Cour de cassation, Chambre sociale, 16 septembre 2020, 19-15.370, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 19-15.370
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-15.370
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Metz, 18 décembre 2017
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000042372228
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:SO00692
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

CF

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 16 septembre 2020

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 692 F-D

Pourvoi n° Z 19-15.370

Aide juridictionnelle totale en demande

au profit de M. O….

Admission du bureau d’aide juridictionnelle

près la Cour de cassation

en date du 14 février 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 SEPTEMBRE 2020

M. H… O…, domicilié […] , a formé le pourvoi n° Z 19-15.370 contre l’arrêt rendu le 19 décembre 2017 par la cour d’appel de Metz (chambre sociale, section 2), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société […], société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,

2°/ à Pôle emploi de Moselle, dont le siège est […] ,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations de Me Carbonnier, avocat de M. O…, de la SCP Ortscheidt, avocat de la société […], après débats en l’audience publique du 16 juin 2020 où étaient présentes Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, Mme Richard, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Metz, 19 décembre 2017), M. O… a été engagé en février 2002 par la société […] en qualité d’aide-maçon et licencié pour faute grave le 9 avril 2014.

2. Le salarié a saisi la juridiction prud’homale de demandes au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

3. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande tendant à la condamnation de l’employeur à lui payer une somme au titre des retenues, alors « qu’il appartient à l’employeur qui se prétend libéré de justifier du paiement ou du fait ayant provoqué l’extinction de l’obligation, notamment par la production de pièces comptables ; que, pour écarter la demande du salarié en paiement de retenues indûment effectuées par l’employeur, la cour d’appel a considéré qu’il lui appartenait ''de justifier que ces retenues

auraient été effectuées à tort, donc du fait qu’il n’aurait pas touché ces montants'' ; qu’en statuant ainsi, alors qu’il n’appartient pas au salarié d’établir que l’employeur a effectué des retenues injustifiées, mais à l’employeur que les retenues opérées étaient justifiées, la cour d’appel a violé les articles 1353 du code civil et L. 3243-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. La cour d’appel a constaté que la somme réclamée au titre des retenues avait donné lieu à déduction du salaire car prise en charge par la caisse de congés payés du bâtiment de la Moselle.

6. L’employeur affilié à la caisse de congés payés du bâtiment n’étant pas personnellement redevable du paiement des indemnités de congés payés, le moyen est dès lors inopérant.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. O… aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour M. O…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR dit le licenciement pour faute grave de M. H… O… était bien fondé et de l’avoir débouté de ses demandes en versement d’indemnités,

AUX MOTIFS QUE "La lettre de licenciement de M. O… en date du 9 avril 2014, qui fixe les limites du litige, énonce que : « Après réflexion, nous avons le regret de vous notifier votre licenciement pour faute grave et pour les motifs suivants : abandon de poste. En effet. le vendredi 21 mars 2014 vers 11h30, en arrivant sur votre chantier, nous avons pu constater que vous aviez quitté votre poste sans autorisation et sans en avoir avisé voire hiérarchie. Vous avez déjà fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire de trois jours pour un fait similaire survenu le 19 juin 2013 La gravité de la faute que vous avez commise vous prive de vos droits légaux et conventionnels à préavis et indemnité de licenciement. Votre contrat de travail prend fin à la présentation de cette lettre. »

Cette lettre ayant retenu la faute grave, la Cour rappelle que lorsque l’employeur invoque une faute grave du salarié pour prononcer un licenciement avec effet immédiat, il lui incombe d’apporter la preuve des griefs avancés dans les termes énoncés par la lettre de licenciement, à charge ensuite pour le juge d’apprécier le caractère réel et sérieux de ces griefs et de rechercher s’ils constituaient une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail importance telle qu’elle rendait impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Pour justifier de l’abandon de poste de M. O…, l’appelante avait produit en première instance un document manuscrit daté du 4 avril 2014 et signé par M. V… Q… D…, lequel avait été écarté des débats par le conseil de prud’hommes car il ne s’agissait pas d’une attestation en bonne et due forme. L’appelante produit désormais une telle attestation, conforme à l’article 202 du code de procédure civile, rédigée par M. V… le 16 septembre 2017 et assortie de la photocopie de sa carte nationale d’identité, laquelle reprend en grande partie les termes de l’écrit précédent. M. V… témoigne en l’occurrence que le 21 mars 2014 il était sur le chantier du restaurant universitaire de Metz pour […] avec H… et D… T…, où ils réalisaient des terrassements pour les massifs en béton, qu’il avait oublié d’acheter une baguette de pain le matin avant d’arriver chez […] et qu’il a demandé à D… H… de le conduire avec le camion pour acheter cette baguette, qu’il était environ 11 h 30 et qu’ils sont partis laissant D… T… en train de finir de coffrer, qu’ils sont revenus sur le chantier avant midi et qu’D… T… leur a dit que M. J… (qui est le dirigeant de l’entreprise […]) était passé sur le chantier en leur absence. Ce témoignage est clair et précis et il caractérise bien l’abandon de poste reproché au salarié, de surcroît intervenu pour un motif futile, l’achat de pain, qui pouvait à l’évidence attendre la pause méridienne. M, O…, qui ne contestait initialement dans ses écrits que la recevabilité de la première pièce sans se prononcer sur son contenu, ne discute toujours pas la véracité des faits rapportés par le témoin, mais fait valoir une différence d’écriture entre les deux documents et le fait que M. V… est toujours salarié, donc subordonné de la société […], outre que, à considérer le fait d’avoir quitté le chantier comme une faute, il n’est pas justifié que M. V… qui en a été à l’origine n’ait pas également été sanctionné. La Cour constate qu’il existe effectivement une différence d’écriture entre le premier document daté du 4 avril 201 4 et l’attestation du 16 septembre 2017, mais sur le premier ligure aussi en bas de page, après la relation des faits qui commence par soussigné Mr V… D… », la mention en majuscules du nom de cette personne « V… Q… D… », apposée d’une écriture colTe.sponda111 en l’occurrence à celle du scripteur de la récente attestation. ce qui indique que M. V… n’a apparemment fait que signer le document initial après y avoir ajouté son nom, mais a rempli seul de sa main et en entier l’attestation ultérieure, dont aucun motif sérieux ne permet de douter de l’authenticité, le témoin ayant en l’occurrence apposé la mention, qui doit obligatoirement l’être de sa main, de la peine encourue au cas où l’attestation ferait état de faits matériellement inexacts. Il est au surplus constaté que tant le document d’avril 2014 que l’attestation récente portent la même signature, qui est aussi en tous points conforme à celle figurant sur le document d’identité joint par M. V…. S’agissant d’un éventuel lien de subordination, M. V… a mentionné sur son attestation qu’il avait un lien avec les parties, en l’occurrence il a marqué « intérim », mais s’il est certain qu’il travaillait en 2014 aux côtés de M. Q… H… et de M. Q… T… pour le compte de l’appelante, l’entreprise […] produisant son contrat de mise à disposition par Inter-Conseil Intérim pour la période du janvier au 31 mars 2014, il n’est pas avéré qu’il était toujours intérimaire pour cette société en septembre 2017. Par ailleurs, M. V… n’était pas le salarié de la société […], mais celui de la société d’intérim, qui disposait seule du pouvoir disciplinaire à son encontre, de sorte qu’il ne peut être reproché à l’appelante une différence de traitement pour ne pas avoir sanctionné aussi ce dernier. Le caractère réel de l’abandon de poste reproché à M. O… ne souffre dès lors d’aucune discussion, aucun permettant d’écarter l’attestation de M. V…. Il est précisé que si l’intimé produit deux attestations d’anciens collègues de travail qui indiquent qu’il aurait été d’usage chez […] de quitter les chantiers 15 à 20 minutes avant midi ou avant 16 h pour vider les déchets à la déchetterie, il n’existe aucun élément pour prouver que tel aurait été l’objet de son départ le 21 mars 2014 avec le camion de l’entreprise et M. V… seul, l’autre ouvrier ayant continué à travailler sur le chantier, cc départ étant d’ailleurs intervenu bien avant ce laps de temps de 15 20 minutes puisque l’abandon de poste a été constaté à 11h30. Cet abandon de poste constituait aussi un motif sérieux de licenciement puisque M. O… a quitté le chantier en cours alors que sa matinée de travail n’était pas achevée, pour un motif dont il ne peut rejeter la faute sur M. V… car il pouvait parfaitement refuser de lui rendre le service strictement personnel que celui-ci avait demandé. Par ailleurs, l’entreprise […], qui pratiquait comme horaires au vu du contrat de M. V… 7h30 -12 h et 13h – 1 6 h, avait émis en juin 2012 une note de service à l’attention de tout le personnel appelant, sous peine de sanctions, au respect des horaires de travail, à faire assurer par les chefs de chantier ou les chefs d’équipe, cette note, qui précisait que le temps de travail effectif était décompté hors trajet et hors temps d’habillage ct de déshabillage, relevant que tous les jours du personnel arrivait au dépôt à 7 1150 euros ct ne pouvait être à 8h au travail sur son chantier ou que plusieurs camionnettes étaient déjà garées au dépôt à 1 6h05 ce qui ne pouvait correspondre à un arrêt de travail à 16 h sur les chantiers. Il est enfin constant que M. O… avait déjà fait l’objet le 5 juillet 2013, pour des faits constatés le 19 juin 2013, d’une mise à pied disciplinaire de 3 jours, non contestée par lui, pour un refus de tâche et pour non-respect des horaires de travail, le courrier qui lui annonçait cette sanction ayant précisé « vous arrêtez le travail avant midi et quittez le chantier à 15h40, soit 20 minutes avant la fin de voire horaire de travail« . En considération de cette sanction pour des faits quasi identiques, qui avait valeur pour le salarié d’un sérieux rappel à l’ordre. la Cour estime que l’abandon de poste réitéré de M O… était un manquement suffisamment grave à une obligation première de son contrat de travail, le respect du temps de travail, pour justifier la rupture a effet immédiat de ce contrat. Le jugement entrepris sera dès lors infirmé et il sera dit que le licenciement de M. O… pour faute grave était justifié. M. O… sera en conséquence débouté de toutes ses prétentions en lien avec ce licenciement » (arrêt, p. 3 à 5),

1°) ALORS QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ;

Qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que l’employeur a reproché au salarié, maçon puis conducteur d’engins, ayant 15 ans d’ancienneté, d’avoir quitté le chantier avant la pause méridienne pour acheter une baguette à la demande d’un autre salarié (qui, au demeurant, établira par la suite une attestation à charge contre lui dans le cadre de la procédure de licenciement, vraisemblablement à la demande de l’employeur) ;

Qu’en retenant que la sanction de mise à pied disciplinaire de 3 jours pour des faits de même nature avait valeur de rappel à l’ordre et que, dès lors, « l’abandon de poste » était un manquement suffisamment grave pour justifier la rupture de préavis et d’indemnités, alors même qu’elle a qualifié ce motif de « futile » , ce qui n’était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l’entreprise, la cour d’appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°) ALORS QUE le juge doit répondre à l’ensemble des moyens qui lui sont soumis, à peine de nullité de la décision qu’il prononce ;

Qu’en l’espèce, le salarié faisait valoir dans ses écritures d’appel, expressément reprises oralement, que « M. O… a continué de travailler durant la période de procédure de licenciement, aucune mise à pied ne lui étant notifiée. Il est bien évident que si la faute reprochée à M. O… était d’une telle gravité, l’employeur en aurait immédiatement tiré les conséquences » (p. 3, § 3 et 4) ;

Qu’en ne répondant pas à ce moyen péremptoire soutenu par le salarié, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR débouté M. H… O… de sa demande tendant à la condamnation de la société […] à lui payer une somme de 4 173,67 euros au titre des retenues,

AUX MOTIFS QUE "S’agissant de la demande au titre des retenues, que M. O… n’a pas non plus contestées au cours de la relation contractuelle, il s’agit de montants ayant donné lieu à déduction du salaire car pris en charge par la Caisse de Congés Payés du Bâtiment de la Moselle à laquelle la SAS […] indique être affiliée. Il appartient à M O… qui agit en restitution de justifier que ces retenues auraient été effectuées à tort. donc du fait qu’il n’aurait pas touché ces montants, or il n’apporte aucun élément en ce sens et n’a pas appelé la Caisse en question à la cause. Il sera donc aussi débouté de cette demande" (arrêt, p. 6),

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « aucun élément ne vient conforter cette demande » (jugement, p. 8),

ALORS QU’il appartient à l’employeur qui se prétend libéré de justifier du paiement ou du fait ayant provoqué l’extinction de l’obligation, notamment par la production de pièces comptables ;

Que, pour écarter la demande du salarié en paiement de retenues indument effectuées par l’employeur, la cour d’appel a considéré qu’il lui appartenait « de justifier que ces retenues auraient été effectuées à tort, donc du fait qu’il n’aurait pas touché ces montants » ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il n’appartient pas au salarié d’établir que l’employeur a effectué des retenues injustifiées, mais à l’employeur que les retenues opérées étaient justifiées, la cour d’appel a violé les articles 1353 du code civil et L. 3243-3 du code du travail.

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