Tribunal administratif de Strasbourg, 4 décembre 2014, n° 1102568

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Sur la décision

Référence :
TA Strasbourg, 4 déc. 2014, n° 1102568
Juridiction : Tribunal administratif de Strasbourg
Numéro : 1102568

Sur les parties

Texte intégral

ct

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE STRASBOURG

N° 1102568

___________

Société Etandex

___________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Mme Didiot

Rapporteuse

___________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

M. Rees

Rapporteur public

___________ Le Tribunal administratif de Strasbourg

Audience du 20 novembre 2014 (2e chambre)

Lecture du 4 décembre 2014

___________

C

39-04-01

Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2011, présentée pour la société Etandex, dont le siège est situé XXX à XXX, par Me Labetoule ; la société Etandex demande au tribunal :

— de constater le défaut de validité du marché relatif au « revêtement de sols en résine » attribué par le centre hospitalier intercommunal (CHI) de la Lauter à la société EGTS dans le cadre de la restructuration de sa cuisine centrale ;

— d’annuler ledit marché ;

— de condamner le CHI de la Lauter à verser à la société Etandex la somme de 19 771,25 € HT augmentée des intérêts au taux légal à compter de l’enregistrement de la présente requête, en réparation du préjudice subi du fait de son éviction irrégulière dudit marché ;

— de condamner le CHI de la Lauter à lui verser une somme de 4 000 € en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La requérante soutient :

— que le contrat est affecté de plusieurs irrégularités :

o que l’avis d’appel public à la concurrence est irrégulier ; que l’avis publié au BOAMP n’est pas conforme au modèle d’avis fixé par le règlement (CE) n°1654/2005 ; que le CHI de la Lauter a omis de renseigner les candidats sur les rubriques suivantes : cote NUTS du marché, soumission éventuelle du marché à l’accord sur les marchés publics, possibilité de présenter des variantes, quantité ou étendue globale du marché et des lot, recours à des options, durée du marché ou son délai d’exécution et des lots, renseignements d’ordre juridique, économique, financier et technique, limites concernant le nombre d’opérateurs invités à soumissionner ou à participer, réduction du nombre d’opérateurs durant la négociation ou le dialogue, informations relatives aux procédures de recours, que ces omissions constituent un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence ;

o que les critères de sélection des candidatures sont irréguliers ; que seuls les renseignements figurant à l’article 45 du code des marchés publics qui renvoie à l’article 1er de l’arrêté du 28 août 2006 peuvent être exigés des candidats ; qu’en l’espèce, l’article 3.1 du règlement de la consultation prévoyait la production de justificatifs ne figurant pas dans cette liste, à savoir la déclaration relative à la lutte contre le travail dissimilé, et une notice justifiant les différentes démarches environnementales générales prises par le candidat dans l’organisation d’un chantier ainsi que ses références à ce titre ;

o que les critères de sélection des offres sont irréguliers ; que les candidats n’ont pas reçu une information appropriée sur les conditions de mise en œuvre des critères de jugement des offres ; que le pouvoir adjudicateur n’a pas défini avec suffisamment de précisions les critères de sélection relatifs à la « valeur technique » et à la « performance méthodologique de l’offre », pondérés respectivement à hauteur de 35% et 30%, notamment par la mise en œuvre de sous-critères détaillés, pertinents et pondérés ; qu’il n’a pas distingué les composantes de ces deux critères, créant une confusion entre eux, aboutissant à un jugement des offres au regard d’un seul critère pondéré à hauteur de 65% ; que le pouvoir adjudicateur lui-même était ainsi dans l’impossibilité de sélectionner les offres selon une analyse minutieuse et parfaitement objective, méconnaissant ainsi ses obligations d’égalité de traitement des candidats et de transparence de la procédure ; qu’en outre, le critère de sélection relatif au « délai d’exécution du marché », pondéré à hauteur de 10%, est totalement inopérant, dès lors que ce dernier était fixé de manière irréversible dans l’acte d’engagement, l’article 5.1.1 du cahier des clauses administratives particulières et l’article 3.2 du règlement de la consultation ;

o que les étapes de la procédure de négociation n’ont pas été respectées, en méconnaissance de l’article 66 du code des marchés publics ; qu’il convient de distinguer la phase de sélection des candidatures et celle de jugement des offres ; que les documents de la consultation concernant la remise des offres ont été communiqués aux entreprises dès la phase de sélection des candidatures, ce qui a eu pour effet d’opérer une confusion entre ces deux phases ;

o que les candidats n’ont pas été informés des modalités de la négociation et qu’il n’y a pas eu de réelle négociation, en méconnaissance de l’article 66 V alinéa 3 du code des marchés publics ; que la négociation s’est déroulée dans l’opacité la plus totale ; qu’elle ne disposait d’aucune information sur ses modalités de mise en œuvre, à savoir sa durée, son étendue, ses conditions ; que la « pseudo » phase de négociation s’est résumée à l’envoi d’un courriel de la maîtrise d’œuvre demandant à la société sa meilleure proposition financière ; qu’aucune discussion n’a été engagée en vue de faire évoluer véritablement son offre ; que la maîtrise d’ouvrage n’a jamais engagé directement le moindre échange avec la requérante ; que surtout, la société Etandex n’a disposé que de deux jours pour établir une offre financièrement plus compétitive, ignorant qu’il s’agirait de son offre finale mettant un terme à la phase de négociation ; que si elle avait connu à l’avance les modalités exactes de la négociation, elle aurait pu présenter une offre initiale différente ;

o que la communication des motifs de rejet de l’offre est irrégulière , en méconnaissance de l’article 80.I.1° du code des marchés publics ; que le CHI ne l’a pas informée des motifs ayant conduit au rejet de son offre ; qu’en outre, aucune information n’ayant été publiée dans l’avis d’attribution quant à la date de conclusion du marché, il n’est pas possible de s’assurer que le délai de 16 jours a bien été respecté ;

o que le CHI ne lui a pas communiqué les motifs détaillés du rejet de son offre malgré sa demande, en méconnaissance de l’article 83 du code des marchés publics ; que le courrier du 30 septembre 2010 est insuffisant à cet égard ;

o que l’offre de la société EGTS, attributaire, est irrégulière ; qu’elle aurait dû être éliminée en vertu des articles 53.III et 35.I.1° du code des marchés publics ; qu’en l’espèce, les documents de la consultation imposaient au titulaire de mettre en œuvre des revêtements de sol adaptés à la destination des locaux en respectant un niveau de qualité minimum au sens du classement UPEC relatif aux cuisines collectives, en l’espèce le classement minimum U4P4sE3C2, conformément à l’article 1.1 du cahier des clauses techniques particulières ; que ledit classement est attribué dans le cadre d’un avis technique ; qu’en l’espèce, le revêtement de sol proposé par l’attributaire, à savoir le système « Sikagard – Sikafloor », ne satisfait pas aux exigences techniques contenues dans les documents de la consultation, ce qui est confirmé par l’avis technique rendu le 14 février 2011 par le centre scientifique et technique du bâtiment ; qu’il ne bénéficie pas du classement U4P4sE3C2, mais uniquement du classement U4P4E3C2, et que son emploi dans les cuisines collectives n’est pas visé ; que par ailleurs, la société EGTS a également choisi d’utiliser le système « Sikagard » pour réaliser « l’étanchéité résine sous-jacente », alors que ce système n’est pas davantage adapté aux locaux classés P4s, telle qu’une cuisine centrale ; que l’offre de l’attributaire aurait ainsi dû être rejetée au profit de celle de la société Etandex ;

o que la situation sociale et fiscale de la société EGTS est irrégulière ; que conformément à l’article 46 du code des marchés publics, lorsqu’elle ne peut justifier du respect de ses obligations sociales et fiscales dans le délai imparti, l’entreprise dont l’offre a été retenue se trouve « déclassée » au profit du candidat arrivé en deuxième position ; que la société EGTS ne peut en justifier compte tenu des privilèges inscrits sur ses comptes bancaires par le trésor public pour un montant de 18 000 € le 11 février 2008, et par l’URSSAF pour un montant de 25 133 € le 29 juillet 2010 ; qu’à défaut de ne pas signer le contrat avec cette entreprise, le CHI aurait dû à tout le moins le résilier, conformément à l’article 47 du code des marchés publics ;

— que les différents manquements relevés ont nécessairement rejailli sur le choix de l’attributaire du marché, ce qui a gravement vicié la procédure ; qu’il y a lieu en conséquence d’annuler le marché litigieux ;

— qu’en l’espèce, la société Etandex détenait des chances sérieuses de remporter le marché, de sorte qu’elle a droit à l’indemnisation de son manque à gagner ; que son offre aurait dû être classée première position, dès lors qu’elle était deuxième et que l’offre de l’attributaire était irrecevable ; que son offre aurait ainsi dû nécessairement être retenue ; qu’à supposer même que l’offre de l’entreprise attributaire aurait été régulière, le pouvoir adjudicateur aurait dû lui attribuer une note très inférieure à celle de la requérante sur le plan technique, compte tenu des caractéristiques techniques nettement supérieures du procédé proposé par la société requérante et du caractère prépondérant de ce critère ;

— que le manque à gagner doit être déterminé en fonction du bénéfice net que lui aurait procuré le marché et a vocation à être réparé intégralement, sans considération d’éléments extérieurs ; que le montant de son offre s’élève à 122 044,76 € HT, et correspond à un coefficient de marge de 16,2%, ce qui correspond au bénéfice net si elle avait exécuté ce marché, soit un montant de 19 771,25 € HT ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 février 2012, présenté pour le CHI de la Lauter, par la selarl CM Affaires Publiques, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société Etandex à lui verser une somme de 2 000 € en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir :

— qu’en ce qui concerne les irrégularités alléguées affectant le marché litigieux :

o qu’en ce qui concerne l’avis d’appel public à la concurrence, le marché querellé a été passé pour un montant inférieur au seuil communautaire, fixé alors à 4 845 000 € HT, le pouvoir adjudicateur étant alors uniquement tenu de publier un avis d’appel public à la concurrence dans le BOAMP ou dans un journal habilité à recevoir des annonces légales, conformément à l’article 40, IV, 1° du code des marchés publics ; qu’en outre, les modèles d’avis annexés à l’arrêté du 28 août 2006 comportent et des rubriques assorties de la mention « zone obligatoire » et d’autres non, étant de jurisprudence constante que celles ne comportant pas cette mention peuvent ne pas être renseignées sans conséquence sur la régularité de la procédure ; que l’ensemble des mentions obligatoires a bien été renseigné dans l’avis d’appel public à la concurrence ; que s’il devait en être jugé autrement, ce vice n’est pas d’une gravité suffisante pour entraîner l’annulation du contrat ; que la société requérante n’a pas été empêchée de déposer une offre conforme, les renseignements en cause ayant été communiqués dans le règlement de la consultation ;

o qu’en ce qui concerne l’irrégularité des critères de sélection des candidatures, conformément à l’article 1er de l’arrêté du 28 août 2006, le pouvoir adjudicateur pouvait valablement exiger des candidats une note quant à leurs références antérieures ; que l’article 46 permet la production des pièces prévues aux articles D. 8222-5 ou D. 8222-7 et D. 8222-8 du code du travail au stade de la candidature ; qu’en tout état de cause, quand bien même ces manquement seraient établis, ils ne constituent pas des vices d’une gravité suffisante pour entraîner l’annulation du contrat, alors que la société requérante n’a pas été empêchée de déposer une offre conforme ;

o qu’en ce qui concerne l’irrégularité des critères de sélection des offres, la mise en œuvre de sous-critères n’est pas une obligation ; qu’il est admis que la condition tenant à l’information des candidats sur les conditions de mise en œuvre des critères de sélection est remplie lorsque la valeur technique des offres doit être appréciée au regard des éléments devant être abordés par les candidats dans leurs mémoires techniques, à condition d’être définis dans le règlement de la consultation ; que le règlement de la consultation comporte les indications à cet égard ; que le critère lié au délai d’exécution des prestations est au nombre des critères légalement admis tant à l’article 53 du code des marchés publics que par la jurisprudence administrative, alors même que la durée d’un marché public doit toujours être préfixe conformément à l’article 16 du code des marchés publics ; qu’en outre, l’article 2.5 du règlement de la consultation stipulait que les délais pouvaient être réduits ; qu’ainsi, ce critère a eu pour finalité d’évaluer la capacité des candidats à respecter les délais d’exécution contractuels et, le cas échéant, en proposer la réduction conformément à l’article 2.5 du règlement de la consultation et ce, pour améliorer la qualité de leur offre ;

o qu’en ce qui concerne le non respect des étapes de la procédure de négociation, qu’à supposer même que les documents de la consultation aient été communiqués au stade de la candidature, la requérante n’établit pas en quoi cette circonstance aurait eu pour effet d’opérer une confusion entre la phase de sélection des candidatures et celle de jugement des offres ; que le règlement de la consultation a clairement délimité les deux phases de la procédure en son article 2.1 ;

o qu’en ce qui concerne le défaut d’information relative aux modalités de la négociation et la tenue d’une négociation, il ne résulte d’aucune disposition du code des marchés publics ni d’aucun autre texte que les modalités de la négociation devraient être portées à la connaissance des candidats dans le règlement de la consultation ; qu’en l’espèce, ces modalités ont néanmoins été précisées en page 3 du règlement de la consultation ; qu’il est établi que le CHI par l’intermédiaire du maître d’œuvre a sollicité de la part de l’ensemble des candidats invités à négocier la communication de leur meilleure proposition financière par courrier du

8 septembre 2010 ; que tant la société attributaire que la société requérante ont ainsi pu transmettre leur offre modifiée de prix ;

o qu’en ce qui concerne la régularité de la communication des motifs de rejet de l’offre de la requérante, il ressort d’une jurisprudence constante que le pouvoir adjudicateur, dès qu’il a fait son choix, notifie aux autres candidats le rejet de leur offre en leur indiquant les motifs mais, qu’à défaut, il bénéficie d’un délai de 15 jours pour notifier ces motifs, à compter d’une demande écrite de leur part ; qu’en l’espèce, si le maître d’ouvrage a, il est vrai succinctement mais régulièrement en vertu de l’article 80 du code des marchés publics, averti la société requérante du rejet de son offre par courrier du 14 septembre 2010, il a, dans un second temps, satisfait à la demande de précision, adressée par celle-ci le 16 septembre 2010 et ce, conformément à l’article 83 du code des marchés publics ; qu’en tout état de cause, il ressort de la jurisprudence que le vice tiré de la méconnaissance éventuelle des règles d’information des candidats non retenus n’a trait ni à l’objet même du marché ni au choix du cocontractant et ne saurait donc entraîner l’annulation du marché ;

o qu’en ce qui concerne la régularité de l’offre de la société EGTS, l’article 6-V du code des marchés publics prohibe le rejet d’une offre non conforme à une spécification technique si le candidat établit que cette dernière respecte de manière équivalente cette spécification ; qu’en l’espèce, si l’article 7.2 du cahier des clauses techniques particulières impose le respect du classement minimum U4P4sE3C2, le cahier des clauses administratives particulières précise également la possibilité de soumission d’équipements d’un niveau et d’une qualité équivalente, cette similitude devant être appréciée par le maître d’œuvre ; que dans son offre, la société EGTS a proposé l’utilisation du système « Sika » en produisant l’ensemble des éléments de nature à démontrer la conformité de ce produit avec les exigences techniques du cahier des charges, et que cette solution a été jugée équivalente par l’équipe de maîtrise d’œuvre à celle d’un revêtement classé U4P4sE3C2 ; que l’utilisation dans les cuisines collectives des systèmes de revêtements de sols coulés « Sikafloor Epoxyfloor » épaisseur 4 mm, tel que proposé par la société EGTS, a fait l’objet d’un avis technique favorable du centre scientifique et technique du bâtiment, ainsi que d’une validation par le contrôleur technique de l’opération, Qualiconsult ;

o qu’en ce qui concerne la régularité de la situation sociale et fiscale de la société EGTS, il n’appartient pas à un pouvoir adjudicateur de prendre une décision de résiliation sur le seul crédit d’affirmations gratuites et lacunaires d’un concurrent évincé ; qu’en outre, la société EGTS a régulièrement fourni une attestation justifiant qu’elle est à jour de ses obligations en matière de cotisations sociales à la date du 31 décembre 2009, l’administration ne pouvant, conformément à l’article 46 du code des marchés publics, exiger des entreprises qu’elles justifient de la régularité de leur situation au regard de leurs obligations sociales ou fiscales à la date à laquelle elles déposent leur candidature mais seulement au 31 décembre de l’année en cours ; qu’enfin, la société attributaire a également remis le formulaire DC7, lequel a pour objet de remplacer la production des certificats sociaux et fiscaux exigés dans une procédure, auxquels ils se substituent en vertu de l’article 46 du code des marchés publics ;

— qu’aucune des irrégularités alléguées n’étant établie, les conclusions à fin d’annulation du contrat devront être rejetées ; qu’en tout état de cause, aucun des manquements allégués ne saurait constituer un vice d’une gravité suffisante de nature à entraîner l’annulation du marché querellé ; qu’en outre, le marché a été entièrement exécuté et qu’une annulation rétroactive du contrat porterait nécessairement une atteinte excessive à l’intérêt général en privant la collectivité publique des garanties légales qui lui sont attachées ;

— que la requérante n’ayant pas été irrégulièrement évincée, aucune indemnisation n’est due ; qu’elle ne justifie pas, en tout état de cause, de chances sérieuses de remporter le marché ; que la seule qualité de co-lauréat d’un candidat évincé n’est pas de nature à établir que ce dernier avait nécessairement des chances sérieuses d’emporter le marché ; qu’il appartient en réalité au candidat évincé de démontrer que si la procédure d’attribution avait été régulière, son offre aurait été classée en première position au regard des critères d’attribution du marché ; que tel n’est pas le cas en l’espèce, compte tenu du manque de compétitivité manifeste de la requérante sur le critère du prix par rapport à ses concurrents ; que la requérante ne justifie pas du quantum de sa réclamation, notamment de la marge indiquée, ni des frais engagés pour présenter son offre ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 mai 2013, présenté pour la société Etandex, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre :

— qu’en ce qui concerne les irrégularités alléguées affectant le marché litigieux :

o qu’en ce qui concerne l’avis d’appel public à la concurrence, dès lors que le marché a été passé selon une procédure formalisée comme en l’espèce, la publicité devait être réalisée selon le modèle d’avis prévu par le règlement (CE) n°1654/2005 et non selon le modèle d’avis national annexé à l’arrêté du 28 août 2006 ; qu’à l’inverse de ce dernier, l’ensemble des mentions figurant dans le modèle communautaire sont obligatoires ;

o qu’en ce qui concerne l’irrégularité des critères de sélection des candidatures, que les informations relatives à la démarche environnementale relèvent des critères de jugement des offres, la valeur technique des offres étant également appréciée au regard d’un mémoire environnemental ; que le formulaire DC6, actuellement NOTI doit être remis après l’attribution du marché ;

o qu’en ce qui concerne l’irrégularité des critères de sélection des offres, lorsque des sous-critères constituent de véritables critères qui exercent une influence sur la présentation de l’offre, ceux-ci doivent être portés à la connaissance des candidats et pondérés ; que les conditions de garantie, d’assistance technique et du service après-vente auraient dû être distinguées de la « valeur technique » et de la « performance méthodologique de l’offre » pour constituer à elles seules un critères de sélection des offres pondéré, conformément à l’article

53-I du code des marchés publics ; qu’en ce qui concerne le critère relatif au « délai d’exécution du marché », l’article 3.2 du règlement de la consultation indiquait que le calendrier prévisionnel des travaux était à dater et signer sans modification ; que cette contradiction de nature à créer un doute caractérise un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence ;

o qu’en ce qui concerne le non respect des étapes de la procédure de négociation, un seul règlement de la consultation a été adressé aux entreprises, lequel comportait l’ensemble des éléments nécessaires au jugement des candidatures et des offres ;

o qu’en ce qui concerne le défaut d’information relative aux modalités de la négociation et la tenue d’une négociation, la jurisprudence citée en matière de délégation de service public n’est pas transposable dès lors que les règles applicables sont beaucoup plus souples ; qu’il résulte de jurisprudences dégagées par les tribunaux administratifs que les modalités de la négociation doivent être indiquées au regard du principe de transparence ;

o que le pouvoir adjudicateur n’a pas traité de manière égale les candidats lors des négociations ; qu’en effet, la non-conformité des offres aux prescriptions du cahier des clauses techniques particulières n’a pas été traitée de la même manière pour tous les candidats ; que la société ITB Structure n’a pas eu l’opportunité de participer aux négociations ni de voir son offre classée à l’inverse d’autres candidats tels que la société Floorclor ou la société Solibat dont l’offre a été classée après la négociation ; qu’en outre, le pouvoir adjudicateur a permis à la société attributaire de rendre son offre conforme aux stipulations contractuelles (en ajoutant une sous-couche d’étanchéité), sans toutefois procéder à la même démarche auprès de trois autres candidats ;

o qu’en ce qui concerne la régularité de la communication des motifs de rejet de l’offre de la requérante, si la jurisprudence permet au pouvoir adjudicateur d’apporter ultérieurement des précisions sur les motifs de rejet d’une offre, ce n’est qu’à la condition d’avoir préalablement communiqué au candidat évincé les informations visées à l’article 80 du code des marchés publics ;

o qu’en ce qui concerne la régularité de l’offre de la société EGTS, ce n’est qu’à compter de la réception de la lettre de la requérante du 5 octobre 2010 que le pouvoir adjudicateur a commencé à se renseigner sur les caractéristiques de l’offre retenue ; que ce n’est qu’après l’attribution du marché que la société EGTS lui a précisé que le système proposé faisait l’objet d’essais en vue d’obtenir le classement U4P4s ; qu’en février 2011, il n’avait toujours pas obtenu la classification attendue ; que l’analyse du contrôleur technique a porté sur un produit différent de celui contenu dans son offre ; qu’au mois de septembre 2011, soit après la réception des travaux, le classement U4P4s a été attribué audit système ; que contrairement à l’article 6 V du code des marchés publics, il ne ressort pas des pièces du dossier que la société EGTS avait transmis un quelconque document à l’appui de son offre de nature à démontrer que le système proposé était équivalent aux prescriptions du cahier des clauses techniques particulières ; que lors de la sélection des offres, le système proposé ne bénéficiait pas du classement P4s ; que le principe de l’égalité de traitement s’oppose à ce que des justifications soient apportées après l’attribution du marché ;

qu’en ce qui concerne la régularité de la situation sociale et fiscale de la société EGTS, ses mises en garde étaient fondées puisque la société attributaire a été placée en redressement judiciaire dès le 28 septembre 2011 ; que le pouvoir adjudicateur aurait dû faire preuve de vigilance et vérifier l’exactitude des informations transmises par la société ; que ce défaut de diligence constitue une irrégularité entachant la validité du marché ;

o que l’offre de la société EGTS aurait dû être rejetée car présentant un caractère anormalement bas conformément à l’article 55 du code des marchés publics ; que le pouvoir adjudicateur est tenu de demander à un candidat de justifier ses prix dès lors que le montant de son offre est nettement inférieur à celui des autres concurrents, ce seuil se situant d’après la jurisprudence aux alentours de 20% ; qu’en l’espèce, le montant de l’offre présentée par la société EGTS était de plus de 33% inférieure à celles des deux candidats ayant présenté une offre conforme aux prescriptions du marché ; qu’en constatant que le prix proposé était plus proche de celui des candidats qui ne proposaient pas un système d’étanchéité conforme, le CHI aurait ainsi dû lui demander des explications, d’autant que l’offre de la société EGTS déposée « avant les négociations » avait déjà été jugée non conforme sur ce point ;

— que le recours Tropic est largement ouvert à tout concurrent évincé, lequel peut invoquer tout moyen de légalité, sans qu’il soit nécessaire de démontrer une quelconque lésion ; que le sort du contrat ne dépend que de la gravité de l’illégalité invoquée, à l’égard de laquelle le juge n’hésite pas à faire preuve de sévérité ; que la circonstance que le marché a été entièrement exécuté ne constitue en rien un obstacle à son annulation ; que la résiliation du marché ne serait pas une sanction pertinente en revanche à cet égard ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 décembre 2013, présenté pour le CHI de la Lauter, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures et réévalue sa demande indemnitaire en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative à la somme de 4 000 € ;

Il fait valoir en outre :

— qu’en ce qui concerne l’irrégularité des critères de sélection des offres, la liste de critères de l’article 53 I 1° n’est pas limitative et revêt un caractère purement indicatif ; qu’ainsi, il n’a pas méconnu ces dispositions en intégrant les « conditions de garantie, d’assistance technique et du service après-vente » dans le critère « valeur technique » ;

— qu’en ce qui concerne le défaut d’information relative aux modalités de la négociation et la tenue d’une négociation, les jurisprudences citées ne concernent que le cas de la transmission par voie électronique de l’invitation à négocier ; que tel n’est pas le cas en l’espèce, conformément à l’article 5.2.2.a du règlement de la consultation ;

— qu’en ce qui concerne la prétendue rupture d’égalité de traitement des candidats lors des négociations, la réalité du manquement invoqué n’est pas établie ; que la requérante ne démontre pas davantage en quoi, à le supposer établi, il lui aurait porté préjudice, alors que son offre a été déclarée conforme ;

— qu’en ce qui concerne la régularité de la communication des motifs de rejet de l’offre de la requérante, le rejet de l’offre de la requérante lui a été notifié le 14 septembre 2010, et l’acte d’engagement a été signé le 30 septembre 2010, soit au moins 16 jours après la date d’envoi de la notification du rejet des offres ;

qu’en ce qui concerne la régularité de la situation sociale et fiscale de la société EGTS, il est interdit par principe d’écarter une entreprise connaissant des difficultés financières, à condition que celle-ci ne soit pas en liquidation judiciaire ou en faillite personnelle conformément à l’article 43 du code des marchés publics ; qu’en outre, la situation sociale et fiscale de la société EGTS au-delà de la date de réception des travaux est sans incidence ;

— qu’en ce qui concerne le caractère anormalement bas de l’offre de la société EGTS, il a été jugé que la seule différence, même importante, entre le montant de l’offre suspectée et celui des autres offres, ne saurait suffire à établir son caractère anormalement bas ; que le prix proposé par la société EGTS était de 26% supérieur à l’estimation du pouvoir adjudicateur et ne pouvait de ce fait en aucun cas être suspectée d’être anormalement basse ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 janvier 2014, présenté pour la société Etandex, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu l’ordonnance en date du 13 février 2014 fixant la clôture d’instruction au

11 août 2014, en application de l’article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 avril 2014, présenté pour le centre hospitalier intercommunal de la Lauter, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 août 2014, présenté pour la société Etandex, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 20 novembre 2014 :

— le rapport de Mme Didiot, rapporteuse ;

— les conclusions de M. Rees, rapporteur public ;

— les observations de :

▪ Me Donval, avocat, pour la société requérante ;

▪ Me Diaby, avocat, pour le centre hospitalier intercommunal de La Lauter ;

1. Considérant que par un avis d’appel public à la concurrence publié le 11 juin 2010 au BOAMP, le centre hospitalier intercommunal (CHI) de la Lauter a lancé une procédure négociée en vue de la restructuration de sa cuisine centrale ; que la mission de maîtrise d’œuvre a été confiée à un groupement composé de la société Ingerop, mandataire, de la société Ecohal et du cabinet d’architectes X Y et associés ; que le marché de travaux était décomposé en 20 lots et que la société Etandex a déposé une offre pour le lot n°7 « revêtements de sols en résine » pour un coût initial de 139 336,12 € HT, revu après négociation au montant de 122 044,76 € HT ; qu’elle a été informée par courrier du 16 septembre 2010 du rejet de son offre, classée 2e ; que le marché a été signé le 30 septembre 2010 avec la société EGTS ; que par le présent recours, la société requérante, estimant que la procédure de passation du marché litigieux n’a pas été respectée, demande au Tribunal d’annuler ledit marché et de condamner le CHI de la Lauter à lui verser une somme de 19 771,25 € HT en réparation de son préjudice en tant que concurrent évincé ;

Sur la validité du contrat :

Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

2. Considérant qu’indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles ; que cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu’au représentant de l’Etat dans le département dans l’exercice du contrôle de légalité ; que les requérants peuvent éventuellement assortir leur recours d’une demande tendant, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, à la suspension de l’exécution du contrat ; que ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l’accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d’un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi ; que la légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer, ne peut être contestée qu’à l’occasion du recours ainsi défini ; que, toutefois, dans le cadre du contrôle de légalité, le représentant de l’Etat dans le département est recevable à contester la légalité de ces actes devant le juge de l’excès de pouvoir jusqu’à la conclusion du contrat, date à laquelle les recours déjà engagés et non encore jugés perdent leur objet ;

3. Considérant que le représentant de l’Etat dans le département et les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l’appui du recours ainsi défini ; que les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l’intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d’une gravité telle que le juge devrait les relever d’office ;

4. Considérant qu’aux termes de l’article 53 du code des marchés publics : « (…) III.-Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées. Les autres offres sont classées par ordre décroissant. L’offre la mieux classée est retenue. (…) » ; que la société Etandex soutient que l’offre de la société EGTS, attributaire du marché, aurait dû être écartée au motif qu’elle n’était pas conforme aux spécifications exigées par les documents contractuels ; que ce moyen, relatif au choix du cocontractant, est en rapport direct avec l’intérêt lésé dont se prévaut la requérante, dès lors que son offre avait été classée deuxième ;

5. Considérant que la position 7.2 du cahier des clauses techniques particulières du marché litigieux prévoyait « la fourniture et la pose d’une résine type chape de sol multicouche décorative dure sur étanchéité, y compris : la sous couche d’étanchéité adaptée aux locaux classés P4s (…) Le produit devra correspondre (…) à un classement minimum U4P4SE3CE » ; qu’il résulte de l’instruction que la société EGTS a proposé dans son offre la mise en œuvre du complexe Sikagard recouverte d’un système résine Sikafloor + quartz color, lequel ne bénéficiait pas, lors de la sélection des offres, du classement requis, lequel n’a finalement été obtenu qu’après la réception des travaux ;

6. Considérant que l’article 6 du code des marchés publics dispose que : « (…)V. – Lorsque le pouvoir adjudicateur utilise une spécification technique formulée selon les modalités prévues au 1° du I, il ne peut pas rejeter une offre au motif qu’elle n’est pas conforme à cette spécification si le candidat prouve dans son offre, par tout moyen approprié, que les solutions qu’il propose respectent de manière équivalente cette spécification. (…) » ; que l’article 7.5 du cahier des clauses administratives particulières prévoit par ailleurs que :« (…) L’entrepreneur sera tenu de mettre en œuvre les matériaux et matériels prescrits au cahier des clauses techniques particulières. L’appréciation de la similitude des matériaux et matériels présentés par l’entrepreneur avec les matériaux de référence prescrits aux cahiers des clauses techniques particulières appartiendra au maître d’œuvre. En cas de divergence de vue avec l’entrepreneur en ce qui concerne cette similitude, celui-ci sera tenu de fournir les matériaux et matériels de référence eux-mêmes. (…)» ; que le CHI fait valoir que conformément à ces dispositions, la société EGTS a proposé l’emploi de matériaux équivalents à la spécification exigée par le cahier des clauses techniques particulières, de sorte qu’il ne pouvait la rejeter ;

7. Considérant toutefois que l’ensemble des justifications techniques produites par le CHI, émanant de la société EGTS, notamment le courrier du maître d’œuvre, l’avis favorable du centre scientifique et technique du Bâtiment, et le contrôle effectué par le bureau Qualiconsult, à les supposer probantes pour démontrer la conformité de son système Sika Epoxyfloor EQC4 au classement susmentionné U4P4SE3CE, ont toutes été émises postérieurement à la signature du marché le 30 septembre 2010 ; que l’équivalence entre le produit proposé et celle exigée par le cahier des clauses techniques particulières n’étant pas établie lors de la sélection des offres, l’offre d’EGTS devait être écartée comme non conforme en application des dispositions susmentionnées de l’article 53 du code des marchés publics ;

Sur les conséquences de l’illégalité du contrat :

8. Considérant que, saisi ainsi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l’auteur du recours autre que le représentant de l’Etat dans le département ou qu’un membre de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d’un intérêt susceptible d’être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu’il critique sont de celles qu’il peut utilement invoquer, lorsqu’il constate l’existence de vices entachant la validité du contrat, d’en apprécier l’importance et les conséquences ; qu’ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l’exécution du contrat est possible, soit d’inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu’il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat ; qu’en présence d’irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l’exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l’intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s’il se trouve affecté d’un vice de consentement ou de tout autre vice d’une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d’office, l’annulation totale ou partielle de celui-ci ; qu’il peut enfin, s’il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu’il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l’indemnisation du préjudice découlant de l’atteinte à des droits lésés ; »

9. Considérant que le vice relevé, relatif au choix même du co-contractant, l’offre de la société requérante ayant par ailleurs été classée juste après la société EGTS, justifie l’annulation du contrat, alors qu’aucune atteinte excessive à l’intérêt général n’est démontrée ; que les seules circonstances que le marché litigieux ait été entièrement exécuté et que son annulation priverait le CHI des garanties qui y sont attachées sont, à elles seules, sans incidence à cet égard ;

Sur les conclusions indemnitaires :

10. Considérant que lorsqu’une entreprise candidate à l’attribution d’un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce dernier, il appartient au juge de vérifier d’abord si l’entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter le marché ; que, dans l’affirmative, l’entreprise n’a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu’elle a engagés pour présenter son offre ; qu’il convient ensuite de rechercher si l’entreprise avait des chances sérieuses d’emporter le marché ; que, dans un tel cas, l’entreprise a droit à être indemnisée de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu’ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l’offre qui n’ont donc pas à faire l’objet, sauf stipulation contraire du contrat, d’une indemnisation spécifique ;

11. Considérant qu’en l’espèce, ainsi qu’il a été indiqué, l’offre de la société Etandex avait été classée en deuxième position, juste après celle de la société EGTS ; qu’il s’ensuit que, l’offre de cette dernière devant être rejetée comme irrégulière, la société Etandex aurait dû se voir attribuer le marché litigieux ; qu’elle justifie ainsi d’une chance sérieuse d’obtenir le marché et peut ainsi prétendre à l’indemnisation du manque à gagner dont elle a été privée, ce dernier devant être calculé sur le bénéfice net que lui aurait rapporté l’exécution du contrat ;

12. Considérant que la requérante produit un tableau détaillant, par rapport au prix de sa prestation, soit 122 045 € HT, le montant de ses débours (machines, main-d’œuvre, matériaux) à hauteur de 78 481 € HT, et fait état d’un taux de marge de 16,2%, soit une somme de 19 771,29 € HT ; que ces éléments ne sont pas sérieusement contestés par le CHI ; qu’il y a lieu, par suite, de condamner ce dernier à lui verser cette dernière somme, assortie, comme la société Etandex le demande, des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2011, date d’enregistrement de sa requête ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. » ;

14. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Etandex, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le CHI demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu en revanche de condamner le CHI à verser à la requérante une somme de 2 000 € au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : Le marché susvisé signé le 30 septembre 2010 entre le centre hospitalier intercommunal de la Lauter et la société EGTS est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier intercommunal de la Lauter versera à la société Etandex une somme de 19 771,25 € (dix neuf mille sept cent soixante et onze euros et vingt-cinq centimes) en réparation de son préjudice, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2011.

Article 3 : Le centre hospitalier intercommunal de la Lauter versera à la société Etandex une somme de 2 000 € (deux mille euros) en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions relatives à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par le centre hospitalier intercommunal de la Lauter sont rejetées.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la société Etandex, au centre hospitalier intercommunal de la Lauter et à la société EGTS.

Délibéré après l’audience du 20 novembre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Vogel-Braun, président,

Mme Didiot, première conseillère,

Mme Dulmet, première conseillère,

Lu en audience publique, le 4 décembre 2014.

La rapporteuse, Le président,

S. DIDIOT J-P. VOGEL-BRAUN

Le greffier,

M-C. SCHMIDT

La République mande et ordonne au préfet du Bas-Rhin, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Strasbourg, le 4 décembre 2014

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Marie-Claude SCHMIDT

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Tribunal administratif de Strasbourg, 4 décembre 2014, n° 1102568