Conseil de prud'hommes de Martigues, 26 avril 2019, n° 18/00168

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Chronologie de l’affaire

Commentaires2

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Me Elisabeth Graeve · consultation.avocat.fr · 8 avril 2021

Le barème « MACRON » issue de l'ordonnance du 22 septembre 2017 est destiné à sécuriser les employeurs et à limiter, par un plafond lié à l'ancienneté du salarié et à la taille de l'entreprise, le montant des dommages et intérêts accordés par les juges en cas de licenciement jugé sans cause ou abusif. Ce barème MACRON fait encore polémique depuis son instauration, il y a un peu plus de 3 ans. Mesure phare de la réforme du droit du travail de 2017, il divise avocats, juges et universitaires. Le nouvel article L. 1235-3 L'ordonnance MACRON n°2017-1387 du 22 septembre 2017 a mis en …

 

Actance Avocats

Sophie Rey et Clarisse Perrin, avocates associée et collaboratrice du cabinet, reviennent sur l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris le 16 mars 2021 écartant l'application du "Barème Macron". Par un arrêt du 16 mars 2021, la 11ème chambre de la Cour d'appel de PARIS a écarté l'application du « Barème Macron » en raison de« la situation concrète et particulière » de la salariée concernée par le litige qui lui était soumis. Elle revenait ainsi sur la position qu'elle avait adoptée par une décision du 30 octobre 2019 (rendue par sa huitième Chambre). Sophie Rey et Clarisse Perrin, …

 
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Sur la décision

Référence :
Cons. prud’h. Martigues, 26 avr. 2019, n° 18/00168
Juridiction : Conseil de prud'hommes de Martigues
Numéro(s) : 18/00168

Sur les parties

Texte intégral

***

CONSEIL DE PRUD’HOMMES RÉPUBLIQUE FRANÇAISE 25 DE MARTIGUES AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS PALAIS DE JUSTICE

[…]

13500 MARTIGUES JUGEMENT cph-martigues@justice.fr

Rendu le 26 avril 2019 N° RG F 18/00168 N° Portalis

DCTN-X-B7C-YIO
Madame

SECTION Activités diverses

Assistée de Me Nathalie BRUCHÉ (Avocat au barreau de MARSEILLE) AFFAIRE

DEMANDEUR

contre

SAS MEDICA FRANCE – KORIAN LES ALCID ES SAS MEDICA FRANCE-[…]

13250 SAINT-CHAMAS Madame L Z (directrice d’établissement), comparante

MINUTE N° 19/00377 Assistée de Me Vanessa DIDIER (Avocat au barreau d’AIX EN PROVENCE) substituant Me F-FERRE (Avocat au barreau de MARSEILLÉ) JUGEMENT DU

26 avril 2019

Qualification : DEFENDEUR Contradictoire premier ressort

- Composition du bureau de jugement lors des débats Notification le ::07/05/2019 et du délibéré :

Monsieur Philippe BEDHOMME, Président Conseiller (S) Madame Sandrine GRIMA, Assesseur Conseiller (S) Monsieur Charbel ADDAD, Assesseur Conseiller (E) Monsieur Marc TERPANT, Assesseur Conseiller (E) Assistés lors des débats de Madame Marlyse PIGNON, Greffier Expédition revêtue de a formule exécutoire lélivrée PROCÉDURE

e:07/05/2019,

- date de la réception de l’acte de saisine: 08 mars 2018

• Me BRUCH convocation devant le bureau de conciliation du défendeur lettre 1: recommandée avec accusé de réception et lettre simple adressée au par demandeur le 26 mars 2018. EXPEDITION COMPORTANT

[…]

- accusé de réception signé le 27 mars 2018

EXPEDITION CERTIFIEE

- bureau de conciliation du 17 avril 2018. CONFORME

POUR NOTIFICATION A l’issue de cette audience il a été constaté qu’aucune conciliation n’était Le directeur de greffe possible et que le conseil n’a pas pris de mesures provisoires sur le fondement de l’article R 1454-14 du Code du Travail.

Un calendrier de procédure a été soumis aux parties qui l’ont validé par émargement sur un bulletin qui leur a été remis et dont un exemplaire a été ES DE conservé au dossier. L’affaire a été renvoyée à l’audience de conciliation pour mise en état.

4/2016

bureau de conciliation pour mise en état du 30 octobre 20 18. SARASE renvoi devant le bureau de jugement du 21 janvier 2019, avec ordonnance PURCHE

RE de clôture différée au 11 janvier 2019, ordonnance transmise par mails aux PU BLIQUE F avocats le 30 octobre 2018 et par lettre simple aux parties le 31 octobre 2018.

- débats à l’audience publique du 21 janvier 2019, où les parties ont comparu tel qu’indiqué ci-dessus.

- prononcé du jugement par mise à disposition au greffe le 26 avril 2019 par Monsieur Philippe BEDHOMME, Président (S) et Madame Marlyse PIGNON, Greffier, en application de l’article 453 du Code de Procédure Civile.

[…]



P . WE

DEMANDES EN DERNIER ETAT

- DIRE le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

- DIRE ET JUGER que le montant maimal d’indemnisation prévu par l’article L. 1235-3 du Code du Travail en raison de son inconvetnionnalité, ce plafonnement, violant les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne, les article 4 et 10 de la convention 158 de l’OIT et le droit au procès équitable

CONDAMNER La SAS MEDICA France à verser à Madame les sommes de :

10 798.5 €uros à titre d’indemnité légale de licenciement

*****

5326 €uros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

532.6 €uros au titre des congés payés afférents

.95 000 €uros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

15 000 €uros à titre de dommages intérêts distincts pour

.

rupture vexatoire

Remboursement POLE EMPLOI – article L. 1235-4 du code du travail

. Exécution provisoire

. Article 700 du code de procédure civile : 1 600 euros

- Entiers dépens

Demande(s) reconventionnelle(s)

- Article 700 du Code de Procédure Civile

Page 2

SHEREKE A

2 000,00 €

Bog


24

LES FAITS:

Madani a été embauchée par la SA MEDICA FRANCE, au foyer de vie pour adultes cérébro lésés LES ALCIDES, en qualité d’Aide soignante de nuit diplômée, filière soignante position I coefficient 190, niveau employé qualifié, selon un contrat à durée indéterminée à temps plein le 06 mars 2003 à effet au 12 mars suivant.

Elle recevait une rémunération mensuelle brute de 1217,90 e uros pour 151,67 heures.

La relation contractuelle est régie par les dispositions de la Conventi on Collective nationale de l’hospitalisation privée du 18 avril 2002.

Au dernier état de la relation contractuelle, A occupait le même emploi de nuit, position 1, coefficient 218 et recevait une rémunération mensuelle brute de base de 1716 euros auquel s’ajoutent diverses primes et indemnités.

En 2015, la SA MEDICA FRANCE intégrait le groupo KORIAN.

Le 10 septembre 2015, par courrier, était convoquée à un entretien préalable le 17/09/2015, pour une éventuelle sanction disciplinaire.

Le 21 septembre 2015, par lettre simple et lettre recommandée avec accusé de réception, Madame X

Y, Directrice du Foyer Les Alcides, lui notifiait une mise à pied disciplinaire.

Le 21/06/2016, bénéficiait de l’entretien annuel de la performance collabora teur et entretien professionnel, ainsi que le 30 janvier 2017.

Le 24 octobre 2017, par lettre remise en main propre contre décharge, Madame Z, Directrice du foyer LES ALCIDES, convoquait Madame à un entretien préalable prévu le 03 novembre 2017, pour une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement.

Madame C 'est rendue à l’entretien assistée de Madame E, Aide-soignante, déléguée suppléante qui a rédigé un compte-rendu joint au débat.

Le 20 novembre 2017, par lettre recommandée avec accusé de réception et lettre simple, Madame Z notifiait le licenciement de Madame pour faute grave.

S’estimant lésée dans ses droits, Madame a saisi le Conseil des Prud’hommes de Martigues, section Activités diverses, des demandes ci-dessus énumérées.

Les parties, comparantes en personne assistées de leur conseil, exposent les faits et versent aux débats leur conclusions écrites respectives, visées par le Greffier, conformément à l’article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile).

La cause débattue, l’affaire a été mise en délibéré et le jugement sera prononcé par mise à disposition au greffe le 26 avril 2019.

SUR QUOI LE CONSEIL

Vu les articles 1101, 1103, 1104, 1106, 1231-1, 1231-2, 1353 du Code C ivil, Vu l’article 4 à 9 du Code de Procédure civile;

1-SUR LE LICENCIEMENT :

Madame A conteste la faute grave et son licenciement qui lui a été notifié le 20 novembre 2017 par Madame Z, Directrice de l’établissement Les Alcides.

I-SUR LES MOTIFS DU LICENCIEMENT:

1-1-1-En droit :

L’employeur qui souhaite licencier un salarié doit respecter la procédure imposée par le Code du Travail. Celle ci comprend un entretien préalable suivi, quelques jours plus tard, d’un courrier de notification de licenciement adressé au salarié.

Page 3


20 ** **

Dans ce courrier de licenciement, l’employeur doit impérativement mentionner le ou les motifs qui justifient sa décision. Cette lettre fixe les limites du litige en matière de motifs de licenciement. Lesquels doivent être suffisamment précis et correspondre aux griefs évoqués au cours de l’entretien préalable de licenciement.

La faute grave quant à elle, est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié personnellement et qui constituent un ou des manquements à ses obligations contractuelles.

Le licenciement pour faute grave ne peut être justifié que s’il obéit à certaines conditions :

La cause est réelle et sérieuse. Le motif doit exister, être exact et conforme à la réalité. De plus, la cause doit être suffisamment sérieuse pour entraîner un licenciement.

Dans le cas d’un licenciement pour faute grave, elle doit présenter des caractéristiques bien précises : la faute est suffisamment importante pour rendre impossible le maintien du salarié à son poste le ou les faits doivent être imputables directement au salarié les circonstances dans lesquelles la faute a été commise sont suffisantes pour qualifier la faute de faute grave.

Ainsi, il incombe à l’employeur d’établir les faits sur lesquels il s’appuie pour justifier les motifs du licenciement.

1-1-2-Dans les faits :

Dans la lettre de licenciement l’employeur reproche à Madame" (pièce 4 de la demanderesse et pièce

4 de l’employeur) d’avoir « fait preuve d’un comportement brutal à l’égard de certains de nos résidents entrainant une prise en charge inadaptée des résidents »>.

L’employeur fait en premier lieu référence à un courrier qu’il a reçu de la part de Monsieur M C, tuteur de Madame N B, et qui est versé au débat. Monsun C informe la Directrice d’une modification du comportement de Madame B « qu’elle s’était refermée sur elle-même, voire prostrée » selon les termes de Monsieur C repris dans la lettre de licenciement. Madame Z ajoute « ce changement de comportement cette modification est lié à des agissements malveillants de votre part à l’encontre de Madame N B ». La résidente aurait déclaré « qu’un soir après avoir sonné à l’équipe de nuit, vous êtes entrée dans sa chambre avec énervement, que vous lui avez hurlé dessus et en lui parlant de très près vous avez dit « si tu n’es pas contente, la porte est ouverte ». De plus, elle a affirmé qu’ensuite vous lui avez retiré la sonnette des mains, éteint la lumière et le téléviseur et que vous êtes partie en claquant la porte de sa chambre.

La Directrice s’appuie aussi sur les déclarations de Madame O D, fille de Madame B, courrier versé au débat, qui trouve sa maman « dans un état second. Elle est très pâle, transpirante très agitée et la peur se lie sur son visage.

Madame D explique que sa maman est très excitée, a très très peur de vous et craint des représailles.

Outre votre manque de respect évident auprès de nos résidents, nous ne pouvons tolérer cette attitude qui représente un risque majeur pour leur santé et leur sécurité qui s’apparente à de la maltraitance.

Ce comportement est d’autant plus inacceptable que vous avez déjà fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire par courrier du 21 septembre 2015 pour des faits similaires …

Dès lors, il nous apparaît clairement que vous n’êtes pas en mesure d’assurer le bien-être physique et psychologique des résidents dont vous avez la charge…

Sur les faits invoqués dans la lettre de licenciement, l’employeur fait référence à l’article 1134 du Code Civil et L. 1222-1 du Code du Travail en ce que le contrat de travail doit être exécuté avec loyauté et de bonne foi par les parties, qu’en conséquence le salarié doit exécuter les fonctions et responsabilités pour lesquelles il a été embauché. Il s’appuie ainsi sur l’article 7 du règlement intérieur.

Pour justifier la faute grave et le licenciement, il fait aussi référence à diverses jurisprudences de la Cour de Cassation sociale, ainsi qu’à la Charte du patient hospitalisé annexée à la circulaire ministérielle n°95-22 du 6 mai 1995 qu’il verse au dossier en sa pièce 13.

Page 4


[…]

Pour sa défense, Madame

Lors de l’entretien préalable dont le compte rendu réalisé par Madame E est versé au débat, Madame ne reconnaît aucun des faits qui lui sont reprochés.

1-1-2-1-Sur le délai :

Elle fait valoir tout d’abord que l’employeur a pris le temps pour initier la procédure. Elle souligne qu’il a été informé de faits répréhensibles le 09 octobre 2017 mai que ce n’est que le 24 du mois qu’il a convoqué Madame

Sur ce point, la SA MEDICA France répond qu’elle a dû réaliser une enquête pour vérifier les faits et que pour établir la réalité de cette enquête, elle verse des attestations.

1-1-2-2-Sur l’absence de faute :

Concernant son attitudo vis-à-vis des patients, elle verse au débat différentes attestations qui témoignent de son comportement correct, ainsi que les évaluations annuelles réalisées par la direction. Elle fait remarquer que
Madame F qui témoigne en faveur de l’employeur est une aide-soignante de jour qui ne travaille pas avec elle alors que les autres salariés qui attestent font partie de l’équipe de nuit.

Concernant les faits litigieux en lien avec Madame
Madame précise que c’est une patiente âgée de 68 ans ayant eu une rupture d’anévrisme en 1987, atteinte d’hémiplégie et qu’elle a des troubles psychiatriques lourds l’amenant à d’importantes crises de hurlements et d’agitation. Elle souligne que le suivi de Madame est difficile pour l’ensemble du corps médical qui intervient.

Les différentes attestations citées ci-dessus témoignent aussi de cela.

Madame une procédure a été mise en place, et elleaffirme que lors des crises de Madame S verse les témoignages de Mesdames et qui confirment que la sonnette lui est retirée, que la porte est fermée pour la protéger des autres patients qui sont fatigués de ses hurlements. Cette procédure ne dure que quelques minutes le temps qu’elle se calme. est sereine actuellement et verse le témoignage deSur ce point, l’employeur répond que Madame Madame F.

Par ailleurs, Madame souligne le fait qu’il n’y a qu’elle qui a été sanctionnée alors que cette procédure est collective, appliquée par l’équipe de nuit qu’il y a de ce fait inégalité de traitement.

Elle fait ensuite valoir le manque de moyens tant matériel qu’humain, l’équipe de nuit n’est composée que de 5 personnes pour un centaine de résidents. Elle travaille donc dans des conditions qui ne favorisent pas la sérénité. Elle verse pour cela, le procès verbal de la réunion des Délégués du personnel de 2017 qui atteste de cette réalité.

Enfin, elle fait remarquer que pour justifier son licenciement, MEDICA FRANCE s’appuie aussi sur la sanction qu’elle lui a notifiée en septembre 2015 soit une antériorité supérieure à 2 ans aux faits actuels.

1-1-3-Pour le Consell d

1-1-3-1-Sur le délai critiqué :

Le Conseil constate que l’employeur a pris le temps pour initier la procédure sous le motif d’une enquête qu’il réalisait. C’est une attitude responsable cependant, en dehors d’une attestation il ne verse pas d’élément relatifs

à cette enquête ni de compte-rendu.

Le Conseil s’interroge donc sur la réalité de cette dernière.

Par ailleurs, sur le délais de mise en oeuvre de la procédure, la SA MEDICA FRANCE a respecté le délai de 2 mois qui est spécifié par l’ Article L. 1332-4 du Code du travail :

« Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales ».

Page 5



Mais en cas de faute grave, l’employeur doit engager la procédure de rupture du contrat de travail dans un délai restreint après avoir été informé des faits allégués. Le délai de 19 jour qui est critiqué par la demanderesse est pour le Conseil admissible.

1-1-3-2-Sur la gravité des faits fautifs :

La cause est réelle et sérieuse. Le motif doit exister, être exact et conforme à la réalité. De plus, la cause doit être suffisamment sérieuse pour entraîner un licenciement.

Dans le cas d’un licenciement pour faute grave, elle doit présenter des caractéristiques bien précises: la faute est suffisamment importante pour rendre impossible le maintien du salarié à son poste le ou les faits doivent être imputables directement au salarié.

Sur l’imputabilité des faits à Madame

La Direction s’appuie sur les courriers de l’ex-époux et de la fille de Madame A qui l’alerte d’une maltraitance à l’encontre d’un membre de leur famille. Mais il est de son devoir vérifier la réalité des faits accusateurs.

Elle a affirmé avoir réalisé une enquête mais en dehors d’une attestation il n’y a aucun élément qui démontre la réalité de cette enquête.

C’est la demanderesse qui confirme qu’il existe une procédure mise en place lorsque Madame G en crise. Les différentes attestations témoignent que cette procédure est ponctuelle, qu’elle est appliquée par tout les membres de l’équipe de nuit et spécifiquement par Madame qui a nié les faits lors de l’entretien préalable.

Le courrier du 12-11-2017 de Madame H à Madame Z (pièce 14 de la demanderesse) ainsi que son attestation (pièce 15) a retenu l’attention du Conseil. Elle confirme l’existence de cette procédure qu’elle détaille.

Le Conseil constate aussi que les faits reprochés ne sont pas datés et qu’il n’y a pas de témoin direct.

Madame a été agressive verbalement, a retiré la sonnette,Aucun élément ne permet d’établir que fermé la porte.

Par ailleurs, les différentes attestations ainsi que les évaluations annuelles réalisées par la Direction démontrent que Madame G a un bon comportement envers les patients.

Le Conseil ne met pas en doute les dires de Madame S qui sont rapportés par son tuteur et ex-époux, Monsieur C , et sa fille. Ils ne font que leur devoir en rapportant ces dires et alerter la direction de

l’établissement afin qu’elle prenne des décisions.

Mais les attestations versées par la demanderesse démontrent que Madame I est sujette à des troubles psychiatriques importants qui peuvent affecter ses différentes capacités. La Direction n’apporte pas d’élément qui en démontrerait le contraire.

Ainsi la conviction du Conseil n’est pas formée quant à la responsabilité des faits reprochés à Madame

Il ne s’agit donc ni de faits précis, ni de faits directement imputables à Madame

Le Conseil considère donc que la cause réelle et sérieuse n’est pas établie et que par voie de conséquence la faute grave ne l’est pas non plus.

Il dira que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

- SUR LES DEMANDES INDEMNITAIRES :

1-1 Sur le salaire :

Madame J des demandes indemnitaires sur la base d’une rémunération mensuelle brute de 2663 euros. Elle justifie ce montant comme représentant la moyenne des 12 derniers mois. (31.956 € de septembre

2016 à octobre 2017).

Page 6


[…]

En réponse la SA MEDICA FRANCE fait remarquer que la moyenne des 12 derniers mois s’élève à 2.240,81 € et non 2663 €.

Le Conseil constate que Madame ne motive pas suffisamment sa demande.

Ayant repris les calculs, il retient le montant de 2.240,81 € comme salaire mensuel brut et base de calcul des indemnités à venir.

11-2-Sur l’inconventionnalité du plafond prévu par l’article L. 1235-3 du Code du Travail :

Madame fait valoir que le plafonnement d’indemnisation prévu dans l’article L. 1235-3 du Code du Travail viole les dispositions des article 24 de la Charte sociale européenne, 4 et 10 de la Convention 158 de l’OIT et le droit à un procès équitable.

Elle développe ainsi longuement son argumentaire qui s’appuie sur les textes internationaux pré cités et diverses arrêts de la Cour de Cassation qu’elle cite.

Elle ne met pas en doute la constitutionnalité de l’article L. 1235-3 du Code du Travail, mais elle appuie son argumentation sur la hiérarchie des normes soulignant qu’elle doit être respectée, en ce sens que les textes internationaux signée par la France ont une valeur supérieure aux textes français, rappelant l’article 55 de la Constitution Française et diverses jurisprudences.

Elle présente ensuite les textes internationaux qui disposent qu’un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse a droit à une indemnisation adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée, ce sont les articles 4 et 10 de la Convention n°158 de l’OIT et l’article 24 de la Charte sociale européenne du 03 mai

1996 qui a été ratifiée par la France le 07 mai 1999.

Elle ajoute les interprétations du Comité Européen des Droits Sociaux (CEDS) et l’avis du Conseil d’Etat du 10 février 2014, n°358992).

Enfin, elle fait aussi référence à la Loi Finlandaise qui a été pénalisée pour avoir instauré un tel plafonnement des indemnités.

En réponse, la SA MEDICA FRANCE soutient lors de l’audience que le Conseil d’Etat a reconnu la constitutionnalité du barème figurant dans le dit article et qu’il s’impose aux juges.

30448

Pour le Conseil :

Les dispositions de l’article L. 1235-3 du Code du Travail sont constitutionnelles et l’on doit s’y référer.

Cependant la France s’inscrit dans un ordre international, lequel est régi par un certain nombre de conventions et traités. Or, l’article 55 de la Constitution française dispose :

« Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois ».

NADALe Conseil d’Etat dans une décision de 2014 dit que les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne sont d’application directe devant les juridictions internes.

Avant le barème figurant dans l’article L. 1235-3 du Code du Travail, les dommages-intérêts alloués au salarié victime d’un licenciement sans cause étaient souverainement appréciés par le juge et n’étaient pas plafonnés.

Seule une limite plancher était fixée, les salariés ayant plus de 2 ans d’ancienneté dans une entreprise d’au moins 11 salariés avaient droit à un minimum de 6 mois de salaire.

Ce barème précisé dans l’article L. 1235-3 du Code du Travail, limite le montant de l’indemnisation du préjudice. Le salarié peut ainsi ne pas se voir indemniser de façon adéquate ou appropriée son propre préjudice alors que l’article 24 de la Charte Sociale Européenne du 3 mai 1996, ratifiée par la France le 7 mai 1999, rappelle le principe suivant :

< En vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties

s’engagent à reconnaître (…) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée. »>

89. Page 7



Les dispositions de l’article L. 1235-3 du Code du Travail qui plafonnent le montant de l’indemnisation ne permettent donc pas aux juges d’indemniser de façon adéquate ou appropriée les salariés victimes d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Ce plafonnement ne respecte pas le principe de l’indemnité adéquate et de la réparation appropriée édicté par la Convention 158 de l’OIT et par l’article 24 de la Charte Sociale Européenne.

Il ressort des arguments des parties que les dispositions de l’article L. 1235-3 du Code du Travail sont constitutionnelles mais non conventionnelles.

Le Conseil dira que le montant maximal d’indemnisation prévu par l’article L. 1235-3 du Code du Travail sera écarté en raison de son inconventionnalité, ce plafonnement violant les dispositions des articlés 24 de la Charte sociale européenne, 4et 10 de de la Convention 158 de l’OIT et le droit à un procès équitable.

-3-Sur l’indemnité légale de licenciement :

Madame demande une indemnité légale de licenciement d’un montant de 10.798, 50 euros plus favorable que l’indemnité de licenciement conventionnelle prévue à l’article 47 de la convention collective applicable, montant calculé sur la base d’un salaire brut mensuel de 2663 €.

MEDICA FRANCE réplique que l’indemnité légale de licenciement et plus favorable que l’indemnité de licenciement conventionnelle prévue à l’article 47 de la convention collective applicable mais qu’il faut la calculer sur la base d’un salaire brut de 2240,81€, soit une indemnité de 9067,79 €.

Le Conseil :

Comme la rupture du contrat de travail a été qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse, Madame a droit à une indemnité de licenciement.

Il a contrôlé ces calculs et condamnera la SAS MEDICA FRANCE à payer à Madame K la somme de 9.067,79 € à titre d’indemnité de licenciement.

II-4-Sur l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents :

Vu ce qui précède Madame! a droit à l’indemnité compensatrice de préavis ainsi qu’aux congés payés incidents.

En raison de son ancienneté de 14 années, elle devait bénéficier d’un préavis de 2 mois.

Le Conseil condamnera la SAS MEDICA FRANCE à payer à Madame K la somme de 4.481,62 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ainsi que 448,16 euros au titre des congés payés incidents.

11-5-Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Madame demande à ce titre une somme de 95.000 €.

Elle justifie ce montant par son ancienneté dans l’entreprise, 14 ans, les conditions de la rupture et son âge, qui ne constitue pas un avantage pour retrouver un emploi.

En réponse, l’employeur demande que si le licenciement est requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse, il convient de lui allouer l’indemnité légale de licenciement prévue par les dispositions de l’article L. 1235-3 du Code du Travail.

L’employeur estime ce montant trop élevé et fait remarquer que l’article 2, 2° de l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 a mis en place un barème d’indemnisation qui s’impose au juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il fait aussi remarquer que la demanderesse ne justifie d’aucun préjudice, et ni de sa situation actuelle.

Il demande que le conseil n’alloue que 3 mois de salaire au plus, en cas de condamnation.

Bog Page 8



Pour le Conseil :

Considérant que l’indemnisation du salarié est évaluée à la hauteur de son préjudice, le Conseil, pour attribuer une < indemnité adéquate » prévue par l’article 24 de la Charte sociale européenne, prenant en compte l’ancienneté de la demanderesse dans l’entreprise, 14 années pleines, son âge qui constitue une difficulté pour retrouver un emploi, le caractère vexatoire de la rupture condamnera la SAS MEDICA FRANCE à payer à Madame P Q la somme correspondant à 14 mois de salaire brut soit la somme de 31.371,34 € au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse:

+ + 11-6-Sur les dommages et intérêts pour rupture vexatoire :

Madame demande des dommages et intérêts pour rupture vexatoire d’un montant de 15.000 euros, distincts de ceux résultant de la perte de son emploi.

Pour justifier cette demande en terme de droit, elle s’appuie sur diverses jurisprudences qu’elle verse au débat.

Dans les faits, elle fait valoir qu’après 14 ans de travail au service des patients, son employeur l’a licenciée du jour au lendemain à la vue de ses collègues de travail laissant supposer qu’elle est l’auteure de faits répréhensibles d’une particulière gravité.

En réponse, MEDICA FRANCE fait remarquer qu’il ne peut y avoir de préjudice distinct que si l’employeur a eu un comportement fautif selon un arrêt de la Cour de Cassation Sociale du 13 mars 2012, n° 10-16802.

Dans les faits, il affirme que la demanderesse ne fait pas la démonstration d’une quelconque condition vexatoire de son licenciement, ni d’un préjudice distinct du licenciement.

MEDICA FRANCE fait remarquer qu’elle a simplement utilisé son pouvoir disciplinaire, qu’il n’y a donc rien d’humiliant ni de vexatoire.

Pour le Conseil :

Il retient le fait que la rupture est intervenue alors que l’employeur reconnaissait les qualités de son travail lors des entretiens d’évaluation et qu’il était informé des conditions de travail difficiles des équipes de nuit.

de sa demande mais condamnera la SAS MEDICA FRANCE à payer à Il fera droit à Madame la somme de 15.000 € au titre des dommages et intérêts pour rupture vexatoire de Madame son contrat de travail.

11-7- Sur le remboursement des allocations chômages :

Madame demande que les allocations chômages qu’elle perçoit soient remboursées par la SAS MEDICA FRANCE. Elle s’appuie sur l’article L. 1235-4 du Code du Travail pour justifier cette demande.

Le conseil la déboutera de cette demande.

III- Sur les dépens :

Jile, condamnera la SAS MEDICA Le Conseil ayant fait droit à l’une des prétentions de Madame

FRANCE aux entiers dépens de l’instance.

IV- Sur l’article 700 du Code de procédure civile:

L’article 700 du code de procédure civile dispose :

« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer : 1° A l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens;

89.

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2° Et, le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’alde juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s’il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l’Etat. »

Le Conseil ayant fait droit à Madame R S à l’une de ses prétentions, condamnera la SAS MEDICA FRANCE à payer à Madame T U la somme de 1.300 € à ce titre.

V-Sur l’exécution provisoire du jugement :

Le Conseil dira qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire du présent jugement sauf pour ce q ui est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le Conseil de Prud’hommes de Martigues, section Activités diverses, après en avoir délibéré conformément à la loi, par jugement rendu public par mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Dit et juge que le licenciement de Madame e est sans cause réelle et sérieuse.

Dit que le montant maximal d’indemnisation prévu par l’article L. 1235-3 du Code du Travail sera écarté en raison de son inconventionnalité, ce plafonnement violant les dispositions des articles 24 de la Charte sociale européenne, 4 et 10 de de la Convention 158 de l’OIT et le droit à un procès équitable.

Condamne la SAS MEDICA FRANCE à payer à Madame K les somme s de :

-9.067,79 € (neuf mille soixante sept euros et soixante dix neuf centimes) à titre d’indemnité légale de licenciement.

-4.481,62 € (quatre mille quatre cent quatre vingt un euros et soixante deux centimes) à titre de l’indemnité compensatrice de préavis.

-448,16 € (quatre cent quarante huit euros et seize centimes) au titre des congés pays afférents à l’indemnité compensatrice de préavis.

-31.371,34 € ( trente et un mille trois cent soixante et onze euros et trente quatre centimes) au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

-1.000 € (mille euros) à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive.

Condamne la SAS MEDICA FRANCE à payer à Madame e la somme de 1.300 € (mille trois cents euros) au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamne la SAS MEDICA FRANCE aux entiers dépens de l’instance.

Dit qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire du présent jugement sauf pour ce qui est de droit.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT, Marlyse PIGNON Philippe BEDHOMME.

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Conseil de prud'hommes de Martigues, 26 avril 2019, n° 18/00168