Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 21 juin 2006, n° 2004/09582

  • Dépôt désignant la défenderesse comme seul auteur·
  • Dépôts désignant la défenderesse comme coauteur·
  • Problème de titularité des modèles créés·
  • Revendication des droits par l'auteur·
  • Actes incriminés commis à l'étranger·
  • Titularité des droits sur le modèle·
  • Présomption de la qualité d'auteur·
  • Travaillant dans la même société·
  • Demandeur et défenderesse·
  • Présomption de titularité

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch., 21 juin 2006, n° 2004/09582
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 2004/09582
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 034647 ; 010121
Classification internationale des dessins et modèles : CL11-02 ; CL07-01
Référence INPI : D20060086
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Texte intégral

M. Jean-Charles G est un créateur d’arts plastiques, peintre, décorateur, concepteur de décors de théâtre et de cinéma, concepteur de mobiliers, concepteur de stands pour les salons du mobilier. Jusqu’en 1988, il a travaillé en son nom propre sous l’enseigne Ateliers Jean-Charles GUENOT, puis à travers une société dénommée CARRE D’ART constituée le 31 décembre 1987 et immatriculée le 28 juillet 1988. Mme Jacqueline M a été salariée de la société CARRE D’ART de 1991 à 2000. En 1996, M. Jean-Charles G a épousé Mme Jacqueline M qui utilise un certain nombre de pseudonymes comme Mme de P, Mme France LELEU, Mme Hélène T, Mme L ou Mme S et qui gère la société CARRE D’ART. A partir de 2001, Mme M va faire protéger les créations de la société en mentionnant comme auteurs M. Jean-Charles G et elle-même. En juillet 2002, Mme Jacqueline M va constituer une nouvelle société dénommée LA VIE DSIGN dont le nom commercial est JACQUELINE G C et déposer à compter de mars 2003 un certain nombre d’oeuvre et de modèles à son seul nom en France et à l’étranger. La société CARRE D’ART a été déclarée en liquidation judiciaire le 13 octobre 2003 et M° Armelle L a été désignée en qualité de mandataire liquidateur. En novembre 2003, une procédure de divorce est initiée par les deux époux. Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 décembre 2003, M. Jean-Charles G amis en demeure Mme Jacqueline M de retirer les dépôts et publications faites auprès de l’INPI des dessins et modèles au nom de Mme Jacqueline M Par acte en date du 4 juin 2004, M. Jean-Charles G a fait assigner Mme Jacqueline M pour lui contester la qualité de co-auteur, pour voir cesser l’exploitation contrefaisante de ses oeuvres et la voir condamner à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts. M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART, est intervenue volontairement à l’instance par conclusions du 4 octobre 2004. Dans ses conclusions récapitulatives du 27 mars 2006, M. Jean-Charles G a fait valoir une double argumentation, l’une fondée sur le droit d’auteur, l’autre sur les dépôts frauduleux effectués par Mme Jacqueline M. Il a d’une part soutenu qu’il était seul l’auteur des oeuvres, dessins et modèles déposés par Mme Jacqueline M, tant au nom de la société CARRE D’ART qu’à leurs deux noms ou au seul nom de Mme Jacqueline M et ce sur le fondement des articles L. 113-1 et L. 113-2 du Code de la propriété intellectuelle. Il a contesté à Mme Jacqueline M la possibilité de lui opposer les dispositions de l’article L. 511-9 du Code de la propriété intellectuelle qui, concerne la présomption de la qualité d’auteur du déposant mais qui ne permet qu’au véritable auteur de contester cette présomption. Il a encore précisé que Mme Jacqueline M n’a à aucun moment fait un apport personnel dérivant d’une activité créatrice, qu’un conseil ou l’apport d’une idée ne peut en aucun cas être considéré comme un apport créatif susceptible d’être considéré comme une oeuvre de l’esprit. Il a argué qu’il était créateur de vases depuis 1983 et que Mme M n’a elle aucun passé artistique. Il a prétendu que les vases « pleine lune, brin de lune, entre ciel et terre » ont été présentés

au salon « RECEVOIR 2000 » sous son seul nom et à la diligence de Mme Jacqueline M elle-même, que la divulgation sous son nom est antérieure au dépôt frauduleux effectué par Mme Jacqueline M. Il verse au débat les modèles initiaux ayant fait l’objet de moulages, les moules, les mères des moules, des attestations. Il a d’autre part prétendu que Mme Jacqueline M avait effectué des dépôts frauduleux, tant sous son seul nom pour les oeuvres suivantes : « sunny days palette money party, assiette palette, vases pleine lune » pour l’Allemagne, le Benelux, la Grèce, l’Italie, Monaco et la Suisse, que sous leurs deux noms pour les oeuvres « vase pleine lune » en Israël, au Canada, en Ukraine, au Japon. Enfin, il a précisé que Mme Jacqueline M exploitait ses oeuvres sans son consentement ce qui établit une contrefaçon. M. Jean-Charles G a demandé au tribunal de : Vu les articles L. 111-1, L. 113-1, L. 113-2 alinéa 1, L. 113-3, L. 121-1 et L. 335-3 du Code de la propriété intellectuelle Vu l’article L.512-4 du Code de la propriété intellectuelle, Vu les articles L. 511-1 à L. 511-9 du Code de la propriété intellectuelle et en l’espèce les articles L. 511-2 et L. 511-3 du Code de la propriété intellectuelle, Débouter Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN de toutes leurs demandes. Constater, ce qui n’est pas contesté par Mme Jacqueline M, que les dessins et modèles des vases « pleine lune, entre ciel et terre, iceberg et Brin de lune » n’ont pas été divulgués sous le nom de Mme Jacqueline M et n’ont pas été non plus enregistrés initialement sous le nom de Mme Jacqueline M. Dire que Mme Jacqueline M qui n’a aucun passe artistique antérieurement aux créations qu’elle revendique, ni aucun présent artistique par des créations nouvelles postérieures aux dessins et modèles objet du présent litige, ne rapporte par ailleurs aucune preuve ni commencement de preuve de ce qu’elle a créé les dessins et modèles du présent litige. Dire au vu des pièces, dessins, documents, attestations versés au débat que M. Jean- Charles G est le seul auteur des créations suivantes :

- des dessins qui seront annexés au jugement à intervenir et des moules des vases intitulés « Pleine Lune ou Full Moon », « Entre ciel et terre », « Iceberg », « Brin de Lune », « Sunny days » (sculpture en fonte d’aluminium) ;

- des dessins qui seront annexés au jugement à intervenir et des moules des assiettes dénommées PALETTE MONEY PARTY et assiette NENUPHARD et de leur réalisation,
- des dessins qui seront annexés au jugement à intervenir des verres intitulés DUO ou TWINS et de leur réalisation,
- des dessins qui seront annexés au jugement à intervenir des sièges dénommés BUBUL et des étagères dénommées BUBUL,
- des dessins qui seront annexés au jugement à intervenir des créations plastiques intitulées EVE et ANDI. Interdire en tant que de besoin à Mme Jacqueline M de se prévaloir de la qualité d’auteur créateur des dessins et modèles sus-visés. Dire que les dépôts des modèles n° 03 4747 déposé le 25 septembre 2003 publié le 5 décembre 2003 sous le numéro le 721 346 et 721 347, n° 03 4667 déposé le 25 septembre 2003 publié le 5 décembre 2003 sous le numéro 721 616 sont nuls en ce qu’ils visent Mme Jacqueline M comme seul auteur en fraude du droit moral de M. Jean-Charles G

seul auteur de ces créations. Dire que les dépôts des modèles n° 01 0121 déposé le 10 janvier 2001 publié le 13 avril 2001 sous le n° 619 237 et n° 36 311 déposé le 14 mars 2002 en Israël sont nuls partiellement en ce qu’ils visent Mme Jacqueline M en qualité de co-auteur en fraude du droit moral de M. Jean-Charles G seul auteur du vase PLEINE LUNE. Dire partiellement nuls les dépôts internationaux des dessins et modèles du VASE PLEINE LUNE effectués le 21 juin 2001 au Japon, le 6 mars 2002 au Canada, le 18 mars 2002 en Ukraine, en ce qu’ils visent Mme Jacqueline M en qualité de co-auteur en fraude du droit moral de M. Jean-Charles G seul auteur du vase PLEINE LUNE. Interdire à la société LA VIE DSIGN et à Mme Jacqueline M de reproduire ou faire reproduire les créations ci-dessus visées sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement assorti de l’exécution provisoire, le tribunal retenant par devers lui la liquidation de l’astreinte ordonnée, et d’exploiter ou de faire exploiter les dessins et modèles en cause. Ordonner en application de l’article L. 335-6 du Code de la propriété intellectuelle la confiscation de tout ou partie des recettes procurées par la contrefaçon ainsi que de tous les exemplaires contrefaisants ou reproduits illicitement. Condamner in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN à payer à titre de dommages et intérêts la somme de 50.000 euros en réparation dé l’atteinte au droit moral et aux droits patrimoniaux de M. Jean-Charles G. Ordonner la publication judiciaire du jugement à intervenir dans trois journaux ou revues dont « la Maison Créative » aux frais avancés des défenderesses dans la limite de 4.500 euros par insertion. Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir. Condamner in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN à payer à M. Jean-Charles G la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamner in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN aux dépens dont distraction au profit de M° Jean-Marc C, avocat aux offres de droit. Dans ses conclusions récapitulatives du 27 mars 2006, M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART, a fait valoir que la société avait acquis les droits d’exploitation des modèles suivants : « vase pleine lune, vase entre ciel et terre, vase iceberg, vase brin de lune » ; que tous les dépôts ont été faits au nom de la société et qu’en les exploitant au sein de sa société DSIGN, Mme Jacqueline M commet une contrefaçon. M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART a demandé au tribunal de : Vu les articles L. 335-3, L. 513-2 et L. 513-4 du Code de la propriété intellectuelle, Recevoir son intervention volontaire, es qualités de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART, La déclarer bien fondée. Dire que les dépôts des modèles n° 03 4747 déposé le 25 septembre 2003 publié le 5 décembre 2003 sous le numéro le 721 346 et 721 347, n° 03 4667 déposé le 25 septembre 2003 publié le 5 décembre 2003 sous le numéro 721 616 sont nuls en ce qu’ils visent Mme Jacqueline M comme seul auteur en fraude du droit moral de M. Jean-Charles G seul auteur de ces créations.

Dire que les dépôts des modèles n° 01 0121 déposé le 10 janvier 2001 publie le 13 avril 2001 sous le n° 619 237 et n° 36 311 déposé le 14 mars 2002 en Israël sont nuls partiellement en ce qu’ils visent Mme Jacqueline M en qualité de co-auteur en fraude du droit moral de M. Jean-Charles G seul auteur du vase PLEINE LUNE. Dire partiellement nuls les dépôts internationaux des dessins et modèles du VASE PLEINE LUNE effectués le 21 juin 2001 au Japon, le 6 mars 2002 au Canada, le 18 mars 2002 en Ukraine, en ce qu’ils visent Mme Jacqueline M en qualité de co-auteur en fraude du droit moral de M. Jean-Charles G seul auteur du vase PLEINE LUNE. Interdire à la société LA VIE DSIGN et à Mme Jacqueline M de reproduire ou faire reproduire les créations ci-dessus visées sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement assorti de l’exécution provisoire, le tribunal retenant par devers lui la liquidation de l’astreinte ordonnée, des créations ayant fait l’objet des dépôts suivants :

- le 4 décembre 2000 sous le n° 007092 quatre dessins ou modèles dans la classe 11-02 publiés le 16 mars 2001 : reproduction 1-1 Vase Pleine lune, reproduction 2-2 vase Entre ciel et terre, reproduction 3-3 vase Iceberg, reproduction 4-4 Vase Brin de Lune ;

- le 10 janvier 2001 sous le n° 01 0121 un modèle dans la classe 11-02 : reproduction 1-1 vase évidé en un cercle en son centre, Ordonner en application de l’article L. 335-6 du Code de la propriété intellectuelle la confiscation de tout ou partie des recettes procurées par la contrefaçon ainsi que de tous les exemplaires contrefaisants ou reproduits illicitement. Faire injonction à Mme Jacqueline M d’avoir à restituer le moule et la mère de moule (90 kg) du vase PLEINE LUNE XL ; Condamner in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN à payer à titre de dommages et intérêts la somme de 50.000 euros pour actes de contrefaçon en fraude des droits de M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART. Ordonner la publication judiciaire du jugement à intervenir dans trois journaux ou revues dont « la Maison Créative » aux frais avancés des défenderesses dans la limite de 4.500 euros par insertion. Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir. Condamner in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN à payer à M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamner in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN aux dépens dont distraction au profit de M° Jean-Marc C, avocat aux offres de droit. Dans ses dernières écritures en date du 20 mars 2006, Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN font valoir que le déposant est présumé, sauf preuve contraire, créateur du modèle déposé et que celui qui conteste cette présomption doit prouver par tout moyen que l’oeuvre déposée a été créée par lui antérieurement au dépôt ; que M. Jean-Charles G ne fait pas cette démonstration pour les dépôts effectués par Mme Jacqueline M seule (dessins et modèles du vase SUNNY DAYS, des assiettes MONEY PARTY et NENUPHAR sic). Pour les oeuvres déposées sous les deux noms, les défenderesses ont précisé que les vases « entre ciel et terre, iceberg et brin de lune » n’ont jamais été réalisés, produits ou commercialisés.

Elles ont soulevé l’irrecevabilité des demandes formées par M. Jean-Charles G pour ce qui est des oeuvres en collaboration qui ont été déposées au nom de la société. Elles ont ajouté que Mme M est présumée co-auteur avec M. Jean-Charles G de ces oeuvres et que ce dernier ne rapporte pas la preuve qu’il en serait le seul auteur. Elles ont précisé que Mme Jacqueline M a bien la qualité d’auteur, qu’elle a pris des cours de dessin et que son style porte essentiellement sur des objets décoratifs, qu’il est très épuré ; que M. Jean-Charles G est principalement un concepteur de décors de cinéma et de théâtre et que la création d’objets décoratifs lui est étrangère. Elles ont prétendu que M. Jean-Charles G ne justifie avoir subi aucun préjudice, qu’il a été rémunéré pour la réalisation du vase pleine lune, que la société CARRE D’ART n’a jamais tiré aucun bénéfice financier de l’exploitation commerciale des trois vases cités plus haut qui n’a jamais été réalisée ni même du vase pleine lune. Elles ont sollicité du tribunal de : A titre principal Vu les articles L. 111-1 et L. 511-9 du Code de la propriété intellectuelle, Dire que M. Jean-Charles G est mal fondé en ses demandes, Dire que M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART, est mal fondée en ses demandes. Y faisant droit, Constater que Mme Jacqueline M est l’auteur du vase sunny days, des assiettes money party et nénuphar. Constater que Mme Jacqueline M est l’auteur des vases « Pleine Lune, Brin de Lune, entre Ciel et Terre, Iceberg ». A titre subsidiaire, Vu l’article 1382 du Code civil, Constater que M. Jean-Charles G ne justifie d’aucun préjudice. Constater que M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur ne justifie d’aucun préjudice. En conséquence, Débouter M. Jean-Charles G et M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART de leur demande de dommages et intérêts, Débouter M. Jean-Charles G et M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART de leur demande de publication du jugement à intervenir. En toute hypothèse, Condamner solidairement M. Jean-Charles G et M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART à régler à Mme Jacqueline M et à la société LA VIE DSIGN la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamner solidairement M. Jean-Charles G et M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART aux entiers dépens. Le 27 mars 2006 la clôture était prononcée, après que le juge de la mise en état ait écarté les deux pièces qui ne figuraient pas dans les pièces communiquées par les défenderesses.

I – Sur recevabilité des demandes de M. Jean-Charles G. Le dépôt d’un modèle sous le nom d’une personne implique une présomption de paternité du déclarant de l’oeuvre mais cette présomption n’est pas irréfragable et toute personne qui se prétend l’auteur de cette oeuvre peut en rapporter la preuve. En l’espèce, M. Jean-Charles G est recevable à contester la qualité d’auteur ou de co- auteur de Mme Jacqueline M. Il lui appartient par contre de faire la démonstration de sa qualité d’auteur à la différence de Mme Jacqueline M. II – Sur la qualité d’auteur de M. Jean-Charles G. S’il est vrai que Mme Jacqueline M se réclame dans ses propres écritures d’une simple qualité d’assistante décoratrice de M. Jean-Charles G de 1991 à 2000, elle démontre avoir suivi des cours de décoration de 1996 à 1998. Il est démontré par les pièces régulièrement mises au débat que si M. Jean-Charles G est un décorateur reconnu travaillant avec les plus grands, créant des décors de théâtre, des modèles de tapis ou des ambiances, il est également un créateur de vases En tout état de cause, il convient de statuer sur la paternité des oeuvres litigieuses oeuvre par oeuvre.

- PLEINE LUNE Avant même le dépôt de l’oeuvre PLEINE LUNE en 2001, celle-ci a été divulguée sous le seul nom de M. Jean-Charles G au salon RECEVOIR 2000 comme l’attestent MM. C et W mais également le bulletin d’inscription au salon rempli par Mme Jacqueline M elle- même. M. Jean-Charles G verse au débat les attestations des deux artistes MM. C et W qui disent avoir vu l’oeuvre évoluer au fur et à mesure des dessins réalisés par celui-ci, puis des moules et enfin des tirages. Mme Jacqueline M est dans l’incapacité d’expliquer comment elle aurait conçu cette oeuvre puisqu’elle ne verse de ce chef aucune pièce probante. Les seuls documents qu’elle verse au débat sont des commandes de réalisation de l’oeuvre PLEINE LUNE aux ateliers G par sa société, ces pièces n’ont donc trait qu’à la commercialisation de l’oeuvre et non à sa création. Il ressort donc clairement de l’ensemble des éléments versés au débat que M. Jean- Charles G est le seul auteur de l’oeuvre PLEINE LUNE.

- ENTRE CIEL ET TERRE, ICEBERG et BRIN DE LUNE. Ces vases ont également été conçus, réalisés tant sous forme de dessin, que de moules par M. Jean-Charles G, divulgués en 2000 sous son seul nom au salon RECEVOIR 2000 et les attestations de M. M et de M. W indiquent que M. Jean-Charles G en est le seul auteur. Mme Jacqueline M ne verse au débat aucun élément relatif à ces vases dont elle prétend seulement qu’ils n’ont jamais été réalisés ni commercialisés. En conséquence, et au vu des pièces versées au débat il convient de dire que M. Jean- Charles G est le seul auteur des oeuvres ENTRE CIEL ET TERRE, ICEBERG et BRIN DE LUNE.

- SUNNY DAYS, VAGUE et MONEYPARTY. L’attestation de M. Serge M démontre que les prototypes de ces oeuvres ont été réalisés au sein de l’association d’artistes « ATELIERS 96 » à Rueil par M. Jean-Charles G seul,

que Mme Jacqueline M n’a jamais été présente dans ce lieu et qu’il a pu constater là encore la progression de l’idée et sa mise en oeuvre pour devenir sous l’impulsion de M. Jean-Charles G une oeuvre d’art, passant d’une simple idée à une réalisation complète à travers les étapes habituelles que sont les dessins, les moules et les prototypes. M. C indique également que l’oeuvre SUNNY DAYS est la création de M. Jean-Charles G. Aucun dessin et aucune attestation ne sont produits par Mme Jacqueline M qui ne démontre à aucun moment les étapes de ce qui aurait été sa création. Les dessins versés au débat sont soit des croquis de robe qui sont signés du seul prénom Jacqueline et des dessins achevés des modèles litigieux contenus dans un carnet édité au nom de Jacqueline G C PARIS mais en aucun cas des esquisses préparatoires. En conséquence, M. Jean-Charles G sera déclaré seul auteur des modèles SUNNY DAYS, VAGUE et MONEY PARTY.

- NENUPHARD. Aucun élément n’est versé au débat par M. Jean-Charles G pour démontrer qu’il serait l’auteur de cette oeuvre qui a été divulguée sous le nom de Mme Jacqueline M Un extrait du journal « MAISON CREATIVE » du 18 décembre 2003 attribue cette oeuvre à Mme Jacqueline M qui, dans une interview, décrit ses choix personnels qui l’ont guidée jusqu’à la création de ses oeuvres. A défaut de démontrer être l’auteur de l’oeuvre intitulée NENUPHARD, et du fait de sa divulgation sous le nom de Mme Jacqueline M, il convient de dire que celle-ci est le seul auteur de cette oeuvre.

- TWINS, BUBUL, EVE et HANDI. Seul M. Jean-Charles G revendique être l’auteur de ces oeuvres dans ses écritures, Mme Jacqueline M ne revendiquant être l’auteur que des oeuvres étudiées plus haut sur lesquelles il a déjà été statué. En conséquence, il sera déclaré auteur de ces oeuvres à défaut de contestation sur sa paternité. III – Sur les dépôts de modèles. Les modèles ICEBERG, PLEINE LUNE, BRIN DE LUNE et ENTRE CIEL ET TERRE ont été déposés à l’INPI au nom de la société CARRE D’ART en indiquant comme co- auteurs M. Jean-Charles G et Mme Jacqueline M. Il convient au vu de la décision rendue plus haut quant à la paternité de M. Jean-Charles G d’annuler partiellement ces dépôts en ce qu’ils indiquent Mme Jacqueline M comme co- auteur ; il en est de même pour les dépôts internationaux des dessins et modèles du VASE PLEINE LUNE effectués le 21 juin 2001 au Japon, le 6 mars 2002 au Canada, le 18 mars 2002 en Ukraine, qui désignent Mme Jacqueline M comme coauteur des dessins et modèles PLEINE LUNE ; Enfin, les dépôts des modèles n° 03 4747 en date du 25 septembre 2003 publié le 5 décembre 2003 sous le numéro le 721 346 et 721 347, n° 03 4667 en date du 25 septembre 2003 publié le 5 décembre 2003 sous le numéro 721 616 ne visent que Mme Jacqueline M comme seul auteur alors qu’elle n’est pas l’auteur de ces oeuvres et devront donc être déclarés frauduleux et annulés.

IV – Sur la contrefaçon. Il est manifeste, et Mme Jacqueline M ne le conteste pas, que cette dernière a exploité seule au travers de sa société le VASE PLEINE LUNE alors qu’elle savait pertinemment pour en avoir fait faire la déclaration elle-même que cette oeuvre appartient à la société CARRE D’ART qui ne lui avait consenti aucune licence et que M. Jean-Charles G était co-auteur déclaré. Les factures de la société LA VIE DSIGN versées au débat montrent une commercialisation importante de ce vase dans le monde entier. En conséquence, la contrefaçon de cette oeuvre est démontrée puisqu’une exploitation sans l’accord du co-auteur déclaré ni de licence de la société exploitant ce modèle déposé a eu lieu du fait de la société LA VIE DSIGN et de Mme Jacqueline M et a porté atteinte aux droits patrimoniaux de la société CARRE d’ART, représentée par son mandataire liquidateur M° Armelle L, et au droit moral de M. Jean-Charles G qui en fait le seul auteur, M. Jean-Charles G ne pouvant prétendre subir un préjudice patrimonial du fait de l’exploitation de cette oeuvre qu’il a concédée à la société CARRE D’ART. Le préjudice moral de M. Jean-Charles G sera indemnisé à hauteur de 5.000 euros et le préjudice patrimonial de la société CARRE D’ART à hauteur de 20.000 euros au vu des factures produites par la société LA VIE DSIGN. Aucune contrefaçon des autres oeuvres de M. Jean-Charles G n’est démontrée ; seule l’atteinte à son droit moral d’auteur est avérée au motif que Mme Jacqueline M s’est attribuée la paternité d’oeuvres qu’elle n’avait pas créées. Il sera alloué 3.000 euros à M. Jean-Charles G en réparation de ce préjudice moral. V – Sur les autres demandes. Les préjudices subis par les demandeurs sont suffisamment réparés par l’allocation d’une indemnité sans qu’il soit nécessaire d’ordonner une mesure de publication judiciaire à titre de réparation complémentaire. La demande de confiscation des recettes procurées par la contrefaçon est sans objet puisqu’une indemnisation a déjà été fixée en réparation du préjudice patrimonial. Il sera enjoint à Mme Jacqueline M de restituer le moule et la mère moule de 90 kg du vase PLEINE LUNE XL à M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART. Il convient d’ordonner l’exécution provisoire des mesures d’interdiction prises. Les conditions sont réunies pour allouer la somme de 2.000 euros d’une part à M. Jean- Charles G d’autre part à M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, Reçoit en son intervention M.° Armelle L, es qualités de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART. Déclare M. Jean-Charles G recevable en ses demandes. Dit que M. Jean-Charles G est le seul auteur des oeuvres « PLEINE LUNE, ICEBERG, BRIN DE LUNE, ENTRE CIEL ET TERRE, VAGUE et SUNNY DAYS », « MONEY PARTY », « TWINS, BUBUL, EVE et HANDI ». Dit que Mme Jacqueline M est le seul auteur de l’oeuvre « NENUPHARD » En conséquence,

Fait interdiction à Mme Jacqueline M et à la société LA VIE DSIGN de reproduire ou faire reproduire, d’exploiter ou de faire exploiter les vases « PLEINE LUNE, ICEBERG, BRIN DE LUNE, ENTRE CIEL ET TERRE, VAGUE et SUNNY DAYS » et des assiettes « MONEY PARTY » sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente décision au profit de M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART pour les oeuvres « PLEINE LUNE, ICEBERG, BRIN DE LUNE, ENTRE CIEL ET TERRE » et au profit de M. Jean- Charles G pour les autres oeuvres. Se réserve la liquidation des astreintes. Déclare frauduleux les dépôts internationaux des dessins et modèles du« VASE PLEINE LUNE » effectués le 21 juin 2001 au Japon, le 6 mars 2002 au Canada, le 18 mars 2002 en Ukraine, qui désignent Mme Jacqueline M comme co-auteur des dessins et modèles PLEINE LUNE. En conséquence, Prononce la nullité partielle de ces dépôts en ce qu’ils visent Mme Jacqueline M comme co-auteur. Déclare frauduleux les dépôts des modèles n° 03 4747 en date du 25 septembre 2003 publié le 5 décembre 2003 sous le numéro le 721 346 et 721 347, n° 034667 en date du 25 septembre 2003 publié le 5 décembre 2003 sous le numéro 721 616 en ce qu’ils visent Mme Jacqueline M comme seul auteur alors qu’elle n’est pas l’auteur de ces oeuvres. En conséquence, Prononce la nullité de ces dépôts en ce qu’ils visent Mme Jacqueline M comme seul auteur. Dit que Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN ont commis une contrefaçon en reproduisant et en commercialisant l’oeuvre PLEINE LUNE. Condamne in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN à payer à M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART la somme de 20.000 euros en réparation du préjudice patrimonial résultant de la contrefaçon de l’oeuvre PLEINE LUNE. Enjoint à Mme Jacqueline M de restituer à M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART le moule et la mère-moule du vase PLEINE LUNE XL. Condamne in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN à payer à M. Jean-Charles G la somme de 8.000 euros en réparation du préjudice moral résultant de la contrefaçon du modèle PLEINE LUNE et de l’attribution fautive de la paternité des oeuvres PLEINE LUNE, ICEBERG, VAGUE, ENTRE CIEL ET TERRE, BRIN DE LUNE, SUNNY DAYS et MONEY PARTY. Déboute les parties du surplus de leurs demandes. Ordonne l’exécution provisoire des mesures d’interdiction. Condamne in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN à payer la somme de deux mille euros d’une part à M. Jean-Charles G d’autre part à M° Armelle L, es qualité de mandataire liquidateur de la société CARRE D’ART sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamne in solidum Mme Jacqueline M et la société LA VIE DSIGN aux dépens dont distraction au profit de M. Jean-Marc C, avocat, par application des dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 21 juin 2006, n° 2004/09582