CJCE, n° C-77/95, Arrêt de la Cour, Bruna-Alessandra Züchner contre Handelskrankenkasse (Ersatzkasse) Bremen, 7 novembre 1996

  • Population active au sens de l' article 2 de la directive·
  • Champ d' application personnel de la directive 79/7·
  • Cee/ce - politique sociale * politique sociale·
  • Communauté européenne·
  • Politique sociale·
  • Exclusion·
  • Population active·
  • Directive·
  • Activité non rémunérée·
  • Gouvernement

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 7 nov. 1996, Züchner, C-77/95
Numéro(s) : C-77/95
Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 7 novembre 1996. # Bruna-Alessandra Züchner contre Handelskrankenkasse (Ersatzkasse) Bremen. # Demande de décision préjudicielle: Hanseatisches Oberlandesgericht in Bremen - Allemagne. # Egalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale - Directive 79/7/CEE - Population active. # Affaire C-77/95.
Date de dépôt : 15 mars 1995
Précédents jurisprudentiels : arrêt du 11 juillet 1991, Johnson, C-31/90, Rec. p. I-3723
Nolte, C-317/93, Rec. p. I-4625
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 61995CJ0077
Identifiant européen : ECLI:EU:C:1996:425
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Sur les parties

Texte intégral

Avis juridique important

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61995J0077

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 7 novembre 1996. – Bruna-Alessandra Züchner contre Handelskrankenkasse (Ersatzkasse) Bremen. – Demande de décision préjudicielle: Oberlandesgericht Bremen – Allemagne. – Egalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale – Directive 79/7/CEE – Population active. – Affaire C-77/95.


Recueil de jurisprudence 1996 page I-05689


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


Politique sociale ° Égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale ° Champ d’ application personnel de la directive 79/7 ° Population active au sens de l’ article 2 de la directive ° Personne exerçant une activité non rémunérée consistant à s’ occuper de son conjoint handicapé mais n’ ayant ni abandonné une activité professionnelle ni interrompu la recherche d’ un emploi ° Exclusion

(Directive du Conseil 79/7, art. 2)

Sommaire


L’ article 2 de la directive 79/7, relative à la mise en oeuvre progressive du principe de l’ égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale, qui définit le champ d’ application personnel de la directive par référence à la population active, doit être interprété en ce sens qu’ il ne vise pas une personne qui exerce une activité non rémunérée consistant à s’ occuper de son conjoint handicapé, quelles que soient l’ importance de cette activité et la compétence requise pour l’ exercer, dès lors que ladite personne n’ a, pour ce faire, ni abandonné une activité professionnelle ni interrompu la recherche d’ un emploi.

En effet, une interprétation qui inclurait dans la notion de population active le membre d’ une famille qui exerce au profit d’ un autre membre de celle-ci une activité qui ne donne pas lieu, en contrepartie, au versement d’ une forme quelconque de rémunération, aux motifs que cette activité requiert une certaine compétence, a une certaine nature ou ampleur ou encore devrait être assurée par un tiers contre rémunération, si le membre de la famille ne le faisait pas, aurait pour effet d’ étendre le champ d’ application de la directive de façon illimitée, alors que l’ article 2 a précisément pour vocation de le délimiter.

Parties


Dans l’ affaire C-77/95,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l’ article 177 du traité CE, par le Hanseatisches Oberlandesgericht in Bremen (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Bruna-Alessandra Zuechner

et

Handelskrankenkasse (Ersatzkasse) Bremen,

une décision à titre préjudiciel sur l’ interprétation de la directive 79/7/CEE du Conseil, du 19 décembre 1978, relative à la mise en oeuvre progressive du principe de l’ égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale (JO 1979, L 6, p. 24), et des principes de droit communautaire régissant la responsabilité de la puissance publique,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de MM. L. Sevón, président de chambre, faisant fonction de président de la cinquième chambre (rapporteur), C. Gulmann, D. A. O. Edward, J.-P. Puissochet et P. Jann, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: M. H. A. Ruehl, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

° pour Mme Zuechner, par M. Gerhard Zuechner, son conjoint,

° pour la Handelskrankenkasse (Ersatzkasse) Bremen, par Me Werner Schmalenberg, avocat à Brême,

° pour le gouvernement allemand, par MM. Ernst Roeder, Ministerialrat au ministère fédéral de l’ Économie, et Bernd Kloke, Oberregierungsrat au même ministère, en qualité d’ agents,

° pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme Lindsey Nicoll, du Treasury Solicitor’ s Department, en qualité d’ agent, assistée de Mme Dinah Rose, barrister,

° pour la Commission des Communautés européennes, par Mme Marie Wolfcarius, membre du service juridique, et M. Horstpeter Kreppel, fonctionnaire national détaché auprès de ce service, en qualité d’ agents, assistés de Me Klaus Bertelsmann, avocat à Hambourg,

vu le rapport d’ audience,

ayant entendu les observations orales de Mme Zuechner, représentée par M. Gerhard Zuechner, de la Handelskrankenkasse (Ersatzkasse) Bremen, représentée par Me Wolfgang Liening, avocat à Brême, du gouvernement allemand, représenté par M. Bernd Kloke, du gouvernement du Royaume-Uni, représenté par Mme Dinah Rose, et de la Commission, représentée par Mme Marie Wolfcarius et M. Peter Hillenkamp, conseiller juridique, en qualité d’ agents, assistés de Mme Ursula Rust, professeur à l’ université de Brême, à l’ audience du 4 juillet 1996,

ayant entendu l’ avocat général en ses conclusions à l’ audience du 11 juillet 1996,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


1 Par ordonnance du 14 février 1995, parvenue à la Cour le 15 mars suivant, le Hanseatisches Oberlandesgericht in Bremen a posé, en vertu de l’ article 177 du traité CE, cinq questions préjudicielles visant à l’ interprétation de la directive 79/7/CEE du Conseil, du 19 décembre 1978, relative à la mise en oeuvre progressive du principe de l’ égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale (JO 1979, L 6, p. 24, ci-après la « directive »), et des principes de droit communautaire régissant la responsabilité de la puissance publique.

2 Ces questions ont été posées dans le cadre d’ une procédure d’ assistance judiciaire introduite par Mme Zuechner contre la caisse d’ assurance maladie de son conjoint en raison du refus de celle-ci de l’ indemniser pour les soins thérapeutiques qu’ elle dispense à ce dernier.

3 Il ressort du dossier de l’ affaire au principal que M. Zuechner, qui exerçait auparavant une activité professionnelle, est devenu paraplégique à la suite d’ un accident. Son état requiert l’ assistance d’ une tierce personne, tant pour les soins à visée thérapeutique que pour les soins généraux et l’ aide à domicile au sens du Sozialgesetzbuch V (SGB V – livre V du code social allemand). Son épouse assure l’ ensemble de ces soins.

4 La caisse d’ assurance maladie de M. Zuechner intervient financièrement pour les soins généraux et l’ aide à domicile. En revanche, s’ agissant des soins à visée thérapeutique, elle oppose l’ article 37, paragraphe 3, du Sozialgesetzbuch V, aux termes duquel: « Les soins à domicile ne sont dus que si l’ assistance et l’ aide nécessaires ne peuvent être fournies par une tierce personne vivant sous le même toit que le malade. »

5 Mme Zuechner estime que cette disposition est contraire à la directive. Compte tenu de son indigence, elle a sollicité du Landgericht Bremen une assistance judiciaire, en vue d’ introduire ensuite une action en dommages et intérêts contre la caisse d’ assurance maladie. Cette demande a été rejetée par décision du 20 janvier 1994, contre laquelle Mme Zuechner a interjeté appel devant l’ Oberlandesgericht in Bremen. Par une première ordonnance du 30 juin 1994, l’ Oberlandesgericht, sans se prononcer sur l’ appartenance de la demanderesse au principal à la « population active » au sens de la directive, a considéré que la disposition légale n’ était pas discriminatoire. Le recours envisagé ne présentant pas de chances suffisantes de succès, l’ une des conditions de l’ octroi de l’ assistance judiciaire n’ était pas remplie, en sorte que l’ Oberlandesgericht a rejeté l’ appel.

6 A la suite de l’ introduction d’ une requête gracieuse, l’ Oberlandesgericht a annulé son ordonnance du 30 juin 1994 et, par une nouvelle ordonnance du 14 février 1995, a posé à la Cour de justice les questions suivantes, qui doivent lui permettre de juger si le recours envisagé par Mme Zuechner présente des chances suffisantes de succès:

« 1) La demanderesse fait-elle, en sa qualité d’ épouse d’ un assuré ayant besoin de soins, partie de la population active au sens de l’ article 2 de la directive?

2) La demanderesse subit-elle, en sa qualité de femme, une discrimination au sens de la directive du fait de l’ article 37, paragraphe 3, du SGB V, malgré l’ absence de référence au sexe dans cette disposition?

3) La demanderesse, qui n’ est pas assurée auprès de la défenderesse, peut-elle faire valoir des droits directs ou ces droits sont-ils réservés à son époux, en sa qualité d’ assuré?

4) La défenderesse est-elle elle-même responsable, en sa qualité d’ organisme de l’ État (caisse de substitution ° Ersatzkasse) ou bien, à défaut, qui assume cette responsabilité?

5) Le droit communautaire connaît-il une responsabilité de la puissance publique indépendante de toute faute ou la responsabilité de la puissance publique ne peut-elle découler que des dispositions combinées de l’ article 839 du BGB (code civil allemand) et de l’ article 34 de la GG (loi fondamentale)?"

7 Par sa première question, l’ Oberlandesgericht demande si la notion de population active au sens de l’ article 2 de la directive doit être interprétée en ce sens qu’ elle comprendrait une personne telle la demanderesse au principal, en sa qualité d’ épouse d’ un assuré ayant besoin de soins. La juridiction de renvoi précise le contexte de sa question en exposant que, à son avis, Mme Zuechner ne fait pas partie de la population active au sens de l’ article 2 de la directive, mais qu’ une interprétation plus large est envisageable, étant donné que la demanderesse au principal apporte à son époux handicapé des soins nettement plus étendus que ceux normalement dispensés dans le cadre du mariage.

8 Selon l’ article 2, la directive s’ applique « à la population active, y compris les travailleurs indépendants, les travailleurs dont l’ activité est interrompue par une maladie, un accident ou un chômage involontaire et les personnes à la recherche d’ un emploi, ainsi qu’ aux travailleurs retraités et aux travailleurs invalides ».

9 Tant dans ses observations écrites que dans ses déclarations lors de l’ audience, la demanderesse au principal ne conteste pas qu’ elle n’ exerçait pas d’ activité professionnelle au moment où son mari a été accidenté. Elle affirme toutefois qu’ elle fait partie de la population active au sens de l’ article 2 de la directive dès lors qu’ elle dispense des soins pour la pratique desquels elle a dû recevoir une formation, soins qui, par leur nature et leur ampleur, sont assimilables à une activité professionnelle et qui, s’ ils n’ étaient pas dispensés par elle, devraient l’ être soit par une personne soignante contre rémunération, soit dans un établissement hospitalier. La Commission soutient cette argumentation.

10 La défenderesse au principal ainsi que les gouvernements allemand et du Royaume-Uni estiment en revanche que Mme Zuechner ne fait pas partie de la population active au sens de la directive, puisqu’ elle n’ exerçait aucune activité professionnelle antérieure aux soins. Par ailleurs, selon le gouvernement du Royaume-Uni, il ne serait pas possible d’ inclure une personne soignante dans la population active au sens de la directive en raison uniquement de l’ étendue des soins dispensés.

11 A cet égard, il y a lieu de rappeler que la notion de population active au sens de l’ article 2 de la directive est très large et inclut les personnes qui travaillent, qui sont à la recherche d’ un emploi, ou dont le travail ou la recherche d’ un emploi a été interrompu par l’ un des risques visés à l’ article 3 de la directive. La Cour a d’ ailleurs jugé qu’ une personne fait toujours partie de la population active même lorsque c’ est dans le chef d’ un ascendant que l’ un des risques visés à l’ article 3 est survenu, la contraignant à interrompre son activité professionnelle (arrêt du 24 juin 1986, Drake, 150/85, Rec. p. 1995), lorsque le risque survient pendant une période de recherche d’ emploi suivant immédiatement une période d’ inactivité professionnelle (arrêt du 11 juillet 1991, Johnson, C-31/90, Rec. p. I-3723), ou encore lorsque l’ emploi occupé est considéré comme mineur parce qu’ il comporte moins de quinze heures de travail par semaine et un salaire ne dépassant pas un septième du salaire mensuel moyen (arrêts du 14 décembre 1995, Nolte, C-317/93, Rec. p. I-4625, et Megner et Scheffel, C-444/93, Rec. p. I-4741).

12 En revanche, la directive ne s’ applique pas à des personnes qui n’ exercent pas d’ activité, qui ne sont pas à la recherche d’ un emploi, ni à des personnes dont l’ activité ou la recherche d’ un emploi n’ a pas été interrompue par l’ un des risques visés à l’ article 3 de la directive (voir arrêts du 27 juin 1989, Achterberg-te Riele e.a., 48/88, 106/88 et 107/88, Rec. p. 1963, point 13, et Johnson, précité, point 20). La Cour a ainsi jugé qu’ une personne qui a quitté son activité professionnelle pour s’ occuper de l’ éducation de ses enfants n’ entre pas dans le champ d’ application de la directive (arrêt Johnson, précité, point 19).

13 Il résulte de ces considérations que la notion d’ « activité » à laquelle fait référence l’ expression « population active » à l’ article 2 de la directive ne peut être entendue que comme visant à tout le moins une activité économique, c’ est-à-dire une activité exercée en contrepartie du versement d’ une rémunération au sens large.

14 En effet, il y a lieu de reconnaître qu’ une personne peut être tenue de recourir aux prestations d’ un tiers lorsqu’ elle n’ est pas ou plus à même d’ accomplir elle-même une certaine activité, qu’ il s’ agisse de l’ éducation des enfants, des travaux domestiques, de la gestion de ses biens privés ou encore des simples gestes de la vie quotidienne. De telles activités requièrent pour la plupart une certaine compétence, sont d’ une certaine ampleur et doivent être assurées par un tiers contre rémunération si une autre personne, membre de la famille ou non, ne s’ en charge pas à titre bénévole.

15 Il s’ ensuit qu’ une interprétation visant à inclure dans la notion de population active le membre d’ une famille qui exerce une activité sans contrepartie au profit d’ un autre membre de la famille aux motifs que cette activité requiert une certaine compétence, a une certaine nature ou ampleur ou encore devrait être assurée par un tiers contre rémunération si le membre de la famille ne le faisait pas aurait pour effet d’ étendre le champ d’ application de la directive de façon illimitée, alors que l’ article 2 a précisément pour vocation de le délimiter.

16 Il y a donc lieu de répondre à la première question que l’ article 2 de la directive doit être interprété en ce sens qu’ il ne vise pas une personne qui exerce une activité non rémunérée consistant à s’ occuper de son conjoint handicapé, quelles que soient l’ importance de cette activité et la compétence requise pour l’ exercer, dès lors que ladite personne n’ a, pour ce faire, ni abandonné une activité professionnelle ni interrompu la recherche d’ un emploi.

17 Compte tenu de la réponse donnée à la première question, il n’ est pas nécessaire de répondre aux autres questions posées par la juridiction de renvoi.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

18 Les frais exposés par les gouvernements allemand et du Royaume-Uni, ainsi que par la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l’ objet d’ un remboursement. La procédure revêtant, à l’ égard des parties au principal, le caractère d’ un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre)

statuant sur la première question à elle soumise par le Hanseatisches Oberlandesgericht in Bremen, par ordonnance du 14 février 1995, dit pour droit:

L’ article 2 de la directive 79/7/CEE du Conseil, du 19 décembre 1978, relative à la mise en oeuvre progressive du principe de l’ égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale, doit être interprété en ce sens qu’ il ne vise pas une personne qui exerce une activité non rémunérée consistant à s’ occuper de son conjoint handicapé, quelles que soient l’ importance de cette activité et la compétence requise pour l’ exercer, dès lors que ladite personne n’ a, pour ce faire, ni abandonné une activité professionnelle ni interrompu la recherche d’ un emploi.

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