Cour de cassation, Chambre sociale, 30 mai 2018, 17-12.783 17-12.786 17-12.994, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 30 mai 2018, n° 17-12.783
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-12.783 17-12.786 17-12.994
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8 décembre 2016, N° 15/05854
Textes appliqués :
Article L. 1224-1 du code du travail.

Article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application.

Article 1015 du même code.

Article 624 du code de procédure civile.

Dispositif : Cassation partielle sans renvoi
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000037043164
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2018:SO00822
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

CF

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 30 mai 2018

Cassation partielle sans renvoi

M. FROUIN, président

Arrêt n° 822 FP-D

Pourvois n° W 17-12.783

Z 17-12.786

A 17-12.994 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois n°s W 17-12.783, Z 17-12.786 et A 17-12.994 formés par la société Elior services propreté et santé, société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,

contre trois arrêts rendus le 9 décembre 2016 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (18e chambre B), dans les litiges l’opposant respectivement :

1°/ à Mme X… Y… V… , domiciliée […] ,

2°/ à Mme Oumou Y…, épouse Z…, domiciliée […] ,

3°/ à Mme Sonia A…, domiciliée […] ,

4°/ au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône, dont le siège est […] ,

5°/ au syndicat Commerce et services CFDT des Bouches-du-Rhône, dont le siège est […] ,

défendeurs à la cassation ;

Les salariées ont formé un pourvoi incident ;

La demanderesse invoque, à l’appui de ses pourvois principaux, cinq moyens de cassation communs annexés au présent arrêt ;

Les demanderesses aux pourvois incidents invoquent, à l’appui de leurs recours, un moyen de cassation commun également annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 11 avril 2018, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Ducloz , conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Goasguen, M. Chauvet, Mme Farthouat-Danon, M. Maron, Mme Aubert-Monpeyssen, MM. Rinuy, Pion, Schamber, Mme Slove, M. Ricour, conseillers, Mmes Sabotier, Salomon, Depelley, conseillers référendaires, Mme Grivel, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Elior services propreté et santé, de la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat de Mmes Y… V… et deux autres salariées et du syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône, l’avis de Mme Grivel , avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu la connexité, joint les pourvois n° W 17-12.783, Z 17-12.786 et A 17-12.994 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués et les pièces de la procédure, que Mme Y… V… et d’autres salariées ont été engagées par la société Hôpital service SFGH, aux droits de laquelle vient la société Elior services propreté et santé, laquelle relève de la convention collective nationale des entreprises de propreté ; que, par un protocole de fin de grève conclu le 20 décembre 2000 entre la société Hôpital service SFGH et les délégués syndicaux CFDT et CGT et relatif à l’établissement de l’hôpital Lapeyronie à Montpellier, il a été décidé de l’octroi d’une prime de treizième mois pour les salariés y travaillant ; que, par un protocole de fin de grève conclu par la société Hôpital service SFGH et la déléguée syndicale CGT le 11 avril 2001 pour le site de Beauregard, et le 18 mai 2001 pour les sites Résidence du Parc, Saint Roch et maison de retraite des Acacias, il a été prévu l’attribution d’une prime d’insalubrité (salissure) spécifique par heure travaillée « afin de tenir compte des contraintes rencontrées sur le site en matière de nettoyage des vêtements de protection » ; que des salariés ont saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes en application du principe d’égalité de traitement ;

Sur le quatrième moyen du pourvoi principal de l’employeur qui est recevable :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident des salariées, qui est recevable, après avis donné aux parties en application de l’article 1015 du code de procédure civile :

Attendu que les salariées font grief aux arrêts de les débouter de leurs demandes au titre d’une prime d’insalubrité, d’une prime de transport et d’une prime d’assiduité alors, selon le moyen, que la loi ne dispose que pour l’avenir et n’a pas d’effet rétroactif ; qu’en l’espèce, il est constant que les salariés ont saisi, en septembre 2012, le conseil de prud’hommes de Marseille aux fins de réclamer à l’encontre de la société ESPS, sur le fondement du principe de l’égalité de traitement, le paiement de différentes primes dont ils avaient été privées ; que pour les débouter de leurs demandes s’agissant de la prime « d’insalubrité », dite également « de salissure », ainsi que de la prime de transport et de la prime d’assiduité, la cour d’appel a énoncé qu’aux termes de l’article L. 1224-3-2 du code du travail, créé par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, les salariés de la société ESPS travaillant sur les sites autres que celui de l’hôpital Sainte-Marguerite ne pouvaient prétendre au bénéfice de cet avantage obtenu par les salariés de ce site dont les contrats de travail ont été poursuivis ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a méconnu l’article 2 du code civil, ensemble l’article L. 1224-3-2 par fausse application et le principe d’égalité de traitement par refus d’application ;

Mais attendu, d’abord, que l’évolution générale de la législation du travail en matière de négociation collective et de la jurisprudence en ce qui concerne le principe d’égalité de traitement à l’égard des accords collectifs conduit à apprécier différemment la portée de ce principe à propos du transfert des contrats de travail organisé par voie conventionnelle ;

Attendu, ensuite, que la différence de traitement entre les salariés dont le contrat de travail a été transféré en application d’une garantie d’emploi instituée par voie conventionnelle par les organisations syndicales représentatives investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote et les salariés de l’employeur entrant, qui résulte de l’obligation à laquelle est tenu ce dernier de maintenir au bénéfice des salariés transférés les droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert, n’est pas étrangère à toute considération de nature professionnelle et se trouve dès lors justifiée au regard du principe d’égalité de traitement ;

Attendu que les arrêts relèvent que la prime d’insalubrité, la prime d’assiduité et la prime de transport étaient servies à des salariés dont le contrat de travail avait été transféré, en application de l’article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, à la société Elior services propreté et santé, et qu’elles correspondaient à des avantages dont ils bénéficiaient chez leur précédent employeur ;

Qu’il en résulte que la société Elior services propreté et santé était fondée à les maintenir au seul bénéfice des salariés transférés sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d’égalité de traitement ;

Que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, les décisions déférées se trouvent légalement justifiées en leur dispositif ;

Que le moyen ne peut donc être accueilli ;

Mais sur le premier moyen et sur le deuxième moyen réunis du pourvoi principal de l’employeur, qui sont recevables :

Vu le huitième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et le principe d’égalité de traitement ;

Attendu, d’une part, qu’un protocole de fin de conflit constitue un accord collectif dès lors que, conclu avant l’expiration de la période transitoire instaurée aux articles 11 à 13 de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale, il a été signé après négociation avec les délégués syndicaux par l’un d’entre eux, et que, conclu postérieurement à l’expiration de la période transitoire précitée, il a été négocié et signé avec des organisations syndicales représentatives dans l’entreprise ou l’établissement dans les conditions visées aux articles L. 2232-12 et L. 2232-13 du code du travail, dans leur rédaction applicable en la cause ;

Attendu, d’autre part, que les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise de nettoyage mais affectés à des sites ou des établissements distincts, opérées par voie d’un protocole de fin de conflit ayant valeur d’accord collectif, sont présumées justifiées, de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle ;

Attendu que pour faire droit à la demande des salariées en paiement d’une prime de treizième mois et d’une prime d’insalubrité (salissure), les arrêts, après avoir constaté que la première résultait d’un protocole de fin de conflit du 20 décembre 2000, lequel avait été signé par la société Hôpital service SFGH et les délégués syndicaux CGT et CFDT, et ne concernait que les salariés affectés à l’hôpital Lapeyronie à Montpellier, et que la seconde résultait d’un protocole de fin de conflit conclu par la société Hôpital service SFGH et la déléguée syndicale CGT le 11 avril 2001 pour le site de Beauregard, et le 18 mai 2001 pour les sites Résidence du Parc, Saint Roch et maison de retraite des Acacias, retiennent que les intéressés caractérisent une inégalité de rémunération entre salariés appartenant à la même catégorie professionnelle et exerçant un travail égal ou de valeur égale, et que l’employeur ne justifie pas d’éléments objectifs et pertinents qui légitimeraient cette différence de traitement ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il ressortait de ces constatations que la différence de traitement résultait d’un protocole de fin de conflit ayant valeur d’accord collectif, ce dont elle aurait dû déduire qu’elle était présumée justifiée et qu’il appartenait à celui qui la contestait de démontrer qu’elle était étrangère à toute considération de nature professionnelle, la cour d’appel a violé le texte et le principe susvisés ;

Sur le moyen relevé d’office, après avis donné aux parties en application de l’article 1015 du code de procédure civile :

Vu le principe d’égalité de traitement, ensemble l’article L. 1224-1 du code du travail ;

Attendu que l’obligation à laquelle est légalement tenu le nouvel employeur, en cas de transfert d’une entité économique, de maintenir au bénéfice des salariés qui y sont rattachés les droits qu’ils tiennent d’un usage en vigueur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ;

Attendu que pour condamner l’employeur au paiement d’un rappel de la majoration de salaire de 80% des dimanches travaillés et des congés payés afférents, les arrêts, après avoir constaté que cette majoration de 80% pour les dimanches travaillés ne concernait, à l’origine, que les salariés engagés par l’association de gestion de l’oeuvre hospitalière Saint Jean de Dieu, dont il n’est pas contesté qu’elle ne relève pas de la convention collective nationale des entreprises de propreté, que ceux-ci avaient vu leur contrat de travail transféré à la société Elior services propreté et santé en application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, et que cette société n’avait maintenu cet avantage qu’à leur seul profit, retiennent qu’il est suffisamment établi que plusieurs salariés, appartenant à la même catégorie professionnelle, bénéficient ou ont bénéficié d’une majoration de 80 % de leur rémunération les dimanches travaillés, situation qui résulte d’avantages acquis, sans que la société Elior services propreté et santé ne justifie ni même ne soutienne qu’elle serait destinée à compenser un avantage spécifique, qu’il en découle une inégalité de traitement entre salariés qui occupent un emploi de même catégorie professionnelle, de valeur égale, dans des conditions équivalentes, sans que l’employeur justifie d’éléments objectifs et pertinents qui légitimeraient cette différence de traitement ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il ressortait de ces constatations que la majoration de 80 % pour les dimanches travaillés résultait de l’obligation pour le nouvel employeur de maintenir une majoration salariale qui avait été consentie à certains salariés par leur ancien employeur, la cour d’appel a violé le principe et le texte susvisés ;

Et sur le cinquième moyen du pourvoi principal de l’employeur :

Vu l’article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation à intervenir sur les premier et deuxième moyens du pourvoi principal de l’employeur et sur le moyen relevé d’office entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif critiqué par le cinquième moyen du pourvoi principal de l’employeur et relatif aux dommages-intérêts alloués au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône et au syndicat Commerce et Services CFDT des Bouches du Rhône ;

Et vu l’article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l’article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’ils condamnent la société Elior services propreté et santé à payer aux salariées un rappel de prime de treizième mois, un rappel de prime d’insalubrité (salissure) et un rappel de majoration des salaires les dimanches travaillés et des congés payés afférents, et des dommages-intérêts au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône et au syndicat Commerce et Services CFDT des Bouches du Rhône, les arrêts rendus le 9 décembre 2016, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Déboute les salariées de leurs demandes en paiement d’un rappel de prime de treizième mois, d’un rappel de prime d’insalubrité (salissure), et d’un rappel de majoration des salaires les dimanches travaillés et des congés payés afférents ;

Déboute le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône et le syndicat Commerce et services CFDT des Bouches du Rhône de leur demande de dommages-intérêts ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens communs produits aux pourvois principaux par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Elior services propreté et santé.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d’avoir condamné la société ESPS à verser aux salariés un rappel de prime de 13e mois ;

Aux motifs propres que [les salariés] sollicite[nt] un rappel au titre d’une prime de 13e mois, égale à 100% du salaire, en se fondant notamment sur le fait qu’une telle prime bénéficie aux salariés d’autres sites exploités ou qui étaient exploités par la société ESPS, et aux salariés du centre hospitalier Lapeyronie à Montpellier, à la suite d’un protocole de fin de conflit en date du 20 décembre 2000, complété le 21 novembre 2001, qui a porté cette prime à 100% du salaire sur plusieurs années, pièces versées aux débats ; que la société ESPS objecte que ces accords n’ont vocation à régir que les relations de travail au sein d’un établissement déterminé et qu’en conséquence, les salariés qui ne relèvent pas de ces accords d’établissement ne peuvent prétendre subir une discrimination salariale au seul motif qu’ils n’en bénéficient pas, l’égalité salariale ne devant être analysée qu’au seul regard du périmètre de l’établissement ; qu’elle ajoute que l’avantage ainsi accordé aux salariés dans le cadre de l’exécution d’un accord d’établissement conclu après négociation collective place nécessairement ces salariés dans une situation différente de celle des salariés qui n’y sont pas employés, différence de situation d’ailleurs présumée ; attendu que si les différences de traitement entre catégories professionnelles ou entre salariés exerçant, au sein d’une même catégorie professionnelle, des fonctions distinctes, opérées par voie de conventions ou d’accords collectifs, négociés et signés par les organisations syndicales représentatives, sont effectivement présumées justifiées, de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle, une telle présomption ne peut trouver à s’appliquer entre salariés d’établissements différents d’une même entreprise, appartenant à la même catégorie professionnelle et exerçant un travail égal ou de valeur égale ; que dans une telle hypothèse, et par application de l’article 1315 du Code civil, il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, mais il incombe à l’employeur de rapporter la preuve des éléments objectifs et pertinents, matériellement vérifiables, pouvant justifier cette différence ; qu’en l’espèce, [les salariés] établi[ssen]t, notamment par la production aux débats des bulletins de salaire de Monsieur D… E… « agent très qualifié de service » et de Madame Michèle F… « agent qualifié de service » qu’à partir de 2004, ces deux salariés, dont il n’est pas contesté qu’ils étaient employés au centre hospitalier Lapeyronie de Montpellier, ont perçu de la société ESPS, jusqu’en 2009, année de la perte du marché, une prime de fin d’année égale à 100% de leur salaire alors que [eux- mêmes], qui appartien[nen]t à la même catégorie professionnelle et qui exerce[nt] un travail égal ou de valeur égale, également en milieu hospitalier, ne perçoi[ven]t pas une telle prime ainsi que cela résulte de l’examen de [leurs]

bulletins de salaire ; que ces éléments de fait sont susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération entre salariés de sites différents d’une même entreprise, appartenant à la même catégorie professionnelle et exerçant un travail égal ou de valeur égale, étant précisé qu’il est indifférent que les salariés dont les bulletins de salaire sont produits à titre d’éléments comparatifs ne soient plus employés par la société ESPS, dans la mesure où ils l’ont été pendant la période concernée par la réclamation [des salariés] : que la société ESPS, qui ne peut valablement soutenir qu’au jour de la signature de ces accords elle se trouvait dans une situation de reprise de marché, ne justifie nullement d’éléments objectifs et pertinents qui légitimeraient cette différence de traitement entre salariés de sites distincts car si elle soutient que la situation des salariés ayant bénéficié de tels accords doit être appréciée de façon globale au regard notamment de sujétions particulières de certains sites, elle ne verse aux débats aucun document en ce sens ; qu’en conséquence le jugement sera confirmé en ce qu’il a fait droit à la demande [des salariés] à ce titre ;

Et aux motifs éventuellement adoptés des jugements entrepris du 31 mars 2015 qu’en application de l’article 1315 du Code civil, s’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal », de soumettre au juge les éléments de faits susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs pertinents justifiant cette différence ; que l’égalité de traitement entre les salariés doit être observée par l’employeur, ne peut s’appliquer qu’à la condition expresse que les salariés en question se trouvent dans la même situation au regard de l’avantage en cause ; que la partie demanderesse verse aux débats des bulletins de salaire de 3 salariés différents (la partie défenderesse n’ayant jamais contesté que ces 3 salariés étaient affectés et travaillaient sur le site de Montpellier) : Monsieur Mohammed G…, agent très qualifié de service, niveau ATQS, a perçu pour le mois de décembre 2007, un salaire de base de 1 363,51 € et une prime de fin d’année du même montant (1 363,51 €), Monsieur Aomar E…, agent très qualifié de service, niveau ATQS, pour le mois de décembre 2009 a perçu en salaire de base et en prime de fin d’année la même somme soit 1 515,17 €, Mademoiselle Michèle F…, agent qualifié de service, niveau AQS a été payée en décembre 2009 avec un salaire de base de 1 393,85 € et a perçu ce même mois de décembre 2009 une prime de fin d’année du même montant soit 1 393,85 € ; que la partie demanderesse verse aussi 5 autres bulletins de salaires de Monsieur Aomar E… et 7 autres bulletins de salaire de Mademoiselle Michèle F… et le Conseil constate à chaque fois le versement d’une prime de fin d’année pour ces 2 salariés affectés sur le site de Montpellier ; que le Conseil ayant comparé les bulletins de salaire de la partie demanderesse et ceux des 3 salariés affectés sur le site de Montpellier, constate le versement pour ces 4 salariés d’une prime de transport et d’expérience ; que la partie défenderesse ne fournit aucun tableau comparatif entre les salariés des deux sites, démontrant que ceux de Montpellier (bénéficiant de la prime de 13e mois) n’avaient pas une rémunération globale annuelle supérieure, et que l’attribution de cette prime pour le site de Montpellier avait pour objet de ramener les salariés de ce site à la hauteur de la rémunération des salariés affectés dans d’autres établissement de la société, conformément à l’accord conclu en novembre 2001 « La gratification annuelle est déterminée en fonction du salaire de base en vigueur au moment de son versement soit le salaire du mois de décembre

elle est versée pour le personnel en contrat à durée indéterminée ainsi que les salariés en contrat à durée déterminée ayant plus d’un an d’ancienneté, en fonction du temps de présence » ; que la partie défenderesse argue de l’argument que la société a perdu le site du CHU Lapeyronie depuis avril 2010 ; que le Conseil ne retient pas cet argument car les salariés du site de Montpellier faisaient bien partie de l’effectif de la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE quand l’accord a été conclu en novembre 2001 ; qu’au vu de ce qui vient d’être exposé, le Conseil fait droit à la demande de prime de fin d’année pour la partie demanderesse ;

ALORS, D’UNE PART, QUE les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d’accords d’établissement négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de ces établissements, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l’établissement et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées, de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle ; qu’en affirmant, pour condamner l’exposante à verser aux salariés un rappel de prime de 13e mois prévue par l’accord d’établissement du site de Lapeyronie dont ils ne f[on]t pas partie, que la société « ne justifie nullement d’éléments objectifs et pertinents qui légitimeraient cette différence de traitement entre salariés de sites distincts car si elle soutient que la situation des salariés ayant bénéficié de tels accords doit être appréciée de façon globale au regard notamment de sujétions particulières de certains sites, elle ne verse aux débats aucun document en ce sens », quand il appartenait aux salariés, et non à la société ESPS, de démontrer que la différence de traitement litigieuse était étrangère à toute considération de nature professionnelle, la Cour d’appel a violé le huitième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, le principe d’égalité de traitement ainsi que le protocole d’accord d’établissement du site de Lapeyronie du 21 novembre 2001 ;

ALORS, D’AUTRE PART et subsidiairement, QUE repose sur une raison objective et pertinente la stipulation d’un accord collectif qui institue une différence de traitement, dès lors que cette différence de traitement a pour objet ou pour but de prendre en compte les spécificités de la situation des salariés relevant d’une catégorie déterminée, tenant notamment aux conditions d’exercice des fonctions, à l’évolution de carrière ou aux modalités de rémunération ; qu’en condamnant l’exposante à verser à l’ensemble de ses salariés un rappel de salaire correspondant à la prime de 13e mois réservée, par voie d’accord d’établissement, aux salariés du site de Lapeyronie, quand cet accord d’établissement de fin de conflit constituait nécessairement une raison objective justifiant la différence de traitement avec les salariés des autres établissements de la société et tenant à l’évolution de carrière toute particulière des salariés rattachés à l’établissement de Lapeyronie, la Cour d’appel a derechef violé le principe d’égalité de traitement, outre l’accord d’établissement susvisé.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d’avoir condamné la société ESPS à verser aux salariés un rappel de prime d’insalubrité dite également de salissure ;

Aux motifs que [les salariés] sollicite[nt], à titre subsidiaire, le versement d’une même prime mais d’un montant moindre, résultant de l’application d’accords de fin de conflit, en date du 11 avril 2001 pour le site de Beauregard, et du 18 mai 2001, pour les sites des cliniques Résidence du Parc, Saint Roch et de la maison de retraite des Acacias, qui ont prévu l’attribution d’une prime de salissure d’un France [0,153 €] par heure travaillée « afin de tenir compte des contraintes rencontrées sur le site en matière de nettoyage des vêtements de protection » ; que l’examen de l’état de rémunération des salariés dont les contrats de travail ont été repris sur le site de Saint Roch par la société ESPS permet de constater qu’il n’existait pas de prime d’insalubrité préalablement à cette reprise ; qu’or, il apparaît qu’au moins une des salariées du site de Saint Roch, Madame Angèle H…, agent qualifié de service, a perçu pendant les années 2008 à 2014, soit postérieurement à ces accords, une prime d’insalubrité d’un montant de 23,13 € par mois pour un temps complet, soit 0,153 € par heure travaillée ; que par ailleurs, d’autres salariés sur les sites de Beauregard et de la Résidence du Parc, à Marseille notamment, bénéficient de cette même prime ; que [les salariés], qui appartien[ne]t à la même catégorie professionnelle et qui occupe[nt] un emploi de valeur égale et exerce[nt] dans des conditions équivalentes à celles des salariés bénéficiant de cette prime, ne perçoi[vent] pas cet élément de rémunération et que la société ESPS ne justifie nullement d’éléments objectifs et pertinents, telle la prise en charge par ses soins de l’entretien de la tenue de travail, qui légitimeraient cette différence de traitement entre salariés de sites distincts ; qu’en conséquence, [les salariés] [sont] fondé[s], en application du principe d’égalité de traitement entre salariés, à solliciter l’attribution d’une prime d’insalubrité d’un montant de 0,153 € par heure travaillée ;

ALORS, D’UNE PART, QUE l’employeur n’est tenu d’assurer l’égalité de rémunération, et plus largement une égalité de traitement, qu’entre les salariés placés dans une situation identique ou similaire ; qu’en se bornant à affirmer, pour condamner la société ESPS à verser aux salariés un rappel de prime d’insalubrité, que « [les salariés], qui appartien[nen]t à la même catégorie professionnelle et qui occupe[nt] un emploi de valeur égale et exerce[nt] dans des conditions équivalentes à celles des salariés bénéficiant de cette prime, ne perçoi[ven]t pas cet élément de rémunération et que la société ESPS ne justifie nullement d’éléments objectifs et pertinents, telle la prise en charge par ses soins de l’entretien de la tenue de travail, qui légitimeraient cette différence de traitement entre salariés de sites distincts », sans cependant rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si, dans le cadre de leur travail, les salariés étaient en contact avec des déchets hospitaliers, à l’instar des autres salariés de l’établissement percevant la prime litigieuse, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d’égalité de traitement et des accords d’établissement des sites de Beauregard, Résidence du Parc, Saint Roch et Les Acacias ;

ALORS, D’AUTRE PART et subsidiairement, QUE l’exposante avait fait valoir, dans ses conclusions d’appel, que « cette prime [d’insalubrité] est prévue par le Code du travail et répond à des spécificités dont les demandeurs ne justifient pas : décret n°67-624 du 23 juillet 1967 fixant les modalités et les taux des indemnités pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants. Elle a été attribuée au salarié en contact avec les déchets hospitaliers. Elle n’a d’ailleurs rien à voir avec l’obligation de prise en charge des frais qu’un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et notamment l’entretien de tenues de travail. On rappellera que les tenues en milieu hospitalier sont des tenues jetables » (conclusions d’appel de la société représentée par Maître W… , page 30); qu’en s’abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions qui lui étaient soumises, dont il résultait que la différence de traitement litigieuse était justifiée par une différence de situation entre les salariés qui n’étaient pas en contact avec les déchets hospitaliers dans le cadre de leur travail, et les autres salariés de leur établissement qui percevaient la prime litigieuse, la Cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d’avoir condamné la société ESPS à verser aux salariés un rappel de prime de la majoration de salaire des dimanches travaillés outre les congés payés y afférents ;

Aux motifs qu’aux termes de la convention collective applicable, les salariés qui sont amenés à travailler le dimanche bénéficient d’une majoration de leur rémunération égale à 20% ;

Et aux motifs que [les salariés] sollicite[nt] d’une somme correspondant à une majoration de 80% du taux horaire de base pour les dimanches travaillés, alors qu’il[s] ne bénéficie[nt] que de la majoration prévue par la convention collective à hauteur de 20% ; qu’il[s] se préva[lent] de la situation de salariés du site de Saint Jean de Dieu qui ont bénéficié, par reprise de leur contrat de travail en application de l’article L1224-1 du Code du travail, de cette majoration de 80% du taux horaire, ainsi que cela résulte de leurs contrats de travail et des avenants ; que la société ESPS objecte que ces avantages, qui résultent de la reprise des contrats de travail des salariés avec leurs avantages acquis préalablement à la reprise du marché sur le site de Saint Jean de Dieu, n’ont pas vocation à s’appliquer aux salariés non concernés par cette reprise des contrats ; que les annexes aux avenants aux contrats de travail des salariés bénéficiaires de cette majoration sont intitulés : « Annexes à l’avenant de contrat de travail de Madame

transférée de l’AGOH Saint Jean de Dieu vers Hôpital-Service dans le cadre de l’externalisation des activités de bio nettoyage et services hôteliers au 1er mai 2006 » et sont rédigées dans les termes suivants : « 1- Dimanche : la majoration pour le travail du dimanche est de 80% du taux horaire de base. 2- Jours enfants malades : 4 jours à 100%. 3- Les jours fériés travaillés ou les jours fériés tombant sur un jour de repos planifié ouvrent droit à une récupération de 7 heures base temps plein

» ; qu’il résulte de ces annexes que les salariés dont les contrats de travail ont été repris étaient employés de l’association de gestion de l’oeuvre hospitalière (AGOH) Saint Jean de Dieu dont il n’est pas contesté qu’elle ne relève pas de la Convention collective des entreprises de nettoyage ; que la reprise desdits contrats de travail n’est donc pas fondée sur les dispositions de la Convention collective nationale des entreprises de propreté, mais de l’application de l’article L1224-1 du Code du travail ; qu’en l’état des pièces produites (les annexes aux avenants des contrats de travail et des bulletins de salaire) et des explications fournies aux débats, il est suffisamment établi que plusieurs salariés appartenant à la même catégorie professionnelle, bénéficient ou ont bénéficié d’une majoration de 80% de leur rémunération les dimanches travaillés et de la majoration des jours enfants malades, situation qui résulte d’avantages acquis, sans que la société ESPS ne justifie ni même ne soutienne qu’elle serait destinée à compenser un avantage spécifique ; qu’il en découle une inégalité de traitement entre salariés qui occupent un emploi de même catégorie professionnelle, de valeur égale, dans des conditions équivalentes, sans que la société ESPS justifie d’éléments objectifs et pertinents qui légitimeraient cette différence de traitement ; qu’il sera donc fait droit à la demande [des salariés] en considération du nombre de dimanches travaillés ;

ALORS QUE le maintien, sans extension aux autres salariés, des avantages individuels acquis résultant de la mise en cause de l’application d’une convention collective en cas de transfert du personnel effectué conformément à l’article L 1224-1 du Code du travail ne méconnaît pas le principe « à travail égal, salaire égal », que ce maintien résulte d’une absence d’accord de substitution ou d’un tel accord ; qu’en affirmant, pour faire droit à la demande des salariés tendant à bénéficier de la majoration de salaire de 80% pour les dimanches travaillés réservée aux salariés transférés du site de Saint Jean de Dieu, « qu’il en découle une inégalité de traitement entre salariés qui occupent un emploi de même catégorie professionnelle, de valeur égale, dans des conditions équivalentes, sans que la société ESPS justifie d’éléments objectifs et pertinents qui légitimeraient cette différence de traitement », quand elle avait constaté, d’une part, que la prime litigieuse « résulte d’avantages acquis », d’autre part, que « la reprise desdits contrats de travail n’est pas fondée sur les dispositions de la Convention collective nationale des entreprises de propreté, mais de l’application de l’article L 1224-1 du Code du travail », ce dont il résultait que les salariés, qui ne faisaient pas partie de ceux dont le contrat de travail avait été transféré par l’effet de la loi à la société ESPS, ne pouvaient bénéficier de la majoration litigieuse, la Cour d’appel a violé le principe d’égalité de traitement, ensemble l’article L 1224-1 du Code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d’avoir condamné la société ESPS à verser aux salariés un rappel de prime d’assiduité ;

Aux motifs que [les salariés] formule[nt] une demande tendant à un tel rappel de prime mais uniquement à hauteur de 200 € par an en arguant de la mise en place d’une telle prime au profit de tous les salariés du site de La Casamance par décision unilatérale de l’employeur ; que la société ESPS objecte que [les salariés] f[on]t état d’une situation très ancienne et ne justifie[nt] nullement qu’une telle prime est toujours en vigueur au sein de l’établissement ; que pour établir l’existence d’une telle prime, l[es] intimé[s]

verse[nt] aux débats copie des bulletins de salaire de plusieurs salariées, dont il n’est pas contesté qu’elles travaillent toutes sur le site de La Casamance, en qualité d’agent de service ou d’agent de service très qualifiées : Mmes Patricia I…, Karine J…, épouse K… L…, Marie-France M…, épouse N…, (directement recrutée par la société HOPITAL SERVICES aux droits de laquelle vient la société ESPS en l’état de la production de leur contrat de travail) ainsi que Mmes Nadia O… et Yolande P…, épouse Q…, dont l’examen des bulletins de paie fait apparaître qu’elles ont perçu, pour certaines dès 2005, pour d’autres, à compter de l’année 2008, une prime, toujours versée en 2014, de 200 € par an, attribuée moitié en juin et moitié en décembre ; que la société ESPS ne justifie, ni même ne soutient que cette décision unilatérale résulte de l’application de la loi ou est destinée à compenser un préjudice spécifique ; qu’il en résulte une inégalité de traitement ainsi créée avec ses autres employés, de même catégorie professionnelle et exerçant des fonctions identiques, toujours au sein d’établissements hospitaliers ; qu’en conséquence, il sera fait droit à la demande [des salariés] au titre du rappel de prime d’assiduité ;

ALORS QU’une différence de traitement établie par engagement unilatéral de l’employeur peut être pratiquée entre des salariés relevant d’établissements différents et exerçant un travail égal ou à valeur égale si elle repose sur des raisons objectives, dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence ; qu’en affirmant, pour condamner l’exposante à verser aux salariés un rappel de prime d’assiduité réservée, par voie d’engagement unilatéral, à l’ensemble des salariés, transférés ou non, du site de La Casamance, que « la société ESPS ne justifie, ni même ne soutient que cette décision unilatérale résulte de l’application de la loi ou est destinée à compenser un préjudice spécifique », sans cependant rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si la différence de traitement litigieuse reposait sur des raisons objectives, la Cour d’appel, qui a statué par motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard du principe d’égalité de traitement.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d’avoir condamné la société ESPS à verser au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône et au syndicat Commerce et Services CFDT des Bouches du Rhône des dommages et intérêts ;

Aux motifs que la société ESPS fait valoir que l’intervention volontaire de ces deux syndicats est irrecevable car les mesures critiquées ne portent pas atteinte à l’intérêt collectif de la profession, le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône étant d’ailleurs signataire de la convention collective applicable et des accords signés sur les différents sites de la société et ne pouvant, en conséquence, se prévaloir de sa propre turpitude ; que non-respect par l’employeur des droits individuels des salariés, comme en l’espèce le principe d’égalité de traitement, constitue une atteinte à l’intérêt collectif de la profession que représentent les syndicats qui leur permet d’agir en justice par application de l’article L 2132-3 du Code du travail ; que par ailleurs, si le rôle des syndicats est de participer à la négociation collective, ceux-ci conservent la possibilité de faire sanctionner la méconnaissance par l’employeur de certaines règles et notamment celles tenant au champ d’application des accords collectifs ; qu’en conséquence, ces deux interventions volontaires seront déclarées recevables et il leur sera alloué à chacun la somme de 10 € en réparation des atteintes portées par la société ESPS à l’intérêt collectif de la profession ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur les premier, deuxième, troisième et/ou quatrième moyens de cassation entraînera, par voie de conséquence, la cassation sur le cinquième moyen, en application de l’article 625 du Code de procédure civile. Moyen commun produit aux pourvois incidents par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour Mmes Y… V… et deux autres salariées.

Le moyen fait grief aux arrêts attaqués d’AVOIR débouté les salariées de leurs demandes relatives au paiement d’une prime d’insalubrité, d’une prime de transport et d’une prime d’assiduité.

AUX MOTIFS QUE « [les salariées] [sollicitent], à titre principal, un rappel au titre d’une prime dite « prime d’insalubrité », en fait « prime de salissure », correspondant à la somme de 0,305 euros de l’heure travaillée, prime dont [ils] [indiquent] qu’elle bénéficie à titre d’avantage acquis aux salariés travaillant pour la société ESPS sur le site de l’hôpital Sainte-Marguerite à Marseille ; que la société ESPS réplique que cette prime est attribuée à des salariés effectuant des travaux dangereux, insalubres incommodes ou salissants, [les salariées] ne justifiant pas relever de cette catégorie de salariés. [Elles] ajoute[nt] que cette prime ne correspond pas à une prise en charge de frais d’entretien de tenues de travail ; qu’il n’est pas contesté que, sur le site de l’hôpital Sainte-Marguerite, cette prime relève d’un avantage acquis qui existe au moins depuis 2004, date de reprise des contrats des salariés par la société ESPS, et bénéficie aux employés affectés sur ce site en raison de l’avantage dont ils bénéficiaient préalablement à la reprise du marché ; qu’aux termes de l’article L 1224-2 du code du travail, créé par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 « lorsque les contrats de travail sont, en application d’un accord de branche étendu, poursuivis entre deux entreprises prestataires se succédant sur un même site, les salariés employés sur d’autres sites de l’entreprise nouvellement prestataire et auprès de laquelle les contrats de travail sont poursuivis ne peuvent invoquer utilement les différences de rémunération résultant d’avantages obtenus avant cette poursuite avec les salariés dont les contrats de travail ont été poursuivis » ; qu’en application de ce texte, les salariés de la société ESPS travaillant sur les sites autres que celui de l’hôpital Sainte-Marguerite ne peuvent prétendre au bénéfice de cet avantage obtenu par les salariés de ce site dont les contrats de travail ont été poursuivis ; que [les salariées], [affectées] sur le site de Saint Roch [seront], en conséquence, [déboutées] de [leurs] demande[s] en principal » ;

ET AUX MOTIFS QUE « [les salariées] [faisaient] valoir que les salariés de la société ESPS affectés sur le site de l’hôpital Sainte-Marguerite à Marseille perçoivent un complément d’indemnité de transport de 28,05 euros mensuels, en plus de ce que prévoit la convention collective nationale des entreprises de propreté, dont ils bénéficient au titre du maintien de primes acquises antérieurement et produit en ce sens huit contrats de travail justifiant de la reprise de salariés avec maintien des avantages acquis dont ladite prime, outre plusieurs bulletins de salaire concernant Mmes R…, S… et T… ; que la société ESPS réplique que [les salariées] ne [justifient] pas des conditions exigées par la convention collective (justificatif de titre de transport collectif, justificatif de défaut d’existence de transport collectif pour se rendre sur le site) et se [comparent] à des salariés bénéficiant d’avantages acquis ; qu’il convient de constater que les contrats de travail produits correspondent effectivement à la reprise de contrats dans le cadre d’une reprise de marché avec maintien des avantages acquis en vertu de la convention collective des entreprises de nettoyage et que les bulletins de salaire des trois employées susvisées sont insuffisants à déterminer que celles-ci bénéficieraient de ces primes à un autre titre, de sorte qu’en application de l’article L.1224-3-2 du Code du travail dont il a été vu supra qu’il prohibe l’extension d’avantages obtenus par reprise du contrat à des salariés d’autres sites, [les salariées seront déboutées] de [leurs] [demandes] de ce chef » ;

ET AUX MOTIFS QUE « [les salariées] [sollicitent] à titre principal un rappel au titre d’une prime d’assiduité de 914,70 euros par an, se fondant sur les bulletins de Mmes Nathalie I… et Nadine U…, employées sur le site de La Casamance à Aubagne, dont [elles] [soutiennent] qu’elles perçoivent une telle prime depuis au moins l’année 2004, versée à hauteur de 50% en juin et en décembre de chaque année, au titre d’avantage acquis ; que cependant, comme vu supra, un tel avantage, dont [elles] [admettent] qu’il résulte de la reprise de leurs contrats de travail par reprise du marché, n’a pas vocation à s’appliquer à des salariés d’autres sites » ;

ALORS QUE la loi ne dispose que pour l’avenir et n’a pas d’effet rétroactif ; qu’en l’espèce, il est constant que les salariées ont saisi, en septembre 2012, le conseil de prud’hommes de Marseille aux fins de réclamer à l’encontre de la société ESPS, sur le fondement du principe de l’égalité de traitement, le paiement de différentes primes dont elles avaient été privées ; que pour les débouter de leurs demandes s’agissant de la prime « d’insalubrité », dite également « de salissure », ainsi que de la prime de transport et de la prime d’assiduité, la cour d’appel a énoncé qu’aux termes de l’article L.1224-3-2 du code du travail, créé par la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, les salariées de la société ESPS travaillant sur les sites autres que celui de l’hôpital Sainte-Marguerite ne pouvaient prétendre au bénéfice de cet avantage obtenu par les salariés de ce site dont les contrats de travail ont été poursuivis ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a méconnu l’article 2 du code civil, ensemble l’article L 1224-3-2 par fausse application et le principe d’égalité de traitement par refus d’application.

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Cour de cassation, Chambre sociale, 30 mai 2018, 17-12.783 17-12.786 17-12.994, Inédit