Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 2 septembre 2015, n° 14/01764

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 15e ch., 2 sept. 2015, n° 14/01764
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 14/01764
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Poissy, 3 mars 2014, N° 13/00056
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 02 SEPTEMBRE 2015

R.G. N° 14/01764

AFFAIRE :

Y X

C/

SAS GO SPORT FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 04 Mars 2014 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de POISSY

N° RG : 13/00056

Copies exécutoires délivrées à :

Me Laurent COLLET

la SELARL EDOU DE BUHREN

Copies certifiées conformes délivrées à :

Y X

SAS GO SPORT FRANCE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX SEPTEMBRE DEUX MILLE QUINZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame Y X

XXX

XXX

comparante en personne, assistée de Me Laurent COLLET, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C375

APPELANTE

****************

SAS GO SPORT FRANCE

XXX

XXX

représentée par Me Marie Laure DE BUHREN de la SELARL EDOU DE BUHREN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P021 substituée par Me Adeline MOY, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Juin 2015, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Bérénice HUMBOURG, Conseiller chargé(e) d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :

Madame Michèle COLIN, Président,

Madame Marie-Hélène MASSERON, Conseiller,

Madame Bérénice HUMBOURG, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Brigitte BEUREL,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Suivant contrat à durée indéterminée, Madame Y X a été embauchée, à compter du 22 avril 2003, par la société GO SPORT FRANCE en qualité d’hôtesse de caisse et affectée au magasin d’Orgeval, statut employé pour un salaire brut mensuel de 1114 euros.

Le 5 juin 2006, elle est nommée responsable de département, avec le statut de cadre et un forfait jour de 216 jours par an pour une rémunération mensuelle brute forfaitaire de 1820 euros.

A compter du 26 octobre 2009, elle travaille sur le site de La Défense puis à compter du 11 avril 2011 dans le magasin de Cergy, où elle sera nommée le 9 août 2011 responsable du rayon chaussures. En dernier lieu elle percevait un salaire de 2222,96 euros.

La société GO SPORT FRANCE emploie plus de 10 salariés et son activité est soumise à la convention collective du commerce des articles de sport et des équipements de loisirs.

En arrêt maladie le 26 septembre 2011, madame X a été en congé le 8 octobre 2011.

A sa reprise de poste le 31 octobre 2011, elle était convoquée à un entretien préalable à une sanction puis une mise à pied de trois jours lui a été notifiée le 21 novembre 2011.

Madame X a saisi le conseil de prud’hommes d’une demande de résiliation de son contrat le 19 janvier 2012.

A nouveau en arrêt de travail le 31 octobre 2011, elle reprenait son poste en mars 2012. Elle déposait plainte le 12 mai 2012 suite à une altercation avec son supérieur, faisait valoir son droit de retrait et bénéficiait d’un nouvel arrêt de travail.

Le 2 juin 2012, Madame Y X était convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement et mise à pied à titre conservatoire. Le 5 juillet 2012, la société GO SPORT FRANCE notifiait à Madame Y X son licenciement pour faute grave pour non conformité du rayon running avec le plan merchandising de l’entreprise et droit de retrait abusif.

Par jugement du 4 mars 2014, le Conseil de Prud’hommes de POISSY a :

— annulé la mise à pied du 21 novembre 2011 ;

— condamné la société GO SPORT FRANCE à verser à Madame Y X les sommes suivantes :

6668,88 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 666,88 euros de congés payés afférents ;

4001,32 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;

1026,80 euros au titre du rappel de salaire pour mai 2011 et 102,68 euros de congés payés afférents ;

avec intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2013 ;

17783,68 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

3000 euros de dommages intérêts pour préjudice moral ;

2000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

— condamné la société GO SPORT FRANCE à rembourser à pôle emploi une somme égale à 6 mois d’allocations de chômage ;

— débouté madame Y X du surplus de ses demandes.

Madame X a régulièrement relevé appel de la décision et dans ses dernières conclusions, elle demande à la Cour d’infirmer partiellement le jugement du conseil de prud’hommes de POISSY et :

— de prononcer la résiliation de son contrat de travail ;

— subsidiairement, de juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— d’annuler l’ensemble des conventions de forfaits en jours ;

— de condamner la société GO SPORT FRANCE à lui verser les sommes suivantes :

4001,32 euros à titre d’indemnité de licenciement ;

6668,88 euros au titre du préavis et 666,88 euros de congés payés afférents ;

40013 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

1111,48 euros à titre de rappel de salaire pour la deuxième quinzaine de mai 2011, pour dépassement du forfait annuel des 216 jours et 111,14 euros de congés payés afférents ;

5000 euros à titre de dommages intérêts pour exécution fautive du contrat et harcèlement moral;

29805,69 euros au titre de 1757 heures supplémentaires et 2980,56 euros de congés payés afférents;

8000 euros de dommages intérêts pour non respect par l’employeur de l’article L3121-46 du code du travail ;

13337 euros au titre du travail dissimulé ;

subsidiairemen t 15000 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article L3121-47 dudit code ;

15000 euros de dommages intérêts pour travail le dimanche non autorisé sur le magasin d’Orgeval ;

3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

et à lui remettre des bulletins de paie, un certificat de travail et une attestation pôle emploi conformes, sous astreinte de 100 euros par document et par jour de retard.

Dans ses dernières conclusions, la société GO SPORT FRANCE SAS demande à la Cour de débouter madame X de l’ensemble de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La cour a interrogé les parties sur les conséquences d’une résiliation du contrat fondée notamment sur des faits de harcèlement moral. Madame X ne demande pas sa réintégration et maintient ses demandes.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l’exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions qu’elles ont déposées et soutenues oralement à l’audience.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR L’EXECUTION DU CONTRAT DE TRAVAIL

Sur la mise à pied du 21 novembre 2011

En application de l’article L.1333-1 du code du travail, en cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L’employeur fournit au conseil les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le conseil forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La notification de la mise à pied rappelait en premier lieu que la salariée avait été entendue sur deux faits :

courant été 2011, 'des témoins vous auraient reconnu alors que vous étiez en train de sortir des cartons de marchandises du magasin en présence d’un homme possédant un véhicule blanc qui lui chargeait les cartons dans le véhicule’ et 'lors de l’inventaire nous avons retrouvé 183 paires de dépareillées sur le département chaussures dont vous avez la responsabilité';

et retenait finalement comme griefs :

'Le fait de retrouver 183 paires de chaussures dépareillées générées sur la période de juillet 2011 à septembre 2011 démontre un manque de gestion flagrant de votre part. En votre qualité de responsable de département, à aucun moment vous ne les avez identifié et alerté votre hiérarchie (…) ;

Nous devons malgré tout constater que vous avez effectué des déclarations contradictoires qui mettent en evidence de graves manquements de votre part dans votre gestion et contrôle des stocks du rayon dont vous avez la charge. Cette n égligence doublée d’une absence d’information à votre direction représente un préjudice financier pour notre entreprise.'

Il ressort de ce courrier que la société GO SPORT n’a pas sanctionné madame X pour des faits de vol tout en relevant ses 'déclarations contradictoires’ sans plus de précision ; que s’agissant du contrôle des stocks dont la date n’est pas précisée, il n’est pas justifié que la salariée aurait repris la gestion du rayon chaussures avant le 9 août 2011 ; que placée en arrêt de travail le 26 septembre, sa responsabilité quant au nombre de chaussures dépareillées n’est pas établie, d’autant que le courrier précise que 3 cartons de chaussures avaient été retrouvés dans les bennes permettant de reconstituer 47 paires.

La mise à pied disciplinaire sera en conséquence annulée et le jugement sera confirmé de ce chef.

sur le harcèlement moral

Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l’article L. 1154-1 du code du travail, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

L’employeur est tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs de l’entreprise, notamment en matière de harcèlement moral et il doit répondre des agissements des personnes qui exercent de fait ou de droit une autorité sur les salariés.

En l’espèce, Madame X soutient qu’elle a été accusée de vol par son employeur, qu’elle a fait l’objet d’une mise à pied abusive en l’absence d’une quelconque faute, qu’elle a subi pendant son arrêt maladie des appels téléphoniques malveillants de la directrice adjointe du magasin, que sa santé en a été durement éprouvée, qu’à son retour d’arrêt maladie en mars 2012, sa hiérarchie lui a retiré ses prérogatives en matière

d 'encadrement des salariés et de gestion des plannings, que le 12 mai 2012, le directeur lui ordonnait de quitter le magasin.

Pour étayer ses affirmations, elle produit notamment :

— le courrier de mise à pied du 21 novembre 2011, sanction annulée par la cour ;

— deux attestations de collègues qui relatent le contenu de deux messages téléphoniques laissés par sa supérieure pendant son arrêt de travail et notamment les propos suivants : 'je suis pas ta secrétaire, donc la prochaine fois que tu m’envoies un arrêt de travail, t’es gentille tu le complêtes’ et 'je voulais m’excuser l’autre fois parce que je me suis énervée pour l’inventaire';

— des échanges de mail des 11 et 12 mai 2012 dont il ressort que la direction a décidé de reprendre la plannification afin de la soulager dans ses tâches quotidiennes, ajoutant 'je prends bonne note de votre désir d’avoir 100% de vos fonctions’ ;

— un mail adressé à son employeur lui indiquant son droit de retrait suite au comportement agressif du directeur du magasin le 12 mai 2012 ;

— des certificats médicaux mentionnant une dépression.

La salariée établit ainsi la matérialité de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral.

La société GO SPORT rétorque qu’elle n’a jamais accusé la salariée de vol, que la teneur des messages téléphoniques démontre au contraire les rapports cordiaux entretenus avec la directrice adjointe du magasin, qu’aucune de ses fonctions d’encadrement ne lui a été retirée et enfin qu’il lui a été effectivement demandé de quitter le magasin le 12 mai 2012 en raison de son insubordination. Elle produit notamment des attestations sur le départ de la salariée le 12 mai 2012.

Force est de constater que les affirmations de l’employeur sont combattues par les pièces versées au dossier, notament quant à la teneur des deux messages laissés sur le répondeur de la salariée et sur le retrait d’une partie de ses fonctions d’encadrement. S’agissant de la mise à pied annulée, si une accusation de vol n’a pas été expressément retenue, il n’en demeure pas moins que la société GO SPORT a sanctionné madame X suite à ses 'déclarations contradictoires’ quant aux cartons sortis du magasin. Enfin, dans ce contexte tendu depuis plusieurs mois, suite à la mise à pied de la salariée et sa demande de résiliation du contrat, la demande de l’employeur de la voir quitter sur le champ son poste le 12 mai est disproportionnée par rapport à l’insubordination alléguée, la salariée ayant visiblement appréhendé d’être interrogée seul par son supérieur sur ses interrogations formulées par écrit la veille (elle attirait notamment son attention sur le dépassement de son forfait jours).

Ainsi, et étant rappelé que le harcèlement moral n’implique pas d’élément intentionnel, l’employeur échoue à démontrer que les faits matériellement établis par la salariée sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le harcèlement moral est ainsi établi et il convient d’allouer de ce chef à madame X la somme de 3000 euros de dommages intérêts.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il avait rejeté la qualification de harcèlement moral mais confirmé en ce qu’il avait alloué cette somme pour préjudice moral.

sur l’annulation de la convention de forfait jours et les heures supplémentaires

Madame X soutient que la convention de forfait jours ne pouvait lui être imposée car d’une part elle était dénuée d’autonomie dans son travail et d’autre part la convention collective sur laquelle se fonde ladite convention ne garantit pas le respect des durées maximales de travail ainsi que les repos.

L’avenant du 22 mai 2006 mentionnait au titre de la durée du travail un forfait annuel de 216 jours conformément à l’accord collectif de réduction du temps de travail conclu par la société le 13 juillet 2000.

Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos.

En l’espèce, l’accord du 13 juillet 2000 prévoit en son article 7 pour le personnel d’encadrement que le nombre de jours travaillés ne peut excéder, pour un droit à congés payés acquis de 30 jours ouvrables, un forfait de 215 jours.

Il précise que 'chaque cadre devra, conformément aux dispositions légales, respecter un repos quotidien de 11 heures consécutives et un repos hebdomadaire de 24 heures consécutives’ et que 'les modalités de contrôle (…) se feront par la mise en oeuvre d’un système auto déclaratif interne visant à assurer le suivi de l’organisation du travail ainsi que l’amplitude de la journée de travail'.

Il en ressort que cet accord, qui ne prévoit aucun suivi de la charge de travail et de l’amplitude des journées de travail par l’employeur, laisse au seul cadre la responsabilité du respect du droit au repos et à la préservation de sa santé, étant également relevé que la société ne justifie pas de la réalisation de l’entretien annuel obligatoire prévu à l’article L3121-46 du code du travail pour tout salarié ayant conclu une convention de forfait en jours.

Ainsi, l’accord collectif n’étant pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition du travail de l’intéressée, la nullité de la convention de forfait jours de la salariée sera prononcée.

Madame X peut dès lors réclamer le paiement des heures de travail effectuées au delà des 35 heures hebdomadaires.

En application de l’article L3171-4 du code du travail, si la preuve des horaires de travail effectués n’incombe spécialement à aucune des parties et si l’employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Madame X soutient que ses journées de travail étaient au minimum de 9 heures par jour,

5 jours par semaine, ce qui équivaut à un minimum de 10 heures supplémentaires par semaine.

Elle verse aux débats :

— les attestations de plusieurs collègues de travail qui mentionnent notamment une amplitude régulière de travail de 9 heures par jour ;

— un récapitulatif des heures effectuées chaque jour avec mention des heures supplémentaires semaine par semaine entre janvier 2008 et décembre 2011, pour un total de 1759 heures.

Madame X produit ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l’employeur et qui sont de nature à étayer sa demande.

L’employeur conteste la réalisation d’heures supplémentaires et précise que les décomptes produits ne mentionnent pas les temps de pause. Or, dans ses conclusions il indiquait qu’il incombait à la salariée en sa qualité de responsable département de réaliser l’ouverture et la fermeture du magasin ce qui confirme l’amplitude horaire importante revendiquée par celle ci ; en outre, il ne produit aucune pièce de nature à justifier les horaires effectivement réalisés, tels que les plannings pourtant évoqués ou les documents 'auto déclaratifs’ qui auraient dû être établis par la salariée selon l’accord susvisé de juillet 2000.

Ainsi, la cour a la conviction que madame X a bien effectué des heures supplémentaires qui seront indemnisées, en tenant compte de l’absence de mention des temps de pause sur les décomptes, à hauteur de 20.000 euros, outre 2000 euros de congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

sur le défaut d’organisation de la réunion annuelle visée à l’article L3121-46 du code du travail

La cour, à la demande de madame X, a annulé la convention de forfait en jours figurant dans son contrat de travail ce qui lui a ouvert le droit de réclamer le paiement des heures effectuées au delà des 35 heures hebdomadaires. En conséquence, elle ne peut se prévaloir des dispositions de l’article L3121-46 du code du travail qui ne s’applique qu’aux salariés étant valablement soumis à une telle convention.

La demande de dommages-intérêts, nouvelle en appel, sera donc rejetée.

sur le travail dissimulé

En application de l’article L8221-5 du code du travail est réputé travail dissimulé le fait pour un employeur de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L1221-10 du code du travail relatif à la déclaration préalable à l’embauche ou à l’article L3243-2 du code du travail relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail.

Ainsi, la dissimulation d’emploi salarié n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.

En l’espèce, le contrat de travail de madame X comportait une convention de forfait jours déclarée nulle dans le cadre de la présente instance. La salariée n’ayant, avant la procédure introduite devant le conseil de prud’hommes, jamais contesté le principe de son forfait ni réclamé le paiement d’heures supplémentaires à son employeur, l’intention de ce dernier de dissimuler des heures de travail n’est pas établie.

La demande à ce titre sera donc rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

sur le travail non autorisé le dimanche

La salariée justifie avoir travaillé à plusieurs reprises le dimanche dans le magasin d’Orgeval, les heures étant d’ailleurs payées à un taux majoré.

La société GO SPORT ne justifie pas avoir bénéficié sur la période réclamée d’une dérogation au repos dominical prévu à l’article L3132-3 du code du travail.

Ce manquement a nécessairement causé un préjudice à la salariée qu’il convient d’évaluer à la somme de 2000 euros. Le jugement sera infirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.

sur le rappel de salaire de la 2e quinzaine du mois de mai 2011

Madame X fait valoir qu’elle n’a pas été payée pour la deuxième quinzaine du mois de mai 2011 qui a été effectuée au delà du forfait annuel de 216 jours.

La salariée ne conteste pas avoir perçu la somme nette de 1678 euros figurant sur la fiche de paie de mai 2011 et qui correspond à sa rémunération forfaitaire brute de 2150 euros et au montant versé habituellement. La convention de forfait jours ayant été annulée, il ne saurait être fait droit à une demande fondée sur celle ci, d’autant que la cour a condamné l’employeur au paiement d’heures supplémentaires sur le même mois.

La demande à ce titre sera donc rejetée et le jugement infirmé de ce chef.

SUR LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

Lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée.

sur la demande de résiliation du contrat aux torts de l’employeur

En application de l’article 1184 du code civil, le salarié peut demander la résiliation de son contrat de travail en cas de manquements de son employeur à ses obligations. Il appartient au salarié de rapporter la preuve des manquements invoqués. Le juge apprécie si la gravité des manquements justifie la résiliation du contrat. Le manquement suffisamment grave est celui qui empêche la poursuite du contrat.

Madame X fonde sa demande sur plusieurs manquements de son employeur et notamment un rythme de travail illicite, sans la rémunérer de ses heures supplémentaires, une sanction disciplinaire injustifiée, le harcèlement moral subi et l’absence d’organisation de l’entretien annuel.

Il ressort des développements qui précèdent que madame X a été victime d 'agissements répétés qui ont dégradé ses conditions de travail et ont entrainé des conséquences sur son état de santé et qu’elle a été soumise à une convention de forfait jours illicite sans suivi par son employeur de sa charge de travail. Ces manquements de l’employeur qui concernent la santé et la durée du travail de madame X sont d’une gravité telle qu’ils empêchaient la poursuite du contrat, ce qui rend bien fondée la demande de résiliation du contrat au 5 juillet 2012, date du licenciement. Le jugement sera donc infirmé.

Enfin, la demande de résiliation judiciaire du contrat étant accueillie, il n’y a pas lieu de statuer sur le bien fondé du licenciement notifié postérieurement.

sur les demandes pécuniaires de madame X

La résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée aux torts de l’employeur notamment pour des agissements de harcèlement moral, produit les effets d’un licenciement nul et ouvre droit pour la salariée aux indemnités de rupture et à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des 6 derniers mois.

Les parties s’accordent sur un salaire mensuel brut de madame X de 2222,96 euros.

Les sommes allouées par les premiers juges à la salariée au titre du préavis et de l’indemnité de licenciement, qui n’ont pas été contestées dans leur quantum, seront confirmées.

Madame X justifie de sa situation postérieure à la résiliation de son contrat. En raison de son ancienneté dans l’entreprise (+ de 9 ans), de son âge et du montant de la rémunération qui lui était versée, la cour dispose des éléments suffisants pour lui allouer la somme de 20000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul.

Le jugement sera donc infirmé sur le quantum.

SUR LES DEMANDES ACCESSORIES

La résiliation du contrat produisant les effets d’un licenciement nul, il n’y a pas lieu d’ordonner le remboursement des allocations chômage perçues par la salariée à Pôle Emploi. Le jugement sera donc infirmé de ce chef.

Au vu des développements qui précèdent, la société GO SPORT FRANCE devra remettre à Madame X des bulletins de paie, un certificat de travail et une attestation pôle emploi conformes au présent arrêt, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner une astreinte.

Partie succombante, la société GO SPORT FRANCE sera condamnée aux entiers dépens, déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à ce titre à la salariée la somme de 2000 euros, en sus de celle allouée en première instance.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,

INFIRME partiellement le jugement du conseil de prud’hommes de Poissy du 4 mars 2014 ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Dit que la convention de forfait jours est nulle ;

Prononce la résiliation du contrat de travail de madame X à la date du 5 juillet 2012 ;

Dit que la résiliation produit les effets d’un licenciement nul ;

Condamne la société GO SPORT FRANCE à payer à Madame X les sommes suivantes :

20.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul ;

20.000 euros au titre des heures supplémentaires et 2000 euros de congés payés afférents;

2000 euros de dommages intérêts pour travail le dimanche non autorisé sur le magasin d’Orgeval;

Rejette la demande au titre du rappel de salaire pour la deuxième quinzaine de mai 2011 ;

Dit n’y avoir lieu d’ordonner le remboursement à Pôle Emploi des allocations perçues par la salariée ;

Confirme pour le surplus les dispositions non contraire du jugement entrepris ;

Y ajoutant :

Rejette la demande fondée sur l’article L3121-46 du code du travail ;

Ordonne à la société GO SPORT FRANCE de remettre à Madame X des bulletins de paie, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes au présent arrêt, dans un délai de 30 jours à compter de la notification de la décision ;

Rejette la demande d’astreinte ;

Condamne la société GO SPORT FRANCE à payer à Madame X la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société GO SPORT FRANCE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société GO SPORT FRANCE aux dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l’avis donné aux parties à l’issue des débats, en application de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Mme COLIN, président, et Mme BEUREL, greffier.

Le GREFFIER Le PRESIDENT

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