Tribunal de commerce de Paris, 15eme chambre, 22 décembre 2014, n° 2013023774

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Chronologie de l’affaire

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Gouache Avocats · 28 avril 2015

La décision rendue, le 22 décembre 2014, par le tribunal de commerce de Paris à l'encontre de sociétés du groupe OPTIC 2000 marque une nouvelle étape dans la stratégie judiciaire du groupe OPTICAL CENTER, qui a introduit ces dernières années plusieurs instances en concurrence déloyale à l'encontre d'enseignes concurrentes. (Vous pouvez visionner ici une vidéo définissant la concurrence déloyale). En raison de l'application par les magasins du groupe Optic 2000de la pratique de "l'optimisation de factures", constitutives d'une fraude à l'assurance, deux sociétés du groupe ont été, aux …

 

Gouache Avocats

La décision rendue, le 22 décembre 2014, par le tribunal de commerce de Paris à l'encontre de sociétés du groupe OPTIC 2000 marque une nouvelle étape dans la stratégie judiciaire du groupe OPTICAL CENTER, qui a introduit ces dernières années plusieurs instances en concurrence déloyale à l'encontre d'enseignes concurrentes. (Vous pouvez visionner ici une vidéo définissant la concurrence déloyale). En raison de l'application par les magasins du groupe Optic 2000de la pratique de "l'optimisation de factures", constitutives d'une fraude à l'assurance, deux sociétés du groupe ont été, aux …

 
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Sur la décision

Référence :
T. com. Paris, 15e ch., 22 déc. 2014, n° 2013023774
Juridiction : Tribunal de commerce de Paris
Numéro(s) : 2013023774

Texte intégral

Copie exécutoire : Me Martine CHOLAY

Copie aux demandeurs : 2 Copie aux défendeurs ; 5

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS AFFAIRES CONTENTIEUSES 15EME CHAMBRE

JUGEMENT PRONONCE LE 22/12/2014 par sa mise à disposition au Greffe

jf RG 2013023774

ENTRE :

SAS Y Z, dont le siège social est […]

RCS de Paris n° B 382 372 993

Partie demanderesse : assistée de Me Michèle BRAULT, Avocat (B1170) et comparant par Me Martine CHOLAY, Avocat (B242).

ET :

1) SA […], dont le siége social est […]

Partie défenderesse : assistée du Cabinet FIDAL – Me Marie Thérèse DELIGNAT LAVAUD, Avocat au Barreau des Hauis de Seine, 4-6, avenue d’Alsace – […] et comparant par Me E F DE GRANVILLIÈERS, Avocat (C0030).

2) SAS LISSAC ENSEIGNE, dont le siège social est […]

Partie défenderesse : assistée du Cabinet FIDAL – Me Marie Thérèse OELIGNAT LAVAUD, Avocat au Barreau des Hauts de Seine, 4-6, avenue d’Alsace – […] et comparant par Me E F G, Avocat (COD30).

3) Société AUDIOPTIC TRADE SERVICES, dont le siége social est […]

Partie défenderesse : assistée du Cabinet FIDAL – Me Marie Thérèse DELIGNAT LAVAUD, Avocat au Barreau des Hauts de Seine, 4-6, avenue d’Alsace – […] et comparant par Me E F G, Avocat (C0030).

4) Société GADOL, Groupement d’Achats des Opticiens Lunetiers, dont le siège social est […]

Partie défenderesse : assistée du Cabinet FIDAL – Me Marie Thérèse DELIGNAT LAVAUD, Avocat au Barreau des Hauts de Seine, 4-6, avenue d’Alsace – […] et comparant par Me E F G, Avocat (C0030).

APRES EN AVOIR DELIBERE

LES FAITS :

La société Y SERVICES a pour activité la vente au détail d’équipements optiques. Elle exploite des magasins en succursales et est également franchiseur pour des sociétés exploitant des magasins sous son enseigne.

Les enseignes OPTIC 2000 et LISSAC sont exploitées par le Groupe OPTIC 2000, le plus important animateur de réseaux en France, ainsi que par des sociétés indépendantes sous contrat de franchise ou d’adhésion. La société GADOL OPTIC 2000 est organisée sous forme de société coopérative. L’enseigne LISSAC est exploitée directement ou par contrat

|

UN

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG : 2013023774 JUGEMENT DU LUNDI 22/12/2014 -. AFFAIRES CONTENTIEUSES 15EME CHAMBRE SB* – PAGE 2

de franchise. La société AUDIOPTIC TRADE SERVICES est un GIE de logistique et de services pour tous les magasins du groupe OPTIC 2000.

Compte tent du prix important des lunettes pour le consommateur, la couverture des frais d’optique par les mutuelles constitue un véritable prix d’appel. Elles dispensent leurs assurés de faire l’avance des frais auprès des opticiens, le montant restant à la charge des assurés étant souvent faible. Les opticiens ont la plupart du temps des accords avec les grandes mutuelles, leur permettant de se faire régler directement..En l’absence de contrôle par les mutuelles, certains opticiens leur imputent un montant maximai d’achat de lunettes, ce qui permet d’attirer les consommateurs en diminuant le prix payé.

Y Z reproche à OPTIC 2000 et LISSAC de pratiquer ainsi une fausse facturation, constitutive selon elle de concurrence déloyale.

LA PROCEDURE :

C’est dans ces conditions que :

» Suivant assignation en date du 22 mars 2013 dûment signifiée, réitérée par des conclusions des 13 septembre 2013, 14 mars et 4 juillet 2014, Y Z demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures, de :

Vu l’article 1382 du code civil

— Constater que les sociétés défenderesses ont commis des faits de concurrence déloyale au détriment de la SAS Y Z ;

— - Leur faire injonction de cesser ces agissements, sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée après le prononcé du jugement ;

Au vu du dommage déjà réalisé

— - Condamner in solidum les défenderesses à verser la somme de 29,5 millions d’euros à la SAS Y Z à litre de dommages intérêts pour le préjudice subi ;

— Condamner sin solidum les mêmes à verser la somme de 500.000 euros à SAS Y Z à titre de dommages intérêts pour le préjudice commercial subi ;

— Déterminer quelle est la part de responsabilité solidaire des sociétés franchisées mises en cause par voie d’intervention forcée ;

— Ordonner la publication du jugement à intervenir dans 3 quotidiens nationaux au choix de la société Y Z et aux frais solidaires des défenderesses dans les publications professionnelles suivantes : Acuité, Bien Vu et L’Essentiel de l’Optique, toujours aux frais des défenderesses, ainsl que sur la page d’accueil des sites internet OPTIC 2000 et LISSAC pendant un mois, et ce sous astreinte de 1.000 Euros par jour de retard à compter d’un mois après le prononcé du jugement ;

— - Condamner in solidum les mêmes à verser la somme de 100,000 euros à ja société Y Z sur le fondement de l’article 700 CPC ainsi qu’à payer les enliers dépens ;

— - Les débouter de toutes leurs demandes ;

— - Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

» Par des conclusions des 13 septembre et 8 novembre 2013 puis des conclusions régularisées à l’audience du juge chargé d’instruire l’affaire le 2 mai 2014, GADOL, Groupement d’achat des opticiens lunetiers, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures, de ; Vu les articles 2224 et 2243 du code civil Vu les articles 9 et 15 du CPC Vu l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme Dans tous les cas

— - Déclarer itrecevable pour acquisition de la prescription l’action intentée par Y

Z pour la période antérieure au 22 mars 2008 ;

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En conséquence – - Ecarter des débats les pièces adverses n° 14, 15, 16, 17, 19, 29,30, 34 à 60 incluse et 67 ; A titre principal – Déclarer irrecevable l’action en concurrence déloyale engagée par Y Z à l’encontre de GADOL OPTIC 2000 et ce en raison de l’absence de preuve versée au débat à l’appui de la demande ; – Déclarer irrecevable l’action en concurrence déloyale engagée par Y Z à l’encontre de GADOL OPTIC 2000 et ce en raison de l’absence d’intérêt à agir ; – Déclarer jrrecevable l’action en concurrence déloyale engagée par Y Z à l’encontre de GADOL OPTIC 2000 et ce en raison de l’absence de qualité à agir de GADOL OPTIC 2000 pour sa défense; En conséquence – - Débouter Y Z de l’ensemble de ses demandes ; Subsidiairement – - Juger que les procédés et moyens de preuve invoqués par Y 2000 sont déloyaux ; En conséquence – - Ecarter des débais les pièces adverses n° 66, 69, 82 à 84 incluses, 94, 99, 108 à 110 incluse, 112 ; – - Juger que la société Y Z n’apporte pas la preuve de la commission par la Coopérative, d’une quelconque faute ; – - Constater qu’au contraire la Coopérative OPTIC 2000 n’a commis aucune faute ; En conséquence – - Débouter Y Z de l’ensemble de ses demandes ; A litre infiniment subsidiaire – - Juger que la société Y Z ne rapporte pas la preuve d’un préjudice et d’un lien de causalité ; En conséquence – - Débouler Y Z de l’ensemble de ses demandes ; A titre reconventionnel – Juger que la société Y Z a commis des faits de dénigrement en désorganisation constitutifs de concurrence déloyale au détriment de la Coopérative GADOL OPTIC 2000 ; En conséquence – - Condamner Y Z à verser à la Coopérative GADOL OPTIC 2000 la somme de 10.000 euros à titre de dommages intérêts ; – Condamner Y Z à verser à la Coopérative GADOL OPTIC 2000 la somme de 50.000 euros conformément aux dispositions de l’article 700 du CPC ; – - Condamner Y Z en tous les dépens ; – Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant opposition, appel et sans caution.

» Par des conclusions des 13 septembre et 8 novembre 2013, LISSAC ENSEIGNE SAS demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures, de : Dans tous les cas – - Déclarer irrecevable pour acquisition de la prescription l’action intentée par Y Z pour la période antérieure au 22 mars 2008 ; En conséquence – - Ecarter des débats les pièces adverses n° 13, 29, 30, 34 à 60 incluse;

A titre principal L_ i

Alt

TRIBUNAL OE COMVERACE O€ PARIS N° RG ; 2013023774 JUGEMENT OU LUNDI 22/12/2014 AFFAIRES CONTENTIEUSES15EME CHAMBRE SB* – PAGE 4

— Déclarer irrecevable l’action en concurrence déloyale engagée par Y Z à l’encontre de LISSAC ENSEIGNE et ce en raison de l’absence de preuve versée au débat à l’appui de la demande ;

— Déclarer irrecevable l’action en concurrence déloyale engagée par Y Z à l’encontre de LISSAC ENSEIGNE et ce en raison de l’absence d’intérêt à agir ;

— Déclarer irecevable l’action en concurrence déloyale engagée par Y Z à l’encontre de LISSAC ENSEIGNE et ce en raison de l’absence de qualité à agir de LISSAC ENSEIGNE pour sa défense;

En conséquence – - Débouter Y Z de l’ensemble de ses demandes ; Subsidiairement

— Juger que les procédés et moyens de preuve invoqués par Y 2000 sont

déloyaux ; En conséquence

— - EÉcarter des débats la piéce adverse n° 111 ;

— - Juger que la société Y Z n’apporte pas la preuve de la commission par LISSAC ENSEIGNE d’une quelconque faute ;

— - Constater qu’au contraire LISSAC ENSEIGNE n’a commis aucune faute ;

En conséquence – - Débouter Y Z de l’ensemble de ses demandes ; A titre infiniment subsidiaire – - Juger que la société Y Z ne rapporte pas la preuve d’un préjudice et d’un lien de causalité ; En conséquence – - Débouter Y Z de l’ensemble de ses demandes ; A titre reconvertionnel

— Juger que la société Y Z a commis des fais de dénigrement en désorganisation constitutifs de concurrence déloyale au défriment de LISSAC ENSEIGNE ;

En conséquence

— - Condamner Y Z à verser à LISSAC ENSEIGNE la somme de 10.000 euros à litre de dommages intéréts ;

— - Condamner Y Z à verser à LISSAGC ENSEIGNE la somme de 50.000 euros conformément aux dispositions de l’article 700 du CPC ;

— - Condamner Y Z en tous les dépens ;

— Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant opposition, appel et sans caution.

» Par des conclusions du 13 septembre 2013, AUDIOPTIC TRADE SERVICES demande au tribunal de : – - Prononcer sa mise hors de cause ; – Condamner Y Z à lui verser la somme de 5.000 euros au litre de l’article 700 CPC ; – - Condamner Y Z aux entiers dépens ; – - Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant opposition, appel et sans caution.

» Par un jugement du 23 mai 2014, ce tribunal a constaté que l’incident de communication de pièces précédemment soulevé élait purgé et a renvoyé la cause au 20 juin 2014 pour dépôt par Y Z de ses conclusions au fond et réattribution au juge à son audience du 25 juillet 2014.

DE

TRIAUMAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG : 2013023774 JUGEMENT ou 22/12/2014 AFFAIRES CONTENTIEUSES 15EME CHAMBRE SB* – PAGE 5

» Par des conclusions récapitulatives du 4 juillet 2014, Y Z réitère ses demandes.

A l’audience du juge chargé d’instruire l’affaire du 5 septembre 2014 les parties entendues, les débats ont été clos et le jugement mis en délibéré pour être prononcé par mise à disposition au greffe du tribunal le 7 novembre 2014, date reportée au 22 décembre 2014, les parties en sont avisées.

LES MOYENS

Après avoir pris connaissance de tous les moyens et arguments développés par les Parties, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, le tribunal les résumera succinctement de la façon suivante :

Les défenderesses soutiennent principalement que : Sur la prescription partielle ;

— - Une instance avait été initiée par Y Z le 18 janvier 2008 mais que ce tribunal a constaté la péremption de l’inslance par un jugement du 12 juillel 2012 ; que la prescription de cinq ans doit s’appliquer aux pièces produites dans le cadre de

cette procédure ; – - Certaines pièces produites à la présente instance sont effectivement antérieures de

plus de cinq ans à l’assignation du 22 mars 2013 ; – - Y Z a volontairement laissé l’action se périmer.

Sur l’exception d’irrecevabilité :

— Y Z n’a ni intérêt, ni qualilé à agir ; qu’en effet, le préjudice est en grande partie allégué par des franchisés, et non des succursales ; qu’il n’est donc pas personnellement subi par Y Z ;

— - Les griefs ne concernent pas GADOL en tant que coopérative mais uniquement ses adhérents.

Y Z soutient principalement que : Sur la prescription partielle :

— - Elle n’a jamais eu l’intention de laisser l’action se périmer ;

— - La prescription ne s’applique pas aux pièces dont il est demandé le rejet ;

— La mise en cause de la responsabilité délictuelle du Groupe OPTIC 2000 pour concurrence défoyale porte sur des faits qui se sont poursuivis sans interruption jusqu’en 2013 ; l’infraction est donc continue.

Sur l’exception d’irrecevabilité :

— - Y Z a qualité à agir ;

— Y Z à intérêt à agir dès lors qu’un tiers des magasins exploitent son enseigne, sa marque et son réseau et que les praliques reprochées affectent directement son chiffre d’affaires ; qu’en outre, les sociélés du Groupe OPTIC 2000 agissent en étroite dépendance, sous une unité de contrôle et de direction unique, avec l’apparence de ne former qu’une entité ; L

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG : 2013023774 JUGEVENT DU LUNOGI 22/12/2014 AFFAIRES CONTENTIEUSES 15EME CHAMBRE SB*-PAGEG

— - Le préjudice subi par Y Z justifie une action en réparation à l’encontre de tout magasin exploitant sous enseigne OPTIC 2000 ou LISSAC ;

Sur le fond

Y Z soutient que :

— Les défendsresses ont pratiqué une fausse facturation de grande ampleur et la simple transgression d’une inlerdiction légale constitue une faute ;

— - Celte pratique répandue chez les opliciens a été dénoncée par les muluelles ;

— Y Z se trouve de ce fait confrontée à une côncurrence déloyale conduisant à un détournement de clientéle, la faute des défenderesses ayant un lien de causalité avec son préjudice ;

— - La sanction encourue par les défenderesses n’égalera jamais le bénéfice qu’elles ont réalisé;

— - Les adhérents de GADOL sont responsables nonabslant le statut de coopérative.

LISSAC rétorque principalement que :

— - L’attestation produite (pièce n° 111) par REINE OPTIQUE n’est pas recevable en ce qu’elle méconnaît les exigences de l’article 202 du code de procédure civile ; qu’elle a au demeurant été obtenue dans des conditions déloyales et que le lien entre REINE OPTIQUE et LISSAC n’est pas démontré ;

— - La faute reprochée à LISSAC n’est ni précisée, ni établie et semble se résumer à une faute non intentionnelle d’imprudence et de négligence ;

— - En obligeant LISSAC à détailler les mesures internes mises en œuvre pour interdire tous faits de fausse facturation comparables aux faits reprochés, Y Z acquiert la connaissance de l’organisation interne de son concurrent ;

— - LISSAC a mis en place, dans l’exercice et la limite de ses pouvoirs de franchiseur, de nombreuses mesures pour tenter de prévenir toute facturation de complaisance ;

— En tout état de cause, à supposer que la faute de LISSAC soit retenue, Y Z ne rapporte pas la preuve du lien de causalité avec le préjudice subl.

GADOL OPTIC 2000 soutient quant à elle principalement que :

— Les faits non prescrits ne la concement pas en sa qualité de coopérative mais visent des adhérents ; or elle est une personne morale distincte de ses membres lesquels sont des commerçants indépendants ;

— - Elle n’exploite aucun magasin en propre et n’a donc pas de contact avec des clients ; qu’aucune faute ne peut lui être reprochée ;

— Il appartient à Y Z, au visa de l’article 1382 du code civil, de démontrer la faute personnelle de GADOL et non d’exiger de celle-ci qu’elle prouve l’inexistence de la faute, preuve impossible ;

— Les atlestations produites par Y Z sur les faits non prescrits sont invalides au regard de l’article 202 du CPC ; elles ne comportent en outre pas la mention de l’absence de lien de subordination ;

— A litre reconventionnel, l’action d’Y Z, se présentant comme l’unique

enseigne n’octroyant pas de facture de complaisance, est constitutive de concurrence défoyale.

SUR CE, LE TRIBUNAL L\

Sur la prescription

TRIBUNAL DE COMMERCE CE PARIS N° RG : 2013023774 JUGEMENT DU LUNDI 22/12/2014 AFFAIRES CONTENTIEUSES 15EME CHAMBRE SB* – PAGE 7

Altendu que par jugement du 12 juillet 2012, ce tribunal a jugé que l’instance initiée par Y Z les 14 et 17 janvier 20086 était périmée ;

Attendu que certaines attestations fournies à l’appui de la présente assignation sont antérieures de plus de cinq ans à l’assignation du 22 mars 2013, à savoir : – - L’attestation de Madame X du 24 septembre 2007, – - Les attestations du personnel d’Y Z, – Les attestations des membres du réseau d’Y Z, toutes établies entre le 21 et le 27 novembre 2007 ;

Attendu que l’article 2224 du code civil dispose que « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le tilulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l’exercer » ;

Attendu que la loi 2008-561 du 17 juin 2008 qui a réduit le délai de prescription applicable en matière civile de dix à cinq ans prévoit que le nouveau délai s’applique aux prescriptions en cours, sans toutefois que la durée totale ne puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ;

Attendu que l’instance introduite en 2008 n’a pas eu pour effet d’interrompre la prescription, la péremption ayant été constatée par jugement du 12 juillet 2012 ;

Attendu qu’Y Z ne démontre pas au surplus que les faits aient été continus ;

Attendu qu’aux termes de l’article 389 du CPC, on ne peut opposer « aucun des actes de la procédure périmée ou s’en prévaloir » ; que la prescription n’a donc pes élé interrompue depuis l’assignation de février 2008 ; le tribunal dira l’action d’Y Z prescrite sur le fondement des pièces citées (piéces Y Z n°s 14, 15, 16, 17, 19,29, 30, 34 à 60 incluse et 67) qui seront écartées des débats.

Sur l’exception d’irrecevabilité

Ailendu qu’au regard de l’article 9 du CPC, le demandeur doit justifier d’un intérêt à agir né et actuel, personnel et légitime ;

Aiflendu qu’Y Z exploite cent magasins en succursales et a consenti également plus de 270 franchises ;

Altendu que les franchisés sont des entrepreneurs indépendants qui disposent de leur fonds de commerce et d’une clientèle ; que le préjudice résultant du détournement de clientéle leur est donc personnel mais que l’intérêt personnel d’Y Z réside dans la défense de sa marque, de son réseau et de son chiffre d’affaires, impacté directement par les pratiques alléguées ; le tribunal déboutera les défenderesses de leur demande de ce chef et dira Y Z recevable en ses demandes ;

Atlendu que les sociétés assignées partagent les mêmes locaux, qu’elles ont des dirigeants communs, qu’elles onl des services administratifs communs, que les organes de contrôle et de direction sont uniques, que l’ensemble des publications relatives à l’enseigne ne font référence qu’au groupe OPTIC 2000 et aux enseignes ;

Atlendu que le comportement des sociétés assignées agissant en étroite dépendance sous

une unité de contrôle et de direction unique justifie l’intérêt à agir d’Y Z contre toute société dont la dénominalion comporte ou reprend OPTIC 2000 ou LISSAC.

l.

pUZ)

TRIBUNAL DE COMMERCE O€ Paris N° RG : 2013023774 JUGEMENT DU LUNDI 22/12/2014 AFFAIRES CONTENTIEUSES 15EME CHAMBRE SB*- PAGE 8

Sur la concurrence déloyale Sur la faute

Attendu que la sociélé LISSAC ENSEIGNE est franchiseur de l’enseigne « LISSAC » et ne peut étre tenue des actes reprochés à ses franchisés ; qu’aucun fait n’est reproché à LISSAC ENSEIGNE : le tribunal mettra LISSAC ENSEIGNE hors de cause ;

Attendu que AUDIOPTIC TRADE SERVICES est un Groupement d’Intérêt Economique dont l’activité est «La mise en commun des connaissances, des expériences et moyens techniques et financiers des membres et ce dans le domaine de l’optique et de l’acoustique » ; que le GIE n’a aucune activité de vente de produits d’optique-lunetterie auprès des consommateurs ; le tribunal mettra AUDIOPTIC TRADE SERVICES hors de cause :

Attendu que lorsqu’une pratique est interdite, la jurisprudence considère qu’il s’agit d’un acte de concurrence illégale qui, de ce fait, constitue également un acte de concurrente déloyale ;

Attendu que la faute est réalisée par la seule transgression d’une règle précisée par un lexte ;

Attendu que la fausse facturation permettrait aux opticiens OPTIC 2000 ou LISSAC d’offrir au consommateur des prix défiant toute concurrence, puisque ce dernier ne payerait qu’un prix minime, la mutuelle prenant en charge le règlement de la facture établie par les opticiens indélicats;

Attendu qu’il ressort des nombreuses pièces versées aux débals, quand bien même certaines seraient imparfaites, que ces dernières années, Y Z a pu se rendre compte par le témoignage de clienis et par la baisse de chiffres d’affaires de certains magasins, que la concurrence drainait la clientèle en adoptant ces pratiques ;

Attendu qu’au vu des éléments produits, le système apparait étre le suivant: les mutuelles remboursent de plusieurs façons: soit un forfait monture souvent limité à un pourcentage du plafond mensuel de la sécurité sociale et un pourcentage (de 90% à 100%) des frais réels sur les verres, soit un forfait de plusieurs centaines d’euros alloué par bénéficiaire el par an, sauf pour certaines mutuelles qui ne limitent pas en cas de casse, et afin que le consommateur ne soit pas rebuté par le prix de son équipement, l’opticien indélicat lui propose de gonfler le prix des verres et de minorer celui des montures pour que le maximum du remboursement soit atteint ou de choisir une autre paire qui n’apparaîtra pas sur la facture, mais qui permet d’atteindre le maximum du forfait remboursé par la mutuelle;

Attendu que les agissements dénoncés constituent une fraude aux mutuelles qui versent les prestations pour des produits qui n’y donnent pas droit et un abus de confiance ;

Attendu que ces pratiques constituent des actes de concurrence déloyale puisque ces pratiques conduisent immanquablement à détourner la clientèle des magasins Y Z :

A_ttendu que les témoignages sont suffisamment nombreux et concordants pour que le tribunal puisse retenir le faisceau de preuves établissant que ce type de pratiques exisle ;

la

Jus -

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG : 2013023774 JUGEMENT DU Luxot 22/12/2014 AFFAIRES CONTENTIEUSES 15EME CHAMBRE SB* – PAGE 9

Attendu que les quelques critiques formelles qui sont portées à certains d’entre eux n’enlévent pas leur caractère probant ;

Attendu que la comparaison entre devis et factures présentées fait bien ressortir la manipulation effectuée ;

Attendu que les allégations des Défenderesses sur de prétendues pratiques elles mêmes déloyales d’Y Z ne sont pas étayées et, en tout état de cause, ne les exonérent pas de teurs responsabilités ;

Altendu que, de l’ensemble des pièces, il ressort qu’en professionnel reconnu, les Défenderesses ne peuvent ignorer ce type de pratiques qui ne sont pas rares et isolées ;

Attendu que les Défenderesses ne démontrent pas, sauf GADOL OPTIC 2000, avoir initié des actions d’envergure, d’information et de sanctions auprés de leurs franchisés pour faire cesser de telles pratiques ;

Pour ces motifs, le tribunal dira les sociétés GADOL OPTIC 2000 et […] coupables d’actes de concurrence défoyale au détriment de la société Y Z et fera injonction aux Défenderesses de cesser immédiatement ces pratiques sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée, passé le délai de 48 heures à compter de la signification du présent jugement, les déboutant de leurs demandes.

Sur le préjudice subi Attendu qu’un préjudice s’infère nécessairement de la foute commise ;

Attendu que le préjudice matériel est constitué par la perte de clientèle et une perte de gain, celle-ci étant attirée par les «facilités» que leur offrent les opticiens des sociétés Défenderesses ;

Attendu que les sociétés défenderesses ont déclaré un chiffre d’affaires de 1.109 millions d’euros pour 2010 et annoncent pour 2011 un chiffre d’affaires de 1.166 millions d’euros, dont 1.128 pour la France, soit une progression de 4,5% ;

Attendu que les dépenses purement consacrées à l’optique médicale représentent 83% du chilfre d’affaires des opticiens, soit pour GADOL OPTIC 2000 un chiffre d’affaires à ce titre de 93-,24 millions d’euros ;

Attendu qu’il apparaît que la pratique de la fausse facturation est proposée à des clients par les vendeurs des sociétés Défenderesses sans que pour autant il ne soit possible de dire précisément dans combien de magasins ce type de pratiques est présenté ;

Attendu qu’en l’absence de cette pratique, les clients attirés chez les Défenderesses se seraient répartis sur les autres enseignes, y compris Y Z, selon les critères de répartition des parts de l’ensemble du marché de l’optique médicale,

Attendu que la part du marché de l’optique de la société Y Z est de 4,5% en 2011;

Attendu que l’on peut évaluer la perte de près de 29,5 millions d’euros de chiffre d’affaires subie par Y Z sur une année, tel que cela ressort des documents versés aux

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débats ; que le manque à gagner sur cinq ans est bien supérieure et que la marge brute est de 20% ;

Le tribunal, au vu des éléments trouvés dans la cause et notamment ceux relatifs au calcul de la marge, et usant de son pouvoir d’appréciation fixera à 29,5 millions d’euros le préjudice matériel subi par la société Y Z du fait de la faute des Défenderesses et condamnera in solidum celles-cl à verser cette somme à la société Y Z.

Attendu par ailleurs qu’il est largement admis par la jurisprudence que le préjudice moral causé par le dommage apporté à la concurrence justifie en soi la réparation ;

Le tribunal condamnera in solidum les sociétés défenderesses à verser la somme de 500,000 euros à la société Y Z en réparation du préjudice commercial subi et comme il est important que les clients qui se sont défournés d’Y Z au bénéfice des Défenderesse soient Informés de la gravité des faits et que l’image d’Y Z soit restaurée auprès d’eux, il ordonnera à titre de réparation complémentaire, la publication du jugement dans les publications professionnelles suivantes : Acuité, Bien Vu et L’Essentiel de l’Optique, aux frais des défenderesses, ainsi que sur la page d’accueil des sites internet OPTIC 2000 et LISSAC pendant 30 jours, ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification du présent jugement, déboutant des autres demandes à ce titre.

Sur les demandes au titre de l’article 700 du CPC, les dépens et l’exécution provisoire Attendu que la société Y Z a dû engager des frais pour faire valoir ses droits,

Le tribunal condamnera solidairement GADOL OPTIC 2000 et SA […] à verser à la société Y Z la somme de 100,000 euros au titre de l’article 700 du CPC et aux dépens et ordonnera l’exécution provisoire compte tenu de la nature de l’affaire, sauf en ce qui concerne les mesures de publication, déboutant les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS Le tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire en premier ressort mis à disposition au greffe:

— Dit l’action de la SAS Y Z prescrite sur le fondement des pièces citées (pièces Y Z n°s 14, 15, 16, 17, 19,29, 30, 34 à 60 incluse et 67) qui seront écartées des débats ;

— - Dit la SAS Y Z recevable en ses demandes ;

— - Met les sociétés SAS LISSAC ENSEIGNE et GIE AUDOPTIC TRADE SERVICES hors de cause ;

— - Dit que les sociétés GADOL OPTIC 2000 et SA […] ont commis des fautes de concurrence déloyale au détriment de la SAS Y Z ;

— Leur fait injonction de cesser ces agissements, sous astreinte de 10,000 euros par infraction constatée passé le délai de 48 heures à compter de la significalion du présent jugement ;

— - Condamné in solidum les sociélés défenderesses à verser la somme de 29,5 millions d’euros à la SAS Y Z en réparation du préjudice matériel subi ;

— Condamne in solidum les sociétés défenderesses à verser la somme de 500.000 euros à la SAS Y Z en réparation du préjudice commercial subi ;

— - Ordonne la publication du jugement au choix de la société Y Z et aux frais in solidum des sociélés GADOL OPTIC 2000, SAS LISSAC ENSEIGNE, GIE

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AUDIOTIC TRADE SERVICES et SA […], dans les publications professionnelles suivantes : Acuité, Bien Vu et L’Essentiel de l’Optique, ainsl que sur la page d’accueil des sites internet OPTIC 2000 et LISSAC pendant 30 jours et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter du présent jugement ;

— Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement sauf en ce qui conceme les mesures de publication ;

— - Déboute les défenderesses de toutes leurs demandes ;

— - Condamne in solidum les sociétés GADOL OPTIC 2000 et SA […] à verser la somme de 25 000 euros à la SAS Y Z sur le fondement de l’article 700 du CPC ;

— - Condamne in solidum les sociétés GADOL OPTIC 2000 et SA […] aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 191,64 € dont 31,72 € de TVA.

En application des dispositions de l’article 871 du code de procédure civile, l’affaire a été débaltue le 05/09/2014, en audience publique, devant Mme A B, juge chargé d’instruire l’affaire, les représentants des parties ne s’y étant pas opposés.

Ce juge a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré du tribunal, composé de :

Mme A B, Mme C D-Lebeau et M. Pascal Gagna.

Délibéré le 05/12/2014 par les mêmes juges.

Dit que le présent jugement est prononcé par sa mise à disposition au greffe de ce tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées lors des débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La minute du jugement est signée par Mme A B, président du délibéré et par Mme Christèle Charpiot, greffier.

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Par arrêt rectificatif du 1" juillet 2015, la Cour d’appel de PARIS :

Ordonne la rectification du dispositif du jugement rendu par tribunal de commerce de Paris le 22 décembre 2014, sous le numéro d’inscription au répertoire général 2013023774, en ce sens que : – les mots « les sociétés défenderesses » sont remplacés par les mots "les sociétés GADOL

OPTIC 2000 et SA […]" ; – les mots « SAS LISSAC ENSEIGNE » et « GIE AUDIOPTIC TRADE SERVICES » sont

supprimés de la condamnation à publication ;

Dit que le reste du jugement ne subira aucune modification ;

Dit que mention de la présente décision sera portée sur la minute et sur les expéditions du jugement-rectif

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Tribunal de commerce de Paris, 15eme chambre, 22 décembre 2014, n° 2013023774