Cour d'appel de Versailles, 12ème chambre section 2, 9 décembre 2010, n° 09/06158

  • Volonté de profiter des investissements d'autrui·
  • Volonté de s'inscrire dans le sillage d'autrui·
  • Publication de la décision de justice·
  • Imitation des documents commerciaux·
  • Produits identiques ou similaires·
  • Action en concurrence déloyale·
  • Au regard des professionnels·
  • Perspectives d'exploitation·
  • Tribunal de grande instance·
  • Imitation de la publicité

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 9 déc. 2010, n° 09/06158
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 09/06158
Décision précédente : Tribunal de commerce de Versailles, 4 juin 2009, N° 2007F4011
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de commerce de Versailles, 5 juin 2009, 2007/04011
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : EVERYNEP
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 3360445
Classification internationale des marques : CL09 ; CL38 ; CL42
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Référence INPI : M20100729
Télécharger le PDF original fourni par la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE VERSAILLES ARRET DU 09 DECEMBRE 2010

12e chambre section 2 R.G. N° 09/06158

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Juin 2009 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES N° Chambre : 3 N° RG : 2007F4011

LE NEUF DECEMBRE DEUX MILLE DIX, La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant, dans l’affaire entre :

APPELANTES S.A.S.NEPENTHES C RCS VERSAILLES 439 740 150, ayant son siège 78500 SARTROUVILLE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentées par la SCP JUPIN & ALGRIN, avoués – N° du dossier 0025662 Pstant : Me Nicolas PERRAULT, avocat au barreau de VERSAILLES.

INTIMEES S.A.R.L. EVERYS, RCS VANNES 398 064 055, ayant son siège ZA du Rédo 56640 ARZON agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par Me Farid SEBA, avoué – N° du dossie r 0012631 Rep/assistant : Me Pascale LEBEL, avocat au barreau de LYON. COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 11 Octobre 2010 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Albert MARON, Président, Madame Marion BRYLINSKI, conseiller, Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller, (rédacteur)

Greffier Népenthès C a développé pour le compte de ses pharmaciens adhérents un guide de référencement du pharmacien, l’activité de centrale d’achats et de grossiste répartiteur, ainsi que des services liés au développement des activités d’officine.

La société Everys a développé un logiciel standard de gestion des officines de pharmacie : le logiciel Winpharma. En 2005, N. BORNEO et Everys se sont rapprochées en vue de développer un module informatique spécifique permettant aux officines équipées de Winpharma de passer leurs commandes en ligne auprès de Népenthès, produit dénommé EVERYNEP. Ces mêmes sociétés ont constitué ensemble la société par actions simplifiée Everynep dans laquelle elles avaient une participation égale de 50%, avec notamment l’objectif de développer et commercialiser ce module. Monsieur Grenier, Président de la société Népenthès a été nommé Président de la société Everynep. L’offre EVERYNEP a été lancée à compter d’octobre 2005. Népenthès et la société Alliadis laquelle avait elle-même développé un logiciel standard de gestion des officines de pharmacie, le logiciel Alliance +, ont lancé en octobre 2006 sur le marché, l’offre ALLIANEP, solution informatique destinée aux officines équipées du logiciel Alliance +, leur permettant de passer leurs commandes en ligne auprès de Népenthès. Au vu de la campagne publicitaire de lancement ALLIANEP, Everys estimant être victime de manoeuvres de concurrence déloyale, a mis en demeure d’une part, les sociétés N. BORNEO, Alliadis et Népenthès C, et d’autre part, M. Grenier en qualité de président d’EVERYNEP, d’avoir à cesser leurs agissements. Par acte d’huissier signifié le 13 juillet 2007, la société Everys a fait citer devant le tribunal de commerce de Versailles les sociétés N. BORNEO, Alliadis et Népenthès C pour obtenir la condamnation des sociétés au paiement des sommes suivantes :

-300'000 € à titre de concurrence déloyale,
-100'000 € au titre du préjudice d’image,
-20'000 € au titre du dépôt de la marque EVERYNEP au profit de N BORNEO.

Elle sollicitait en outre la publication du jugement et une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Dans le dernier état de ses prétentions, elle portait sa demande de dommages et intérêts du chef de concurrence déloyale et perte de chance à la somme de 443.800 €. La société Everys faisait valoir notamment :

-que les campagnes publicitaires du nouveau produit EVERYNEP créés par la société Everys témoignaient d’une créativité originale spécifique et identifiable par leur accroche commerciale, leurs slogans, logos et descriptifs desdits avantages du produit sous forme de lecture circulaire autour d’un logo symbolisant une spirale,

— que les sociétés Alliadis et Népenthès C en reprenant ces éléments avaient commis à son encontre une manoeuvre de concurrence déloyale,
-que les campagnes de lancement du produit ALLIANEP dans les articles de presse, en évoquant de façon similaire les qualités précédemment énoncées à propos d’EVERYNEP, ont contribué à aggraver la situation de concurrence déloyale,
-que Népenthès a abandonné les campagnes promotionnelles EVERYNEP à compter du lancement d’ALLIANEP par Népenthès,
-que le dépôt de la marque EVERYNEP au bénéfice de la seule société N. BORNEO constitue une manoeuvre déloyale lui causant un préjudice. Par jugement rendu le 5 juin 2009, le tribunal de commerce s’est déclaré compétent, a déclaré la société Everys recevable en ses demandes, a :

-dit que la société Népenthès C s’est livrée à une manoeuvre de concurrence déloyale au détriment de la société Everys, l’a condamnée en conséquence à payer la somme de 50'000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice d’image,
-dit que la société N. BORNEO s’est livrée à une manoeuvre déloyale à l’encontre de la société Everys en procédant à une atteinte au patrimoine de la société Everynep et a condamné la société N. BORNEO en conséquence à lui payer la somme de 10'000 € à titre de dommages et intérêts pour manoeuvre déloyale,
-débouté la société Everys du surplus de ses demandes, notamment de sa demande pour perte de chance et les défenderesses de leurs demandes reconventionnelles, débouté les sociétés Népenthès et N. BORNEO de leur demande de garantie contre la société Alliadis,
-condamné in solidum les sociétés Népenthès et N. BORNEO à payer à la société Everys 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Les sociétés Népenthès et N. BORNEO ont relevé appel de ce jugement. Par dernières écritures signifiées le 16 novembre 2009, les appelantes demandent à la cour d’infirmer partiellement le jugement du tribunal de commerce de Versailles en date du 5 juin 2009 et statuant à nouveau, Vu les dispositions des articles L.716-3 du code de la propriété intellectuelle et L.311-2 du code de l’organisation judiciaire. Déclarer les sociétés Népenthès C et N. BORNEO recevables et bien fondées en leur exception d’incompétence. Dire que le tribunal de commerce de Versailles est incompétent pour connaître de la demande formulée par la société Everys et désigner en conséquence le tribunal de grande instance de Paris.

Vu les dispositions des articles 31 et 32 du code de procédure civile, Vu l’application du principe selon lequel « nul ne plaide par procureur ». Constater le défaut de qualité à agir de la société Everys à l’encontre des sociétés N. BORNEO et de sa filiale Népenthès C. Dire en conséquence la société Everys irrecevable en ses demandes. Constater que la société Everys ne démontre pas l’existence de manoeuvres déloyales de la part des sociétés Népenthès C et N. BORNEO à son encontre et qu’au surplus son préjudice n’est pas caractérisé. Débouter en conséquence la société Everys de l’intégralité de ses demandes. Recevoir les sociétés N. BORNEO et Népenthès C en leur demande reconventionnelle et condamner la société Everys à leur verser chacune la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour comportement abusif. A titre infiniment subsidiaire, réduire le préjudice invoqué par la société Everys à de plus justes proportions et condamner en toute hypothèse la société Alliadis à relever et garantir les sociétés Népenthès C et N. BORNEO de toutes condamnations prononcées à leur encontre.

Condamner la société Everys à verser aux sociétés Népenthès C et N. BORNEO chacune la somme de 5 000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Par dernières conclusions signifiées le 24 mars 2010, la société Alliadis demande à la cour :

Á titre principal de réformer le jugement, et de : Constater que la solution informatique EVERYNEP a été mise au point par la société Everynep créée spécialement à cet effet. Constater que la présente action a pour objet de faire constater des actes de concurrence déloyale par imitation de la publicité EVERYNEP. Dire que seule de la société Everynep a qualité à agir pour défendre la publicité de son produit.

À titre subsidiaire, Constater que la société Alliadis n’a pas pris part à la publicité du produit ALLIANEP. Constater en toute hypothèse que la publicité ALLIANEP n’est pas constitutive de concurrence déloyale.

Constater en outre que la société Everys ne justifie pas du préjudice invoqué à hauteur de 300 000 €. Constater que les sociétés Népenthès et N. BORNEO ne justifient pas de leurs demandes tendant à être relevées et garanties par la société Alliadis en cas de condamnation.

En conséquence, Dire irrecevable l’action de la société Everys.

A titre subsidiaire Confirmer le jugement du tribunal de commerce qui a débouté la société Everys de ses demandes à l’encontre de la société Alliadis. Débouter les sociétés Népenthès et N. BORNEO de leurs demandes de garantie à l’encontre de la société Alliadis.

Condamner la société Everys, ou qui mieux le devra, à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages intérêts pour procédure abusive, outre 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions signifiées le 16 mars 2010, la société Everys demande à la cour de se déclarer compétente pour juger d’une action en concurrence déloyale et la recevoir en son appel incident, statuant à nouveau :

-fixer sa perte de chance à l’installation de 200 pharmacies en trois ans, soit 20% de l’objectif commercial initial, correspondant à une somme égale à 443'880 € de marges bénéficiaires perdues,
-en conséquence condamner solidairement à titre principal, les sociétés Népenthès et Alliadis à lui payer cette somme à titre de dommages et intérêts pour s’être livrées à une manoeuvre de concurrence déloyale à son détriment,
-à titre subsidiaire, condamner chacune de ces sociétés à lui payer 221 900 € de dommages et intérêts du même chef,
-condamner in solidum les sociétés N. BORNEO et Népenthès C à la somme de 100 000 € de dommages et intérêts pour atteinte à l’image,
-dire que le dépôt de la marque EVRYNEP au bénéfice de la seule société N BORNEO constitue une manoeuvre déloyale à son encontre lui ayant causé un préjudice et la condamner en conséquence à lui payer 20 000 € de dommages- intérêts de ce chef,
- ordonner la publication de la décision à intervenir dans trois magazines de presse concernant le secteur spécialisé, en format pleine page, pour une parution dans chaque magazine, aux frais avancés des trois sociétés Alliadis, N. BORNEO et Népenthès C, dans la limite de 12 000 € hors-taxes par insertion par magazine,

— débouter les mêmes sociétés de toutes leurs demandes et les condamner in solidum à lui payer 6 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. A l’appui de leur appel, les sociétés appelantes estiment que l’action diligentée ne relève pas de la compétence du tribunal de commerce de Versailles, que de surcroît elle apparaît irrecevable eu égard au défaut de qualité à agir de la société Everys et qu’enfin elle est manifestement infondée en fait comme en droit à solliciter réparation au titre de l’action en concurrence déloyale. Elles soutiennent leur exception d’incompétence en faisant valoir que l’action dont se prévaut la société Everys repose sur la protection d’un droit privatif relevant de la législation sur la protection des marques, que le titulaire de la marque EVERYNEP est la société N. BORNEO ainsi qu’il résulte du dépôt effectué le 17 mai 2005 sous le numéro 053360446 auprès de l’INPI, que l’enregistrement de la marque confère à son titulaire un droit de propriété sur cette marque ainsi que sur les produits et services qu’il a désignés (article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle), que le débat portant sur l’utilisation des droits que confère à son titulaire le dépôt de cette marque relève donc exclusivement du tribunal de grande instance quand bien même les deux parties auraient la qualité de commerçant. Conformément à une jurisprudence constante, le tribunal de grande instance est seul compétent en matière de contrefaçon de marque ou de brevet ou lorsque l’action en concurrence déloyale lui est connexe. La société Everys, simple associée de la société Everynep, est dénuée de qualité à agir car seule cette dernière est fondée à se prévaloir directement du préjudice résultant d’une campagne imitant la commercialisation de ses produits et l’action en concurrence déloyale n’est pas ouverte directement à la société Everys. La cour déclarera en conséquence l’action irrecevable. Au fond, les appelantes font valoir que la société Everys ne démontre pas que l’ensemble des conditions de la concurrence déloyale soit réuni. De surcroît, son action s’inscrit dans une démarche de parfaite mauvaise foi, abusive et préjudiciable aux sociétés N. BORNEO et Népenthès. En premier lieu, les appelantes estiment qu’elles ne se trouvent pas dans un rapport de concurrence avec la société Everys. Leur démarche peut être simplement complémentaire sans qu’elle puisse nécessairement entraîner la concession d’une exclusivité réciproque. Une gamme complète de produits et de services communs a été mise au point et développée sous l’impulsion de N. BORNEO et de Népenthès C pour permettre aux pharmaciens de commander des produits en ligne sur les plates-formes proposées par le Groupement.

De son côté, la société Everys est une société de services informatiques qui a développé et commercialisé un logiciel de gestion intégrale des officines de pharmacie dénommé Winphama. Il existe plusieurs groupements de pharmaciens en France dont Népenthès est un des plus importants avec plus de 4500 adhérents. Les sociétés de services informatiques développant et commercialisant les logiciels de gestion d’officines sont nombreuses. Le pharmacien doit pouvoir recevoir du groupement auprès duquel il est adhérent l’ensemble des catalogues en ligne pour effectuer ses commandes de médicaments et ce quel que soit l’équipement informatique dont il est déjà doté. Il n’y a pas de concurrence déloyale entre deux professionnels exerçant des activités totalement distinctes.

En second lieu, les appelantes considèrent qu’il n’y a pas d’imitation qui soit répréhensible du support publicitaire. Les supports publicitaires ne comportent aucune originalité leur conférant une protection particulière. Le slogan employé est commun. La notion de « spirale gagnante » est très utilisée dans le vocabulaire économique général et n’emporte donc au profit de quiconque aucun droit privatif. Everys ne démontre pas sérieusement qu’une confusion dans l’esprit du public ait pu se produire. Aucune faute ne peut donc être reprochée objectivement aux sociétés Népenthès C. et N. BORNEO en l’absence d’interdiction contractuelle qui puisse leur être opposable ou de l’existence de man’uvres déloyales caractérisées. Les appelantes soutiennent encore que la société Everys ne justifie d’aucun préjudice. Elle ne démontre aucun préjudice d’image à défaut d’originalité du produit. Il est parfaitement inexact de prétendre que l’impact ait pu être supérieur au périmètre du marché de la pharmacie d’officine alors qu’il s’agit d’une fonctionnalité supplémentaire à un logiciel-métier bien spécifique : l’achat de médicaments en ligne dans le cadre d’un circuit strictement réglementé des produits de santé. Concernant l’existence d’un prétendu préjudice commercial, la société Everys ne démontre à aucun moment un détournement de clientèle à son préjudice ou même la perte d’une chance qui ne peut avoir en l’espèce qu’un caractère purement hypothétique.

La société Everys produit aux débats, en dernière minute, ses bilans, qui ne démontrent aucune perte particulière. Le chiffre d’affaires est en constante augmentation et les résultats ont progressé. Le chiffrage du préjudice prétendument causé « par l’arrêt de la communication de produits adhérents » est totalement fantaisiste. L’analyse effectuée par le Cabinet KPMG (Bureau de Lorient) manque de sérieux et d’objectivité (rapport du 29 octobre 2008). En revanche, il est bien certain que la société Everys a contribué à dégrader sa propre image en raison des dysfonctionnements de son matériel entraînant le mécontentement de plusieurs pharmaciens. Enfin, la procédure diligentée par la société Everys est abusive. La société Everys ne peut sérieusement reprocher à son partenaire un comportement déloyal alors qu’elle s’autorise de son côté à contracter des accords avec des groupements de pharmaciens concurrents de Népenthès. De plus en omettant ou en refusant de définir le périmètre d’intervention de son propre associé dans la société Everynep, la société Everys a clairement entendu laisser à son partenaire la possibilité de conduire sa propre action commerciale en application des principes de la liberté du commerce et de l’industrie. L’attitude de la société Everys démontre un comportement procédurier qui n’a pour autre but que de nuire à la réputation et à l’image du groupement Népenthès dans le milieu de la santé. La société Alliadis rappelle qu’elle a développé une logiciel de gestion d’officines Alliance +, que la société Népenthès ne fournit aucun matériel ni logiciel, qu’elle a donc été logiquement approchée par la société Népenthès, un grand nombre de ses adhérents utilisant la solution Alliance +. Il s’agissait en effet pour Népenthès d’obtenir que ces adhérents puissent bénéficier de l’incorporation de ses catalogues en ligne dans les fonctionnalités de commandes de produits. La solution informatique ainsi mise au point a été commercialisée par la société Népenthès à compter de la fin de l’année 2006, sous le nom ALLIANEP. Au soutien de sa demande, devant les premiers juges, en paiement de dommages et intérêts à l’encontre des sociétés Népenthès, N. BORNEO et Alliadis, la société Everys affirmait que ces dernières sociétés se seraient livrées à des actes de concurrence déloyale en faisant de la publicité pour la solution informatique ALLIANEP dans les mêmes termes que la publicité faite par EVEYNEP lors du lancement de ce logiciel. A l’évidence, l’action ainsi formée sera jugée irrecevable, et à titre subsidiaire, non fondée.

Sur la recevabilité, la société Alliadis fait valoir que la solution informatique EVERYNEP a été mise au point et développée, selon les termes de l’exploit introductif d’instance, par la société Everynep, créée en 2005 par les sociétés Everys et Népenthès . L’objet de la société Everynep était la réalisation de travaux d’étude, de conseil, promotion, gestion, conception et assistance en matière informatique, et toute prestation de négoce s’y rapportant, et notamment « les services de développement, production, fournitures et documentation de logiciels standards, ainsi que leur édition ; les services « clé en main » dans le domaine des activités informatiques ». C’est donc bien la société Everynep et qui a mis au point la solution du même nom, et en a fait la promotion à la fin de l’année 2005 et courant 2006. Seule cette société a donc qualité à agir en concurrence déloyale du fait d’une prétendue imitation des slogans et publicités utilisés pour le lancement du logiciel EVERYNEP, cette imitation pouvant entraîner une confusion avec le produit ALLIANEP. En effet, la société Everynep a fait la campagne de lancement du produit EVERYNEP. C’est elle également qui avait fait les développements pour le produit. C’est d’ailleurs ce que retient le jugement, en rappelant que c’est la société Everynep qui a subi une amputation de son patrimoine du fait de l’action de N. BORNEO et qu’en tant qu’actionnaire d’EVERYNEP, la société Everys est fondée à en demander réparation à N. BORNEO. Ainsi, comment retenir l’intérêt à agir de la société Everys alors que le tribunal relève lui-même que c’est la société Everynep qui subirait les conséquences des manoeuvres des sociétés Népenthès et N. BORNEO. La cour réformera donc le jugement du 5 juin 2009 et ne pourra que constater le défaut de qualité à agir de la société Everys. Subsidiairement, la cour devra constater l’absence de responsabilité de la société Alliadis qui n’a pas participé à l’élaboration de la campagne de lancement de ALLIANEP, qui n’a pris aucune part dans la réalisation de la publicité ni dans l’envoi des invitations pour les soirées de présentation du produit ALLIANEP. La société Alliadis ayant développé une relation de partenariat depuis longtemps avec la société Népenthès, c’est tout naturellement que la solution ALLIANEP a été mise au point pour intégrer les prestations offertes par Népenthès. Elle est proposée aux officines pharmaceutiques depuis la fin de l’année 2006, exclusivement par la société Népenthès et non pas par Alliadis qui ne peut imposer le choix de tel ou tel fournisseur à ses clients pharmaciens. Alliadis a par ailleurs développé l’intégration de catalogues avec d’autres fournisseurs, ce qu’aucune des parties à la présente instance n’ignore.

Il n’existe donc aucune structure commune entre la concluante et la société Népenthès, cette dernière ayant en outre décidé seule du mode de lancement de ALLIANEP, et particulièrement du mailing auprès de ses clients, la totalité des frais ayant été supportés par la société Népenthès. Le grief formulé par la société Everys à l’encontre de la société Alliadis consistant en une reproduction des documents publicitaires d’EVERYNEP pour le lancement de la solution ALLIANEP n’était donc pas fondé. Au surplus, l’imitation de la publicité ne saurait constituer un acte de concurrence déloyale que pour autant que d’une part, la publicité mérite une protection et que d’autre part, il en résulte une confusion dans l’esprit du public. Or, la société Everys se garde bien de rapporter la preuve d’une quelconque confusion que les pharmaciens auraient pu faire entre le produit ALLIANEP d’une part et EVERYNEP d’autre part. La demande formulée à l’encontre de la société Alliadis sera en conséquence rejetée, et le jugement déféré confirmé. Il convient d’ailleurs de relever que la société Everys avait parfaitement admis le jugement du 5 juin 2009 ayant mis la société Alliadis hors de cause, puisqu’elle lui avait fait signifier le jugement, pour le rendre définitif à son égard. Elle ne pourrait en conséquence, dans le cadre de l’appel formé par les sociétés Népenthès et N. BORNEO, solliciter la réformation pour ce qui concerne la mise hors de cause d’Alliadis. Subsidiairement, la demande de dommages et intérêts de la société Everys n’est pas justifiée. Les sociétés appelantes n’expliquent pas devant la cour pas plus qu’elles ne l’ont fait devant les premiers juges, leur demande de garantie formée à son encontre. En réponse, la société Everys, sur la compétence, rappelle que son action ne repose que sur la notion juridique de concurrence déloyale, en raison de similitudes constatées dans des campagnes publicitaires concernant la promotion de deux modules informatiques novateurs et similaires, commercialisés par deux sociétés directement concurrentes, toutes deux partenaires de la société Népenthès C dans le cadre précis de la vente de leurs modules informatiques. Les ressemblances constatées dans les campagnes publicitaires se situent au niveau de la description et de la promotion de deux outils informatiques, en ce qui concerne le texte, les slogans des campagnes publicitaires et non la marque des outils EVERYNEP ou ALLIANEP. Aucune demande de protection de marque n’est sollicitée.

Par ailleurs, il est également sollicité que la cour se prononce spécifiquement sur le comportement de la société N. BORNEO, associée de la société Everys au sein de la société Everynep, laquelle a cru pouvoir déposer en son nom la marque EVERYNEP, sans en informer Everys. Il est sollicité à ce titre la condamnation de N. BORNEO en raison de son comportement déloyal vis-à-vis de la société Everys, cela en dehors du problème qui peut se poser vis-à-vis de la société Everynep, dépossédée de sa dénomination sociale. La Cour constatera qu’il n’est pas demandé réparation pour contrefaçon de la marque EVERYNEP, ou contrefaçon de la marque Everys ; elle dira donc la société Everys recevable en cette demande également. Sur le prétendu défaut de qualité à agir, la société Everys démontre dans la présente instance des préjudices propres et directs, consécutifs à la concurrence déloyale invoquée. En effet, la société Everys démontre tout d’abord que c’est seulement elle qui a conçu le programme informatique EVERYNEP, ce qui n’est pas contesté ; que c’est également elle, factures à l’appui, qui est à l’origine de la création et de la diffusion de la campagne promotionnelle d’EVERYNEP.

C’est la société Everys, seule propriétaire du logiciel Winpharma et du programme associé EVERYNEP, qui les commercialise partout en France, qui forme les pharmaciens sur site à ce produit informatique, qui assure les mises à jour et facture toutes les prestations correspondantes. A la suite du tribunal, la cour relèvera que la société Everynep n’a jamais effectué un seul paiement ou investissement correspondant à une conception informatique quelconque, ce malgré son objet social, qu’elle ne dispose par ailleurs d’aucun salarié, qu’elle ne facture aucune vente d’aucun produit ou prestation de service, que ses locaux sont ceux de la société Népenthès, chez laquelle elle est gracieusement hébergée. L’activité économique de déploiement du module EVERYNEP a toujours été assurée par la société Everys, laquelle en a avancé tous les frais et perçu les exacts bénéfices avancés dans la présente procédure, pièces à l’appui. De son côté, la société Népenthès bénéficiait, par le déploiement du module EVERYNEP permettant la vente en ligne de ses produits, de l’accroissement corrélatif de ses ventes, tout en n’ayant pas à assumer les charges de fonctionnement et de maintenance du service informatique EVERYNEP, assuré par Everys.

Enfin, c’est bien la société Everys qui a vu les ventes EVERYNEP s’effondrer dès l’apparition des campagnes publicitaires Alliance + et qui en a subi un préjudice économique direct, attesté, incontestable. La société Everys a donc qualité à agir. Au fond, la société Everys soutient que la similitude des campagnes publicitaires concernant les deux produits EVERYNEP et ALLIANEP est constitutive d’une manoeuvre de concurrence déloyale. La comparaison des supports publicitaires distribués aux pharmaciens en octobre 2005 pour EVERYNEP et en octobre 2006 pour ALLIANEP met en évidence la ressemblance entre ces supports. La cour reconnaîtra à la campagne publicitaire EVERYNEP, dans les slogans et les descriptions détaillées des services proposés à la vente, le caractère d’une création publicitaire caractérisant de façon spécifique et originale une offre commerciale nouvelle sur le marché de la gestion informatique des pharmacies, à la rentrée 2005. Il y aura lieu de dire ensuite que les ressemblances des publicités ALLIANEP constituent un acte de concurrence déloyale ayant provoqué une situation de parasitisme préjudiciable à la société Everys. La reprise à l’identique, en 2006 par Népenthès et Alliadis, de l’accroche commerciale, des slogans et descriptifs publicitaires tels qu’ils ont été originellement diffusés par Everys pour l’outil EVERYNEP, dans leur forme de lecture circulaire également, manifeste l’existence d’une faute caractérisant en l’espèce une manoeuvre de concurrence déloyale de ces sociétés.

La cour constatera que la reprise des slogans et descriptifs s’est non seulement déroulée entre des sociétés directement concurrentes, puisque la société Alliadis est un concurrent de la société Everys, qu’elle s’est opérée également à l’initiative des sociétés Népenthès et N. BORNEO, partenaires des deux sociétés concurrentes sur deux projets concurrents, la société N. BORNEO étant de surcroît l’associée d’Everys dans EVERYNEP, ce qui ajoute au comportement déloyal et à la confusion sur le marché. Le risque de confusion s’en est trouvé automatiquement aggravé, puisque les invitations aux soirées de présentation des deux produits concurrents ont toujours été lancées par Monsieur Grenier, P.D.G. de Népenthès, également P.D.G de la société Everynep. La similitude parfaite constatée entre les supports publicitaires des deux produits concurrents va également se retrouver colportée dans les articles qui sont diffusés auprès des pharmaciens, via les magazines professionnels, ce qui a aggravé la situation de confusion initialement générée par les manoeuvres de concurrence déloyale.

Sur la situation de concurrence déloyale, la société Everys reprend à son compte la motivation du tribunal de commerce. En revanche, la cour devra retenir que les sociétés Népenthès C et Alliadis ont commis ensemble, à leur profit, les actes de concurrence déloyale constatés. Il y aura donc lieu de condamner celles-ci solidairement. En effet, la société Alliadis apparaît également à l’initiative des campagnes publicitaires du produit ALLIANEP, participant activement à toutes les soirées de présentation, et co-signant, avec la société Népenthès C, tous les documents publicitaires publiés. Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que le produit ALLIANEP est un outil conçu et commercialisé par la seule société Alliadis, fonctionnant sous son logiciel de gestion. En conséquence, celle-ci a directement bénéficié d’une campagne publicitaire dont elle ne pouvait ignorer qu’elle constitue une reprise à l’identique de la publicité EVERYNEP, diffusée un an plus tôt par son concurrent direct. Sur ses préjudices, la société Everys soutient que son objectif sur trois ans d’équiper 1000 pharmacies et à terme d’équiper 20% des adhérents du groupement avec le système Winpharma / EVERYNEP était parfaitement réaliste, d’autant plus lorsque l’on prend en considération le fait que Népenthès a entendu communiquer très abondamment dans la presse sur ses services de commande en ligne. En réalité, seules 63 pharmacies ont été installées.

A partir de trois hypothèses comptables de détermination des préjudices basées sur des objectifs parfaitement réalistes, ainsi que sur les ventes réalisées par la société Everys pendant plusieurs mois, la perte de chance ne saurait être inférieure à la somme de 204.120 euros de marge bénéficiaire qui ne sera jamais atteinte par Everys, au vu des courbes de ventes fonction des ventes constatées dans les extraits des livres comptables communiqués et ne saurait être supérieure à la somme de 1.631.880 euros de marge bénéficiaire, en fonction des objectifs initiaux. La société Everys sollicite la condamnation solidaire des sociétés Népenthès C et Alliadis à la somme de 443.880 euros de dommages et intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale constatés, pour perte de chance. Aux sommes qui seront retenues par la Cour au titre de perte de chance, il convient d’ajouter :

-le préjudice subi par Everys en termes d’image, du fait du comportement des sociétés N. BORNEO et Népenthès ;

-la perte de la marque EVERYNEP pour Everys, associée de N. BORNEO. Il conviendra également de prendre en considération deux autres aspects :

— le coût global d’EVERYNEP pour Everys ;

-les frais d’actualisation des bases de données des produits au profit de Népenthès, qui continue d’accroître son chiffre d’affaires grâce aux 63 pharmacies équipées sous EVERYNEP. La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 3 juin 2010. Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l’article 455 du code de procédure civile. SUR CE, LA COUR : Sur la compétence En application de l’article L. 716-3 du code de la propriété intellectuelle, les actions civiles et les demandes relatives aux marques sont exclusivement portées devant les tribunaux de grande instance, y compris lorsqu’elles portent à la fois sur une question de marques et sur une question connexe de concurrence déloyale. Les tribunaux de grande instance appelés à connaître des actions et des demandes en matière de marques sont déterminés par voie réglementaire.

La société Everys reproche à Népenthès, N. BORNEO et Alliadis des agissements constitutifs à son sens de concurrence déloyale et elle agit à leur encontre sur le fondement de l’article 1382 du code civil. Cette action ne vise pas à se faire reconnaître un quelconque droit de propriété intellectuelle sur les marques EVERYNEP ou EVERY NEP déposée par N. BORNEO ou à contester le droit de N. BORNEO sur ces marques, et son action en concurrence déloyale n’est pas connexe à une action relative à la contrefaçon de ces marques EVERYNEP ou EVERY NEP. Son action ne repose pas sur un droit privatif relevant de la législation des marques. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence soulevée au profit du tribunal de grande instance de Paris. Sur la qualité à agir de la société Everys

Il n’est pas discuté que c’est la société Everys, éditeur de logiciel qui a mis au point le produit spécifique EVERYNEP. Les parties n’apportent aucun élément venant démentir, ce que le tribunal de commerce a relevé dans son jugement, qu’elles s’étaient accordées à l’audience devant le juge rapporteur pour confirmer que les ventes du logiciel Winpharma avec ou sans le module EVERYNEP étaient et demeuraient faites par la société Everys, que c’est cette dernière qui facturait directement les pharmaciens, que ni Népenthès, ni N. BORNEO ni Everynep n’étaient intervenues à aucun moment dans le processus de vente. Ni Népenthès, ni N. BORNEO ne contestent qu’Everynep est une société sans employé, qu’elle n’a pas acheté les droits d’exploitation du logiciel, qu’elle n’a avancé aucun frais de fonctionnement ou de structure et pas même le coût du dépôt des marques EVERYNEP et EVERY NEP qui a été supporté par N. BORNEO. De son côté, la société Everys justifie avoir réglé le coût de la campagne de lancement de son produit EVERYNEP. Dès lors, sous réserve de l’appréciation qui sera faite du bien fondé de ses demandes, elle justifie de sa qualité à agir à l’encontre de Népenthès, N. BORNEO et Alliadis, dont elle soutient qu’elles ont participé en commun aux agissements visant à concurrencer de manière déloyale le produit EVERYNEP qu’elle a elle- même mis au point et commercialisé et pour lesquels elle demande réparation des préjudices qu’elle a personnellement subis. La société Everys est donc recevable en son action. Sur la concurrence déloyale

L’imitation des messages ou supports publicitaires d’un concurrent peut constituer un comportement déloyal et/ou parasitaire lorsqu’il est de nature à créer dans l’esprit des clients une confusion avec des produits concurrents et/ou qu’il vise à tirer profit des efforts et investissements déployés par le concurrent. En l’espèce, il ressort de la comparaison des documents publicitaires de lancement des produits EVERY NEP et ALLIANEP et des invitations aux soirées de lancement qui ont été diffusés pour les premiers à partir d’octobre 2005 et pour les seconds d’octobre 2006, que s’ils diffèrent par des détails, leurs similitudes sont évidentes et produisent la même impression d’ensemble avec l’utilisation du graphisme de la spirale, associée au même argumentaire de la « spirale gagnante », avec une reprise quasiment à l’identique des avantages présentés sous forme de lecture circulaire autour du logo symbolisant cette spirale, dans le même ordre et avec le même agencement : « mieux acheter, meilleures remises, moins de rangements, plus de marge, personnel plus disponible, plus de conseil à la vente, plus de vente, plus de C.A., plus de rentabilité ».

L’accroche associée à EVERY NEP sur les invitations « Gagnez 2 fois plus que le marché, plus de marge, plus de C.A., plus de temps, plus de résultat » figure à l’identique sur les invitations ALLIANEP aux soirées de lancement, reprenant les mêmes gains attendus. Au surplus, les invitations font apparaître en premier le nom de Christian Grenier en sa qualité de P.D.G. de Népenthès, puis le nom du P.D.G. de la société informatique ; la présentation des invitations est la même, l’organisation est identique. La ressemblance dans les documents de la campagne publicitaire ALLIANEP avec ceux du produit EVERYNEP est d’autant plus marquée que le même suffixe « NEP », destiné à mettre en valeur le partenariat avec Népenthès, a été repris. Les mêmes observations peuvent être faites en ce qui concerne la campagne de presse. Même si la notion de spirale gagnante est utilisée dans le vocabulaire économique et si le slogan publicitaire « gagnez plus » est banal, la combinaison de tous les éléments graphiques, couleurs, slogans, argumentaires, utilisés par les documents publicitaires et les invitations EVERYNEP confère à cette création publicitaire un caractère distinctif et original révélant une oeuvre de l’esprit. La reproduction quasiment à l’identique pour l’offre de l’outil ALLIANEP dans la campagne publicitaire de lancement, de la même combinaison utilisée pour la campagne EVERYNEP qui lui donnait un aspect d’ensemble original et distinctif, constitue un acte de concurrence déloyale. Elle est de nature à créer un risque de confusion dans l’esprit des pharmaciens du groupement Népenthès et permet à Alliadis de se glisser dans le sillage de la société Everys, notamment sans exposer les frais de conception de la campagne publicitaire en profitant des efforts déployés par la société Everys lors de l’annonce de son association avec Népenthès pour lancer une offre qui était présentée comme nouvelle en octobre 2005 incorporant pour la première fois le catalogue en ligne Népenthès dans la fonctionnalité commandes, pour les pharmaciens du groupement. Il suffit que l’imitation reprochée engendre, comme en l’espèce eu égard à la similitude des campagnes publicitaires et la fonctionnalité identique des produits, un risque de confusion sans qu’il y ait à démontrer que des pharmaciens ont été effectivement trompés. C’est la société Everys qui a vendu par le biais de ses commerciaux, le logiciel EVERYNEP auprès des officines du groupement Népenthès. La société Everys et Alliadis qui ont mis au point respectivement Winpharma et Alliance +, logiciels de gestion destinés aux pharmaciens sont en situation de concurrence directe sur ce marché. Elles le sont également en ce qu’elles ont toutes les deux développé une solution spécifique EVERY NEP et ALLIANEP permettant l’accès au catalogue en ligne et les commandes en ligne auprès de Népenthès.

Alliadis soutient qu’elle n’a aucune structure commune avec Népenthès et que cette dernière a décidé seule du mode de lancement de ALLIANEP, et plus particulièrement du mailing auprès de ses clients, la totalité des frais ayant été supportés par Népenthès. Toutefois, les invitations aux soirées de lancement ALLIANEP associent les deux sociétés Népenthès et Alliadis « Gagnez 2 fois plus…. Grâce à Népenthès et Alliadis », les noms de leurs P.D.G. et de leurs collaborateurs, de sorte que même si le coût de cette campagne de lancement a été supporté par Népenthès, Alliadis y a directement participé en associant son nom à son produit et en en assurant la promotion lors des soirées organisées, n’étant pas vraisemblable que la présence de son P.D.G. et de ses collaborateurs ait pu être décidée sans son assentiment.

Par ailleurs, les deux contrats de partenariat commercial signés entre Népenthès et Alliadis en 2001 prévoient que Népenthès s’engage à conseiller et à prescrire à l’ensemble de ses pharmaciens adhérents les produits commercialisées par Alliadis, qu’en contrepartie, Alliadis s’engage à consentir auprès des adhérents de Népenthès ses meilleurs tarifs et verse une commission à Népenthès sur les ventes. Aux termes de ces contrats, Alliadis demeure néanmoins chargée de la présentation de son produit, d’établir la proposition commerciale et de négocier, de signer le contrat définitif. Il n’est nullement démontré qu’il en ait été autrement pour ALLIANEP et Népenthès ne prétend pas avoir dans ses activités, la commercialisation auprès de ses adhérents des logiciels de gestion intégrée des officines de la société Alliadis. Il n’est pas reproché à Alliadis d’avoir permis aux pharmaciens du groupement Népenthès de bénéficier de la mise en ligne de son catalogue, comme elle l’a fait pour d’autres partenaires, mais d’avoir, à l’occasion du lancement auprès des adhérents de Népenthès de son nouveau logiciel ALLIANEP, imité la campagne publicitaire de son concurrent direct, la société Everys, en utilisant son argumentaire quasiment à l’identique dans les soirées de lancement de son produit, ce dont elle était nécessairement informée, ne serait-ce que par l’écho donné dans la presse professionnelle à « l’association » de Népenthès et de la société Everys lors de la création d’Everynep. Ce comportement engage la responsabilité de la société Alliadis sur le fondement de l’article 1382 du code civil. Il est de l’intérêt de Népenthès, dont l’objectif est d’étendre l’accès à son catalogue en ligne et son offre de commandes en ligne aux membres adhérents de son groupement, quels que soient leurs logiciels de gestion, de développer des partenariats avec les principales sociétés éditrices de logiciels informatiques destinés aux officines.

La société Everys ne prouve pas que Népenthès se serait engagée à lui consentir une quelconque exclusivité auprès de ses adhérents. Aucun contrat de partenariat avec Népenthès n’est même produit par la société Everys. La création de la société Everynep n’apporte pas la preuve d’une quelconque exclusivité consentie par Népenthès pour la mise en ligne de son catalogue et la société Everys n’ignorait pas, puisqu’elle propose son logiciel à d’autres groupements de pharmaciens, que chaque groupement a intérêt à offrir à chacun de ses adhérents l’accès à son catalogue en ligne, quel que soit le logiciel de gestion qu’il utilise. Le fait que Népenthès se soit rapprochée de la société Alliadis n’est donc pas en soi critiquable et ne constitue pas un comportement déloyal. En revanche, la contribution, au lancement du produit ALLIANEP, de Népenthès laquelle ne conteste pas avoir supporté les frais de cette campagne, la reprise quasiment à l’identique de l’argumentaire sur les documents publicitaires et dans les soirées de lancement, de la campagne publicitaire financée par la société Everys, la participation active dans ces circonstances de Népenthès à la promotion de ce nouveau produit, manifestée de façon évidente par la présence annoncée de son P.D.G., ont concouru au risque de confusion parmi les adhérents de son groupement entre les deux produits concurrents et caractérisent un comportement déloyal envers la société Everys. Il n’est pas nécessaire que Népenthès soit en concurrence directe avec la société Everys pour que cet agissement soit fautif à son encontre. La responsabilité de Népenthès est donc engagée envers la société Everys sur le fondement de l’article 1382 du code civil.

Sur les préjudices - sur le préjudice commercial à l’encontre de Népenthès et Alliadis La société Everys demande de voir fixer sa perte de chance à l’installation de 200 pharmacies en 3 ans, soit 20 % de son objectif commercial initial, correspondant à une marge bénéficiaire perdue de 443.800 €, à tout le moins à 221.900 €. La société Everys soutient que son objectif initial d’installer son logiciel dans 1000 officines en 3 ans était parfaitement réaliste. Néanmoins, la cour ne saurait se contenter des annonces faites à la presse lors de la création de la société Everynep qui relèvent de la communication commerciale des deux sociétés, qui ne sont corroborées par aucun élément objectif d’études de marché.

Aucun document ne vient démontrer le caractère réaliste de l’objectif initial affiché par la société Everys d’un tel développement de sa clientèle, alors qu’elle équipait en 2005, 1.700 pharmacies avec son logiciel Winpharma selon ses propres chiffres, sans qu’il soit même précisé quel pourcentage de ses clients était adhérent du groupement Népenthès. La société Everys ne donne aucune information quantifiée sur le rythme de développement de sa clientèle sur les années antérieures et parfaitement avertie du fonctionnement du marché, elle ne démontre pas que la fonctionnalité nouvelle offerte par EVERYNEP était un argument de vente suffisant pour capter 1.000 nouveaux clients au sein du groupement Népenthès non encore équipés de Winpharma. Il est avéré que la société Everys a installé 45 nouvelles pharmacies et que 18 pharmacies déjà équipées de Winpharma ont migré sur l’offre EVERYNEP, soit au total 63 pharmacies dans les premiers mois qui ont suivi le lancement de l’offre. En considération de ce qui a été dit ci-avant, il n’est pas contraire au jeu de la concurrence normale que Népenthès et Alliadis se soient rapprochées pour proposer aux adhérents du groupement équipés d’un logiciel Alliance + la mise en ligne du catalogue d’autant que la société Everys ne bénéficiait d’aucune exclusivité de Népenthès ou de N. BORNEO. En revanche, la société Everys doit obtenir réparation du préjudice résultant de la confusion entretenue ensemble par Népenthès et Alliadis par la campagne publicitaire d’ALLIANEP et de ce qu’Everys ayant supporté les frais de la campagne de lancement de son produit EVERYNEP, Népenthès et Alliadis ont profité de ses efforts et de ses investissements. Le dirigeant de la société Everys par mail adressé le 23 septembre 2006 à Monsieur Grenier, dirigeant de Népenthès, qui souhaitait développer l’offre EVERYNEP et augmenter le nombre d’adhérents, sollicitait de son interlocuteur, conformément à leur rencontre du mois de mai 2006 et à une discussion de septembre 2006, sa décision en urgence sur le choix de pharmacies pilotes pour valider les développements effectués et pour continuer à construire l’offre, et organiser la communication et la promotion de cette offre en concertation avec Népenthès.

Le comportement de Népenthès qui a cessé de promouvoir l’offre EVERYNEP et s’est associé à la promotion d’ALLIANEP à compter d’octobre 2006 et celui de la société Alliadis ont donc entraîné pour la société Everys une perte de la chance de commercialiser son offre auprès des pharmaciens du groupement, qui est démontrée par la cessation de toute installation en janvier 2007, soit après le lancement de l’offre ALLIANEP. Népenthès prétend que le logiciel EVERYNEP présentait des dysfonctionnements.

Son courrier du 27 novembre 2006, faisant suite à la mise en demeure du 16 octobre 2006 de la société Everys d’avoir à cesser ses agissements de concurrence déloyale, dans lequel Népenthès fait état du mécontentement de nombreux pharmaciens, ne peut apporter de preuve des dysfonctionnements allégués, pas plus que les quelques messages électroniques émanant de pharmaciens qui relèvent de difficultés ponctuelles et dont au plus tous ne justifient pas de les imputer à la société Everys. A l’appui de sa réclamation, la société Everys produit notamment un rapport établi par KPMG et ses bilans et comptes de résultats de 2005 à 2007. Les éléments comptables ne mettent pas en évidence une quelconque incidence sur les bénéfices de la société Everys qui n’ont cessé de progresser sur cette période. Au vu des éléments chiffrés figurant au rapport KPMG, notamment du taux de marge, en considération d’une progression réaliste de son nombre de clients au regard de ceux qu’elle avait déjà, de l’évolution constatée sur la période pendant laquelle il n’y avait pas d’offre concurrente et des caractéristiques du marché sur lequel la société Everys déploie son activité, la perte de chance de la société Everys de commercialiser son produit EVERYNEP résultant des agissements reprochés sera justement réparée par la somme de 50.000 €. Les sociétés Népenthès et Alliadis ont concouru ensemble à la réalisation du même préjudice. Elles seront condamnées in solidum à en supporter la réparation.

- sur l’atteinte à l’image La promotion par Népenthès de son nouveau partenariat avec Alliadis un an à peine après avoir promu celle avec la société Everys, en utilisant les mêmes arguments, les mêmes visuels et la même méthode de promotion était de nature à persuader des pharmaciens utilisateurs que Népenthès était le maître d’oeuvre central du développement d’EVERYNEP et non Everys et qu’au surplus, Népenthès cessait de préconiser le produit EVERYNEP pour lui préférer ALLIANEP, induisant au moins implicitement un manque de confiance dans l’ancien produit. Ces agissements sont de nature à avoir porté atteinte à l’image de la société Everys. Il n’est pas établi cependant comme l’ont retenu les premiers juges que cette atteinte ait débordé de la profession de pharmacien et elle sera suffisamment réparée par la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts.

La société Everys prétend que l’action personnelle de Monsieur Grenier a été susceptible d’aggraver ce préjudice mais ne prouve aucun agissement imputable à la société N. BORNEO susceptible de caractériser une atteinte à l’image alors qu’il n’est pas établi que la société N. BORNEO a participé à la commercialisation ou au lancement du produit ALLIANEP et que Monsieur Grenier a toujours été présent en sa qualité de président de Népenthès et non de la société N. BORNEO dans la campagne publicitaire de ce produit.

La société Everys est donc mal fondée en sa demande à l’encontre de la société N. BORNEO. - sur la demande à l’encontre de N. BORNEO au titre du dépôt de la marque EVERY NEP et EVERYNEP La société Everys ne démontre pas une atteinte à son patrimoine résultant du dépôt des marques en cause par N. BORNEO. La société Everys avait précédemment consenti en s’associant à cette dernière dans la société EVERYNEP à l’utilisation dans la dénomination sociale de cette société d’une partie de son nom avec l’utilisation du suffixe NEP pour Népenthès, et elle ne justifie d’aucun risque supplémentaire résultant d’une confusion liée au dépôt de la marque. Elle ne démontre pas au surplus l’existence d’un préjudice en lien avec l’agissement déloyal qu’elle reproche à N. BORNEO. Le jugement sera infirmé sur ce point.

- sur la publication dans la presse spécialisée La mesure de publication est, au regard des circonstances des manoeuvres déloyales utilisées relatives à la publicité de produits concurrents et du souci de prévenir le renouvellement de tels faits, justifiée en son principe. La publication dans la presse spécialisée sera ordonnée dans les conditions prévues au dispositif du présent arrêt. Sur la demande de garantie des sociétés Népenthès et N. BORNEO Les sociétés Népenthès et N. BORNEO sollicitent subsidiairement d’être garantie par la société Alliadis. Cependant, Népenthès ne motive pas cette demande et n’invoque aucun agissement fautif de la société Alliadis à son égard qui justifierait que celle-ci soit condamnée à la garantir des condamnations prononcées à son encontre. Sur les autres demandes Eu égard au sens de la présente décision, Alliadis, Népenthès et N. BORNEO seront déboutées de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive. Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Les dépens de première instance et d’appel seront supportés in solidum par la société Népenthès et de la société Alliadis. L’équité commande de les condamner in solidum à payer à la société Everys une indemnité de 6.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. PAR CES MOTIFS Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Reforme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société Everys de sa demande de dommages et intérêts pour perte de chance et de toutes ses demandes à l’encontre de la société Alliadis, en ce qu’il a condamné la société N. BORNEO au paiement de dommages et intérêts pour s’être livrée à une manoeuvre déloyale à l’encontre de la société Everys en procédant à une atteinte à son patrimoine, en ses dispositions relatives au préjudice d’image, à la publication du jugement, à l’indemnité de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance. Statuant à nouveau, Condamne in solidum les sociétés Népenthès C et Alliadis à payer à la société Everys 50.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale commis à son encontre. Condamne in solidum les sociétés Népenthès C et Alliadis à payer à la société Everys 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour atteinte à son image. Déboute la société Everys de toutes ses demandes à l’encontre de la société N. BORNEO. Ordonne la publication du présent arrêt dans trois magazines de presse spécialisés au choix de la société Everys, et ce, aux frais avancés des sociétés Népenthès et Alliadis, sur simple présentation d’un devis et sans que le coût global puisse dépasser 3.000 euros HT par insertion. Condamne in solidum les sociétés Népenthès C et Alliadis aux dépens. Condamne in solidum les sociétés Népenthès C et Alliadis à payer à la société Everys une indemnité de 6.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Accorde aux avoués à la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement direct conforme aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Déboute la société Népenthès, la société N. BORNEO et la société Alliadis de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Versailles, 12ème chambre section 2, 9 décembre 2010, n° 09/06158