Tribunal administratif de Marseille, 2 juillet 2014, n° 1404496

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Marseille, 2 juill. 2014, n° 1404496
Juridiction : Tribunal administratif de Marseille
Numéro : 1404496
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 28 avril 2014

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE MARSEILLE

N°1404496

___________

SARL DAKAR ICE

___________

Mme X

Juge des référés

___________

Ordonnance du 2 juillet 2014

__________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le juge des référés Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2014 sous le n° 1404496, présentée pour la Sarl Dakar Ice, dont le siège est XXX, Sénégal, représentée par son gérant en exercice, par Me Pierchon ;

la société Dakar Ice demande au juge des référés sur le fondement des dispositions de l’article L 521-1 du code de justice administrative :

— d’ordonner la suspension des deux décisions de refus d’admission des marchandises ( lot 196/14 et lot 197/14) du 11 mars 2014, rendues par le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt et notifiées à la SA Y Z, et la suspension de la décision de refus de réexpédition rendue pour les deux lots ensemble le 6 mars 2014, par le même ministre, également notifiée à la SA Y Z, jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de ces décisions ;

— de mettre à la charge du Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt une somme de 2 500 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

La société Dakar Ice sise au Sénégal a confié à la SA Y Z la charge des formalités d’importation d’une cargaison de poisson congelé (espadon) ; à la suite d’un contrôle sanitaire renforcé mené en application des articles L 236-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, par le Poste d’inspection frontalier (PIF) de Fos sur Mer au laboratoire départemental d’analyses (LDA) des Bouches-du-Rhône sis à Château Gombert sur les prélèvements effectués le 21 février 2014 sur les lots F 196/14 et F 197/14, il s’est avéré que ces lots présentaient des teneurs en mercure de 1.2 et 1.6 mg/kg, alors que la dose maximale autorisée par le Règlement UE no 420/2011 est de 1 mg/kg , provoquant ainsi leur refus d’admission sur le territoire communautaire, et leur placement sous consigne vétérinaire, conformément à l’article L 236-9 du même code ; que suite à ces résultats datés du 28 février 2014, l’Etat du Sénégal a autorisé leur réadmission au Sénégal par courrier du 5 mars 2014 versé au dossier ; que toutefois par la première décision contestée du 6 mars 2014, cette réexpédition était refusée eu égard à la dangerosité actuelle et future des produits, alors que les deux décisions du 11 mars 2014 exigeaient, suite aux observations de la SA Y Z formulées en réponse à la pré-notification de refus d’importation adressée le 3 mars 2014, la destruction des lots avant le 11 mai 2014, conformément au Règlement UE n°882/2004 et à l’arrêté n°AGR 0000955A du 5 mai 2000 pris en application de la Directive n°97/78 toujours en vigueur ;

La société Dakar Ice soutient que l’urgence est constituée, du fait du dépassement du délai de stationnement, dont les frais s’élèvent fin mars à la somme de 70 364 euros, de la nécessité d’éviter une destruction des marchandises, du coût du stockage et de la perte économique engendrée, la marchandise ayant une valeur proche de 900 000 euros ; qu’elle a reçu un courrier de relance des services du ministre daté du 12 juin 2014, refusant tout nouveau sursis ;

Elle invoque ensuite un doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées, tenant à l’existence d’une erreur de droit en raison de l’application de l’arrêté du 5 mai 2000, contraire au règlement CEE n°882/2004 du 29 avril 2004, lequel prévoit la possibilité d’un retour des marchandises refusées si le pays d’origine l’autorise, ce qui est le cas en l’espèce, en raison du fait que l’administration française ne peut faire obstacle à la décision d’un pays tiers hors UE alors que la marchandise n’est pas encore entrée juridiquement sur le territoire français, et enfin car il doit être fait application du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats, prévu par la convention de Vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969 ;

La société Dakar Ice invoque également des erreurs manifestes dans les rapports d’analyse, erreurs sur l’espèce, confusion avec d’autres lots, qui dénaturent le processus de vérification censé garantir une parfaite traçabilité, et ne pouvaient être rectifiées a posteriori ;

La société soutient par ailleurs que la procédure suivie par les services du ministre n’est pas conforme à la notion de procédure équitable au sens de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, et enfin, qu’il y a erreur manifeste d’appréciation quant à la notion de dangerosité des marchandises, la notion de danger immédiat ne pouvant résulter du seul dépassement du taux de mercure admis au sein de la Communauté ;

Vu la requête numéro 1403345 enregistrée le 6 mai 2014 par laquelle la Sarl Dakar Ice demande l’annulation des décisions susvisées ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l’ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Marseille du 29 avril 2014 ;

Vu l’ordonnance du Conseil d’Etat du 21 mai 2014 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le règlement 178/2002 du 28 janvier 2002 du Parlement et du Conseil ;

Vu le règlement 854/2004 du 29 avril 2004 du Parlement et du Conseil ;

Vu le règlement 882/2004 du 29 avril 2004 du Parlement et du Conseil ;

Vu le règlement 1881/2006 du 19 décembre 2006 de la Commission ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu l’arrêté du 5 mai 2000 fixant les modalités des contrôles vétérinaires à l’importation des produits en provenance des pays tiers des ministres de l’agriculture et du budget ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 1er octobre 2013, par laquelle le président du tribunal a désigné Mme X, vice-président, pour statuer sur les demandes de référé ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :

1. Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (…) » et qu’aux termes de l’article L. 522-1 dudit code : « Le juge des référés statue au terme d’une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu’il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d’y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l’heure de l’audience publique (…) » ; que l’article L. 522-3 du même code dispose : « Lorsque la demande ne présente pas un caractère d’urgence ou lorsqu’il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu’elle est irrecevable ou qu’elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu’il y ait lieu d’appliquer les deux premiers alinéas de l’article L. 522-1 » ; qu’enfin aux termes du premier alinéa de l’article R. 522-1 dudit code : « La requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit (…) justifier de l’urgence de l’affaire » ; qu’en vertu de l’article L. 522-3 précité, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d’urgence n’est pas remplie ou lorsqu’il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu’elle est irrecevable ou qu’elle est mal fondée ;

2. Considérant que l’urgence s’apprécie à la date à laquelle le juge des référés se prononce, objectivement et en tenant compte de l’ensemble des circonstances de l’affaire, de la situation de la société requérante mais aussi de l’imminence des risques que la destruction des marchandises se propose de prévenir ; qu’il résulte de l’instruction que les délais de stationnement des lots d’espadon en chambre froide, et les frais concomitants, ne résultent que de la carence de la requérante à se conformer à l’application du droit commun, susceptible de conduire à la destruction de la marchandise si sa réexpédition est jugée impossible du fait du danger que présentent les produits, situation dont elle était avertie dès les 7 et 12 mars 2014 ; qu’elle n’a cependant présenté son premier recours que le 24 avril et son second recours que le 25 juin 2014, alors qu’elle avait reçu des services du ministre une lettre de relance du 12 juin 2014, lui signifiant l’imminence d’une destruction d’office à la suite d’un premier délai accordé le 13 mai jusqu’à la décision du Conseil d’Etat ; que, par suite, la requérante n’établit pas l’existence d’une situation d’urgence, qui ne résulte pas davantage de la nature et de la portée de la décision attaquée ; qu’il y a lieu de faire application de l’article L. 522-3 du code de justice administrative et de rejeter la requête ;

3. Considérant en tout état de cause qu’au soutien de sa demande de suspension de l’exécution des décisions litigieuses, la Sarl Dakar Ice se borne, pour conclure à l’existence d’un doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées, à présenter les moyens déjà soulevés lors de sa précédente requête en référé-liberté, dont l’ordonnance de rejet du juge des référés du tribunal de céans a été confirmée par une ordonnance du 21 mai 2014 du Conseil d’Etat, cette dernière précisant expressément que les erreurs de fait opposées sont sans incidence sur la légalité des décisions attaquées, que les teneurs en mercure décelées présentaient un danger suffisant pour ne pas interdire de prescrire la destruction des lots d’espadon en cause, que l’arrêté du 5 mai 2000 ne méconnaît pas le règlement 882/2004 du 29 avril 2004 quant à la possibilité de destruction de produits alimentaires dangereux pour la santé humaine, que les décisions attaquées n’imposent aucune obligation à l’Etat souverain du Sénégal, que la convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités n’a pas été ratifiée par la France, enfin que les décisions litigieuses n’entrent pas dans le champ de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ;

4. Considérant qu’en l’état de l’instruction aucun des moyens invoqués n’est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; que, par suite, les conclusions aux fins de suspension de l’exécution des décisions attaquées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu’il résulte des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée ; il peut, même d’office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation ;

6. Considérant que ces dispositions font obstacle aux conclusions de la Sarl Dakar Ice dirigées contre le Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, qui n’est pas, dans la présente instance de référé, la partie perdante ;

O R D O N N E

Article 1er : La requête de la Sarl Dakar Ice est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la Sarl Dakar Ice et au Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.

Fait à Marseille, le 2 juillet 2014.

Le juge des référés,

signé

A. X

La République mande et ordonne au ministre de l’agriculture de l’agroalimentaire et de la forêt en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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