Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 3e section, 17 septembre 2010, n° 09/04868

  • Volonté de s¿inscrire dans le sillage d¿autrui·
  • Imitation de la présentation des produits·
  • Marque dite signature christian louboutin·
  • Nom de domaine christianlouboutinshop.com·
  • Fait distinct des actes de contrefaçon·
  • Protection au titre du droit d'auteur·
  • Marque figurative dite semelle rouge·
  • Régime spécifique de responsabilité·
  • Sur le fondement du droit d'auteur·
  • Atteinte au nom patronymique

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 3e sect., 17 sept. 2010, n° 09/04868
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 09/04868
Publication : GAZ PAL, 351-352, 17-18 décembre 2010, p. 45-46, note de Marie-Hélène Fabiani
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE ; DESSIN ET MODELE
Marques : CHRISTIAN LOUBOUTIN
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 1026905 ; 2246080 ; 5282322 ; 3067674 ; 759326
Classification internationale des marques : CL03 ; CL14 ; CL18 ; CL25
Référence INPI : M20100583
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 17 Septembre 2010

3e chambre 3e section N°RG: 09/04868

DEMANDEURS Monsieur Christian L

Société CHRISTIAN LOUBOUTIN SA- représentée par son DG Mr Christian L […] 75001 PARIS représentés par Me Jean-Marie ALGOUD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire J 150

DÉFENDEURS Monsieur Yong Z défaillant

Société NANJING UON CULTURE DIFFUSE CO LTD Jianyu district NANJING JIANGSU PROVINCE 210004 REPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE défaillante

Société BEIJING XIN NET TECHNOLOGY CO LTD 1/F Building n°2 -Software Park Of Beijing Universi ty of technology, Beijing 100176 REPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE défaillante

COMPOSITION DU TRIBUNAL Agnès T, Vice-Président, signataire de la décision Anne CHAPLY, Juge Mélanie B. Juge assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DEBATS A l’audience du 01 Juin 2010 tenue en audience publique

JUGEMENT Prononcé par remise de la décision au greffe Réputé Contradictoire en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE M. Christian L, créateur de souliers de luxe, est titulaire de différentes marques communautaires, déposées pour désigner des chaussures, parmi lesquelles :

- la marque communautaire verbale « CHRISTIAN LOUBOUTIN » déposée le 23 décembre 1998 et enregistrée le 29 mai 2000 sous le n°001026905;

— la marque communautaire semi-figurative dite « signature » déposée le 6 juin 2001 et enregistrée le 22 juillet 2002

sous le n°002246080;

- la marque communautaire figurative dite « semelle rouge » déposée le 29 août 2006, enregistrée sous le n°005282322 le 19 juin 2007. Il est en outre titulaire de la marque française figurative dite « semelle rouge » déposée le 29 novembre 2000, enregistrée sous le n°003067674 et étendue à l’international le 23 mai 2001 sous le n°759 326. La société CHRISTIAN LOUBOUTIN, qui commercialise les chaussures créées par M. L sous ces différentes marques, bénéficie d’une licence exclusive de l’ensemble de ces marques. Par ailleurs, M. Christian L est également titulaire des noms de domaines www.christianlouboutin.com et christianlouboutin.fr.

M. Christian L et la société CHRISTIAN LOUBOUTIN indiquent qu’est venue à leur connaissance les 8, 9 et 11 janvier 2009, l’existence d’un site internet à l’adresse http://www.christianlouboutinshop.com présentant des souliers qu’ils estiment contrefaire les modèles connus sous les marques LOUBOUTIN. Des recherches leur ont permis de constater que ce site, qui porterait selon eux atteinte aux droits de M. L sur la marque communautaire verbale n°00 10 269 05, a été réservé par une personne domi ciliée en Chine, M. ZHANG Y, auprès du registrar accrédité par l’ICANN, XIN NET Technology corporation. La recherche des coordonnées de M. Z a permis de découvrir que l’adresse et le numéro de téléphone mentionnés sur la fiche INDOM correspondaient aux coordonnées de la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd, laquelle exploiterait selon eux le site litigieux. Le site incriminé propose à la vente dans le monde entier, y compris en France, des souliers dont les demandeurs estiment qu’ils constituent la contrefaçon de leurs propres produits et de leurs marques et qu’ils reproduisent la signature et la semelle rouge caractéristique de la marque LOUBOUTIN. Suivant ordonnance rendue le 21 janvier 2009, M. L et la société CHRISTIAN LOUBOUTIN ont été autorisés à procéder au transfert du nom de domaine litigieux au profit de M. L et à la suspension des accès au nom de domaine christianlouboutinshop.com dans les 24 heures suivant la notification de l’ordonnance rendue sur requête; en outre, l’ordonnance a prononcé une interdiction de vendre des souliers revêtus des marques communautaires n°001026905,

n°002246080 et n°005282322, la fermeture du site li tigieux et la publication judiciaire de l’ordonnance dans cinq journaux. La notification de cette ordonnance par mail et par huissier étant restée vaine, les demandeurs ont fait assigner M. ZHANG Y, la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd et la société Beijing Xin Net Technology Co Ltd devant le présent tribunal par actes d’huissier en date des 20 février et 13 mars 2009 délivrés au Ministère de la justice de la république populaire de Chine, conformément aux dispositions de l’article 684 du code de procédure civile. Aux termes de leurs assignations, M. Christian L et la société CHRISTIAN LOUBOUTIN demandent au tribunal, par application des articles L. 112-1, 121-1 et 331-l-3 ; L. 713-1, L. 713-2, L. 713-3 b) et suivants du code de la propriété intellectuelle et de l’article 1382 du code civil de:

-juger que M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd se sont rendus coupables de contrefaçon des droits d’auteur de M. Christian L;

— juger que M. ZHANG Y et les sociétés Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd et Beijing Xin Net Technology Co Ltd se sont rendus coupables de contrefaçon des marques n°001026905, n°002246080, n°005282322 et n°00306767 4 ;

- ordonner le transfert du nom de domaine christianlouboutinshop.com au profit de M. Christian L;

- ordonner à M. ZHANG Y et aux sociétés Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd et Beijing Xin Net Technology Co Ltd de suspendre les accès au nom de domaine christianlouboutinshop.com dans les 24 heures suivant la notification du jugement et ce sous astreinte de 1000 euros par jour de retard;

- interdire à M. ZHANG Y et à la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd de vendre des souliers revêtus des marques communautaires n°001026905, n°002246080, n°005282322 et française n°003067674 ;

- ordonner la fermeture du site exploité à l’adresse http//:christianlouboutinshop.com ; Et en réparation du préjudice causé,
- condamner solidairement M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd à payer à M. Christian L la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon de ses droits patrimoniaux et 20 000 euros pour atteinte à son droit moral,
- condamner solidairement M. ZHANG Y et les sociétés Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd et Beijing Xin Net Technology Co Ltd à payer à M. Christian L la somme de 30 000 euros pour les actes de contrefaçon des marques n°001026905, n°002246080, n°005282322 et n°003067674 ;

- condamner solidairement M. ZHANG Y et les sociétés Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd et Beijing Xin Net Technology Co Ltd à payer à la société

Christian LOUBOUTIN la somme de 100 000 euros pour les actes de contrefaçon des marques n°001026905, n°002246080, n°005282322 e t n°003067674 ;

- condamner solidairement M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd à payer à la société Christian LOUBOUTIN la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale ;

- autoriser la publication du jugement dans cinq journaux ou revues au choix des demandeurs, le coût de chaque publication étant fixé à la somme de 4 000 euros H.T. et ce, au besoin à titre de complément de dommages et intérêts aux frais des défendeurs ;

- ordonner l’exécution provisoire de la présente décision ;

— condamner solidairement M. ZHANG Y et les sociétés Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd et Beijing Xin Net Technology Co Ltd à verser aux demandeurs la somme de 20 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement M. ZHANG Y et les sociétés Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd et Beijing Xin Net Technology Co Ltd en tous les dépens de l’instance, en ce compris les frais de traduction des actes, dont distraction au profit de la SELARL @mark, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. Les défendeurs ayant été régulièrement assignés par remise de l’acte à l’autorité compétente depuis plus de six mois, conformément à l’article 688 du code de procédure civile, il sera statué par jugement réputé contradictoire. L’ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 13 avril 2010.

EXPOSE DES MOYENS Sur la protection au titre des droits d’auteur En vertu de l’article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. En l’espèce, M. Christian L revendique la qualité de créateur de l’ensemble des chaussures L et la société CHRISTIAN LOUBOUTIN exploite et commercialise les chaussures dont s’agit, ainsi que cela ressort du catalogue pour la saison hiver 2008-2009 versé aux débats, sous les marques LOUBOUTIN énumérées ci-dessus. Dans leurs écritures, les demandeurs revendiquent la créativité et l’originalité des modèles de souliers créés par M. Christian L comme étant unanimement reconnues et bénéficiant dès lors, sans contestation possible, de la protection au titre du droit d’auteur. Ils prétendent en outre démontrer la contrefaçon de 28 modèles de souliers présentés sur le site christianlouboutinshop.com par la référence à leur pièce n°16,

intitulée "tableau comparatif des modèles''' et ils ont inclus dans le corps de leurs conclusions quatre photographies de leurs modèles en face de quatre photographies des modèles argués de contrefaçon en entourant sur ces derniers les différences par rapport aux modèles originaux (richesse du drapé de soie, largeur de l’ouverture à l’avant, épaisseur du bout de forme, emplacement et richesse de la broderie, hauteur de la tige, taille du talon ou emplacement d’une boucle ornementale). Cependant, il appartient aux demandeurs à une action en contrefaçon de droit d’auteur de caractériser les éléments originaux de leur modèle afin de mettre utilement le défendeur en mesure de présenter ses moyens de défense et de permettre au tribunal d’apprécier l’originalité de l’oeuvre opposée et s’assurer ainsi que la création porte l’empreinte de la personnalité de son auteur. Or, en l’espèce, les demandeurs se contentent d’indiquer que la créativité et l’originalité des modèles créés par Christian L sont unanimement reconnues alors qu’il leur appartient de caractériser, pour chaque modèle opposé, les éléments démontrant l’effort créatif de M. L et de caractériser ainsi leur originalité. A défaut de telles précisions dans l’acte introductif d’instance, les défendeurs n’ont pas été mis en mesure de connaître avec exactitude l’objet du litige, ce qui contrevient au principe du respect du contradictoire et la référence à la pièce n°16, sous un intitulé vague faisant référence à la preuve de la contrefaçon (« tableau comparatif des modèles ») ne suffit pas à combler les carences de l’assignation, qui n’a pas été complétée par des écritures postérieures. Enfin, l’insertion de la photographie de quatre créations de M. L, sans aucune description ni indication de l’empreinte de la personnalité de l’auteur qui pourrait être alléguée, ne suffit pas à pallier ce manque de caractérisation, dès lors que le tribunal, qui n’est tenu que par les faits qui sont dans le débat conformément à l’article 7 du code de procédure civile, ne peut d’office caractériser l’éventuel effort créatif de l’auteur. Il s’induit de ces éléments que les demandeurs qui n’ont pas caractérisé l’originalité de leurs modèles sont irrecevables à agir en contrefaçon de leurs droits d’auteur, les souliers opposés n’étant pas protégeables à ce titre en l’absence de toute originalité constatée par le tribunal.

Sur la contrefaçon de marques L’article 9 §1 a) du règlement CE n° 40/94 20 décem bre 1993 dispose que "la marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, défaire usage dans la vie des affaires d’un signe identique à la marque communautaire pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée". Aux termes de l’article L 713-2 a) du code de la propriété intellectuelle "Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que : "formule, façon, système,

imitation, genre, méthode « , ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement ». * Sur les marques communautaires n°001026905 et n°002 246080 En l’espèce, il résulte du constat d’huissier rédigé le 19 janvier 2009 et des copies d’écran versées au débat que le site internet www.christianlouboutinshop.com reproduit à l’identique la marque verbale « Christian LOUBOUTIN » sur les pages de vente des chaussures litigieuses puisqu’il y est indiqué :

- « Christian L – sandals »
- « Christian L – shorts boot »
- « Christian L – Pump »
- « Christian L tall boot ». Dès lors que la marque verbale communautaire n°0010 26905 est reproduite à l’identique pour des produits identiques s’agissant de chaussures, les actes de contrefaçon de marque par reproduction sont parfaitement caractérisés et portent atteinte aux droits privés de M. L, titulaire de cette marque communautaire, en vertu de l’article précité. Par ailleurs, la marque semi-figurative dite « Christian LOUBOUTIN signature » est reprise à l’identique en haut à gauche et dans le bandeau de chacune des pages de vente du site internet litigieux et en arrière plan des photographies de présentation des modèles de chaussures, sur des boîtes en carton et les housses de protection. En outre, les photographies des chaussures laissent apparaître la reproduction à l’identique de la marque revendiquée sur les semelles intérieures. Il s’ensuit que M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd se sont rendus coupables d’actes de contrefaçon au préjudice de M. L, titulaire des deux marques communautaires n°001026905 et n°002246 080 et de la société CHRISTIAN LOUBOUTIN, licenciée exclusive de ces marques. * Sur les marques française et communautaire « semelle rouge » En l’espèce, il ressort de la pièce 16 présentant les photographies de l’ensemble des modèles exposés sur le site litigieux ainsi que de la paire de chaussures livrée suite à la commande de l’huissier lors de son constat du 19 janvier 2009, que tous les produits comportent une semelle rouge identique aux marques française n°003067674 et communautaire n°00 5282322, laquelle constitue pourtant l’un des éléments d’identité caractéristique de la marque Christian LOUBOUTIN et est à ce titre notoirement connue. En vertu des textes précités, Monsieur M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd se sont donc rendus coupables d’actes de contrefaçon par reproduction de la marque française n°003067674 et de la marque communautaire n°005282322, au préjudice de M. L, titulaire et de la société CHRISTIAN LOUBOUTIN, licenciée exclusive de ces marques. Sur la concurrence déloyale

II convient de rappeler à titre liminaire que le principe est celui de la liberté du commerce et que ne sont sanctionnés au titre de la concurrence déloyale ou parasitaire que des comportements fautifs tels que ceux visant à créer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit ou à profiter sans bourse délier des investissements de son concurrent.

Le parasitisme économique est caractérisé par la circonstance selon laquelle une personne physique ou morale, à titre lucratif et de manière injustifiée, s’inspire ou copie une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements. Il est établi que l’univers de la société LOUBOUTIN est constitué de code couleurs apposés sur l’ensemble des accessoires de présentation, en particulier sacs, boîtes de rangement des chaussures, housses de protection et que l’ensemble de ces codes ont été repris à l’identique pour la vente des produits commercialisés sur le site litigieux, puisque:

- les sacs présentent la même taille, la même matière en papier kraft, la même couleur beige avec inscription de la signature de Christian L en blanc, les lanières de couleur blanche,
- – les boîtes à chaussure reprennent les mêmes couleurs, la même matière et la même inscription,
- les housses de protection sont siglées à l’identique, dans un tissu rouge avec mention de la marque en lettres noires. En outre, l’utilisation du nom de domaine "christianlouboutinshop.com« dont l’élément prédominant est constitué du nom patronymique de M. Christian LOUBOUTIN, associé au terme anglais »shop" désignant un lieu de commerce, constitue un acte de concurrence déloyale visant à détourner la clientèle de la marque Christian LOUBOUTIN de ses sites de vente officiels {www.christianlouboutin.com et www.christianlouboutin.fr) afin de capter sa clientèle. Enfin, les défendeurs ont proposé à la vente 28 modèles avec le nom de Christian L, dont il résulte du tableau comparatif que l’impression d’ensemble est la même que les modèles commercialisés par la société LOUBOUTIN, dans différents coloris, créant ainsi un effet de gamme de nature à générer un risque supplémentaire de confusion dans l’esprit de la clientèle. Ces faits parfaitement distincts des actes de contrefaçon de marques caractérisent à l’évidence la volonté de M. Z et de la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd de se placer dans le sillage de l’activité d’une société haut-de-gamme afin de détourner la clientèle à son profit en créant une confusion dans l’esprit de la clientèle, cette confusion étant établie en l’espèce par la publication d’un article dans un quotidien national faisant référence au site internet litigieux en ces termes : uLe site à ne pas louper: christianlouboutinshop.com, le site du chausseur favori des stars hollywoodiennes. Les rabais et les prix d’origine ne sont pas indiqués mais on ne va pas bouder son plaisir devant les escarpins en cuir vernis noir à 198 € ou les bottines en cuir noir clouté à 298 €" (Le Figaro, 11 janvier 2009). Sur la responsabilité de la société XIN NET TECHNOLOGY CORPORATION

Conformément à l’article 6 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004, la responsabilité de la société XIN NET TECHNOLOGY CORPORATION ne peut être recherchée que si, après avoir reçu notification des actes de contrefaçon commis sur le site www.christianlouboutinshop.com, elle n’a pas agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible. En l’espèce, les demandeurs ne justifient pas d’une signification régulière de l’ordonnance sur requête rendue le 21 janvier 2009 ordonnant la suspension des accès au nom de domaine litigieux à l’unité d’enregistrement XIN NET Technology Corporation dès lors que l’acte de signification par huissier en date du 12 février 2009 ne mentionne aucune des formalités requises par l’article 688 du code de procédure civile et notamment pas la remise de l’acte judiciaire à l’autorité compétente. Il s’ensuit que le tribunal n’est pas en mesure de s’assurer de la délivrance de l’acte au prestataire de service et ne peut en conséquence s’assurer de la prompte exécution par ce dernier de l’ordonnance du 21 janvier 2009. La simple copie d’un mail adressé par le conseil du demandeur, sans preuve de la réception de celui-ci par l’intéressé ne saurait pallier ce manquement et il convient en conséquence d’écarter toute responsabilité de la société XIN NET Technology Corporation dans les actes de contrefaçon et de concurrence déloyale qui sont reprochés à M. Z et à la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd. Sur les mesures réparatrices Les défendeurs régulièrement assignés n’ont pas comparu et aucun élément ne permet de connaître la masse contrefaisante vendue par le biais du site litigieux. Cependant, il est établi que l’huissier instrumentaire a déboursé 266,67 euros pour acquérir une paire de chaussures et que 28 modèles contrefaisants les marques « LOUBOUTIN » étaient offerts à la vente dans différentes tailles ; que le site litigieux, ouvert le 12 décembre 2008 auprès du registrar XIN NET TECHNOLOGY CORPORATION, devait expirer le 12 décembre 2009 sans qu’il soit établi que l’interdiction d’exploitation ordonnée sur requête le 21 janvier 2009 ait été respectée entraînant une fermeture prématurée du site. En conséquence, M. Z et à la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd, respectivement titulaire et exploitant du site litigieux, doivent être condamnés solidairement à payer à M. L la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de ses trois marques communautaires et de sa marque française, qui a nécessairement engendré une banalisation et une dépréciation de celles-ci. Ils devront également payer solidairement la somme de 30 000 euros à la société CHRISTIAN LOUBOUTIN, licenciée exclusive de chacune de ces marques, qui les exploite effectivement sur les produits haut-de-gamme qu’elle commercialise.

Enfin, les faits de concurrence déloyale et de parasitisme ont nécessairement causé un préjudice à la société CHRISTIAN LOUBOUTIN en lui faisant perdre une partie de sa clientèle et le dommage en résultant sera justement réparé à hauteur de 20 000 euros.

L’article R. 20-44-45 du code des postes et des communications électroniques dispose que « Un nom identique ou susceptible d’être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle par les règles nationales ou communautaires ou par le présent code ne peut être choisi pour nom de domaine, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi. » Le nom de domaine constitue une adresse électronique sur le réseau internet qui permet d’accéder à un site, de l’identifier et de le répertorier dans les outils de recherche et, comme tout signe distinctif, il permet le ralliement de la clientèle à une entreprise commerciale. En l’espèce, les défendeurs exploitent un site internet reprenant intégralement le nom patronymique de M. Christian L sur lequel ils n’ont aucun droit ou intérêt légitime. Pour mettre fin aux actes illicites relevés à l’encontre des sociétés défenderesses, il convient de faire droit à la demande de transfert du nom de domaine « christianlouboutinshop.com » accessible en France au profit de M. Christian L, d’ordonner la suspension de l’accès au site litigieux selon les modalités fixées au dispositif et d’ordonner la fermeture du site exploité à cette adresse. Il convient par ailleurs de faire droit aux mesures d’interdiction et d’ordonner la publication de la décision conformément à l’article L. 716-15 du code de la propriété intellectuelle et selon les modalités définies ci-après. Sur les autres demandes II convient de condamner solidairement M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd, qui succombent, aux entiers dépens de l’instance, qui comprendront les frais de traduction des actes et qui pourront être directement recouvrés par la SELARL @mark, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. Il y a lieu enfin de condamner solidairement M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd à payer à la société CHRISTIAN LOUBOUTIN et à M. Christian L ensemble la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Compte tenu de la nature de la présente décision, il y a lieu d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision sauf en ce qui concerne les mesures de publication.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL, par jugement rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

Déclare irrecevables les demandes en contrefaçon de droit d’auteur formées par M. L et la société CHRISTIAN LOUBOUTIN faute pour eux de caractériser l’originalité des créations alléguées; Dit qu’en reproduisant à l’identique les marques communautaires n°001026905, n°002246080 et n°005282322, ainsi que la marque fra nçaise figurative dite « semelle rouge » n°003067674 pour désigner des chaus sures, M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd ont commis des actes de contrefaçon des marques détenues par M. Christian L et dont la société CHRISTIAN LOUBOUTIN est licenciée exclusive; Dit que M. ZHANG Y et la société Nanj ing Uon Culture Diffuse Co Ltd ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société CHRISTIAN LOUBOUTIN;

En conséquence, Condamne solidairement M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd à payer à M. Christian L et à la société CHRISTIAN LOUBOUTIN la somme de 30 000 euros (TRENTE MILLE EUROS) chacun en réparation du préjudice subi du chef des actes de contrefaçon de marques; Condamne solidairement M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd à payer à la société CHRISTIAN LOUBOUTIN la somme de 20 000 euros (VINGT MILLE EUROS) en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire; Déboute les demandeurs de leurs demandes d’indemnisation formées à rencontre de la société XIN NET Technology Corporation; Interdit à M. ZHANG Y et à la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd de vendre des souliers revêtus des marques communautaires n°0 01026905, n°002246080, n°005282322 et française n°003067674 ; Ordonne le transfert du nom de domaine christianlouboutinshop.com au profit de M. Christian L; Ordonne en cas de besoin à M. ZHANG Y et aux sociétés Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd et Beijing Xin Net Technology Co Ltd de suspendre les accès au nom de domaine christianlouboutinshop.com dans les 24 heures suivant la notification du jugement et ce sous astreinte de 100 euros (CENT EUROS) par jour de retard; Dit que le tribunal se réserve la liquidation de l’astreinte qui sera limitée à six mois ;

Ordonne la fermeture du site exploité à l’adresse http//:christianlouboutinshop.com ; Autorise la publication du dispositif du présent jugement dans deux journaux ou revues au choix de la demanderesse et aux frais de M. ZHANG Y et de la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd solidairement, sans que le coût de chaque publication n’excède la somme de 4000,00 euros H.T. ;

Condamne solidairement M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd aux entiers dépens de l’instance, qui comprendront les frais de traduction et pourront être directement recouvrés par la SELARL @mark, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile; Condamne solidairement M. ZHANG Y et la société Nanjing Uon Culture Diffuse Co Ltd à payer à M. Christian L et à la société CHRISTIAN LOUBOUTIN ensemble la somme de 5 000 euros (CINQ MILLE EUROS) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ; Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision à l’exception de la mesure de publication.

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