Cour d'appel de Toulouse, 2eme chambre section 1, 6 octobre 2010, n° 06/03089

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 2e ch. sect. 1, 6 oct. 2010, n° 06/03089
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 06/03089
Décision précédente : Tribunal de commerce de Toulouse, 30 mai 2006
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

06/10/2010

ARRÊT N° 395

N°RG: 06/03089

XXX

Décision déférée du 31 Mai 2006 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE – 05/4267

M. X

SOCIETE D’INGENIERIE ET DE CONCEPTION D’ELECTRONIQUE SIGLE SOICEX ELECTRONIQUE

représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT JEUSSET

C/

XXX

représentée par la SCP DESSART-SOREL-DESSART

SA AIR FRANCE

représentée par la SCP MALET

XXX

sans avoué constitué

Confirmation

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2e Chambre Section 1

***

ARRÊT DU SIX OCTOBRE DEUX MILLE DIX

***

APPELANT(E/S)

SOCIETE D’INGENIERIE ET DE CONCEPTION D’ELECTRONIQUE SIGLE SOICEX ELECTRONIQUE

XXX

XXX

représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT JEUSSET, avoués à la Cour

assistée de Me Serge TERRACOL-LAJEUNE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME(E/S)

XXX

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP DESSART-SOREL-DESSART, avoués à la Cour

assistée de Me Renaud CLEMENT, avocat Association CLEMENT & NEIGE, avocats au barreau de E

INTERVENANT(E/S) SUR APPEL PROVOQUE

SA AIR FRANCE

45, B de E

XXX

représentée par la SCP MALET, avoués à la Cour

assistée de la SCP CLYDE & CO, avocats au barreau de E

XXX

XXX

XXX

TCHAD

sans avoué constitué

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 02 Septembre 2010 en audience publique, devant la Cour composée de :

G. COUSTEAUX, président

V. SALMERON, conseiller

P. DELMOTTE, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : A. THOMAS

ARRET :

— réputé contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par G. COUSTEAUX, président, et par A. THOMAS, greffier de chambre.

Exposé des faits :

Par déclaration en date du 28 juin 2006, la société d’ingéniérie et de conception d’électronique SA sigle « Soicex Electronique » a relevé appel du jugement du tribunal de commerce de Toulouse du 31 mai 2006 qui, après avoir joint les procédures 2005 004267, 2005 007350 et 2005 013165,

s’est déclaré compétent,

a condamné la SAS SDV Logistique Internationale à payer à la SA Soicex Electronique la somme de 896 euros avec intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2004 en réparation des dommages,

a débouté la SA Soicex Electronique du surplus de ses demandes,

a débouté la SAS SDV LI de ses demandes à l’encontre des sociétés Air France et Toumai Air Tchad,

a condamné la SA SDV LI à payer la somme de 750 euros à chacune des sociétés Soicex et Air France au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

Le 10 juin 2004, la SA Soicex Electronique a confié à la société SDV LI deux colis contenant 4 tubes émetteurs radio à destination de N’Djamena (Tchad) par avion depuis Toulouse avec assurance et emballage, coût assurance et frêt selon facture du 10 juin 2004. La valeur déclarée à l’assurance était de 35.310 euros.

Lors de la livraison, le destinataire, la présidence de la République du Tchad, a porté sur la lettre de voiture des réserves «NB débris sur 3 tubes».

Par lettre recommandée avec avis de réception du 16 juin 2004, Soicex a confirmé ces réserves à SDV LI et a confirmé sa réclamation par lettre recommandée avec avis de réception du 8 juillet 2004 pour un montant de 24.708,75 euros à l’appui d’un rapport d’un commissaire d’avarie du CESAM. Soicex a renouvelé sa mise en demeure les 27 août 2004, 8 octobre 2004 et 5 janvier 2005.

Ces mises en demeure étant restées infructueuses, le tribunal de commerce de Toulouse a été saisi le 25 mars 2005 par la société Soicex Electronique qui a assigné la XXX (SDV LI) en réparation du dommage subi.

La SAS SDV LI a attrait la SA AIR FRANCE le 31 mai 2005 et la XXX le 19 août 2005 afin de la relever éventuellement de toute condamnation prononcée à son encontre.

La clôture a été fixée au 5 mai 2009.

Les débats ont été réouverts par arrêt du 2 juin 2010 à l’audience du 2 septembre 2010.

Moyens des parties :

Par conclusions notifiées le 24 octobre 2006 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, la SA SOICEX ELECTRONIQUE demande de réformer le jugement, de condamner la société SDV LI au paiement de la somme au principal de 24.708,75 euros à titre de réparation du dommage ainsi qu’à 5.000 euros au titre de la résistance abusive et 2.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile et de confirmer pour le surplus le jugement.

Elle fait observer que la marchandise est assurée à 110 % de sa valeur aux soins de la SDV LI qui choisit et impose son assureur. Le transporteur est assuré à l’occasion des dommages qui surviennent lors de son activité de transport et la société Soicex en qualité de propriétaire de la marchandise qui a péri ; tant est et si bien que, si la marchandise périt en dehors de l’activité de transport, la marchandise n’est plus garantie et, si la prime d’assurance est payée par la société Soicex, c’est sur une facture de SDV LI. Dès lors, après le litige, la société Soicex a respecté la clause contractuelle de la lettre de transport (art 12-1-1) toute réclamation devant être faite dans le délai de 14 jours à compter de la réception de la marchandise.

La société SDVLI a elle-même constaté le dommage par les réserves portées sur le bordereau de livraison et a répercuté la déclaration de sinistre à la Cie d’assurance Cauvin et Palle qui a enregistré une déclaration de sinistre sous le n° 04S0651. La société Soicex, afin de préserver ses intérêts, a fait assigner la Cie Cauvin et Palle dans le délai de 2 ans ; ce dernier se désigne comme l’assureur de la société SDV LI et la SA Soicex comme un tiers victime. Il appartenait donc à SDV LI de faire intervenir la Cie d’assurance Cauvin et Palle au titre du contrat souscrit pour la valeur des marchandises endommagées dès qu’elle a été assignée devant le tribunal de commerce. La sté SDV LI était la seule informée de la position de l’assureur postérieurement à la déclaration de sinistre.

L’assuré ne peut opposer à la victime une limitation du dommage qui a été assurée pour une valeur déclarée.

Par conséquent, il y a lieu de réformer le jugement et de condamner la société SDV LI à payer à la société Soicex Electronique la somme de 24.708,75 euros en principal selon la valeur assurée et éventuellement de se retourner et se faire garantir par son assureur.

Par conclusions notifiées le 22 mai 2008 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, la société SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE demande d’infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas retenu l’exception d’incompétence ainsi que les autres moyens soulevés, de se déclarer incompétent au profit du tribunal de commerce de Nanterre et, à titre subsidiaire, de déclarer l’action irrecevable pour défaut de qualité ou d’intérêt à agir, à titre infiniment subsidiaire, de la déclarer mal fondée ou encore de confirmer le jugement sur la limitation de la responsabilité contractuelle et de condamner la société AIR FRANCE à la relever et garantir de toute condamnation et de lui allouer 5.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

La responsabilité de la société SDV LI est recherchée en qualité de commissionnaire de transport ; en application de l’article L132-1 et suivants du Code de commerce, la responsabilité de ce dernier peut être recherchée soit en raison de son fait personnel soit du fait de ses substitués. Il peut donc invoquer les moyens de défense de ses substitués et ses moyens propres et autonomes résultant des articles L132-1 et suivants du Code de commerce et de ses conditions contractuelles d’intervention.

Sur l’incompétence du tribunal de commerce de Toulouse, les conditions générales prévues sur les documents contractuels de la société SDV LI rappellent que la clause attributive de juridiction est le tribunal de commerce de Nanterre. Les sociétés Soicex et SDV LI entretiennent des relations d’affaires suivies. Il convient d’appliquer les dispositions de l’article 46 du Code de procédure civile et celles de l’article 17 de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale.

Il convient d’infirmer le jugement sur l’exception d’incompétence.

Sur l’irrecevabilité de l’action, la facture prévoit une vente avec la mention CAF (coût assurance frêt) ce qui fait peser les risques du transport sur l’acheteur, le destinataire, (en l’espèce, la présidence du Tchad). Contrairement à ce qu’a affirmé le tribunal («le transfert de propriété s’opère au moment de l’embarquement») et en application de l’article B5 des règles officielles publiées par la chambre de commerce internationale, seul l’acheteur doit supporter tous les risques de perte ou de dommage que la marchandise peut courir. Principe fondamental de la vente CAF, «res perit domino» la chose périt aux risques du propriétaire, à savoir l’acheteur. La société SDV LI a mentionné sur la facturation l’incoterm CPT ce qui confirme une vente au départ à savoir le transfert du risque, «dès la remise de la marchandise au premier transporteur», à l’acheteur. La société SOICEX vendeur n’a donc aucune qualité pour agir au visa des articles 31, 32 et 122 du Code de procédure civile.

A supposer que le destinataire entende intervenir aux débats et à titre conservatoire, l’action serait prescrite puisque l’action diligentée le 25 mars 2005 n’a pu valablement interrompre la prescription d’un an dont la société SDV LI bénéficie en application de l’article L133-6 du Code de commerce.

Agissant du fait de son substitué, la société SDV LI est recevable à invoquer à son bénéfice les dispositions de l’article 26 de la convention de Varsovie : l’action irrecevable pour défaut de qualité à agir au visa du défaut de réserves qui auraient dû être directement notifiées au transporteur aérien dans les 14 jours à compter de la réception des marchandises.

Enfin sur le fond, la société Soicex n’a pas de fondement à son action puisqu’en l’absence de réserves et/ou de réserves nulles, le commissionnaire de transport et/ou le transporteur substitué sont bien fondés à revendiquer le bénéfice de la livraison conforme. Les réserves émises par lettre recommandée avec avis de réception du 16 juin 2004 n’expriment rien en l’état de leur imprécision et sont donc nulles. La société SDV LI bénéficie de la présomption de livraison conforme. De plus, les fiches de constatations dressées le 16 juin 2004 ne sont pas des documents contradictoires, SDV LI n’a pas été convoquée et n’a pas signé les documents. La présidence de la République du Tchad a reçu la marchandise «conforme sous réserve d’essais» et les essais n’ont pas été effectués.

A titre subsidiaire, sur l’appel en garantie, elle a qualité à agir contre le transporteur aérien AIR FRANCE au visa des articles 13 et 14 de la convention de Varsovie. Elle rappelle que l’expert de la société Soicex a relevé «les manipulations et secousses» qui ne peuvent que survenir sous couvert du transporteur ou de son agent de handling (société Toumai Air Tchad).

Sur la limitation de responsabilité, elle rappelle les stipulations de l’article 7-2.1 des conditions générales du contrat de la société SDV LI soit 14 euros x 64 kg = 896 euros et, du chef de l’intervention du transporteur aérien, la société SDV LI bénéficie d’une limitation de responsabilité à hauteur de l’équivalent en euros de 1061,36 DTS ; il conviendra alors de confirmer le jugement attaqué.

Par conclusions notifiées le 12 mars 2009 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, la société AIR FRANCE demande de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a débouté la société SDV LI de ses demandes à l’égard d’Air France et de déclarer irrecevables toutes demandes formulées à l’encontre d’Air France pour absence de réserve et de qualité pour agir et, subsidiairement, de prononcer la mise hors de cause d’Air France. En tout état de cause, elle souhaite le rejet de toute demande fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile et elle sollicite 5.000 euros sur ce fondement.

Elle rappelle que le litige porte sur un transport aérien international entre E et le Tchad et que la responsabilité d’un transporteur aérien international est régie par la convention de Varsovie du 12 octobre 1929 modifiée par le protocole de La Haye du 28 septembre 1955.

Elle fait valoir que les demandes de SDV LI sont irrecevables en raison du défaut de réserves à la livraison conformément à l’article 26 de la convention de Varsovie : en cas d’avarie, le destinataire et lui seul peut prendre des réserves immédiates à la livraison en les inscrivant sur le titre de transport soit en adressant au transporteur une protestation écrite dans les 14 jours de la réception de la marchandise. En l’espèce, le destinataire contractuel figurant sur la lettre de transport aérien (LTA) est M. le conseiller à la communication, seul habilité à effectuer des réserves. Il n’a adressé aucune protestation à Air France. En application de l’article 26 alinéa 4 de la convention de Varsovie, les demandes sont irrecevables. Par ailleurs, en vertu d’une jurisprudence constante fondée sur les articles 24 et 30 de la convention de Varsovie, le droit d’action contre le transporteur aérien n’appartient qu’aux parties au contrat de transport c’est-à-dire à l’expéditeur et au destinataire figurant sur la LTA. Le commissionnaire ne peut agir même en garantie contre le transporteur aérien. La société SDVLI, qui n’apparaît ni comme expéditeur ni comme destinataire de la marchandise sur la LTA, n’est titulaire d’aucun droit à l’encontre d’Air France.

A titre infiniment subsidiaire au fond, elle s’appuie sur l’article 26 de la convention de Varsovie qui pose une présomption de livraison conforme en faveur du transporteur aérien en l’absence de réserves du destinataire. Air France doit être mise hors de cause.

Et si par extraordinaire, la responsabilité du transporteur devait être retenue, il conviendrait d’appliquer l’article 22 alinéas 2 et 4 de la convention de Varsovie qui pose une limitation de responsabilité à 250 francs par kg sauf déclaration spéciale d’intérêt à la livraison faite par l’expéditeur au moment de la remise du colis avec taxe supplémentaire.

La société TOUMAI AIR TCHAD dûment assignée n’a pas constitué avoué.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

I. Sur les exceptions :

Sur l’exception d’incompétence territoriale :

La cour rappelle les dispositions de l’article 48 du Code de procédure civile qui prévoient que «toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à laquelle elle est opposée.»

En l’espèce, le contrat de transport aérien en date du 10 juin 2004 qui lie la société Soicex Electronique et la société SDV LI, commissionnaire de transport, comporte au verso «l’avis concernant la limitation de responsabilité du transporteur» et les «conditions du contrat de transport». Force est de constater qu’en raison du caractère minuscule et quasi illisible de ces mentions, la cour n’est pas en mesure de vérifier l’existence de la clause dérogatoire de compétence alléguée par la société SDV LI qu’elle entend opposer à la société Soicex.

En application des dispositions de l’article 48 du Code de procédure civile, la cour constate que la clause attributive de juridiction alléguée est totalement illisible sur le contrat liant les parties, elle est donc réputée non écrite.

En revanche, sur tous les documents liant les parties et notamment sur la lettre de transport, la société SDV LI est domiciliée XXX

En application des dispositions des articles 42 et 43 du Code de procédure civile, la juridiction territorialement compétente est sauf disposition contraire celle du lieu où demeure le défendeur qui s’entend, s’agissant d’une personne morale, du lieu où elle est établie. Les personnes morales peuvent être assignées devant la juridiction dans le ressort de laquelle elles disposent d’une succursale ou d’une agence ayant le pouvoir de les représenter à l’égard des tiers.

Par conséquent, la société Soicex Electronique pouvait assigner la société SDV LI devant le tribunal de commerce de Toulouse dès lors que son établissement secondaire à Colomiers avait engagé directement la société à l’égard de son client, la société Soicex Electronique, ce que la société SDV LI ne conteste pas.

La cour confirme le jugement en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence territoriale.

Sur la fin de non recevoir liée au défaut de qualité à agir de Soicex Electronique à l’encontre de la société SDV LI :

Pour dénier à la société Soicex Electronique la qualité à agir en responsabilité contre le commissionnaire de transport, ce dernier invoque la mention «CAF» sur la facture de vente qui opérerait un transfert des risques sur le destinataire dès l’embarquement de la marchandise.

Il convient de rappeler que, si le caractère essentiel de la vente «CAF» (coût assurance frêt) ou encore dite vente «CIF» (cost insurance freight) est de faire voyager la marchandise aux risques et périls de l’acheteur, les conditions substantielles de la vente normale n’en subsistent pas moins et le vendeur n’est libéré qu’autant que la marchandise livrée est conforme à la commande.

Par ailleurs, l’expéditeur conserve son droit d’agir contre l’intermédiaire bien que le contrat de vente de la marchandise contienne la clause selon laquelle les risques relatifs à la chose transportée sont transférés à l’acheteur destinataire et, en application de l’article 1165 du Code civil, les clauses du contrat de vente sont inopposables aux parties au contrat de commission de transport.

Par ailleurs, si dans une vente stipulée CAF les risques du transport sont transférés à l’acheteur, le chargeur a l’obligation de veiller à l’emballage convenable de la marchandise.

La société Soicex Electronique était donc seule recevable à réclamer à la société SDV LI la réparation du préjudice né de la mauvaise exécution des obligations qui lui appartenaient et dont elle lui avait confié l’accomplissement.

De surcroît, en l’espèce, la mention «CAF» alléguée n’existe ni sur la lettre de transport aérien du 10 juin 2004 ni sur la facture de SDV LI adressée à la société Soicex Electronique du même jour. Seul figure sur la dite facture l’incoterm CPT qui signifie « port payé jusqu’à» et qui, en l’espèce, était suivie de la mention : «vol AF 884 12/06».

Par lettre de transport aérien du 10 juin 2004, la société Soicex Electronique a chargé la société SDV LI, en qualité de commissionnaire de transport, d’acheminer les marchandises litigieuses. Dès lors, le contrat de commission liant bien les deux sociétés SDV LI et Soicex Electronique, cette dernière avait qualité pour agir contre la société SDV LI, commissionnaire de transport, quelles que soient les mentions des incoterms sur le contrat de vente.

Il convient par conséquent de rejeter l’exception d’irrecevabilité pour défaut de qualité à agir de ce chef.

Sur la fin de non recevoir liée au défaut de qualité à agir au visa de l’article 26 de la convention de Varsovie :

La société SDV LI entend soulever l’irrecevabilité de l’action au visa de l’article 26 de la convention de Varsovie pour défaut de réserves notifiées au transporteur aérien dans le délai de 14 jours de la réception de la marchandise et qui bénéficierait à son substitué la SA AIR FRANCE, transporteur aérien.

La cour constate que seule la société SDV LI a assigné son substitué Air France pour l’appeler en garantie. La société Air France a soulevé l’irrecevabilité de la demande liée au défaut de réception de toute protestation dans le délai de l’article 26 de la convention de de Varsovie.

Il convient de rappeler qu’en vertu des dispositions de l’article L132-5 du Code de commerce «il (le commissionnaire de transport) est garant des avaries ou pertes de marchandises et effets, s’il n’y a stipulations contraires dans la lettre de voiture ou forcé majeure».

La cour constate que la société SDV LI a été informée de l’existence de réserves dès le 15 juin 2004 par le bon de livraison de la société SDV TCHAD qui mentionnait «NB : débris sur trois (3) tubes» et par la lettre recommandée avec accusé de réception adressée par la société Soicex Electronique du 16 juin 2004 précisant que les trois tubes étaient hors service et non utilisables après réserves sur le bordereau de livraison de SDV TCHAD.

Si toute action pour avarie partielle était éteinte à l’encontre du transporteur en application de l’article 26 de la convention de Varsovie, en revanche, le commissionnaire de transport ne peut se prévaloir des dispositions de ce texte dès lors qu’il avait été mis en mesure de sauvegarder son recours contre le transporteur et qu’en l’espèce, il ne l’a pas fait. Il convient d’écarter la fin de non recevoir au visa de l’article 26 de la convention de Varsovie au profit de la société SDV LI.

Sur fin de non-recevoir liée à la prescription de l’action diligentée par Soicex Electronique à l’encontre de SDV LI:

En application de l’article L133-6 du Code de commerce, l’action en responsabilité contre le commissionnaire de transport est soumise à la prescription annale, y compris en cas de responsabilité pour faute personnelle. Le commissionnaire doit être assigné dans le délai d’un an à compter de la livraison.

En l’espèce, la marchandise litigieuse a été livrée le 15 juin 2004 selon le bordereau de livraison n° 0033568 et l’assignation de la société SDV LI par la société Soicex Electronique a été délivrée le 25 mars 2005 soit dans le délai d’un an.

Il convient de rejeter l’exception de prescription de l’action engagée et de confirmer le jugement de ce chef.

II. Sur le fond :

En vertu des dispositions de l’article L132-5 du Code de commerce, la société SDV LI, commissionnaire de transport, est tenue de garantir les avaries ou pertes de marchandises sauf stipulation contraire dans la lettre de voiture ou cas de force majeure.

Le commissionnaire de transport est tenu à une obligation de résultat et ne peut, sous réserve d’une stipulation contraire, s’exonérer de la responsabilité qui pèse sur lui que par la preuve d’une cause étrangère.

Sur la preuve des avaries, la cour rappelle que le recours à l’article L133-4 du Code de commerce sur les conditions de l’expertise prévue à cet article n’est que l’un des des procédés pour établir l’existence et l’importance du dommage et n’exclut aucun autre mode de preuve.

En l’espèce, il ressort du bon de livraison n°0033568 présenté par SDV TCHAD que des réserves ont été mentionnées le 15 juin 2004 sous la forme suivante «reçu conforme sous réserve d’essai NB débris sur trois (3) tubes».

Selon la fiche de constatation n° 00023986, dès le lendemain, le 16 juin 2004, les commissaires aux avaries intervenaient à la requête de Soicex Electronique agissant pour le compte du gouvernement tchadien. Il y était indiqué :

— qu’étaient présents à Djamenna le représentant de la société Soicex Electronique (Y Z), le chef de centre, un agent de SDV AIR et le conseiller à la communication et aux droits de l’Homme du président de la République,

— que, sur l’état des colis, étaient marqués les «tilt watch» de couleur rouge sur les cartons, qu’au fur et à mesure du déballage et de l’ouverture des cartons, qu’il était constaté un tube TH6091 intact et 3 tubes TH6091 sonnant la casse et présentant des débris de verre à l’intérieur des tubes, qu’ainsi 4 tubes émetteur radio étaient déballés. Enfin, il était mentionné en NB «les 3 tubes sonnant la casse et présentant des débris de verre n’ont pas été testés suite au refus de M. Y Z qui déclare avoir reçu des instructions de renvoyer les tubes.».

Le certificat d’avaries du CESAM n°053/06/JT/LEM/04 indique que la société Soicex Electronique agit pour le compte de M. Hassan Guedallah Mahamat Conseiller à la communication du Président de la République du Tchad, que la marchandise est arrivée par SDV AIR le 12 juin 2004, que le constat a été effectué au centre de Gredia le 16 juin 2004, que l’emballage et le conditionnement de la marchandise étaient appropriés au transport considéré, que les avaries constatées sont celles mentionnées précédemment sur la fiche de constatation et que, sur l’origine et la cause du dommage, : «présumons :

— manipulation sans soins au cours des diverses opérations de la chaîne de transport, malgré les inscriptions sur les emballages (les tilt watch marqués sur les 4 cartons étaient de couleur rouge)

— manutentions sans soins, secousses au cours de la chaîne de transport pour les tubes sonnant la casse».

Enfin, la société Soicex Electronique a produit le courrier qu’elle a adressé à SDV LI dès le 16 juin 2004 pour préciser que les tubes étaient hors service et non utilisables après réserves sur le bordereau de livraison de SDV TCHAD et lui annonçant l’envoi du rapport du commissaire aux avaries. Dès le 12 juillet 2004, elle adressait à la société SDV LI le dossier complet concernant l’avarie, dont le certificat d’avaries CESAM, les 14 photographies, la demande d’enlèvement direct etc…, et la demande de remboursement des 3 tubes TH6091 endommagés et du frêt soit la somme de 24.708,75 euros.

La société SDV LI reproche à ces éléments de preuve de ne pas respecter le principe du contradictoire ; or, le bordereau de livraison de SDV TCHAD lui-même comporte des réserves avec mention de débris sur 3 tubes, réserves et débris qui ont été ensuite confirmés par le certificat d’avaries. En outre, la société SDV était présente lors des opérations de contrôle du CESAM en dépit du fait qu’elle a refusé de signer la fiche de constatation sans autre observation. Dès lors, l’existence de l’avarie ne peut être contestée et la société SDV LI en a été informée dès le 16 juin 2004 par courrier, bordereau de livraison à l’appui, puis par courrier du 12 juillet 2004, comprenant le dossier d’avaries complet de la société Soicex Electronique, qui avait agi pour le compte du destinataire dans le cadre du contrôle CESAM.

Il se déduit du rapport d’avaries du CESAM qu’il y a bien un lien direct entre les avaries constatées et l’opération de transport puisqu’il évoque des «manipulations sans soins au cours des diverses opérations de la chaîne de transport malgré les instructions sur les emballages».

Par ailleurs, la société SDV LI ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une cause étrangère qui l’exonérerait de sa responsabilité.

En effet, d’une part, concernant l’emballage, effectué selon la société SDV LI par la société Soicex Electronique, il ne saurait constituer une cause exonératoire de responsabilité pour SDV LI puisque le certificat d’avaries précise que l’emballage et le conditionnement sont appropriés au transport considéré.

D’autre part, sur les réserves concernant les essais mentionnés sur le bon de livraison, il convient de rappeler qu’ils n’ont pas été pratiqués après constat par le CESAM que les 3 tubes endommagés ont été renvoyés sur instruction de Soicex Electronique, cette dernière «agissant pour le compte du gouvernement tchadien» c’est-à-dire du destinataire.

Par ailleurs, la gravité de ces avaries a été ensuite confirmée par le fabriquant puisque A, par fax du 17 juin 2004 à Soicex, a précisé : «d’après les photos reçues par mail le 15 juin 2004, nous constatons que ces tubes ont été endommagés par choc. Des fragments de verre provenant de l’enrobage des tigelles de support du bloc électronique sont visibles dans la partie inférieure des tubes. Une des photos montre cet enrobage cassé. D’autre part, sur un des ces tubes, l’embase du ballon verre est cassée, ce qui confirme la violence du choc. Ces tubes ne sont pas réparables. Il est inutile de nous les renvoyer pour expertise.» Enfin, la société Soicex Electronique rapporte la preuve de son préjudice puisqu’elle a adressé 3 nouveaux tubes TH 6091 gratuitement à son destinataire, envoi attesté par la production d’une facture du 29 juin 2004, par la lettre de transport aérien du même jour n° 9057/55937405 et par le contrat d’assurance correspondant.

La réalité des avaries en lien avec l’opération de transport est dès lors établie eu égard aux débris constatés et confirmés par les experts du CESAM et au remplacement effectif du matériel par la société Soicex Electronique auprès de son client tchadien.

Par ailleurs, selon les conclusions de la société Soicex Electronique, la faute reprochée au commissionnaire de transport est de ne pas avoir effectué les diligences nécessaires pour faire intervenir l’assureur et obtenir l’indemnisation correspondant au contrat d’assurance souscrit.

Or, il appartenait à la société Soicex Electronique de faire intervenir l’assureur la Cie GENERALI pour obtenir dédommagement des marchandises endommagées en fonction de leur valeur déclarée, ce qu’elle n’a pas fait. La société Soicex Electronique ne rapporte en effet pas la preuve d’une obligation contractuelle du commissionnaire de transport d’aviser la Cie d’assurance pour couvrir le dommage.

Si le certificat d’assurance n°0103806 produit par la société Soicex Electronique prévoyait en effet «pour le paiement des dommages susceptibles d’être mis à la charge des assureurs, adresser le dossier complet à / .. CAUVIN ET PALLE 8 B C D E», les conditions au verso rappelaient «les formalités essentielles à remplir en cas de sinistre et notamment :

3. conserver tous droits et recours contre les transporteurs et/ou tous autres tiers responsables

4. présenter la réclamation aux assureurs dans les plus brefs délais afin d’éviter les prescriptions applicables».

Il appartenait donc bien à l’assuré et non au commissionnaire de transport de faire le nécessaire auprès des assureurs pour éviter les prescriptions.

La société Soicex Electronique doit donc être déboutée de sa demande de condamnation de la société SDV LI à hauteur de la valeur assurée des marchandises.

Toute faute du commettant ayant été écartée et la société SDV LI n’opposant aucun cas de force majeure et se contentant de rappeler les limitations conventionnelles de responsabilité prévues aux conditions générales de la lettre de transport, il convient de retenir le principe de sa responsabilité au titre de sa garantie posée par les dispositions de l’article L132-5 du Code de commerce.

Il est mentionné sur la lettre de transport liant Soicex Electronique à SDV LI : «l’attention de l’expéditeur est attirée sur l’avis concernant la limitation de responsabilité du transporteur».

La mention au verso prévoit, dans le cas où la marchandise serait perdue endommagée ou retardée, que la responsabilité du transporteur est limitée à 250F français par kilogramme ou son équivalent en droits de tirage spéciaux (DTS) pour les membres du FMI à moins qu’une valeur plus élevée n’ait été déclarée à l’avance par l’expéditeur.

Par conséquent et à défaut de faute lourde alléguée, c’est à bon droit que les premiers juges ont retenu la clause limitative de responsabilité et ont condamné la société SDV LI à payer à la société Soicex Electronique la somme de 14 euros x 64 kg = 896 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 juillet 2004.

Sur l’appel en garantie de la SA Air France en qualité de transporteur par SDV LI :

La SA Air France rappelle à juste titre que sa responsabilité ne peut être engagée qu’en application de la convention de Varsovie du 12 octobre 1929 modifiée par le protocole de La Haye du 28 septembre 1955 et qu’en vertu des stipulations de l’article 26 de la convention «en cas d’avaries, le destinataire doit adresser au transporteur une protestation immédiatement après la découverte de l’avarie et, au plus tard dans le délai de 14 jours pour les marchandises à dater de leur réception» et «à défaut de protestation dans les délais prévus, toutes actions contre le transporteur sont irrecevables sauf le cas de fraude de celui-ci».

En l’espèce, la cour constate que la SA Air France n’a été destinataire d’aucune protestation relative aux avaries dénoncées par la société Soicex Electronique auprès de SDV LI. En outre, le destinataire seul habilité à prendre des réserves immédiates à la livraison de la marchandise par le transporteur, en l’espèce le Conseiller à la Communication du Président de la République du Tchad tel que mentionné sur le titre de transport, n’a porté aucune réserve sur le titre de transport Air France. Enfin, les réserves prises à l’encontre de SDV TCHAD sur le bon de livraison n°0033568 ne sont pas opposables à la société Air France.

Il convient de confirmer le jugement et de mettre hors de cause la SA Air France.

Concernant la mise en cause de la société Toumai Air Tchad :

Aucune demande précise n’est formulée à l’encontre de la société Toumai Air Tchad par aucune des parties. Seule la société SDV LI la mentionne dans ses conclusions en rappelant l’éventualité de secousses à l’origine du dommage allégué mais sans préciser les liens de droit existant entre la société Toumai Air Tchad et les autres parties dans l’instance. Il convient par conséquent de confirmer la mise hors de cause de la société Toumai Air Tchad.

Sur la demande de la société Soicex Electronique de dommages-intérêts pour résistance abusive :

La cour relève que la société Soicex Electronique n’a pas obtenu réformation du jugement en appel ; de surcroît , la résistance a une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à réparation que s’il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi insuffisamment caractérisé en l’espèce, la société SDV LI n’a fait qu’user de moyens de défense et notamment d’exceptions de procédure autorisées pour son substitué le transporteur.

Elle sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

III. Sur les demandes annexes :

La société Soicex Electronique, appelant principal qui n’obtient pas satisfaction, supportera la charge des dépens ; elle ne peut de ce fait bénéficier des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il apparaît inéquitable eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties de laisser à la charge des sociétés SDV LI et Air France les frais occasionnés par la procédure et non compris dans les dépens. Il convient de leur allouer à chacune la somme de 1.200 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour

— Confirme le jugement,

et, y ajoutant,

— Déboute la société Soicex Electronique de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive.

— Condamne la société Soicex Electronique à payer à chacune des sociétés SDV LI et Air France la somme de 1.200 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

— Rejette la demande formée par la société Soicex Electronique de ce chef.

— Condamne la société Soicex Electronique aux dépens d’appel.

— Autorise les SCP MALET et DESSART-SOREL-DESSART, avoués, à recouvrer directement les dépens d’appel dont elles auraient fait l’avance sans avoir reçu provision.

Le greffier, Le président,

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Cour d'appel de Toulouse, 2eme chambre section 1, 6 octobre 2010, n° 06/03089