Cour de cassation, Chambre sociale, 10 mai 2012, 11-11.371, Inédit

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avocatalk.fr · 24 janvier 2024

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 10 mai 2012, n° 11-11.371
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 11-11.371
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Douai, 29 novembre 2010
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000025866512
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2012:SO01193
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Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l’arrêt attaqué (Douai, 30 novembre 2010) que M. X… engagé le 22 octobre 1980 par la société Castorama en qualité de dessinateur, exerçant en dernier lieu les fonctions de directeur d’établissement depuis le 1er février 2006, a été, après mise à pied conservatoire, licencié pour faute grave en raison de faits de harcèlement moral par lettre du 30 octobre 2007 ;

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter en conséquence de ses demandes en paiement d’indemnités et dommages-intérêts alors, selon le moyen :

1°/ QU’en cas de contestation sur la nature du licenciement, le juge doit rechercher quelle est la véritable cause de la rupture ; qu’en l’espèce, il faisait valoir que son licenciement prononcé en raison de prétendus agissements de harcèlement moral s’inscrivait en réalité dans « un contexte de valse de l’ensemble des cadres de la société CASTORAMA reprise par la société KINGFISHER », ce fait étant corroboré par une attestation et qu'« à cet effet, plus d’une centaine de cadres ont fait l’objet d’une rupture de leurs relations contractuelles » ; qu’en se bornant à examiner le motif de licenciement invoqué par la société CASTORAMA, sans rechercher si le licenciement ne reposait pas en réalité sur la volonté de cette société de se séparer d’un certain nombre de cadres de l’entreprise, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1235-1 du code du travail ;

2°/ QU’il appartient à l’employeur d’établir l’existence des agissements de harcèlement moral qu’il impute à son salarié pour justifier son licenciement ; qu’en retenant qu’il appartenait seulement à la société CASTORAMA « d’établir la matérialité des faits » invoqués, à charge pour les juges de rechercher s’ils permettaient de « présumer l’existence du harcèlement allégué » contre le salarié licencié et « qu’il revient ensuite à la partie défenderesse d’établir que ces faits ne caractérisent pas une situation de harcèlement moral », lorsqu’il incombait au contraire à la société CASTORAMA d’établir tant la matérialité des faits allégués que la qualification de harcèlement moral, la cour d’appel a violé les articles L. 152-5 et L. 1154-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L.. 1234-5 du code du travail ;

3°/ QUE l’employeur ne peut invoquer comme motif de licenciement de prétendus agissements de harcèlement moral qu’il impute à un salarié dont il a régulièrement approuvé l’action en le gratifiant de plusieurs promotions, sauf à prouver qu’il était dans l’ignorance de tels agissements ; qu’en l’espèce, il soulignait que postérieurement à sa promotion au poste de directeur d’établissement en janvier 2006, il avait continué comme auparavant à recevoir des appréciations laudatives de ses supérieurs hiérarchiques et que son employeur lui avait proposé au mois de décembre 2006 de le nommer comme membre d’une instance éminente du groupe constituée de 136 dirigeants (le KINGFISHER EXECUTIF GROUP) et ajoutait qu’il était « invraisemblable » que l’employeur n’ait pas eu connaissance des méthodes qui lui étaient reprochées au fil des nombreux entretiens d’évaluation mis en place avec les salariés de l’entreprise ; qu’en retenant « l’existence de faits laissant présumer un harcèlement moral de sa part à compter de sa nomination en février 2006 en qualité de directeur d’établissement et des services généraux », sans s’interroger sur le point de savoir comment l’employeur aurait pu demeurer ignorant d’un « mode de management constitutif de harcèlement moral » dont elle a constaté qu’il aurait été adopté au vu et au su de tous (« en public » « lors de réunion de travail » « lors d’une réunion avec SECURITAS » « lors d’une réunion avec la société ISS » " sautes d’humeur permanentes » « lors de l’installation du Moa Café » etc …), de façon généralisée (« agent de sécurité " « collaborateurs » « à son équipe » « fournisseurs » « responsable atelier, hôtesse d’accueil, assistante de direction » etc …), et entre février 2006 et septembre 2007 soit pendant plus d’un an et demi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-5 et L. 1154-1, L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L.. 1234-5 du code du travail ;

4°/ QUE des agissements qualifiés de harcèlement moral et tenant à des méthodes de management d’un salarié ne constituent pas nécessairement une faute grave, notamment lorsque ce salarié, justifiant d’une longue ancienneté et d’une carrière exemplaire maintes fois récompensée, a dû faire face à une surcharge de travail sans pour autant obtenir de son employeur les moyens nécessaires à l’accomplissement de ses missions ; qu’en l’espèce, il soulignait que les méthodes de management qui lui étaient reprochées étaient exclusivement liées « aux aléas de gestion interne et dictées par une exigence du travail accompli dans le seul intérêt de la société CASTORAMA », l’employeur exigeant de tout responsable logistique une « capacité à tenir tête » et lui ayant confié des responsabilités particulièrement étendues en matière commerciale, de sécurité des personnes et des biens sans jamais remédier au sous-effectif et à l’insuffisance des moyens budgétaires ; qu’en affirmant péremptoirement que « le harcèlement constitue nécessairement une faute grave » et que « le fait de manquer de quelques moyens en personnel ne justifie pas un comportement injurieux et humiliant », lorsqu’elle devait au contraire tenir compte non seulement des conditions concrètes dans lesquelles le salarié avait dû faire face à d’importantes responsabilités touchant en particulier à la sécurité physique de ses collaborateurs, mais aussi de l’ancienneté et de la carrière exemplaire de 26 ans dont il justifiait au sein de l’entreprise, la cour d’appel a violé les articles L. 1152-5 et L. 1154-1, L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail ;

5°/ QUE l’employeur doit indemniser le salarié qu’il a licencié dans des conditions vexatoires, quand bien même le licenciement serait justifié ; qu’en l’espèce, à l’appui de sa demande d’indemnisation, il faisait également valoir qu’il avait subi un préjudice du fait d’une « rupture brutale, vexatoire et humiliante », qui avait porté atteinte à son « intégrité morale et physique » ; qu’il soulignait à cet égard que le licenciement était intervenu « au cours d’une période par ailleurs éprouvante sur un plan personnel et dans un contexte de rapidité extrême sans aucune possibilité d’explication avec ses supérieurs, ses collègues de travail ou même les personnes considérées comme ‘ ses victimes », l’employeur lui ayant demandé « de partir sur le champ sans même la possibilité de prendre dans son bureau ses affaires personnelles » ; qu’en se bornant à dire que son licenciement était justifié pour lui refuser toute indemnisation, sans à aucun moment s’interroger sur les conditions mêmes de la rupture, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil ;

Mais attendu d’abord, qu’abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la deuxième branche du moyen et relatif au régime d’administration de la preuve, la cour d’appel a retenu que l’employeur établissait des faits répétés de la part du salarié de pressions diverses, propos insultants et dénigrants tant à l’égard des subordonnés que des prestataires de services, des méthodes de management humiliantes en dépit de contre-indication médicale connue portant atteinte à la dignité et dégradant les conditions de travail de ses subordonnés, altérant la santé de plusieurs d’entre eux ; qu’elle a ainsi caractérisé un harcèlement moral constitutif d’une faute grave malgré l’ancienneté importante de l’intéressé et l’absence de remarque de la part de l’employeur pendant cette période, qui ne valait pas approbation des ces agissements, excluant par là-même toute autre cause de licenciement ;

Attendu ensuite qu’il ne résulte ni de l’arrêt, ni de la procédure, que le salarié ait formé une demande tendant à la réparation d’un préjudice spécifique lié aux circonstances vexatoires de son licenciement ;

D’où il suit que le moyen, irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit en sa dernière branche, n’est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour M. X…

Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR dit que le licenciement de M. X… était fondé sur une faute grave et D’AVOIR en conséquence débouté le salarié de ses demandes tendant à obtenir diverses sommes et des dommages et intérêts

AUX MOTIFS QU’aux termes des dispositions de l’article L. 1232-6 du code du travail, l’employeur est tenu d’énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre prévue à cet article ; Que la lettre de licenciement est motivée en l’espèce comme la cour l’a citée dans la partie Faits et procédure du présent arrêt ; que la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, même pendant la durée limitée du préavis, sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l’employeur ; que l’employeur qui invoque la faute grave du salarié doit en rapporter la preuve ; que M. X… est licencié pour son comportement vis à vis de plusieurs de ses collaborateurs, notamment pour avoir tenu des propos injurieux, humiliants ou agressifs, proféré des critiques incessantes, pour avoir témoigné d’une absence de communication et de mise sous pression et pour avoir pris des décisions et avoir eu des paroles ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail de certains collaborateurs portant atteinte à leur dignité et allant parfois jusqu’à l’altération de leur état de santé ; que l’employeur a qualifié l’ensemble de ces comportements répétés de harcèlement moral ; qu’en application de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que les faits caractérisant le harcèlement moral peuvent se dérouler sur une brève période ; qu’en vertu des dispositions de l’article L. 1152-5 du code du travail, que tout salarié ayant procédé à des agissements de harcèlement moral est passible d’une sanction disciplinaire ; que le harcèlement constitue nécessairement une faute grave privative de préavis et d’indemnité de rupture du contrat de travail ; qu’aux termes des dispositions de l’article L. 1152-4 du code du travail, l’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral ; qu’il est tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise, notamment en matière de harcèlement moral ; qu’il appartient à la personne physique ou morale invoquant l’existence d’un tel harcèlement d’établir la matérialité des faits et aux juges de les apprécier dans leur ensemble et de rechercher s’ils permettent de présumer l’existence du harcèlement allégué ; que ces attestations, rédigées à la suite de l’arrêt de travail pour maladie de Mme Y…, la plus proche collaboratrice de M. X…, qui a eu pour effet de « délier les langues » de plusieurs autres subordonnés dans le cadre d’une enquête dûment diligentée par l’employeur, sont parfaitement recevables ; que ces témoins rapportent des faits ou des événements auxquels ils ont assisté ; que M. Z…, agent de sécurité, expose qu’il est victime de pressions et d’humiliation en public de la part de son supérieur et évoque sa souffrance au travail en indiquant qu’il ne dort plus et qu’il a peur de venir travailler ; Que M. X… l’appelle 10 à 20 fois par jour pour lui demander « où il est, et ce qu’il fait » ; Que celui-ci soutient que ces appels fréquents étaient nécessaires pour les besoins-urgents-du service, que l’intéressé était le seul représentant en activité de l’équipe maintenance et qu’il avait refusé un intérimaire pour l’aider ; que, toutefois, que d’autres collaborateurs, MM. A…, B… et C… confirment qu’ils faisaient également l’objet d’appels incessants pour savoir ce qu’ils faisaient, où ils étaient ou pour « des bricoles » ; que M. X… ne conteste pas avoir dit à M. Z… qu’il ferait mieux de devenir « barman », lors d’une réunion de travail avec la société SECURITAS, mais indique que ce propos doit être replacé dans son contexte et qu’il s’agissait d’humour ; qu’il dénie avoir utilisé l’expression « aux pieds » lors d’un appel téléphonique, en indiquant que ceci ne constitue pas son langage habituel ; qu’il dénie avoir forcé M. Z… à signer un document qualifié de constat le 17 septembre 2007 à la suite d’un accident provoqué par un autre salarié ; qu’il soutient que cette signature avait une simple vocation de formation et de responsabilisation de l’intéressé ; que M. Z… n’était pas présent au moment des faits et n’était pas le responsable de l’auteur de l’accident ; qu’en revanche, que la suppression du compte de messagerie de M. Z… pouvait se justifier par un souci de rationalisation ; Que cette suppression intervenait toutefois sans préalable et au retour des vacances de l’intéressé ; que M. A…, agent de sécurité et de maintenance, atteste également des propos injurieux tenus à son encontre lors d’un réunion avec la société SECURITAS où il a été traité de « vendeur de cacahuètes » et lors de l’installation du « Moa Café » à Paris au mois de mai 2007 où l’équipe a été traitée « de bande de branleurs » ; qu’il précise qu’il venait travailler avec « des sabots de plomb » et évitait de croiser M. X… ; qu’il confirme que M. Z… était contraint de signer un constat d’accident, alors qu’il n’était pas témoin, et qu’il était dérangé et surveillé sans cesse ; qu’il indique encore que, lors d’une réunion avec la société ISS, prestataire de ménage, M. X… « a descendu la responsable de site Mme D… » et qu’elle « a quitté la réunion en pleurant », après avoir entendu qu’il faut « changer de métier, que c’est pas dur de pousser un balai » ; qu’il rapporte que M. X… a fait ramasser des pierres pendant plusieurs jours à son équipe sur un terrain destiné à une exposition de matériel de jardin pour éviter de louer une machine, sans tenir compte des problèmes de santé de certains collaborateurs et des charges de travail de chacun ; que, si M. X… fait valoir qu’il est capable de « mettre la main à la pâte » en ramassant lui aussi des pierres et de féliciter son équipe, c’est souvent pour obtenir un résultat sans ménagement et après les félicitations reçues de la direction générale ; que M. C…, agent de sécurité, confirme également que M. X… s’acharnait sur certains collaborateurs M. Z… et M. E… (ses cibles préférées) et avait des sautes d’humeur permanentes ; qu’il confirme le ramassage de cailloux sur la pelouse pendant trois jours avec ses collègues comme « des forçats », alors qu’il y avait plein de travail ailleurs et que lui-même avait une contre indication médicale parfaitement connue ; que pour se disculper, M. X… met en avant l’achat récent, suite à son intervention, d’une balayeuse d’une valeur de 15 000 € pour le nettoyage des parkings ; que M. B…, responsable de la maintenance et de la sécurité, confirme les reproches de ses collègues sur les propos injurieux et humiliants et les traits de caractère de M. X… ; que ce dernier reconnaît son emportement à la suite de la découverte d’archives à proximité de la chaufferie, alors que M. F… invoque des ordres reçus du directeur comptable ; que M. X… appréciait effectivement son collaborateur en écrivant « Dominique B… est votre homme, il fera tout ce que vous voudrez, quand vous voudrez » ; que M. E…, employé à l’atelier merchandising, confirme que M. X… est une personne colérique, qui ne se maîtrise pas ; qu’il le « rabaissait » en permanence en le traitant d’incapable et qu’il était son souffre douleur avec M. Z… ; Que M. X… lui a déclaré à la suite de l’organisation d’un barbecue : « Tu sais faire la fête, alors tu vas me ramasser toute la merde qui a été faite » ; Qu’il était mis en cause pour la conduite d’un engin de manutention sans autorisation, alors que M. X… le savait pertinemment et que la responsable des ressources humaines avait proposé une formation ; que M. X… fait valoir que M. E… ne pouvait conduire à cause de son état dépressif et sous l’emprise de produits à caractère stupéfiant, alors qu’il prenait seulement des médicaments anti-dépresseurs ; que Mme Y…, responsable catering et assistante de direction, confirme que M. X… était colérique, « comme un enfant gâté » et « cherchant de bons petits soldats », oppressant et dénigrant ; Qu’elle précise avoir reçu l’ordre de fermer la porte de son bureau, afin de mieux s’isoler, et que trop de tension et d’angoisse ont conduit à son arrêt de travail pour maladie et à la révélation des faits devenus insupportables pour elle-même et pour ses collègues de travail ; que M. X… qualifie tout cela de « ressenti », parce que Mme Y… n’avait pas obtenu une réduction de son temps de travail comme elle le souhaitait ; Que fermer la porte du bureau lui évitait d’être trop dérangée ; Que l’arrêt de travail de Mme Y… s’est prolongé après son propre départ de l’entreprise et que son temps de travail a été finalement aménagé ; que Mme G…, assistante de direction, atteste également du caractère suspicieux et colérique de M. X…, de ses appels incessants des membres de l’équipe de maintenance et de son agressivité envers les fournisseurs ; Qu’elle précise, s’agissant de M. Z…, que M. X… avait déclaré « je l’aurai…. » et qu’il avait été obligé de signer un constat d’accident alors qu’il n’était pas témoin ; que M. X… se contente de dire que Mme G… était heureuse de travailler avec lui ; Que les éléments objectifs rapportés par M. X… pour justifier ses décisions relatives à gestion du service et à la sécurité ne sont pas déterminants ; Que le fait de manquer de quelques moyens en personnel ne justifie pas un comportement injurieux et humiliant vis-à-vis de ses subordonnés ; Que les actes relevés ci-dessus ont eu pour effet de dégrader les conditions de travail dans l’entreprise, de porter atteinte à la dignité de plusieurs collaborateurs et d’altérer la santé de sa plus proche collaboratrice ; que le comportement au travail de M. X… caractérisait une faute grave justifiant un licenciement sans préavis et sans indemnité de rupture ; que le jugement est infirmé en ce sens ;

1°/ ALORS QU’en cas de contestation sur la nature du licenciement, le juge doit rechercher quelle est la véritable cause de la rupture ; qu’en l’espèce, M. X… faisait valoir que son licenciement prononcé en raison de prétendus agissements de harcèlement moral s’inscrivait en réalité dans « un contexte de valse de l’ensemble des cadres de la société CASTORAMA reprise par la société KINGFISHER », ce fait étant corroboré par une attestation (production n° 12) et qu'« à cet effet, plus d’une centaine de cadres ont fait l’objet d’une rupture de leurs relations contractuelles » (conclusions p. 14) ; qu’en se bornant à examiner le motif de licenciement invoqué par la société CASTORAMA, sans rechercher si le licenciement ne reposait pas en réalité sur la volonté de la société CASTORAMA de se séparer d’un certain nombre de cadres de l’entreprise, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1235-1 du code du travail ;

2°/ ALORS QU’il appartient à l’employeur d’établir l’existence des agissements de harcèlement moral qu’il impute à son salarié pour justifier son licenciement ; qu’en retenant qu’il appartenait seulement à la société CASTORAMA « d’établir la matérialité des faits » invoqués, à charge pour les juges de rechercher s’ils permettaient de « présumer l’existence du harcèlement allégué » contre le salarié licencié et « qu’il revient ensuite à la partie défenderesse d’établir que ces faits ne caractérisent pas une situation de harcèlement moral », lorsqu’il incombait au contraire à la société CASTORAMA d’établir tant la matérialité des faits allégués que la qualification de harcèlement moral, la cour d’appel a violé les articles L. 1152-5 et L. 1154-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail ;

3°/ ALORS QUE l’employeur ne peut invoquer comme motif de licenciement de prétendus agissements de harcèlement moral qu’il impute à un salarié dont il a régulièrement approuvé l’action en le gratifiant de plusieurs promotions, sauf à prouver qu’il était dans l’ignorance de tels agissements ; qu’en l’espèce, M. X… soulignait que postérieurement à sa promotion au poste de directeur d’établissement en janvier 2006, il avait continué comme auparavant à recevoir des appréciations laudatives de ses supérieurs hiérarchiques et que son employeur lui avait proposé au mois de décembre 2006 de le nommer comme membre d’une instance éminente du groupe constituée de 136 dirigeants (le KINGFISHER EXECUTIF GROUP ; cf. productions n° 8 à 11) ; et ajoutait qu’il était « invraisemblable » que l’employeur n’ait pas eu connaissance des méthodes qui lui étaient reprochés au fil des nombreux entretiens d’évaluation mis en place avec les salariés de l’entreprise (conclusions p. 41 et 42) ; qu’en retenant « l’existence de faits laissant présumer un harcèlement moral de la part de M. X… à compter de sa nomination en février 2006 en qualité de directeur d’établissement et des services généraux » (arrêt attaqué p. 11), sans s’interroger sur le point de savoir comment l’employeur aurait pu demeurer ignorant d’un « mode de management constitutif de harcèlement moral » dont elle a constaté qu’il aurait été adopté au vu et au su de tous (« en public » : v. arrêt p. 11 § 5 ; « lors de réunion de travail » : v. arrêt p. 11 § 9 ; « lors d’une réunion avec SECURITAS » : v. arrêt p. 12 § 2 ; « lors d’une réunion avec la société ISS » : v. arrêt p. 12 § 5 ; « sautes d’humeur permanentes » : v. arrêt p. 12 § 8 ; « lors de l’installation du Moa Café » : v. arrêt p. 12 § 2, etc …), de façon généralisée (« agent de sécurité » : v. arrêt p. 11 § 5 ; « collaborateurs » : v. arrêt p. 11 § 8 ; « à son équipe » : v. arrêt p. 12 § 6 ; « fournisseurs » : v. arrêt p. 13 § 12 ; « responsable atelier, hôtesse d’accueil, assistante de direction » : v. arrêt p. 14 § 1, etc …), et entre février 2006 et septembre 2007 (v. arrêt p. 14 § 2 et p. 11 § 11), soit pendant plus d’un an et demi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-5 et L. 1154-1, L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail ;

4°/ ALORS QUE des agissements qualifiés de harcèlement moral et tenant à des méthodes de management d’un salarié ne constituent pas nécessairement une faute grave, notamment lorsque ce salarié, justifiant d’une longue ancienneté et d’une carrière exemplaire maintes fois récompensée, a dû faire face à une surcharge de travail sans pour autant obtenir de son employeur les moyens nécessaires à l’accomplissement de ses missions ; qu’en l’espèce, M. X… soulignait que les méthodes de management qui lui étaient reprochées étaient exclusivement liées « aux aléas de gestion interne et dictée par une exigence du travail accompli dans le seul intérêt de la société CASTORAMA » (conclusions p. 20), l’employeur exigeant de tout responsable logistique une « capacité à tenir tête » (production n° 7), et lui ayant confié des responsabilités particulièrement étendues en matière commerciale, de sécurité des personnes et des biens (conclusions p. 28 à 30) sans jamais remédier au sous-effectif et à l’insuffisance des moyens budgétaires (conclusions p. 19 et p. 20) ; qu’en affirmant péremptoirement que « le harcèlement constitue nécessairement une faute grave » et que « le fait de manquer de quelques moyens en personnel ne justifie pas un comportement injurieux et humiliant », lorsqu’elle devait au contraire tenir compte non seulement des conditions concrètes dans lesquelles le salarié avait dû faire face à d’importantes responsabilités touchant en particulier à la sécurité physique de ses collaborateurs, mais aussi de l’ancienneté et de la carrière exemplaire de 26 ans dont il justifiait au sein de l’entreprise (conclusions p. 3, 4, 15, 16, 21, 42), la cour d’appel a violé les articles L. 1152-5 et L. 1154-1, L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail ;

5°/ ALORS QUE l’employeur doit indemniser le salarié qu’il a licencié dans des conditions vexatoires, quand bien même le licenciement serait justifié ; qu’en l’espèce, à l’appui de sa demande d’indemnisation, M. X… faisait également valoir qu’il avait subi un préjudice du fait d’une « rupture brutale, vexatoire et humiliante », qui avait porté atteinte à son « intégrité morale et physique » (conclusions p. 47) ; qu’il soulignait à cet égard que le licenciement était intervenu « au cours d’une période par ailleurs éprouvante sur un plan personnel et dans un contexte de rapidité extrême sans aucune possibilité d’explication avec ses supérieurs, ses collègues de travail ou même les personnes considérées comme ses victimes », l’employeur lui ayant demandé « de partir sur le champ sans même la possibilité de prendre dans son bureau ses affaires personnelles » (conclusions p. 47) ; qu’en se bornant à dire que le licenciement de M. X… était justifié pour lui refuser toute indemnisation, sans à aucun moment s’interroger sur les conditions mêmes de la rupture, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil.

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