Tribunal administratif de Versailles, 6 février 2014, n° 0910749

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Versailles, 6 févr. 2014, n° 0910749
Juridiction : Tribunal administratif de Versailles
Numéro : 0910749
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Versailles, 6 novembre 2011, N° 11VE01169

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE VERSAILLES

N° 0910749

___________

Commune de Vicq

___________

M. Durand

Rapporteur

___________

Mme Lefebvre-Soppelsa

Rapporteur public

___________

Audience du 9 janvier 2014

Lecture du 6 février 2014

___________

mh

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Versailles

(8e chambre)

39-06-01-04

39-06-01-04-01

39-06-01-04-05-01

39-06-01-07-03-02-01

C

Vu la requête, enregistrée le 24 novembre 2009, présentée pour la commune de Vicq, représentée par son maire, par Me Capdevila, avocat ;

La commune de Vicq demande au tribunal :

— de condamner la société par actions simplifiées (SAS) Eparco Assainissement à lui verser, en réparation des désordres affectant les dispositifs individuels d’assainissement mis en conformité ou installés par cette société, les sommes de :

* 459 523,10 euros toutes taxes comprises (TTC) correspondant au coût des travaux de réparation, à réévaluer en fonction du coût de l’indice INSEE de la construction à la date de la décision à intervenir ;

* 14 000 euros correspondant au coût de remplacement des paniers de sortie de fosse ;

* 30 000 euros correspondant aux frais d’études préalables nécessaires au remplacement des paniers de sortie de fosse ;

* 100 000 euros correspondant au surcoût des frais de gestion liés au contentieux ;

* 200 000 hors taxes (HT) à titre provisionnel pour la réparation des désordres intervenus sur les dispositifs individuels d’assainissement après la visite de l’expert judiciaire ;

— de faire application des dispositions de l’article 1154 du code civil pour les intérêts ayant couru depuis plus d’une année ;

— de condamner la SAS Eparco Assainissement aux entiers dépens, comprenant les frais et honoraires d’expertise ainsi que le coût de l’audit qu’elle a fait réaliser ;

— de mettre à la charge de la SAS Eparco Assainissement une somme de 30 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Vicq soutient :

Sur la responsabilité :

A titre principal :

— que les désordres affectant les installations individuelles d’assainissement mises en place par la SAS Eparco Assainissement, qui ont provoqué le colmatage des filtres et le dysfonctionnement complet de la filière, rendent les habitations avec lesquelles elles sont indissociables impropres à leur destination et engagent la responsabilité décennale de ce constructeur ;

— que ces désordres, liés à des vices d’exécution et de conception n’étaient pas apparents lors de la réception des ouvrages ;

— qu’aucune faute n’est imputable à un autre constructeur ;

— qu’elle n’a elle-même commis aucune faute dans ses missions d’entretien et de contrôle, cette dernière ayant été confiée à un autre intervenant ;

A titre subsidiaire :

— que la SAS Eparco Assainissement a méconnu son obligation contractuelle de résultat ;

Sur la réparation :

— que l’expert a chiffré le coût des réparations, incluant les honoraires de maîtrise d’œuvre de 12 % et une provision pour aléa de 10 %, à 384 216,64 euros HT imputables à l’entrepreneur, somme à laquelle il convient d’ajouter la TVA, soit un total de 459 523,10 euros TTC ;

— que la défaillance des paniers de sortie de fosse est généralisée et a été constatée par l’expert ; que les fautes commises par la SAS Eparco Assainissement impliquent donc nécessairement le remplacement des paniers, soit un coût de 14 000 euros pour le remplacement de 35 paniers évalués à 400 euros chacun ;

— que cette réparation nécessite des frais d’études préalables évalués à 30 000 euros ;

— que les mêmes désordres ont entraîné des frais supplémentaires pour la gestion de la commune évalués à 100 000 euros ;

— et que compte tenu des désordres apparus depuis la campagne de visite menée par l’expert judiciaire, elle est fondée à réclamer une allocation provisionnelle de 200 000 euros sauf à parfaire, au besoin après complément d’expertise ;

Vu l’ordonnance du 31 octobre 2011 informant les parties de la clôture de l’instruction au 13 décembre 2011 en application des dispositions de l’article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les mémoires, enregistrés les 16 novembre 2011 et 4 juillet 2012, présentés pour la commune de Vicq, par Me Capdevila, avocat, qui conclut aux mêmes fins que précédemment et porte à 50 000 euros la somme dont elle demande qu’elle soit mise à la charge de la SAS Eparco Assainissement sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Vicq informe le tribunal :

— que par ordonnance du 7 novembre 2011, le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Versailles a fait droit à sa demande et lui a notamment accordé à titre provisionnel une somme de 459 523 euros TTC en application de l’article R. 541-1 du code de justice administrative ;

— que par jugement du 20 décembre 2011, le tribunal de commerce de Sens a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la SAS Eparco Assainissement ;

— et qu’elle a régulièrement déclaré la créance de 789 537,10 euros au mandataire judiciaire désigné pour cette société, en application de l’article L. 622-24 du code de commerce ;

Vu l’ordonnance du 6 juillet 2012 décidant la réouverture de l’instruction, en application de l’article R. 613-4 du code de justice administrative et informant les parties de sa clôture au 18 septembre 2012 ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 septembre 2012, présenté pour la société Geeb, par Me Lhumeau, avocat ;

La société Geeb demande au tribunal :

— de rejeter toute demande en garantie de la SAS Eparco Assainissement ;

— de la mettre hors de cause ;

— de mettre à la charge de la SAS Eparco Assainissement ou de tout succombant une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

— de condamner la SAS Eparco Assainissement ou tout succombant aux entiers dépens ;

La société Geeb soutient :

— qu’elle est intervenue à compter du 14 février 1996 comme assistant du maître d’ouvrage ;

— qu’alors même qu’elle n’était pas partie aux opérations d’expertise, ces dernières ne retiennent aucun manquement qui lui serait imputable ;

— qu’elle ne saurait donc être tenue de garantir quelconque constructeur ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 décembre 2012, présenté pour la commune de Vicq, par Me Capdevila, avocat ;

La commune de Vicq demande en outre au tribunal :

— de mettre en cause la société par actions simplifiées (SAS) Eparco, subrogée dans les droits et obligations de la SAS Eparco Assainissement en application de la convention d’apport partiel d’actifs signée le 29 octobre 2010 ;

— de mettre en cause la Selarl A B, ès-qualité de liquidateur de la SAS Eparco Assainissement suivant le jugement du tribunal de commerce de Sens du 11 septembre 2012 ;

— de fixer la créance de SAS Eparco aux sommes mentionnées dans la requête introductive d’instance dont il conviendra de déduire celle de 71 660,64 euros, recouvrée par saisie-attribution le 13 décembre 2011 ;

— de condamner la SAS Eparco Assainissement aux entiers dépens, comprenant les frais et honoraires de l’expertise taxés et liquidés à 76 712,64 euros, le coût de l’audit qu’elle a fait réaliser ainsi que les frais de saisie-attribution pour un montant de 4 155,09 euros ;

Vu l’ordonnance du 8 avril 2013 décidant la réouverture de l’instruction, en application de l’article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mai 2013, présenté pour la société par actions simplifiées (SAS) Eparco, par Me Israël, avocat ;

La SAS Eparco demande au tribunal :

— le rejet de la requête ;

— à ce que soit mise à la charge de la commune de Vicq une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SAS Eparco soutient :

— à titre principal, que la demande de la commune de Vicq tendant à ce que la somme de 789 537,10 euros soit mise à sa charge est irrecevable dès lors que cette créance, qui est antérieure au jugement ouvrant une procédure de redressement judiciaire à son encontre, n’a pas été déclarée dans les conditions prévues à l’article L. 622-24 du code de commerce ;

— à titre subsidiaire, que la créance dont se prévaut la commune ne lui a pas été transférée en application de la convention d’apport partiel d’actifs conclue avec la SAS Eparco Assainissement ;

— et que l’assureur de la SAS Eparco Assainissement lui a versé une somme afin d’exécuter l’ordonnance du juge des référés de la Cour administrative d’appel de Versailles ;

Vu l’ordonnance du 19 septembre 2013 informant les parties de la clôture de l’instruction au 10 octobre 2013 en application des dispositions de l’article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 octobre 2013, présenté pour la commune de Vicq, par Me Capdevila, avocat, qui persiste dans ses précédentes écritures ;

La commune de Vicq soutient, par ailleurs :

— que ce n’est qu’en raison d’une fraude qu’elle n’a pu déclarer sa créance ;

— que la SAS Eparco Assainissement et la SAS Eparco doivent être condamnées in solidum au paiement de sa créance ;

— et qu’en dépit de nombreuses relances, elle ne dispose d’aucune information quant à la somme qui aurait été transmise par l’assureur de la SAS Eparco Assainissement ;

Vu l’ordonnance du 9 octobre 2013 décidant la réouverture de l’instruction, en application de l’article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 octobre 2013, présenté pour la SAS Eparco, par Me Israël, avocat, qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

La SAS Eparco ajoute qu’elle n’a pas fait l’objet d’une liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif et que, par conséquent, la commune requérante ne peut se prévaloir de l’action du créancier non averti sur le fondement de l’article 1382 du code civil ;

Vu l’ordonnance du 4 novembre 2013, informant les parties de la clôture de l’instruction intervenue dans les conditions prévues aux articles R. 611-11-1 et R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu l’ordonnance du 5 novembre 2013 décidant la réouverture de l’instruction, en application de l’article R. 613-4 du code de justice administrative et informant les parties de sa clôture au 3 décembre 2013 ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été communiquée, dans un premier temps, à la SAS Eparco Assainissement puis, dans un second temps, à la Selarl A B, ès-qualité de liquidateur de la SAS Eparco Assainissement à compter du 11 septembre 2012, qui n’ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu l’ordonnance du 20 septembre 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a ordonné une expertise et désigné, en qualité d’expert, M. Y X et l’ordonnance du 3 avril 2007 étendant la mission d’expertise au contradictoire de la société EAV ;

Vu le rapport d’expertise établi par M. Y X et déposé au greffe du tribunal le 17 mars 2009 ;

Vu l’ordonnance du 10 juin 2009 par laquelle le président du tribunal administratif de Versailles a liquidé et taxé les frais et honoraires de l’expertise à la somme de 76 712,64 euros ;

Vu l’ordonnance n° 11VE01169 du 7 novembre 2011 par laquelle le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Versailles a accordé à la commune de Vicq, à titre provisionnel, une somme de 459 523,10 euros TTC mise à la charge de la SAS Eparco Assainissement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 9 janvier 2014 ;

— le rapport de M. Durand, rapporteur ;

— les conclusions de Mme Lefebvre-Soppelsa, rapporteur public ;

— et les observations de Me Capdevila, avocat, pour la commune de Vicq et de Me Israël, avocat, pour la SAS Eparco ;

1. Considérant que, par acte d’engagement reçu en préfecture des Yvelines le 14 février 1996, la commune de Vicq a confié à la SAS Eparco Assainissement ainsi qu’à son sous-traitant, l’entreprise Deschamps, des travaux de mise en conformité ou d’installation et mise en conformité de dispositifs individuels d’assainissement pour le compte de propriétaires avec lesquels des conventions, prévoyant une contrepartie financière à l’exécution des travaux ainsi qu’une redevance pour l’entretien des dispositifs, ont été conclues ; que ces travaux ont été divisés en trois tranches respectivement réceptionnées sans réserve pour les deux premières les 2 décembre 1996 et 18 novembre 1997 et avec réserves pour la dernière le 31 octobre 2000 ; qu’à compter du 1er mars 2000, a été par ailleurs confié à la société EAV l’entretien desdits dispositifs ;

2. Considérant qu’en raison de l’apparition de différents désordres sur certains dispositifs, entraînant notamment le colmatage des filtres et des dysfonctionnements dans la filière, la commune a demandé au juge des référés du tribunal de céans de désigner un expert ; que M. X a remis son rapport le 17 mars 2009 ; que, par la présente requête, la commune de Vicq demande, à titre principal, l’engagement de la garantie décennale de la SAS Eparco Assainissement ; que, le 7 novembre 2011, le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Versailles a accordé à la commune requérante la somme de 459 523,10 euros TTC en application de l’article R. 541-1 du code de justice administrative et l’a mise à la charge de la société Eparco Assainissement ;

Sur la mise en cause de la SAS Eparco :

3. Considérant qu’il résulte de l’instruction que, par jugement du 20 décembre 2011, le tribunal de commerce de Sens a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la SAS Eparco Assainissement et a désigné la Selarl A B comme mandataire judiciaire ; qu’en application de l’article L. 622-24 du code de commerce, la commune de Vicq a déclaré entre ses mains la créance qu’elle chiffre à 789 537,10 euros ; que, par jugement du 11 septembre 2012, publié au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales du 28 septembre 2012, cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire ; que la Selarl A B a été désignée liquidateur judiciaire ;

4. Considérant, en outre, que la SAS Eparco Assainissement, suivant convention du 29 octobre 2010, a fait bénéficier la SAS Eparco d’un apport partiel d’actifs ; que cette dernière société, par un jugement du tribunal de commerce de Sens du 11 septembre 2012, a bénéficié d’un plan de redressement par voie de continuation de son activité pour une durée de dix ans ;

5. Considérant que la commune de Vicq demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures, de condamner in solidum la SAS Eparco Assainissement ainsi que la SAS Eparco à réparer les préjudices qu’elle impute aux désordres affectant les dispositifs individuels d’assainissement mis en conformité ou installés et mis en conformité par la SAS Eparco Assainissement ;

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par la SAS Eparco :

6. Considérant qu’il résulte des dispositions applicables du code du commerce qu’il appartient de façon exclusive à l’autorité judiciaire de statuer sur l’admission ou la non-admission des créances déclarées ; que la circonstance que la collectivité publique dont l’action devant le juge administratif tend à faire reconnaître et évaluer ses droits à la suite des désordres constatés dans un ouvrage construit pour elle par une entreprise admise ultérieurement à la procédure de redressement, puis de liquidation judiciaire, n’aurait pas déclaré sa créance éventuelle ou n’aurait pas demandé à être relevée de la forclusion, est sans influence sur la compétence du juge administratif pour se prononcer sur ces conclusions, qu’elles tendent à la condamnation définitive de l’entreprise ou à l’octroi d’une provision, dès lors qu’elles ne sont elles-mêmes entachées d’aucune irrecevabilité au regard des dispositions dont l’appréciation relève de la juridiction administrative, et ce, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d’avoir sur l’extinction de cette créance ;

7. Considérant que, par conséquent, la SAS Eparco n’est en tout état de cause pas fondée à soutenir que la commune Vicq serait irrecevable à se prévaloir d’une créance à son égard dès lors qu’elle n’aurait pas été déclarée dans les conditions prévues à l’article L. 622-24 du code du commerce ;

En ce qui concerne la société débitrice de l’indemnisation du préjudice invoqué par la commune de Vicq :

8. Considérant, cependant, que pour demander l’engagement in solidum de la responsabilité décennale de la SAS Eparco Assainissement et de la SAS Eparco, la commune de Vicq se prévaut de la convention d’apport partiel d’actifs évoquée au point 4 ; qu’il résulte toutefois clairement des stipulations de cette convention que la SAS Eparco Assainissement a conservé sous sa responsabilité les questions relatives aux assainissements vendus à des collectivités, notamment la commune de Vicq, laquelle figure en annexe de ladite convention ;

9. Considérant que, par conséquent, la commune de Vicq n’est pas fondée à demander à ce que la SAS Eparco soit condamnée in solidum à réparer les préjudices qu’elle impute à la SAS Eparco Assainissement, dont la personnalité morale subsiste pour les besoins de sa liquidation, conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 237-2 du code de commerce et qui est représentée, dans l’intérêt des créanciers, par son liquidateur, en application de l’article L. 237-24 du même code ; qu’il y a ainsi lieu de mettre hors de cause la SAS Eparco ;

Sur le fondement juridique de la demande de la commune de Vicq :

10. Considérant que la commune de Vicq invoque, à titre subsidiaire, l’engagement de la responsabilité contractuelle de la SAS Eparco Assainissement ;

11. Considérant que la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserve ; qu’elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l’ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l’ouvrage ; que si elle interdit, par conséquent, au maître de l’ouvrage d’invoquer, après qu’elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l’ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation, elle ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs que dans cette seule mesure ; qu’il en va ainsi, s’agissant des dommages causés aux tiers, et sauf clause contractuelle contraire, alors même que le maître de l’ouvrage entendrait exercer une action en garantie à l’encontre des constructeurs à raison de condamnations prononcées contre lui au profit de ces tiers, sauf dans le cas où la réception n’aurait été acquise à l’entrepreneur qu’à la suite de manœuvres frauduleuses ou dolosives de sa part ;

12. Considérant qu’il résulte de l’instruction, comme il a déjà été évoqué, que sur les quatre-vingt cinq dispositifs individuels d’assainissement mis en place par la SAS Eparco Assainissement, quatre-vingt trois ont été réceptionnés sans réserve au plus tard le 31 octobre 2000, deux avec réserves à la même date ; qu’il résulte des pièces versées au dossier que la commune intention des parties a été de réceptionner tous les ouvrages à ladite date ;

13. Considérant que, si la commune de Vicq se prévaut des stipulations de l’article 1.2 du chapitre II du cahier des clauses techniques particulières applicable au marché conclu avec la société défenderesse, aux termes desquelles « l’entreprise s’engage sur le remplacement du matériel en cas d’impossibilité d’en obtenir un rendement satisfaisant », ces stipulations ne constituent qu’une réserve pour la présentation d’une solution variante et ne sauraient avoir ni pour objet, ni pour effet de soumettre la SAS Eparco Assainissement à une obligation de résultat s’étendant au-delà de la réalisation des ouvrages ;

14. Considérant, par conséquent, que la réception rappelée au point 12 a mis fin aux relations contractuelles entre la commune et la société en ce qui concerne la réalisation des quatre-vingt cinq installations litigieuses ; que, dès lors, s’agissant de ces installations, seule l’action en garantie décennale, dont la commune de Vicq demeure titulaire compte tenu des conventions conclues avec les propriétaires, peut être invoquée à l’égard de la SAS Eparco Assainissement ;

Sur la responsabilité décennale de la SAS Eparco Assainissement :

En ce qui concerne la nature et l’origine des désordres :

15. Considérant qu’en application des principes dont s’inspire l’article 1792 du code civil, tout constructeur est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination ;

16. Considérant qu’il résulte de l’instruction, notamment de l’expertise judiciaire ordonnée par le tribunal administratif, que peu de temps après la réception des ouvrages évoquée au point 12, sur l’ensemble des dispositifs individuels d’assainissement mis en place par la SAS Eparco Assainissement, trente-cinq ont présenté des désordres consistant en le colmatage des filtres et le dysfonctionnement complet de la filière et entraînant le débordement des ouvrages, des odeurs nauséabondes ainsi qu’une pollution des eaux souterraines et superficielles ; que l’expert a également relevé que toutes les installations comportaient des écarts entre les ouvrages et les tolérances de pose non conformes à la réglementation en vigueur, aux règles de l’art et aux spécifications propres au constructeur ;

17. Considérant qu’il résulte de l’instruction que ces désordres, par leur nature même, sont susceptibles de rendre les ouvrages impropres à leur destination, c’est-à-dire l’assainissement des eaux usées ;

18. Considérant, en outre, qu’il résulte du rapport d’expertise que ces désordres sont exclusivement imputables à la SAS Eparco Assainissement ; qu’en effet, l’expert relève que lesdits désordres résultent notamment de l’utilisation d’un procédé technique qu’elle a elle-même conçu, constitué par l’installation de 62 filtres compacts à « zéolithe » en lieu et place de filtres à sable ; qu’elle a de même conçu techniquement les paniers de sortie de fosse qui se sont révélés défaillants, entraînant dans certains cas des départs de boue ; qu’il résulte aussi de l’instruction que la mise en œuvre des installations par le sous-traitant de la SAS Eparco Assainissement a également été défectueuse ; que l’expertise relève enfin huit défauts qualifiés de rédhibitoires tenant à une aération aval déficiente, une épaisseur et un nivellement du filtre compact insuffisants ou incorrects, un réseau d’épandage du même type de filtre colmaté, une interface en fond de couche « zéolithe » colmatée, en des paniers de sortie de fosse qui ont chuté, en la présence de racines dans le filtre et en un colmatage du dispositif d’infiltration ;

19. Considérant que, par conséquent, alors que la SAS Eparco Assainissement n’a pas produit en défense et donc n’allègue pas que les désordres constatés seraient, au moins pour partie, imputables à d’autres intervenants ou résulteraient d’une faute du maître d’ouvrage, lesdits désordres doivent donc être regardés comme exclusivement imputables à cette société ; qu’ainsi, il y a lieu de mettre la société Geeb hors de cause et de condamner la seule SAS Eparco Assainissement à réparer ces désordres ;

En ce qui concerne les préjudices :

Quant aux travaux de réparation :

20. Considérant que le montant du préjudice dont le maître d’ouvrage est fondé à demander réparation aux constructeurs en raison des désordres affectant l’ouvrage qu’ils ont réalisé correspond aux frais qu’il doit engager pour les travaux de réfection ; qu’en outre, si la victime doit recevoir la réparation intégrale du préjudice qu’elle a subi, l’indemnisation qui lui est allouée ne doit pas dépasser le montant nécessaire à la réparation du dommage ;

21. Considérant qu’il résulte de l’instruction, notamment des constatations de l’expert à la date de rédaction de son rapport, que la réparation du dommage induit par les désordres évoqués plus haut consiste, selon les différents cas qu’il a listés, à la reprise totale de l’installation d’assainissement ou à la révision des filtres compacts ; que l’expert chiffre le coût des réparations imputables à la SAS Eparco Assainissement à 384 216,64 euros HT, incluant 10 % pour aléas et 12 % d’honoraires de maîtrise d’œuvre ; qu’il y a donc lieu de mettre à la charge de la société cette somme ;

22. Considérant, en revanche, que si la commune de Vicq demande également une somme de 14 000 euros correspondant au remplacement de l’intégralité des paniers de sortie de fosse ainsi qu’une somme de 30 000 euros pour les études préalables à ce remplacement, elle n’apporte à l’appui de cette demande aucun élément de nature à démontrer la réalité ainsi que la nécessité de ces dépenses au regard des seuls désordres qu’elle invoque et qui sont ceux repris par l’expert ; qu’elle n’est donc pas fondée à réclamer lesdites sommes ;

Quant à la taxe sur la valeur ajoutée :

23. Considérant que le montant du préjudice évalué au point 21 dont le maître de l’ouvrage est fondé à demander réparation comprend, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître de l’ouvrage ne relève d’un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle dont il est redevable à raison de ses propres opérations ;

24. Considérant que la SAS Eparco Assainissement, qui n’a pas produit en défense, n’établit pas que la commune de Vicq relèverait d’un régime fiscal lui permettant normalement de déduire tout ou partie de la taxe sur la valeur ajoutée à raison de ses propres opérations de travaux ;

25. Considérant que, par conséquent, l’indemnisation du préjudice de la commune requérante s’agissant des travaux de réparation doit être évaluée toutes taxes comprises à la date du présent jugement ;

Quant à la réévaluation du montant en fonction du coût de l’indice INSEE de construction :

26. Considérant que la commune de Vicq demande que la somme évaluée au point précédent toutes taxes comprises soit elle-même réévaluée en fonction du coût de l’indice INSEE de la construction à la date du présent jugement ; que cependant l’évaluation des dommages subis doit être faite à la date où, leur cause ayant été déterminée et leur étendue prévisible étant connue, il pouvait être procédé aux travaux destinés à les réparer ; qu’en l’espèce, cette date peut être fixée comme celle à laquelle l’expert a déposé son rapport qui définit avec une précision suffisante la nature et l’étendue des travaux nécessaires ; que la commune requérante ne justifie pas avoir été dans l’impossibilité technique ou financière de réaliser à cette période lesdits travaux, alors d’ailleurs qu’il résulte de l’instruction que certains ont pu être menés ; que, par suite, il y a lieu de rejeter ses prétentions tendant à ce que le montant de l’indemnisation proposée par l’expert soit actualisé en fonction de l’évolution de l’indice des coûts à la consommation ;

Quant au surcoût de gestion induit par le litige :

27. Considérant que, si la commune de Vicq demande également une somme forfaitaire de 100 000 euros correspondant aux frais supplémentaires liés à la gestion du litige qui l’oppose à la SAS Eparco Assainissement, elle n’apporte pas d’élément permettant d’établir la réalité de ce préjudice, qui serait distinct de la somme accordée au titre des dépens ou des frais exposés pour l’instance et non compris dans les dépens ; que cette demande ne peut ainsi qu’être rejetée ;

Quant à la réparation des désordres postérieurs aux opérations d’expertise :

28. Considérant, enfin, que la commune de Vicq sollicite la condamnation de la société défenderesse à lui verser, à titre provisionnel, une somme de 200 000 euros pour la réparation des désordres intervenus sur les dispositifs individuels d’assainissement après la visite de l’expert judiciaire ; que, toutefois, pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point 22, la commune de Vicq n’apporte aucune preuve de la réalité de ces désordres postérieurs à la visite de l’expert ; qu’ainsi, sans qu’il soit besoin d’ordonner une expertise, il y a lieu de rejeter cette demande ;

29. Considérant qu’il résulte ainsi de l’ensemble de ce qui précède que la SAS Eparco Assainissement doit être condamnée à payer à la commune de Vicq une somme de 384 216,64 euros assortie de la TVA applicable à la date du présent jugement ; que, compte tenu de la saisie-attribution intervenue le 13 décembre 2011 en exécution de l’ordonnance du juge des référés de la Cour administrative d’appel de Versailles du 7 novembre 2011, il y aura lieu de déduire de cette somme celle de 75 815,63 euros prélevée par l’huissier ; qu’en outre, il conviendra également de déduire du montant total la somme supplémentaire versée le cas échéant, sous réserve de justificatif d’un versement effectif, en exécution de cette même ordonnance ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

30. Considérant que la somme accordée à la commune de Vicq évaluée au point 29 sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2009, date d’enregistrement de la présente requête ;

31. Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée dans la requête introductive d’instance de la commune de Vicq le 24 novembre 2009 ; que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d’une année ; qu’en ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu’à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière qu’il y a donc lieu de faire droit à cette demande de capitalisation à compter du 24 novembre 2010, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d’intérêts, ainsi qu’à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les dépens :

32. Considérant qu’aux termes de l’article R. 761-1 du code de justice administrative : « Les dépens comprennent la contribution pour l’aide juridique prévue à l’article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d’expertise, d’enquête et de toute autre mesure d’instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l’Etat … » ;

33. Considérant, en premier lieu, qu’il y a lieu de mettre à la charge définitive de la SAS Eparco Assainissement les frais et honoraires de l’expertise confiée à M. X, taxés et liquidés à la somme de 76 712,64 euros TTC par ordonnance du président du tribunal du 10 juin 2009 ;

34. Considérant, en revanche, en second lieu, que les frais supportés par la commune de Vicq pour la réalisation d’un audit technique en décembre 2006 ainsi que ceux mis à sa charge dans le cadre de la saisie-attribution de sommes détenues par la SAS Eparco Assainissement ne constituent pas des dépens au sens des dispositions précitées ; que, par conséquent, la commune requérante n’est pas fondée à demander à ce que la SAS Eparco Assainissement soit condamnée à supporter ces frais au titre des dépens de l’instance ;

Sur les frais exposés pour l’instance et non compris dans les dépens :

35. Considérant, d’une part, que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la SAS Eparco Assainissement au profit de la commune de Vicq une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

36. Considérant, d’autre part, que dans les mêmes circonstances, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de la commune requérante, qui n’est au demeurant pas la partie perdante dans la présente instance, ou de toute autre partie les sommes réclamées par la SAS Eparco et la société Geeb au titre des frais qu’elles ont exposés pour l’instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La SAS Eparco Assainissement, représentée par la Selarl A B, liquidateur, est condamnée à verser à la commune de Vicq une somme de 384 216,64 euros assortie de la TVA applicable à la date du présent jugement, dont il conviendra de déduire une somme 75 815,63 euros résultant de la saisie-attribution du 13 décembre 2011 ainsi que celle de 459 523,10 euros TTC, accordée à titre provisionnel par le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Versailles du 7 novembre 2011, sous réserve de la preuve de son versement, cette dernière somme devant elle-même être réduite des 75 815,63 euros saisis en exécution de l’ordonnance du juge des référés.

Article 2 : Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2009. Les intérêts échus à la date du 24 novembre 2010 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La SAS Eparco Assainissement, représentée par la Selarl A B, liquidateur versera à la commune de Vicq une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la SAS Eparco et la société Geeb sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Les frais et honoraires de l’expertise confiée à M. X, liquidés et taxés à la somme de 76 712,64 euros par ordonnance du président du tribunal du 10 juin 2009 sont mis à la charge définitive de la SAS Eparco Assainissement, représentée par la Selarl A B, liquidateur.

Article 6 : Le présent jugement sera notifié à la commune de Vicq, à la SAS Eparco Assainissement, représentée par la Selarl A B, liquidateur, à la SAS Eparco et à la société Geeb.

Copie en sera adressée, pour information, à M. X, expert.

Délibéré après l’audience du 9 janvier 2014 où siégeaient :

— M. Gros, président,

— Mme Malet, premier conseiller,

— M. Durand, conseiller,

Lu en audience publique le 6 février 2014.

Le rapporteur, Le président,

T. Durand L. Gros

Le greffier,

C. Benoit-Lamaitrie

La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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Tribunal administratif de Versailles, 6 février 2014, n° 0910749