 9 juillet 2019, la fixation et la condamnation à paiement seront prononcées pour cette période.


Sur la demande de dommages et intérêts


La société DMDA sollicite la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts résultant des atermoiements de la société FCY qui l’ont laissée dans une grande incertitude juridique.


Toutefois, la société FCY n’a fait qu’exercer son droit d’option conformément aux dispositions du code de commerce et si l’exercice du repentir est sans effet en raison du caractère irrévocable de son droit d’option, le fait d’avoir tiré des conséquences juridiques erronées de ses droits ne constitue pas une faute de la part de la SCI FCY.


La société DMDA sera par conséquent déboutée de sa demande de dommages et intérêts.


Sur les demandes accessoires


L’équité commande de condamner la société FCY à régler à la société DMDA la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.


La société FCY étant à l’origine du refus de renouvellement du bail, celle-ci sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de l’avocat postulant conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS


Par arrêt contradictoire


Vu l’article 783 du code de procédure civile ;


Accueille les conclusions notifiées par la société DMDA le 10 octobre 2021 tendant à actualiser la créance qu’elle sollicite ;


Vu l’arrêt du 8 novembre 2017 de la chambre 5-3 de la cour d’appel de Paris ;


Déboute la SCI FCY de ses demandes tendant à dire que l’exercice du droit de repentir du bailleur le 9 juillet 2019 entraîne irrévocablement le renouvellement du bail à la date du repentir, de dire dès lors que le loyer doit être fixé à la valeur locative à la date du repentir, de fixer le montant du loyer de renouvellement au 9 juillet 2019 à la somme annuelle hors charges et hors taxes de 23.968,54 € et de condamner la société DMDA à son paiement ;


Déboute la société DMDA de ses demandes tendant à constater que le congé du 24 décembre 2015 est de nul effet ; que le bail a été renouvelé à compter du 2 juillet 2016 aux conditions figurant au congé du 2 décembre 2015 et de constater dès lors que le loyer en renouvellement s’élève à 8.140,00 euros HT par an à compter du 2 juillet 2016 ; de condamner en conséquence la SCI FCY à verser à la société DMDA, la somme de 78.574,23 euros HT soit 94.289,08 euros TTC au titre des loyers trop perçus ;


Fixe l’indemnité d’occupation due par la société DMDA à la SCI FCY à la somme de 20.400 €/ an hors taxes et hors charges pour la période du 2 juillet 2016 au 9 juillet 2019 ;


Condamne la société DMDA à payer la somme de 20.400 €/ an hors taxes et hors charges à la SCI FCY pour la période du 2 juillet 2016 au 9 juillet 2019 ;


Rejette les demandes plus amples ou contraires ;


Condamne la société FCY à régler à la société DMDA la somme de 8000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;


Condamne la société FCY aux dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de l’avocat postulant conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 5 janvier 2022, n° 20/07250