Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 février 2020, 17-31.614, Publié au bulletin

  • Responsabilité délictuelle ou quasidélictuelle·
  • Concurrence déloyale ou illicite·
  • Economie injustement réalisée·
  • Éléments d'appréciation·
  • Concurrence déloyale·
  • Évaluation·
  • Réparation·
  • Préjudice·
  • Cristal·
  • Sociétés

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Lorsque les effets préjudiciables, en termes de trouble économique, d’actes de concurrence déloyale sont particulièrement difficiles à quantifier, ce qui est le cas de ceux consistant à parasiter les efforts et les investissements, intellectuels, matériels ou promotionnels, d’un concurrent ou à s’affranchir d’une réglementation, dont le respect a nécessairement un coût, tous actes qui, en ce qu’ils permettent à l’auteur des pratiques de s’épargner une dépense en principe obligatoire, induisent pour celui-ci un avantage concurrentiel, il y a lieu d’admettre que la réparation du préjudice peut être évaluée en prenant en considération l’avantage indu que s’est octroyé l’auteur des actes de concurrence déloyale au détriment de ses concurrents, modulé à proportion des volumes d’affaires respectifs des parties affectés par ces actes.

Doit donc être approuvée la cour d’appel qui, appelée à statuer sur la réparation d’un préjudice résultant d’une pratique commerciale trompeuse pour le consommateur, conférant à son auteur un avantage concurrentiel indu par rapport à ses concurrents, tient compte, pour évaluer l’indemnité à allouer à l’un de ceux-ci, de l’économie injustement réalisée par lui, qu’elle a modulée en tenant compte des volumes d’affaires respectifs des parties affectés par lesdits agissements

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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 12 févr. 2020, n° 17-31.614, Publié au bulletin
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-31614
Importance : Publié au bulletin
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 18 septembre 2017, N° 16/05727
Textes appliqués :
article 1382, devenu l’article 1240, du code civil
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000041620381
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:CO00174
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Sur les parties

Texte intégral

COMM.

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 12 février 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 174 FS-P+B+R+I

Pourvoi n° Q 17-31.614

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 FÉVRIER 2020

La société Cristal de Paris, société anonyme à conseil d’administration, dont le siège est […], a formé le pourvoi n° Q 17-31.614 contre l’arrêt rendu le 19 septembre 2017 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige l’opposant à la société Cristallerie de Montbronn, société par actions simplifiée, dont le siège est […], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Bras, conseiller référendaire, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Cristal de Paris, de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société Cristallerie de Montbronn, l’avis écrit de Mme Pénichon, avocat général, et l’avis oral de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l’audience publique du 14 janvier 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Le Bras, conseiller référendaire rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, Mmes Darbois, Poillot-Peruzzetto, Pomonti, Champalaune, Daubigney, Michel-Amsellem, M. Ponsot, Mme Boisselet, M. Mollard, conseillers, Mmes de Cabarrus, Lion, Lefeuvre, conseillers référendaires, Mme Beaudonnet, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 19 septembre 2017), la société Cristallerie de Montbronn, dont le siège social est à Montbronn en Moselle, est spécialisée dans la création et la fabrication de produits d’arts de la table en cristal. La société Cristal de Paris, dont le siège social est situé dans la même rue, commercialise des produits en cristal fabriqués, taillés et polis en Chine et en Europe ainsi que des produits en verre, cristallin et luxion. Reprochant à cette dernière des pratiques commerciales trompeuses consistant à présenter dans ses catalogues des produits en verre, en cristallin ou luxion mélangés à des produits en cristal afin de laisser croire que l’ensemble serait en cristal, à les présenter comme étant « made in France » et à se présenter elle-même comme un « haut lieu du verre taillé en Lorraine » et un « spécialiste de la taille », la société Cristallerie de Montbronn l’a assignée aux fins de cessation de ces pratiques illicites et indemnisation de son préjudice.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés

2. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

3. La société Cristal de Paris fait grief à l’arrêt de la condamner à verser à la société Cristallerie de Montbronn la somme de 300 000 euros en réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale par pratique commerciale trompeuse et tromperie alors « que la réparation du préjudice doit correspondre à ce dernier, sans qu’il puisse en résulter ni perte ni profit pour la victime, et ne saurait être fixée en considération du profit ou de l’économie réalisé par l’auteur du dommage ; que, pour évaluer l’indemnisation du préjudice qui aurait été subi par la société Cristallerie de Montbronn, la cour d’appel s’est bornée à relever que cette société employait huit tailleurs là où la société Cristal de Paris n’en employait que deux pour l’équivalent d’un mi-temps et à affirmer que la tromperie qui aurait été réalisée par la société Cristal de Paris lui aurait ainsi permis d’avoir des prix de revient beaucoup plus bas que ceux de la société Cristallerie de Montbronn ; qu’en prenant ainsi en considération la seule différence de prix de revient entre les deux sociétés, et donc la seule économie qui aurait été réalisée par l’auteur de la prétendue pratique illicite aux lieu et place de l’éventuel préjudice subi par la prétendue victime, seul élément dont la loi autorisait la prise en compte, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil, devenu l’article 1240 du même code, ensemble le principe susvisé. »

Réponse de la Cour

4. Le propre de la responsabilité civile est de rétablir, aussi exactement que possible, l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu, sans perte ni profit pour elle.

5. La Cour de cassation juge traditionnellement que « Le juge apprécie souverainement le montant du préjudice, dont il justifie l’existence par la seule évaluation qu’il en fait, sans être tenu d’en préciser les divers éléments » (Ass. plén., 26 mars 1999, pourvoi n° 95-20.640, Bull. 1999, Ass. plén., n° 3 ; Ch. mixte., 6 septembre 2002, pourvoi n° 98-22.981, Bull. 2002, Ch. mixte, n° 4 ; 2e Civ., 21 avril 2005, pourvoi n° 04-06.023, Bull. 2005, II, n° 112 ; Com., 16 janvier 2007, pourvoi n° 05-16.222 ; 1re Civ., 11 juin 2009, pourvoi n° 08-15.954 ; 3e Civ., 10 mars 2010, pourvoi n° 08-15.950, 08-15.332 ; Com., 24 mai 2017, pourvoi n° 15-21.179).

6. Mais elle juge également que méconnaît son office le juge qui refuse d’évaluer un dommage dont il a constaté l’existence en son principe (3e Civ., 6 février 2002, pourvoi n° 00-10.543, Bull. 2002, III, n° 34 ; Com., 28 juin 2005, pourvoi n° 04-11.543, Bull. 2005, IV, n° 148 ; 2e Civ., 5 avril 2007, pourvoi n° 05-14.964, Bull. 2007, II, n° 76 ; 3e Civ., 2 février 2011, pourvoi n° 10-30.427 ; Com., 10 janvier 2018, pourvoi n° 16-21.500) et qu’il ne peut allouer une réparation forfaitaire (1re Civ., 3 juillet 1996, pourvoi n° 94-14.820, Bull. 1996, I, n° 296 ; Com., 23 novembre 2010, pourvoi n° 09-71.665 ; 3e Civ., 7 juin 2011, pourvoi n° 09-17.103 ; 2e Civ., 13 décembre 2012, pourvoi n° 11-26.852 ; Com., 3 juillet 2019, pourvoi n° 17-18.681), c’est-à-dire sans rapport avec l’étendue du préjudice subi.

7. En matière de responsabilité pour concurrence déloyale, la chambre commerciale retient qu’il s’infère nécessairement un préjudice, fût-il seulement moral, d’un acte de concurrence déloyale (Com., 22 octobre 1985, pourvoi n° 83-15.096, Bull. 1985, IV, n° 245 ; Com., 27 mai 2008, pourvoi n° 07-14.442, Bull. IV, n° 105 ; 1re Civ., 21 mars 2018, pourvoi n° 17-14.582 ; Com., 28 septembre 2010, pourvoi n° 09-69.272 ; Com., 11 janvier 2017, pourvoi n° 15-18.669).

8. Cette jurisprudence, qui énonce une présomption de préjudice, sans pour autant dispenser le demandeur de démontrer l’étendue de celui-ci, répond à la nécessité de permettre aux juges une moindre exigence probatoire, lorsque le préjudice est particulièrement difficile à démontrer.

9. En effet, si les effets préjudiciables de pratiques tendant à détourner ou s’approprier la clientèle ou à désorganiser l’entreprise du concurrent peuvent être assez aisément démontrés, en ce qu’elles induisent des conséquences économiques négatives pour la victime, soit un manque à gagner et une perte subie, y compris sous l’angle d’une perte de chance, tel n’est pas le cas de ceux des pratiques consistant à parasiter les efforts et les investissements, intellectuels, matériels ou promotionnels, d’un concurrent, ou à s’affranchir d’une réglementation, dont le respect a nécessairement un coût, tous actes qui, en ce qu’ils permettent à l’auteur des pratiques de s’épargner une dépense en principe obligatoire, induisent un avantage concurrentiel indu dont les effets, en termes de trouble économique, sont difficiles à quantifier avec les éléments de preuve disponibles, sauf à engager des dépenses disproportionnées au regard des intérêts en jeu.

10. Lorsque tel est le cas, il y a lieu d’admettre que la réparation du préjudice peut être évaluée en prenant en considération l’avantage indu que s’est octroyé l’auteur des actes de concurrence déloyale, au détriment de ses concurrents, modulé à proportion des volumes d’affaires respectifs des parties affectés par ces actes.

11. Par motifs propres et adoptés, l’arrêt, après avoir constaté que les deux sociétés sont directement concurrentes, sur un marché restreint où agissent d’autres opérateurs, de plus grande taille et notoriété, retient qu’en trompant le consommateur sur la composition, l’origine et les qualités substantielles des produits vendus, la société Cristal de Paris s’est assuré un avantage concurrentiel au préjudice de la société Cristallerie de Montbronn. Il relève en particulier que la tromperie sur la taille « made in France » lui a permis d’obtenir des prix de revient beaucoup plus bas et que, pour 2013, elle justifie n’avoir employé qu’un tailleur pour six mois, là où la société Cristallerie de Montbronn en employait huit, en précisant leur coût annuel. Relevant enfin que la société Cristal de Paris a bénéficié de cet avantage pour une taille représentant 10 % de son chiffre d’affaires de 5 000 000 euros, cependant que la taille représente 25 % du chiffre d’affaires de la société Cristallerie de Montbronn, qui est de 2 000 000 euros, il évalue à 300 000 euros le préjudice subi par cette dernière en déduisant, conformément à la méthode proposée par celle-ci, de la charge d’emploi de tailleurs de la société Cristallerie de Montbronn, rapportée à son chiffre d’affaires, le montant correspondant à la charge de ces emplois pour la société Cristal de Paris, rapportée au chiffre d’affaires de celle-ci.

12. Appelée à statuer sur la réparation d’un préjudice résultant d’une pratique commerciale trompeuse pour le consommateur, conférant à son auteur un avantage concurrentiel indu par rapport à ses concurrents, la cour d’appel a pu, pour évaluer l’indemnité devant être allouée à la société Cristallerie de Montbronn, tenir compte de l’économie injustement réalisée par la société Cristal de Paris, qu’elle a modulée en tenant compte des volumes d’affaires respectifs des parties affectés par lesdits agissements.

13. Le moyen n’est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cristal de Paris aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Cristal de Paris et la condamne à payer à la société Cristallerie de Montbronn la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société Cristal de Paris.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt confirmatif attaqué D’AVOIR débouté la société Cristal de Paris de ses demandes d’irrecevabilité et DE L’AVOIR condamnée à verser à la société Cristallerie de Montbronn la somme de 300.000 euros au titre de la réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale par pratique commerciale trompeuse et tromperie ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE pour soutenir qu’il n’y aurait pas en l’espèce concurrence déloyale au préjudice de la société Cristallerie de Montbronn et que celle-ci serait irrecevable à l’alléguer, la société Cristal de Paris faisait valoir que cette concurrente serait elle-même l’auteur de pratiques commerciales trompeuses sur l’origine de ses propres produits ; qu’ainsi, elle écrivait dans son assignation du 27 février 2014 que : « les modèles de la cristallerie de Montbronn [étaient] ''made in France'' » et « bénéfici[aient] de la mention ''Made in France'' »; que son dirigeant, interviewé dans un article de l’Express publié le 10 juillet 2013, déclarait que : « [nos] produits [étaient] étiquetés made in France, dans le Monde de l’artisan, [notre publicité] évoqu[ait] volontairement la France » ; qu’elle apposait sur ses produits une étiquette ainsi qu’un sceau indélébile Cristallerie de Montbronn – France, ainsi que d’un certificat assurant qu’il s’agissait du résultat d’un « geste authentique et précieux des maîtres verriers français » ; que ses produits apparaissaient sur un catalogue de l’association Lorraine Terre de Luxe ou sur des sites coin-fr.com ou luxury-made-in-France.fr comme affichant le label Origine France Garantie, alors qu’elle ne possédait pas de four permettant de fabriquer le cristal brut qu’elle achetait dans différentes usines en Europe, se bornant à importer les objets de verrerie quasi-finis de l’étranger qu’elle taillait, polissait ou faisait décorer ; mais que, de première part, nonobstant les termes maladroits de l’assignation du 27 février 2014 ou ceux retranscrits par un journaliste de l’Express, aucun modèle ni même aucun document émanant de la société Cristallerie de Montbronn ne comportait une mention Made in France ; que, de deuxième part, les termes Origine France Garantie pouvant apparaître sur un catalogue ou sur des sites étaient extérieurs à l’entreprise intimée, ce que celle-ci affirmait sans être démentie ; que, de troisième part enfin, l’apposition sur les produits de la mention Cristallerie de Montbronn – France ne faisait qu’attester l’origine de l’entreprise elle-même, cependant que la certification d’un geste authentique et précieux des maîtres verriers français n’était pas trompeur dès lors qu’il était acquis qu’elle taillait, polissait et faisait décorer les objets de verrerie bruts qu’elle achetait à l’étranger ; que, sur le préjudice, il était manifeste qu’en trompant le consommateur sur la composition, l’origine et les qualités substantielles des produits vendus, la société Cristal de Paris s’était assuré un avantage concurrentiel au préjudice de la société Cristallerie de Montbronn ; qu’à juste titre le tribunal avait pris en considération le fait qu’en achetant ses produits à l’étranger pour une taille représentant 10 % de son chiffre d’affaires de 5.000.000 €, alors qu’il était de 25 % de 2.000.000 € pour la société Cristallerie de Montbronn, le préjudice subi par cette dernière pouvait être évalué à la somme de 300.000 € ; que rien ne justifiait en revanche qu’il était porté à une somme supérieure (arrêt, p.8) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la Sa Cristal de Pais prétendait avoir subi des actes de concurrence déloyale de la part de la Sarl Cristallerie de Montbronn qui se prévalait de la qualité de « fabricant français » et précisait que ces produits étaient réalisés « exclusivement à la main », alors même qu’elle sous traiterait sa décoration à l’or fin ; que cependant la Sarl Cristallerie de Montbronn, bien que qualifiée de « EPV » (entreprise du Patrimoine Vivant) ne faisait pas usage du label « Made in France » au contraire de la Sa Cristal de Paris qui le faisait à tort ; que la Sarl Cristallerie de Montbronn vendait très majoritairement du cristal qu’elle ne s’était jamais cachée d’importer à l’état brut mais dont elle justifiait, sans être démentie, assurer elle-même tant la taille que le polissage ; que peu importait qu’elle en sous-traite la décoration à l’or, celle-ci étant assurée à la main chez son sous-traitant : que le tribunal débouterait la Sa Cristal de Paris de ce chef (jugement, p. 7);

ALORS, DE PREMIERE PART, QU’est irrecevable à agir en concurrence déloyale pour pratique commerciale trompeuse, faute d’intérêt légitime, l’entreprise elle-même auteur de telles pratiques ; que la concurrence déloyale pour pratique commerciale trompeuse constitue un quasi-délit pouvant exister sans élément intentionnel ; qu’en refusant de retenir l’existence de pratiques trompeuses imputables à la société Cristallerie de Montbronn, rendant irrecevable son action en concurrence déloyale, par la considération que les termes par lesquels cette société revendiquait mensongèrement une fabrication française de ses produits auraient été « maladroits », cependant que, même involontaires ou résultant d’une imprudence, ces propos étaient de nature à constituer une faute, la cour d’appel a violé l’article 31 du code de procédure civile ;

ALORS, DE DEUXIÈME PART ET EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QUE n’est pas réparable le préjudice consistant en la lésion d’un intérêt illicite ; qu’est infondée, en conséquence, à solliciter la réparation de prétendus préjudices nés de pratiques déloyales trompeuses, faute de pouvoir se prévaloir de la lésion d’un intérêt licite, l’entreprise elle-même auteur de telles pratiques ; que la concurrence déloyale pour pratique commerciale trompeuse constitue un quasi-délit pouvant exister sans élément intentionnel ; qu’en refusant de retenir l’existence de pratiques trompeuses imputables à la société Cristallerie de Montbronn et rendant irrecevable son action, par la considération que les termes par lesquels cette société revendiquait mensongèrement une fabrication française de ses produits auraient été « maladroits », cependant que, même involontaires ou résultant d’une imprudence, ces propos étaient de nature à constituer une faute et à rendre illicite le prétendu préjudice dont la société Cristallerie de Montbronn prétendait obtenir réparation par son action en justice, la cour d’appel a violé les articles 1382 et 1383 du code civil, devenus 1240 et 1241 du même code, et l’article L. 121-1, devenu L. 121-2 du code de la consommation ;

ALORS, DE TROISIÈME PART, QU’une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service ; qu’il en résulte que l’existence d’une telle pratique ne saurait être appréciée en la personne de son auteur et doit être appréciée au regard de sa seule incidence sur la décision commerciale du consommateur moyen ; qu’en se fondant sur les considérations sus-rappelées, prises du caractère prétendument maladroit des propos tenus par la société Cristallerie de Montbronn, pour écarter l’existence d’une pratique déloyale de cette dernière, quand l’existence de cette pratique ne pouvait être appréciée qu’au seul regard de l’incidence de ces propos sur la décision commerciale du consommateur, la cour d’appel a de plus fort violé les articles 1382 et 1383 du code civil, devenus 1240 et 1241 du même code, l’article L. 121-1, devenu L. 121-2 du code de la consommation, ensemble l’article L. 121-1 nouveau du même code ;

ALORS, DE QUATRIÈME PART, QU’en se fondant, pour écarter tout comportement fautif imputable à la société Cristallerie de Montbronn consistant en une tromperie du consommateur sur l’origine française de la fabrication de ses produits, sur la considération que « nonobstant les termes maladroits de l’assignation du 27 février 2014 ou ceux retranscrits par un journaliste de l’Express », aucun modèle ni même aucun document « émanant » de cette société ne comportait une mention Made in France et que les termes « Origine France Garantie » figurant dans un catalogue ou sur des sites étaient « extérieurs » à cette entreprise, sans rechercher, comme elle y avait pourtant été invitée par la société Cristal de Paris dans ses écritures, si une tromperie sur l’origine des produits n’était pas néanmoins imputable directement à la société Cristallerie de Montbronn dès lors qu’elle avait volontairement choisi de distribuer ses produits sur des sites dédiés aux produits « fabriqués en France » ou affichant le label « Origine France garantie », sites dont elle avait accepté qu’ils la présentent comme une entreprise fabriquant ses produits en France (pp. 19 à 21 et p.27), qu’elle accompagnait l’ensemble de ses produits d’un certificat faisant référence à une fabrication française (p.18), que le dirigeant de la société Cristallerie de Montbronn était administrateur de l’association ayant édité le catalogue présentant ses produits comme des produits « 100% made in France » (p. 26), que lui-même, dans les interviews qu’il donnait, revendiquait l’origine française de ses produits (p. 27) et que, plus généralement, une recherche sur les moteurs de recherches sur Internet montrait que la société Cristallerie de Montbronn avait fait diffuser des présentations comportant de nombreuses références ou allusions à une fabrication artisanale en France (ibid), la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

ALORS, DE CINQUIEME PART, QU’en retenant que « la certification d’un geste authentique et précieux des maîtres verriers français » n’était pas trompeuse dès lors qu’il était « acquis » que la société Cristallerie de Montbronn « taill[ait], poli[ssait] et fai[sait] décorer les objets de verrerie bruts qu’elle ach[etait] à l’étranger », sans rechercher, comme l’y avait invitée l’exposante, si l’usage de l’appellation de « maître verrier » – dont il n’était pas contesté qu’il fabrique lui-même le verre et le cristal par opposition au maître tailleur -, associé à l’image d’une tour Eiffel et à la référence à la « fabrication » des pièces, sur les certificats accompagnant l’ensemble des produits de la Cristallerie de Montbronn, n’était pas susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur, en créant dans son esprit la croyance qu’il achetait un produit fabriqué en France, et non un produit fabriqué à l’étranger, taillé et poli en France et décoré à l’étranger, la cour d’appel a de plus fort privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt confirmatif attaqué D’AVOIR condamné la société Cristal de Paris à verser à la société Cristallerie de Montbronn la somme de 300.000 euros au titre de la réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale par pratique commerciale trompeuse et tromperie ;

AUX MOTIFS PROPRES QU’en ce qui concerne les pratiques commerciales trompeuses sur la composition des produits, les catalogues janvier 2010, 2010-2011 et septembre 2011 de la société Cristal de Paris étaient publiés sous la dénomination Cristal de Paris ; que les deux derniers comportaient en page introductive un texte en cinq langues dont le français : « En réunissant sous sa bannière les pièces en cristal soufflé bouche et taillé main et les grands classiques indémodables, Cristal de Paris, haut lieu du verre taillé en Lorraine, décline désormais l’éventail complet en cristal de table et de la décoration (…) » ; que les pages de ces catalogues (89 pour le premier, 81 pour le deuxième, 77 pour le troisième) présentaient les photographies de l’ensemble des produits ainsi commercialisés, regroupés par thèmes et modèles ; que, sans que la société appelante le dénie dans ses conclusions, il résultait des recherches effectuées auprès des fournisseurs de la société Cristal de Paris que les produits émanant de la société Still Glass, présentés notamment en pages 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12 et 13 du catalogue septembre 2011, étaient en verre ; que les produits Rcr, présentés notamment en pages 16, 17, 18, 20, 54 et 58 du catalogue janvier 2010, étaient principalement en luxion ; que les produits de la société Rona étaient en cristallin ; que les bouchons de la société South Port Glass étaient en verre ; que les cendriers, bougeoirs et flacons de parfum de la société Pujiang n’étaient pas en cristal ; qu’ainsi, il était établi, sans que la société Cristal de Paris le conteste, qu’une grande partie des produits présentés dans ses catalogues, plus de 40% selon la société intimée, n’étaient pas en cristal mais en verre, luxion ou cristallin ; qu’alors, d’une part, que la dénomination et le texte introductif de ces catalogues indiquaient que les produits qui y étaient présentés étaient en cristal, d’autre part, qu’aucune mention ne permettait de savoir qu’une partie d’entre eux étaient en verre, luxion ou cristallin, les pratiques commerciales trompeuses sur la composition des produits étaient ainsi suffisamment établies ; qu’il était précisé, de première part, que la circonstance qu’un produit photographié à l’occasion du constat d’huissier du 11 décembre 2013 comportait une étiquette comportant la mention « verre véritable soufflé bouche » n’enlevait pas le caractère trompeur des catalogues ; de seconde part, que rien ne justifiait que ceux-ci auraient été exclusivement destinés à des professionnels, lesquels, au demeurant, auraient eux aussi dû être exactement informés sur la composition des produits vendus afin de pouvoir en éclairer utilement les consommateurs finaux ; qu’en ce qui concernait les pratiques commerciales trompeuses sur l’origine et les qualités substantielles des produits, il ressortait du constat d’huissier pratiqué le 3 avril 2013 qu’à cette date, la recherche sur Google des termes Cristal de Paris conduisait notamment au lien « Cristal de Paris, le savoir faire ''Made in France'' » ; que le clic sur ce lien conduisait à une page, sous le logo Cristal de Paris, comportant le titre Cristal de Paris, le Savoir Faire ''Made in France'', avec le même texte que ci-dessus examiné pour les catalogues : « En réunissant sous sa bannière les pièces en cristal soufflé bouche et taillé main et les grands classiques indémodables, Cristal de Paris, haut lieu du verre taillé en Lorraine, décline désormais l’éventail complet en cristal de table et de la décoration [ ;] Spécialiste de la taille et de la décoration, Cristal de Paris emploie plus de 20 salariés, réalise plus de 5 millions d’euros de chiffre d’affaires et exporte 40 % de sa production vers le moyen orient, la Russie et l’Asie [ ;] Sa spécialité, la verrerie couleur, soufflée bouche et taillée main, a permis à la marque, fondée en 1970 par Q… M…, de se faire un nom dans le monde très select de la cristallerie [ ;] L’acquisition en 2001 de la dernière ligne de polissage, la grande qualité de ses tailleurs et le rachat en 2000 du nom commercial, Cristalleries de Lorraine – qui appartenait à Lalique – ont propulsé Cristal de Paris dans la cour des grands » ; que cependant, sans que l’appelante l’ai dénié non plus dans ses conclusions, il ressortait des recherches effectuées auprès de ses fournisseurs, que la société roumaine Still Glass, la société slovaque Rona, la société Rcr italienne, la société chinoise Pujiang et la société polonaise Zawiercie ne fabriquaient que des produits finis, c’est-à-dire taillés et polissés ; qu’à juste titre, le tribunal avait ajouté que cette analyse était corroborée (i), par les seulement 6 mois/homme de travail de taille constaté en 2013 au sein de la Sa Cristal de Paris et (ii) par la faible quantité d’achat d’acide nécessaire au polissage comparée à celle achetée par la Sarl Cristallerie de Montbronn, soit près de 15 fois moins d’acide consommé pour un chiffre d’affaires 2,6 fois supérieur, alors que l’éventuelle différence de procédé de polissage entre les deux sociétés ne pouvait en aucun cas expliquer une telle différence ; qu’il avait encore exactement observé que la Sa Cristal de Paris importait la totalité de son cristal, n’ayant aucun four à sa disposition dans son atelier ; qu’ainsi, en laissant accroire sur son site internet et dans ses catalogues qu’elle avait un savoir faire « Made in France », que réunissant sous sa bannière les pièces cristal soufflé bouche et taillé main, elle était un « haut lieu du verre taillé en Lorraine », alors que les produits qu’elle commercialisait étaient achetés, pour une grande part, finis à l’étranger, sans aucune plus value de sa part, la société Cristal de Paris a encore accompli des pratiques commerciales trompeuses sur l’origine et les qualités substantielles de ces produits ; qu’il importait peu, au regard des éléments qui précédaient et qui étaient suffisants, d’une part, que les initiales M. F., figurant sur la marque semi-figurative qu’elle possédait depuis le juin 1987, seraient les initiales du fondateur, Q… M…, et ne signifieraient pas Made In France, d’autre part, que trois produits saisis portant l’apposition des mots France et Made in France auraient pu prétendre, pour ce qui les concernait, au marquage de l’origine France ; que ces pratiques commerciales, de nature à tromper le consommateur moyen sur la composition en cristal et la fabrication en France de produits qui étaient en réalité pour une grande partie en cristallin, verre ou luxion, et achetés finis à l’étranger, étaient à l’évidence susceptibles d’altérer de manière substantielle son comportement (arrêt, pp. 7 et 8) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU’à partir de l’ensemble des pièces remises au tribunal, catalogues, saisies de page Internet, constats d’huissier, il n’était pas contestable que la société Cristal de Paris présentait l’ensemble de ses produits sans faire la distinction entre les produits en cristal et ceux en cristallin, verre ou luxion, de qualités bien inférieures ; que la société Cristal de Paris se présentait sur son site Internet avec la mention « Cristal de Paris, le savoir-faire ''Made in France'' » et la présence d’un logo « Sélection – M. F. – Cristal de Paris », M. F. signifiant « Made in France » ; que nulle part n’était mentionnée sur ses catalogues la nature réelle des produits vendus (cristal, cristallin, verre ou luxion) mais que, au contraire, le titre du catalogue était Cristal de Paris avec parfois l’apposition du logo précité en page de couverture (cf. pièce 10 demandeur) ; que lors du constat d’huissier du 11 décembre 2013 la société Cristal de Paris avait remis quelques factures de fournisseurs, et non pas l’ensemble des factures des articles importés depuis un an comme prévu par l’ordonnance rendue sur requête ; qu’au vu des factures remises et des échanges d’e-mails entre lesdits fournisseurs et la société Cristallerie de Montbronn (pièces 17, 18, 21, 23, 24, 25, 31, 35, 36 et 37), il était avéré que la quasi totalité des produits mentionnés avait été livrée en produits finis, c’est-à-dire taillés et polissés ; que cette analyse était corroborée (i) par les seulement 6 mois/homme de travail de taille constatés en 2013 au sein de la société Cristal de Paris et (ii) par la faible qualité d’achat d’acide nécessaire au polissage, comparée à celle achetée par la société Cristallerie de Montbronn, soit près de 15 fois moins d’acide consommé pour un chiffre d’affaires 2,6 mois supérieur ; que l’éventuelle différence de procédé de polissage entre les deux sociétés ne pouvait en aucun cas expliquer une telle différence ; qu’il était attesté, au vu des éléments rapportés par le même constat d’huissier du 11 décembre 2013, qu’une part significative de la production de la société Cristal de Paris était importée et vendue telle quelle sans aucune valeur ajoutée ; qu’en conséquence, pour cette part significative (et sans doute même majoritaire), l’apposition du label « Made in France » était totalement usurpée ; qu’il n’était pas contesté que la société Cristal de Paris importait la totalité de son cristal, n’ayant aucun four à sa disposition dans son atelier ; que le tribunal constatait donc (i) que l’usage du label « Made in France » par la société Cristal de Paris était trompeur, (ii) que la présentation sans distinction des matières de l’ensemble de ses produits sous l’appellation « Cristal de Paris »

était également de nature à tromper le consommateur et (iii) que l’ensemble des mentions figurant sur son site Internet (« savoir-faire Made in France », « spécialisée de la taille », « haut lieu du verre taillé » et « grande technicité de ses produits ») était inapproprié et tout aussi trompeur ; que la société Cristallerie de Montbronn, bien que qualifiée de « Epv » (entreprise du patrimoine vivant) ne faisait pas usage du label « Made in France » au contraire de la société Cristal de Paris qui le faisait à tort (jugement, pp. 5 à 7) ;

ALORS, DE PREMIÈRE PART, QU’après avoir relevé l’existence d’un certain nombre de pratiques prétendument imputables à la société Cristal de Paris, la cour d’appel s’est bornée à la pure et simple affirmation de ce qu’elles seraient « à l’évidence » susceptibles d’altérer de manière substantielle le comportement d’un consommateur et s’est abstenue de rechercher, de manière effective et concrète, cependant qu’elle y avait été expressément invitée par cette société (conclusions, p. 37, in limine, pp. 38 à 42 et 48 à 50), en quoi ces éléments altéraient ou étaient de nature à altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 121-1, devenu L. 121-2, du code de la consommation, ensemble les article 1382 et 1383, devenus 1240 et 1241 du code civil ;

ALORS, DE DEUXIÈME PART, QU’en retenant l’existence de pratiques commerciales trompeuses sur la composition des produits, prises de ce que la société Cristal de Paris aurait indiqué, sur la page introductive de ses catalogues, que ses produits étaient en cristal et n’aurait pas indiqué qu’une partie d’entre eux étaient en verre, luxion ou cristallin, cependant que l’arrêt avait lui-même relevé que la société Cristal de Paris se présentait, dans ce propos introductif, comme un « haut lieu du verre taillé en Lorraine » et qu’en outre, un huissier avait relevé la présence d’une « étiquette comportant la mention verre véritable soufflé », tous éléments dont il résultait que la société Cristal de Paris n’affirmait pas que tous ses produits étaient en cristal et indiquait, au contraire, que ses produits pouvaient être fait d’autres matières, telles que le verre soufflé, de sorte qu’aucune faute ne pouvait lui être imputée à cet égard, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

ALORS, DE TROISIÈME PART, QU’en retenant l’existence de pratiques commerciales trompeuses sur l’origine des produits, prises de ce que la société Cristal de Paris aurait fait, à tort, usage du label « Made in France » et qu’elle aurait « laiss[é] accroire sur son site internet et dans ses catalogues qu’elle avait un savoir-faire 'Made in France’ », sans répondre aux écritures (pp.38 à 40, not.) par lesquelles cette société avait soutenu qu’aucune pratique déloyale ne pouvait à cet égard lui être imputée, les termes visés se rapportant au savoir-faire de ses ouvriers et non au pays d’origine de ses produits, et la société Cristallerie de Montbronn n’ayant pas relevé un quelconque produit qui aurait été marqué « France » ou « made in France » et dont l’origine française n’aurait pas été justifiée, la cour d’appel a méconnu l’article 455 du code de procédure civile.

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt confirmatif attaqué D’AVOIR condamné cette société à verser à la société Cristallerie de Montbronn la somme de 300.000 euros au titre de la réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale par pratique commerciale trompeuse et tromperie ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le préjudice, il était manifeste qu’en trompant le consommateur sur la composition, l’origine et les qualités substantielles des produits vendus, la société Cristal de Paris s’était assuré un avantage concurrentiel au préjudice de la société Cristallerie de Montbronn ; qu’à juste titre le tribunal avait pris en considération le fait qu’en achetant ses produits à l’étranger pour une taille représentant 10 % de son chiffre d’affaires de 5.000.000 €, alors qu’il était de 25 % de 2.000.000 € pour la société Cristallerie de Montbronn, le préjudice subi par cette dernière pouvait être évalué à la somme de 300.000 € ; que rien ne justifiait en revanche qu’il soit porté à une somme supérieure (arrêt, pp. 7 à 9) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l’article 1382 [devenu 1240] du code civil disposait que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » ; que la société Cristallerie de Montbronn demandait que la société Cristal de Paris soit condamnée à lui verser euros de dommages et intérêts ; que s’il y avait acte de concurrence déloyale, générateur d’un trouble commercial, il y avait nécessairement un préjudice qui devait être réparé ; qu’il n’était pas contesté que les deux sociétés étaient directement concurrentes entre elles, dans un marché restreint où existaient quatre autres opérateurs mais de plus grande taille et notoriété, à savoir Baccarat, Saint-Louis, Lalique et Daum ; que ces agissements commerciaux trompeurs portaient préjudice directement à la société Cristallerie de Montbronn qui employait huit tailleurs là où la société Cristal de Paris en employait que deux pour l’équivalent d’un mi-temps ; que la tromperie sur la taille « made in France » permettait à la société Cristal de Paris d’avoir des prix de revient beaucoup plus bas que ceux de la société Cristallerie de Montbronn ; que, selon les éléments économiques portés à la connaissance du tribunal, la société Cristallerie de Montbronn justifiait pour l’année 2013 d’une part de l’emploi de huit tailleurs à temps plein et de leurs couts annuels et d’autre part de l’existence au mieux de l’emploi d’un tailleur pour 6 mois chez la société Cristal de Paris ; qu’en l’absence d’informations avérées pour les années 2011 et 2012, il apparaissait que la somme de 300.000 euros était de nature à compenser la différence de prix de revient entre les deux sociétés ; que le tribunal condamnerait la société Cristal de Paris à verser à la société Cristallerie de Montbronn la somme de 300.000 euros au titre de l’indemnisation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale par pratique commerciale trompeuse et tromperie, déboutant pour le surplus (jugement, pp. 5 à 7) ;

ALORS QUE la réparation du préjudice doit correspondre à ce dernier, sans qu’il puisse en résulter ni perte ni profit pour la victime, et ne saurait être fixée en considération du profit ou de l’économie réalisé par l’auteur du dommage ; que, pour évaluer l’indemnisation du préjudice qui aurait été subi par la société Cristallerie de Montbronn, la cour d’appel s’est bornée à relever que cette société employait huit tailleurs là où la société Cristal de Paris n’en employait que deux pour l’équivalent d’un mi-temps et à affirmer que la tromperie qui aurait été réalisée par la société Cristal de Paris lui aurait ainsi permis d’avoir des prix de revient beaucoup plus bas que ceux de la société Cristallerie de Montbronn ; qu’en prenant ainsi en considération la seule différence de prix de revient entre les deux sociétés, et donc la seule économie qui aurait été réalisée par l’auteur de la prétendue pratique illicite aux lieu et place de l’éventuel préjudice subi par la prétendue victime, seul élément dont la loi autorisait la prise en compte, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil, devenu l’article 1240 du même code, ensemble le principe susvisé.

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Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 février 2020, 17-31.614, Publié au bulletin