Cour d'appel de Toulouse, 2e chambre, 27 avril 2022, n° 18/04729

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 2e ch., 27 avr. 2022, n° 18/04729
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 18/04729
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Toulouse, 30 octobre 2018, N° 2017J00702
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 29 septembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

27/04/2022

ARRÊT N°175

N° RG 18/04729 – N° Portalis DBVI-V-B7C-MTZN

VS/CO

Décision déférée du 31 Octobre 2018 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE – 2017J00702

M. FAIDHERBE

[F] [Z]

C/

[M] [U]

S.E.L.A.S. MJS PARTNERS EN LA PERSONNE DE ME [I] ES QUALITE MANDATAIRE LIQUIDATEUR DE SARL BATI SUR 06

Sté.coopérative Banque Pop. BANQUE

POPULAIRE OCCITANE

SARL ARBAT

SARL BATI SUR 06

infirmation partielle

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT SEPT AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [F] [Z]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représenté par Me Nicolas MATHE de la SELARL LCM AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [M] [U] Es qualité de « Mandataire judiciaire » de la « SARL ARBAT »

[Adresse 8]

[Localité 10]

Sté.coopérative Banque Pop. BANQUE POPULAIRE OCCITANE

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par Me Sébastien BRUNET-ALAYRAC de la SCP CAMILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

SARL ARBAT

[Adresse 3]

[Localité 10]

sans avocat constitué

SARL BATI SUR 06

[Adresse 1]

[Localité 12]

sans avocat constitué

INTERVENTION FORCEE

SELAS MJS PARTNERS en par personne de Maître [V] [I]

[Adresse 2] es qualité de mandataire liquidateur de la SARL BATI SUR 06

sans avocat constitué

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant V. SALMERON, Présidente, P. BALISTA Conseiller , chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

V. SALMERON, présidente

P. BALISTA, conseiller

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseiller

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

ARRET :

— défaut

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties- signé par V. SALMERON, présidente, et par C. OULIE, greffier de chambre.

Exposé des faits et procédure :

Le 21 juillet 2015, la société Arbat, dont [F] [Z] est le gérant, a ouvert un compte professionnel dans les livres de la Banque Populaire.

Le 21 juillet 2015, par acte sous-seing privé, [F] [Z] s’est porté caution solidaire et indivisible de la société Arbat au profit de la Banque Populaire pour toutes les sommes que la société Arbat resterait devoir à la banque dans la limite de 150.000 €. Il y est mentionné que Mme [J] [Z] est intervenue à l’acte en donnant son consentement exprès au cautionnement donné par son époux.

Le 27 juillet 2015, [F] [Z] a rempli avec son épouse une fiche patrimoniale qui indiquait qu’ils étaient mariés sous le régime de communauté légale, qu’il percevait des revenus professionnels annuels de 31.000 €, qu’ils étaient propriétaires de leur résidence principale estimée à 120.000 € et que celle-ci était affectée d’un emprunt dont le capital restant dû se portait à 18.000€.

Le 18 juillet 2016, une lettre de change d’un montant de 72.600,34 € et ayant pour date d’échéance le 30 septembre 2016 a été émise, avec comme tireur la société Arbat et comme tiré la société Bati. La lettre de change a été acceptée par la société Bati.

Le 30 septembre 2016, la Banque Populaire était le tiers porteur de cette lettre de change, qui lui a été transmise par la voie de l’endossement et aucun règlement n’est intervenu de la part du tiré.

Le 6 octobre 2016, la Banque Populaire a mis en demeure par courrier recommandé la société Bati de procéder au règlement de l’effet impayé qui avait été accepté.

Le 22 novembre 2016, la Banque Populaire a mis en demeure par courrier recommandé la société Arbat de lui régler le solde débiteur du compte-courant d’un montant de 5.858,22 € ainsi que le solde débiteur du compte « impayés au remboursement » qui comportait trois effets impayés, dont celui objet de la demande, pour un montant total de 107.655,44 €.

Le 15 décembre 2016, la Banque Populaire a mis en demeure de la société Arbat pour un montant total de 113.329,97 €, de [F] [Z] pour un montant identique et de la société Bati pour 110.840,72 €.

Par jugement du 29 novembre 2017, la société Arbat a été placée en liquidation judiciaire, Me [M] [U] étant nommé liquidateur.

Par acte d’huissier en date du 13 septembre 2017 enrôlé sous le n°2017J702, la Banque Populaire a assigné [F] [Z], la société Arbat et la société Bati devant le tribunal de commerce de Toulouse.

Par acte d’huissier en date du 29 janvier 2018 enrôlé sous le n°2018J00095, la Banque Populaire a assigné Me [M] [U] es-qualités devant le tribunal de commerce de Toulouse.

La Banque Populaire a demandé au tribunal notamment de condamner solidairement [F] [Z] et la société Bati à lui verser la somme de 73.203,80€ outre intérêt légal, et de fixer au passif de la société Arbat sa créance à hauteur de la même somme outre intérêt légal.

[F] [Z] a demandé au tribunal à titre principal de constater la nullité de la lettre de change, de la disqualifier en cession de créance, de juger en conséquence que la créance que la société Arbat détenait sur la société Bati avait été cédée au profit de la Banque Populaire, qu’en conséquence la Banque Populaire ne disposait d’aucun recours cambiaire à l’encontre de la société Arbat, et de juger la Banque mal fondée à agir contre la société Arbat et sa caution [F] [Z]. A titre subsidiaire, il a demandé de constater le caractère disproportionné de son engagement de caution.

La société Bati n’a pas comparu ni conclu.

Par jugement en date du 31 octobre 2018, le tribunal de commerce de Toulouse a :

prononcé la jonction des instances 2017J00702 et 2018J00095 et statué en un seul et même jugement ;

condamné solidairement [F] [Z] et la société Bati à régler à la Banque Populaire la somme de 73.203,80 € outre les intérêts au taux légal à compter du 31 août 2017 jusqu’au jour du règlement définitif, étant précisé que, conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil, les intérêts échus deviennent eux-mêmes productifs d’intérêts au bout d’un an ;

admis au passif de la société Arbat la créance de la Banque Populaire à la somme de 73.203,80 € outre les intérêts au taux légal à compter du 31 août 2017;

condamné in solidum [F] [Z], la société Bati et Me [U], es qualités de mandataire de la société Arbat, à régler à la Banque Populaire la somme de 1.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens ;

dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration en date du 14 novembre 2018, [F] [Z] a relevé appel du jugement. L’appel porte sur les chefs du jugement qui ont :

condamné solidairement [F] [Z] et la société Bati à régler à la Banque Populaire la somme de 73.203,80 € outre les intérêts au taux légal à compter du 31 août 2017 jusqu’au jour du règlement définitif,

admis au passif de la société Arbat la créance de la Banque Populaire à la somme de 73.203,80 € outre les intérêts au taux légal à compter du 31 août 2017;

condamné in solidum [F] [Z], la société Bati et Me [U], es qualités de mandataire de la société Arbat, à régler à la Banque Populaire la somme de 1.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens ;

Par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 26 septembre 2019, la société Bati a été placée en liquidation judiciaire, la Selas MJS Partners étant désignée en qualité de liquidateur.

Une première ordonnance de clôture a été rendue le 11 mai 2020.

Par conclusions notifiées le 28 mai 2020, [F] [Z] a indiqué que la société Bati Sur 06 avait été placée en liquidation judiciaire, et a demandé la révocation de l’ordonnance de clôture et le renvoi à une date ultérieure afin de permettre aux parties d’appeler en cause les organes de la procédure collective.

Par acte en date du 21 août 2020, [F] [Z] a assigné en intervention forcée la Selas MJS Partners, es qualité de mandataire liquidateur de la société Bati Sur 06;, par signification à domicile.

La clôture est intervenue le 10 janvier 2022.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions notifiées le 11 février 2019 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, de [F] [Z] demandant, au visa des articles L511-1 du code de commerce et L341-4 du code de la consommation, de :

infirmer le jugement du 31 octobre 2018 en toutes ses dispositions ; en conséquence,

à titre principal

débouter la Banque Populaire de l’ensemble de ses demandes ;

constater la nullité de la lettre de change en date du 18 juillet 2016;

requalifier cette lettre de change en cession de créance ;

juger en conséquence que la créance que la société Arbat détenait sur la société Bati a été cédée au profit de la Banque Populaire Occitanie ;

juger en conséquence que la Banque Populaire ne dispose d’aucun recours cambiaire à l’encontre de la Société Arbat ;

juger en conséquence que la Banque Populaire Occitanie est mal fondée à agir à l’encontre de la société Arbat et de sa caution [F] [Z]

à titre subsidiaire

débouter la Banque Populaire de l’ensemble de ses demandes

dire et juger inopposable à [F] [Z] l’engagement de caution qu’il a souscrit en garantie de la Société Arbat au bénéfice de la Banque Populaire

en tout état de cause, condamner la Banque Courtois au paiement de la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Vu les conclusions n°2 notifiées le 2 mai 2019 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, de la Banque Populaire demandant, au visa des articles 1103, 1104, 1231-1 et 2288 du code civil, L511-1 et s. du code de commerce, et L332-1 du code de la consommation, de :

confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Toulouse en date du 31 octobre 2018,

y ajoutant, condamner [F] [Z] à régler à la Banque Populaire la somme de 2.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers frais et dépens.

La Selas Partners es-qualités, assignée le 21 août 2020 par [F] [Z] par signification à domicile, et à qui les conclusions de l’appelant ont été signifiées par le même acte, n’a pas constitué avocat .

La société Bati, qui a fait l’objet de vaines recherches selon procès-verbal d’huissier en date du 10 mai 2019, n’a pas constitué avocat .

La société Arbat, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 14 janvier 2019 par signification à domicile, n’a pas constitué avocat.

Me [M] [U] es-qualités, n’a pas constitué avocat .

Par acte en date du 20 août 2021, [F] [Z] a assigné en intervention forcée la Selas MJS Partners, es qualité de mandataire liquidateur de la société Bati, par signification à domicile.

MJS Partners, es qualites, n’a pas constitué avocat

Motifs de la décision :

La clôture a été rabattue et fixée au 10 janvier 2022.

En cause d’appel, les débats portent uniquement sur la nullité de la lettre de change et ses conséquences éventuelles et, à titre subsidiaire, sur les demandes de la Banque populaire et notamment le caractère manifestement disproportionné de l’engagement de caution.

Il convient de relever qu'[F] [Z] a relevé appel à titre personnel et non en tant que représentant de la société Arbat et que par ailleurs, la société Bati Sur 06 n’avait pas comparu en première instance et a été intimée par [F] [Z] en appel qui a dû assigner en intervention forcée son représentant légal en cours d’instance, le liquidateur judiciaire de la société.. Ni la société Arbat ni la société Bati Sur 06 n’ont constitué avocat.

Il convient d’en déduire que ni la société Arbat ni la société Bati Sur 06 ne remettent en cause le jugement déféré.

— sur la nullité de la lettre de change du 18 juillet 2016 venant à échéance le 30 septembre 2016:

[F] [Z] invoque la nullité de la lettre de change sur le fondement de l’article L511-1 du code de commerce à défaut de mention du lieu où le paiement doit être effectué.

La Banque Populaire conteste le défaut de domiciliation du paiement puisque figure sur la lettre de change dans la case « domiciliation » la mention « [Localité 13] Montgolfier ».

De surcroît, elle rappelle que la sanction d’une telle irrégularité n’est pas la nullité de la lettre de change mais comme le précise l’article L511-1 4° du code de commerce :« à défaut d’indication spéciale, le lieu désigné à coté du nom du tiré est réputé être le lieu du paiement et, en même temps le lieu du domicile du tiré »

En application de l’article L511-1 du code de commerce, I. – La lettre de change contient :

1° La dénomination de lettre de change insérée dans le texte même du

titre et exprimée dans la langue employée pour la rédaction de ce titre;

2° Le mandat pur et simple de payer une somme déterminée ;

3° Le nom de celui qui doit payer, dénommé tiré

4° L’indication de l’échéance ;

5° Celle du lieu où le paiement doit s’effectuer ;

6° Le nom de celui auquel ou à l’ordre duquel le paiement doit être fait ;

7° L’indication de la date et du lieu où la lettre est créée ;

8° La signature de celui qui émet la lettre dénommé tireur. Cette signature est apposée, soit à la main, soit par tout procédé non manuscrite

A l’examen de la lettre de change litigieuse, émise par la société Arbat, le tiré est désigné comme étant la société Bati Sur 06 , sise [Adresse 9], et dans la case domiciliation est indiqué « [Localité 13] Montgolfier ».

Par ailleurs, les références bancaires du compte du tiré sont précisément renseignées.

Le grief allégué manque donc en fait.

La lettre de change critiquée est valable et comporte en outre les mentions exigées pour dire ce titre cambiaire valide.

Il convient de débouter [F] [Z] de sa demande de nullité et de confirmer le jugement de ce chef.

— sur la disproportion manifeste de l’acte de cautionnement d'[F] [Z] :

[F] [Z] invoque la disproportion manifeste de son engagement de caution en se fondant sur l’article L341-4 ancien du code de la consommation.

Il précise que son épouse n’a pas signé l’acte en qualité de conjoint qui donne son consentement exprès en application de l’article 1415 du code civil et en déduit que seuls ses biens propres entrent dans la gage du créancier. Il écarte le patrimoine immobilier qui est un bien commun et qui, en tout état de cause, avait une valeur nette de 102.000 euros face à un engagement de 150.000 euros. Par ailleurs, il percevait une rémunération annuelle de 31.000 euros ce qui, face à ses charges mensuels, représente un salaire net de 1.666,48 euros.

La Banque Populaire conteste toute disproportion manifeste alors que la caution a établi une fiche patrimoniale le 27 juillet 2015 indiquant qu’il était marié sous le régime de la communauté légale, percevait un revenu annuel de 31000 euros et était propriétaire d’un bien immobilier valorisé à 120.000 euros, précisant qu’un capital restant dû s’élevait à la somme de 18.000 euros.

Par ailleurs, elle rappelle que le patrimoine commun doit être pris en considération alors que son épouse a signé l’acte et qu’il se borne à affirmer le contraire sans l’établir.

Les dispositions de l’article L341-4 du code de la consommation, devenu L332-1 depuis le 1er juillet 2016, selon lesquelles « un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci appelée, ne lui permette de faire face à son obligation », sont applicables aux cautionnements souscrits après l’entrée en vigueur de cet article issu de la loi n°2003-721 du 1er août 2003 publiée au JO du 5 août.

Cette disposition s’applique à toute caution personne physique qui s’est engagée au profit d’un créancier professionnel. Il importe peu qu’elle soit caution profane ou avertie ni qu’elle ait la qualité de dirigeant social.

Il convient d’apprécier la disproportion manifeste de l’engagement à la situation de revenus et de patrimoine de la caution pour chaque acte de cautionnement successif à la date de l’engagement de caution .

L’engagement de caution ne doit pas être manifestement disproportionné aux biens et revenus déclarés par la caution, dont le créancier, en l’absence d’anomalies apparentes, n’a pas à vérifier l’exactitude.

La proportionnalité de l’engagement de la caution ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l’opération garantie.

La sanction du caractère manifestement disproportionné de l’engagement de la caution est l’impossibilité pour le créancier de se prévaloir de cet engagement.

Il appartient à la caution de rapporter la preuve du caractère manifestement disproportionné de son engagement à la date où l’engagement a été souscrit.

Enfin, il résulte de la combinaison des articles 1315 du code civil et L341-4 du code de la consommation qu’il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’établir qu’au moment où il l’appelle, le patrimoine de celui-ci permet de faire face à son obligation.

Par ailleurs,concernant le patrimoine d’une caution mariée, la disproportion manifeste de l’engagement de la caution s’apprécie, selon l’article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, notamment par rapport aux biens de la caution sans distinction, de sorte qu’un bien dépendant de la communauté doit être pris en considération, quand bien même il ne pourrait être engagé pour l’exécution de la condamnation éventuelle de la caution, en l’absence du consentement exprès du conjoint donné conformément à l’article 1415 du code civil.

En l’espèce, la fiche patrimoniale établie le 27 juillet 2015 par [F] [Z] fait mention d’un couple marié sous le régime de la communauté légale, sans enfant à charge et d’un patrimoine immobilier, résidence principale, d’une valeur de 120.000 euros financé par un emprunt dont le capital restant dû est de 18.000 euros et disposant d’un revenu professionnel annuel de 31.000 euros.

L’engagement de caution, dit « omnibus », de [F] [Z] à l’égard de la Banque populaire pour les engagements de la sarl Arbat daté du 21 juillet 2015 était de 150.000 euros sur 10 ans.

Il n’est pas invoqué par [F] [Z] d’anomalie concernant cette fiche patrimoniale en dehors de la fausse signature de madame [Z] sur le consentement du conjoint.

Outre le fait que la caution n’établit pas le défaut de signature de son épouse, cette seule irrégularité ne prive pas le créancier de se prévaloir du gage des biens communs.

Pour couvrir son engagement de 150.000 euros, [F] [Z] disposait d’un patrimoine immobilier de 102.000 euros net, ; il devait couvrir 48.000 euros( =150.000-102.000) à l’aide de ses seuls revenus soit 31.000 euros.

Sur deux ans de délai de paiement qu’une juridiction peut accorder à tout débiteur défaillant, il devait donc rembourser 2.000 euros par mois pour couvrir le solde résiduel de son engagement ; ses revenus mensuels déclarés ne dépassaient pas 2583 euros (=31.000 /12).

Il en résulte qu’il lui restait 583 euros pour vivre avec son épouse.

L’engagement de caution était donc manifestement disproportionné à ses revenus.

A la date de l’assignation en septembre 2017, la Banque populaire ne justifie pas qu'[F] [Z] disposait du patrimoine suffisant pour s’acquitter de la somme de 73.203, 80 euros réclamés.

Il n’était plus domiciliés dans la résidence principale déclarée dans la fiche patrimoniale établie en 2015 au [Adresse 11].

Par conséquent, la Banque Populaire est déchue du droit de se prévaloir de l’engagement de caution d’Askin [Z] et d’infirmer le jugement de ce chef.

— sur les autres demandes de la Banque Populaire :

la Banque populaire justifie de sa déclaration de créance au passif de la sarl Arbat.

Il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a fixé la créance de la Banque Populaire à l’égard de la société Arbat à concurrence de 73.203,80 euros

— sur les demandes accessoires :

la société Arbat sera condamnée aux dépens de première instance et la Banque Populaire prendra en charge les dépens d’appel.

Chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement, mais seulement en ce qu’il a :

condamné solidairement [F] [Z] et la société Bati Sur 06 à régler à la Banque Populaire la somme de 73.203,80 € outre les intérêts au taux légal à compter du 31 août 2017 jusqu’au jour du règlement définitif, étant précisé que, conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil, les intérêts échus deviennent eux-mêmes productifs d’intérêts au bout d’un an ;

condamné in solidum [F] [Z], la société Bati Sur 06 et Me [U], en qualité de mandataire de la société Arbat, à régler à la Banque Populaire la somme de 1.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens ;..

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

— dit que la lettre de change du 18 juillet 2016 est valide

— dit que la Banque Populaire est déchargée du droit de se prévaloir de l’acte de cautionnement d'[F] [Z] du 21 juillet 2015

— condamne la société Arbat aux dépens de première instance

— dit que chaque partie conserve la charge de ses frais irrépétibles de première instance

— confirme le jugement pour le surplus

— condamne la Banque populaire aux dépens d’appel

— dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Le greffier La présidente

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